Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 27 février 1995, présentée pour M. et Mme Yves X... demeurant ... (Pyrénées-Atlantiques) ;
M. et Mme X... demandent à la cour :
1 ) d'annuler le jugement en date du 15 décembre 1994 par lequel le tribunal administratif de Pau ne leur a accordé qu'une décharge partielle des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1984, 1985 et 1986 par les rôles mis en recouvrement les 31 août, 31 novembre et 31 juillet 1989 ;
2 ) de prononcer la décharge sollicitée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 juin 1997 :
- le rapport de M. LABORDE, rapporteur ;
- et les conclusions de M. PEANO, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'à la suite d'une vérification de leur comptabilité et d'un examen contradictoire de l'ensemble de leur situation fiscale personnelle, M. et Mme X... ont été assujettis à des compléments d'impôt sur le revenu au titre des années 1984 à 1986, résultant de la réintégration dans leurs revenus du montant de crédits d'origine indéterminée constatés sur leurs comptes bancaires et du montant de revenus de capitaux mobiliers constitués par des sommes distribuées à leur profit par l'association Ski Ecole International dont M. X... était président et son épouse trésorière ;
Sur la régularité de la procédure de vérification :
Considérant, en premier lieu, que les irrégularités qui auraient entaché la procédure de vérification de comptabilité de l'association Ski Ecole International sont sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition suivie à l'égard de M. et Mme X... que l'administration a regardés comme étant les bénéficiaires des revenus distribués par ladite association ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des termes de la correspondance adressée par le directeur des services fiscaux des Pyrénées-Atlantiques au préfet des Pyrénées-Atlantiques, le 21 avril 1987, que l'administration aurait commencé la vérification de comptabilité de M. et Mme X... avant l'envoi des avis de vérification qui leur ont été adressés respectivement le 16 juillet et le 3 août 1987, et aurait commencé un examen contradictoire de l'ensemble de leur situation fiscale personnelle avant l'envoi de l'avis de vérification du 10 septembre 1987 ; que, par suite, le jugement du tribunal administratif, qui est suffisamment motivé sur ce point, a pu à bon droit écarter le moyen tiré de ce que la vérification de comptabilité a été engagée avant l'envoi ou la remise d'un avis de vérification ;
Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales : "Un examen contradictoire de l'ensemble de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu ou une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification ; cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable à la faculté de se faire assister par un conseil de son choix"; "qu'aux termes de l'article 35 de la loi de finances rectificative du 29 décembre 1989 : "II - En cas d'examen contradictoire de l'ensemble de la situation fiscale personnelle visé à l'article L. 12 du livre des procédures fiscales ... La demande au contribuable des relevés de compte dans l'avis de vérification ou simultanément à l'envoi ou à la remise de cet avis, ainsi que l'envoi ou la remise de toute demande de renseignements en même temps que cet avis sont sans influence sur la régularité de ces procédures lorsque celles-ci ont été engagées avant la date d'entrée en vigueur de la présente loi" ; qu'il résulte de ces dispositions qui ont un caractère interprétatif en application de l'article 35-II de la loi n 89-936 du 29 décembre 1989, que M. et Mme X... ne sont pas fondés à soutenir que c'est irrégulièrement que l'administration leur a adressé le 10 septembre 1987, en même temps que l'avis de vérification, une demande tendant à obtenir communication des relevés de leurs comptes bancaires ;
Considérant, en quatrième lieu, qu'aucune dispositin législative ou règlementaire n'oblige l'administration à engager sous une forme orale le débat contradictoire qu'elle est tenue de mener avec le contribuable qui fait l'objet d'un examen contradictoire de l'ensemble de sa situation fiscale personnelle ;
Sur la régularité de la procédure de redressement :
Considérant qu'en vertu des dispositions des articles 16 et 69 du livre des procédures fiscales, l'administration, si elle a réuni des éléments permettant d'établir qu'un contribuable peut avoir disposé de revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés, peut lui adresser des demandes de justifications, et, en particulier, l'interroger, le cas échéant, sur l'origine de sommes portées, au cours de l'année d'imposition, au crédit de ses comptes bancaires ou autres, ou sur celle des ressources à l'aide desquelles il apparaît qu'il a pu, la même année, financer des dépenses de toute nature d'un montant supérieur à celui de ses disponibilités dégagées ;
Considérant que la circonstance que M. et Mme X... aient pu expliquer l'origine de 93 % de leurs crédits bancaires dont la justification leur était demandée au titre des années 1985 et 1986, n'est pas de nature à établir que la procédure de taxation d'office aurait été abusivement utilisée, alors que le montant de leurs crédits bancaires inexpliqués recensés par le vérificateur soit 533.165 F en 1985 et 344.742 F en 1986 représentaient plusieurs fois le montant des revenus qu'ils avaient déclarés annuellement et que la discordance ainsi constatée entre les revenus déclarés et le total des crédits bancaires était suffisante, sans qu'il ait été besoin d'élaborer une balance de trésorerie, pour permettre d'établir que les intéressés pouvaient avoir des revenus plus importants que ceux qu'ils avaient déclarés ; que, d'autre part, l'absence de justification des crédits restés inexpliqués justifiait le recours à la procédure de taxation d'office du montant de ces crédits inexpliqués ;
Considérant, en deuxième lieu, que si les requérants soutiennent que la procédure de vérification de leur situation fiscale personnelle n'a pas été orale et a été menée de façon trop hâtive, ils n'indiquent pas au dossier quelles dispositions législatives ou règlementaires auraient été en l'espèce violées, notamment au regard des délais qui leur ont été accordés pour répondre à la demande de justifications du 11 décembre 1987 et à la mise en demeure du 17 février 1988 ;
Considérant, en troisième lieu, que dans sa réponse aux observations du contribuable du 26 mai 1988, le vérificateur ne se borne pas dans sa motivation à renvoyer les requérants à la notification de redressements adressée à l'association le 14 avril 1988, mais précise également les motifs des redressements des revenus de capitaux mobiliers ; que ladite réponse est suffisamment motivée au regard des observations présentées par les contribuables à la suite de la notification de redressements ;
Sur le bien-fondé des impositions :
Considérant, en premier lieu, que les requérants ne contestent pas le bien-fondé des redressements relatifs aux crédits bancaires non justifiés, effectués suivant la procédure de taxation d'office ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 206 du code général des impôts : "1 ... sont passibles de l'impôt sur les sociétés, quel que soit leur objet, ... toutes personnes morales se livrant à une exploitation ou à des opérations de caractère lucratif ..." et que l'article 207 du même code dispose : "1. Sont exonérés de l'impôt sur les sociétés : ...5bis - Les organismes sans but lucratif mentionnés à l'article 206-7-1 pour les opérations à raison desquelles ils sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée ..." ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'association Ski Ecole International constituée en 1984 entre Monsieur, Madame X... et une troisième personne, laquelle a démissionné en 1985, avait pour objet principal l'exercice en commun de la profession de moniteur de ski par ses membres et la mise en commun des moyens utiles à l'exercice de la profession ; qu'elle encaissait les rémunérations des cours de ski et les reversait en partie aux moniteurs de ski vacataires ; que le vérificateur a considéré que certaines sommes que M. et Mme X... avaient encaissées sur leurs comptes bancaires personnels entre le 1er janvier et le 30 mai des années 1985 et 1986, période correspondant à la saison de ski, et les redressements apportés aux bénéfices de l'association S.E.I. en sus de ces sommes, constituaient pour eux des revenus distribués à leur profit par l'association, laquelle se livrait à des opérations à caractère lucratif ;
Considérant qu'en raison des importantes recettes encaissées par M. et Mme X... en 1984, 1985 et 1986, l'association doit être regardée comme ayant accordé à ses dirigeants des avantages dont l'allocation n'était pas compatible avec une gestion désintéressée ; que l'activité de l'association présentait, dès lors, le caractère d'une exploitation lucrative au sens de l'article 206-1 du code général des impôts ; que les requérants ne peuvent utilement se prévaloir de l'autorité de la chose jugée qui s'attacherait à l'appréciation donnée à l'activité de l'association par le tribunal de police d'Oloron et par le tribunal administratif de Bordeaux lesquels ne se sont prononcés ni sur les mêmes faits ni sur la qualification qui pourrait leur être donnée au regard du texte fiscal ;
Considérant qu'aux termes de l'article 109-I du code général des impôts : "1. Sont considérés comme revenus distribués:1 Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; 2 Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices ;
Considérant que le vérificateur a pu en application de l'article 109-1-1 du code général des impôts regarder M. et Mme X... comme les destinataires des bénéfices redressés de l'association dont ils étaient les seuls maîtres ; qu'au demeurant il a relevé sans être contredit que ceux-ci avaient directement appréhendé sur leurs comptes bancaires les sommes de 47.905 F et 51.046 F provenant de l'activité de l'association pendant la période de ski des années 1985 et 1986 ;
Considérant que la circonstance que l'administration a dégrèvé pour vérification irrégulière de comptabilité les impositions notifiées à l'association Ski Ecole International est sans influence sur le bien-fondé des redressements des revenus de capitaux mobiliers notifiés aux requérants au titre de l'année 1984 correspondant au bénéfice taxable de l'association ; que ce dégrèvement ne constitue pas une prise de position formelle sur une situation de fait ou sur une question de droit dont les contribuables pourraient utilement se prévaloir ;
Considérant, en dernier lieu, qu'il résulte des dispositions de l'article L. 77 du livre des procédures fiscales applicables en l'espèce, que les demandes que les contribuables peuvent présenter sur le fondement dudit article doivent être faites avant l'établissement de l'impôt sur les sociétés résultant de la vérification ; que les requérants n'établissent pas qu'une demande au titre du 2 alinéa de cet article aurait été effectuée dans ces conditions ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme X... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande tendant à la décharge des droits redressés ;
Sur les conclusions incidentes du ministre :
Considérant que le vérificateur ne s'est pas borné à faire valoir l'importance des sommes redressées pour appliquer aux droits réclamés au titre des années 1985 et 1986 des pénalités de mauvaise foi, mais a établi, en faisant état, à juste titre, de l'organisation d'une activité commerciale taxable à l'impôt sur les sociétés sous couvert d'une association du type de la loi de 1901 et de l'appréhension à titre personnel de certaines recettes, de la mauvaise foi des contribuables ; que c'est à bon droit que les impositions auxquelles ceux-ci ont été assujettis au titre des années 1985 et 1986 ont été assorties des pénalités prévues par les dispositions de l'article 1729 du code général des impôts ; qu'il résulte de ce qui précède que le ministre est fondé, par son recours incident, à demander que M. et Mme X... soient rétablis à l'impôt à hauteur des majorations initialement appliquées et dont ils ont obtenu décharge par le tribunal administratif ;
Article 1er : La requête de M. et Mme X... est rejetée.
Article 2 : M. et Mme X... sont rétablis au rôle de l'impôt sur le revenu au titre des années 1985 et 1986 à raison de l'intégralité des pénalités qui leur ont été assignées ;
Article 3 Le jugement du tribunal administratif de Pau en date du 15 décembre 1994 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.