Vu la requête, enregistrée le 11 avril 1996 au greffe de la Cour, présentée par la S.A.R.L. L'ORIEGE, dont le siège est situé à Saint-Jean-du-Falga (Ariège) représentée par sa gérante, Mlle X... ;
La S.A.R.L. L'ORIEGE demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 26 décembre 1995 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande en décharge des impositions complémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1988 à 1990, et des pénalités y afférentes ;
2°) de prononcer la décharge des impositions susvisées ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 février 1999 :
- le rapport de M. BICHET ;
- et les conclusions de D. PEANO, commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant qu'il ressort de l'examen de la minute du jugement attaqué que le tribunal administratif a visé et analysé les divers mémoires produits devant lui par les parties à l'instance ; que le moyen tiré de l'irrégularité dudit jugement, qui est suffisamment motivé, manque en fait ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales : " ... une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ... d'un avis de vérification. Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix " ; qu'en application de ces dispositions, l'administration a adressé à la S.A.R.L. L'ORIEGE un avis de vérification de comptabilité portant sur les années 1988 à 1990 ; que cette vérification ayant fait apparaître que la société avait reporté sur les résultats de l'exercice clos en 1988 le déficit de l'exercice clos en 1987, le vérificateur s'est alors assuré, comme il en avait le droit, de l'exactitude des résultats y afférents ; que s'il est constant que la vérification des écritures de l'exercice clos en 1987 n'a donné lieu à l'envoi d'aucun avis complémentaire, une telle omission n'a pas préjudicié aux garanties accordées au contribuable par les dispositions précitées, dès lors que le déficit de l'exercice clos en 1987 figurait dans les écritures de la société sous forme d'une charge de l'exercice 1988 et que la requérante était ainsi avertie, par la seule réception d'un avis de vérification mentionnant l'année 1988, qu'elle pouvait avoir à justifier le bien-fondé de l'ensemble des charges déduites des résultats de ce dernier exercice et notamment du déficit ainsi reporté ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction que l'examen des documents comptables de la S.A.R.L. L'ORIEGE a été effectué au cabinet de l'expert- comptable à la demande expresse de la gérante de la société, dont les allégations, selon lesquelles elle aurait rédigé ce document à la demande pressante du vérificateur, ne sont assorties d'aucun commencement de preuve ; que la requérante n'établit pas que le vérificateur, dont il est constant qu'il s'est rendu à plusieurs reprises dans les locaux de la société pour y mener des investigations en présence de la gérante, se serait refusé à tout échange de vues avec elle au cours des opérations de vérification ; que la circonstance que la position du vérificateur, notamment en ce qui concerne le pourcentage de pertes admis, a été arrêtée postérieurement aux interventions menées sur place, n'est pas susceptible de démontrer que la requérante aurait été privée de la possibilité d'avoir avec lui un débat oral et contradictoire ;
Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 59 du livre des procédures fiscales, qui a repris les dispositions de l'article 1649 quinquiés A du code général des impôts : "Lorsque le désaccord persiste sur les redressements notifiés, l'administration, si le contribuable le demande, soumet le litige à l'avis ... de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ... Les commissions peuvent également être saisies à l'initiative de l'administration." ; qu'il est constant que la S.A.R.L. requérante, informée de cette faculté, n'a pas demandé la saisine de la commission précitée ; que, contrairement à ce qu'elle soutient, le service n'était tenu par aucune disposition de la loi fiscale, devant le désaccord qu'elle avait manifesté sur les redressements, de prendre cette initiative ;
Considérant, il est vrai, que la société requérante invoque les termes d'une instruction en date du 30 août 1974, publiée au bulletin officiel de la direction générale des impôts et reprise dans la documentation administrative de base, à jour au 1er juillet 1989, sous la référence 13 L 1414, invitant le service à prendre l'initiative de la saisine de la commission, dans l'hypothèse ou le contribuable ne répondrait pas à la notification explicitant les points sur lesquels le désaccord persiste ; que, toutefois, la requérante ne peut utilement invoquer ces prescriptions sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, du fait que cette instruction traite d'une question qui intéresse la procédure d'imposition et qu'elle ne peut, par suite, être regardée comme comportant une interprétation de la loi fiscale au sens desdites dispositions ;
Sur le bien fondé des impositions :
En ce qui concerne la reconstitution des recettes :
Considérant que la société requérante n'a produit, pour justifier la consistance de ses recettes journalières, dont il n'est pas contesté qu'elles faisaient l'objet d'une inscription globale en comptabilité, qu'un "brouillard" de caisse, constitué à partir de feuilles volantes, qui, ne précisant, ni le nombre de repas ou de consommations, ni leurs prix respectifs, ne permettait pas de connaître la nature et le montant exacts de ces recettes ; que l'examen des variations, tant du stock, que de la consommation de boissons, a révélé de nombreuses anomalies de nature à établir l'existence d'achats sans factures ; que, compte tenu de ces lacunes et irrégularités, la comptabilité est dépourvue de valeur probante ; que, dès lors, contrairement à ce que soutient la requérante, l'administration était en droit de procéder à la reconstitution des recettes de la société ;
En ce qui concerne la réintégration des sommes de 144.190 F et de 20.000 F :
Considérant qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : "1 le bénéfice imposable est le bénéfice net déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises ... 2- Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt ... L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés" ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la S.A.R.L. L'ORIEGE a inscrit à l'actif de son bilan, à un compte d'immobilisation, une somme de 144.190 F correspondant à la valeur des travaux de maçonnerie effectués dans ses locaux en 1987 ; que la dette correspondante figurait encore au passif de son bilan de l'exercice clos en 1990, alors qu'il n'est pas contesté que cette créance avait été abandonnée par l'entrepreneur ; que, dès lors, cette somme a été réintégrée, à bon droit, par l'administration, dans les valeurs de l'actif net de la société et, partant, dans ses bases imposables au titre de l'année 1990 ; que, de même, c'est à bon droit que l'administration a réintégré dans le montant de l'actif net de cet exercice, une somme de 20.000 F correspondant à une dépense par caisse dès lors, d'une part qu'il est constant que celle-ci a été justifiée fictivement sous forme d'un acompte versé à un fournisseur, d'autre part, que la S.A.R.L. n'établit pas que cette opération correspondrait, en réalité, à une charge déductible de ses résultats ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la S.A.R.L. L'ORIEGE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande en décharge des impositions en litige ;
Article 1er : La requête de la S.A.R.L. L'ORIEGE est rejetée.