Vu le recours enregistré le 15 juillet 1997 au greffe de la Cour, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; Le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande à la Cour :
1?) d'annuler le jugement en date du 19 décembre 1996 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a accordé à la société de fait Laumet-Melotto la décharge des suppléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre des années 1987, 1988 et 1989 et a condamné l'Etat à verser à cette société la somme de 3000 F en application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
2?) de remettre à la charge de la société de fait Laumet-Melotto 106429 F de taxe sur la valeur ajoutée et 63503 F de pénalités ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n? 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 février 2000 :
- le rapport de A. DE MALAFOSSE ;
- et les conclusions de M. HEINIS, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales : " ...une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable n'en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix" ; Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société de fait Laumet-Melotto a été informée, par un avis en date du 19 avril 1990 comportant les mentions prévues par les dispositions précitées, de l'engagement d'une vérification de sa comptabilité portant sur la période du 24 octobre 1986 au 31 août 1989 ; que la société n'ayant reçu cet avis, en raison de difficultés d'acheminement du courrier, que le 4 mai, date annoncée du début des opérations de vérification, le vérificateur a renoncé à engager les opérations de vérification à cette date et a remis à la société, le 9 mai suivant, une lettre l'informant que sa première intervention était reportée au 21 mai ;
Considérant que, s'agissant d'un simple report du début des opérations de vérification, aucune disposition législative ou réglementaire n'imposait à l'administration de rappeler à la société de fait Laumet-Melotto, dans la lettre qui prévenait celle-ci, en temps utile, de la nouvelle date de la première intervention, qu'elle avait la possibilité de se faire assister d'un conseil de son choix ; que si la société de fait Laumet-Melotto se prévaut de la doctrine administrative qui prévoit l'envoi d'un nouvel avis de vérification en cas de report à l'initiative du vérificateur, cette doctrine n'est invocable ni sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, dès lors qu'elle a trait à la procédure d'imposition, ni sur le fondement de l'article 1er du décret du 28 novembre 1983, dès lors qu'elle est contraire aux textes législatifs et réglementaires en vigueur ; que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est, dans ces conditions, fondé à soutenir que le tribunal administratif de Toulouse n'a pu valablement retenir le moyen tiré de la violation de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales pour accorder à la société de fait Laumet-Melotto la décharge des suppléments de taxe sur la valeur ajoutée en litige ; Considérant qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la société de fait Laumet-Melotto à l'appui de sa demande en décharge ;
Sur les rehaussements portant sur les recettes autres que les recettes de jeux :
Considérant qu'il appartient à l'administration, qui a écarté comme non probante la comptabilité présentée par la société de fait Laumet-Melotto, qui exploite un bar-brasserie, et a reconstitué l'ensemble de ses recettes, de démontrer en quoi cette comptabilité est dépourvue de caractère probant ;
Considérant que l'administration fait état, en premier lieu, de ce que des achats de lait, de fruits et de café n'ont pas été enregistrés en comptabilité ; que toutefois, elle ne donne aucune précision sur l'ampleur des omissions relevées en matière d'achats de fruits et de lait, alors que la société de fait Laumet-Melotto précise, sans être sérieusement contestée, que ces achats portaient sur des quantités négligeables et que le vérificateur ne les a d'ailleurs même pas pris en compte pour sa reconstitution ; que la simple circonstance qu'aucun achat de café n'a été enregistré en comptabilité au cours de l'été 1989 n'est pas, par elle-même, de nature à démontrer qu'auraient été effectués pendant cette période des achats de café qui n'auraient pas été enregistrés, alors surtout que le vérificateur a lui-même repris, dans le cadre de sa reconstitution des recettes de l'année 1989, le montant d'achats de café porté en comptabilité pour cette année ;
Considérant, en second lieu, que si l'administration fait état de ce que la société de fait Laumet-Melotto a omis d'enregistrer les recettes provenant d'une machine à sous installée dans son établissement d'octobre 1987 à mars 1988, ce reproche, pour fondé qu'il soit en ce qui concerne du moins les années 1987 et 1988, n'est pas de nature, s'agissant de recettes accessoires et distinctes de celles que procuraient par ailleurs les activités de bar et de brasserie, à justifier le rejet, dans son ensemble, de la comptabilité des années litigieuses ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la comptabilité de la société de fait Laumet-Melotto doit être regardée comme probante en tant qu'elle retrace les recettes de l'établissement autres que celles qui proviennent de l'exploitation de ladite machine à sous ; que, par suite, la société de fait Laumet-Melotto est fondée, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens qu'elle invoque, à demander la décharge des suppléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie dans la mesure où ils procèdent du rehaussement des recettes autres que les recettes de jeux ;
Sur les rehaussements relatifs aux recettes de jeux :
Considérant qu'en se fondant sur les déclarations faites par M. X... à la police, le service a fixé à 24000 F pour l'année 1987 et 18000 F pour l'anée 1988 les recettes provenant de l'exploitation d'une machine à sous, qui n'avaient pas été déclarées par la société de fait Laumet-Melotto ;
En ce qui concerne la procédure d'imposition :
Considérant, d'une part, qu'il résulte des dispositions combinées des articles L. 57, L. 59 et R. 57-1 du livre des procédures fiscales qu'en cas de maintien du désaccord entre l'administration et le contribuable après la production par ce dernier d'observations dans le délai d'un mois suivant la notification de redressements, le contribuable dispose d'un nouveau délai de trente jours pour demander que le litige soit soumis à la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; qu'il est constant qu'en l'espèce, la saisine de cette commission a été demandée par la société de fait Laumet-Melotto postérieurement au délai de trente jours dont elle disposait à la suite de la notification de la confirmation des redressements ; que le moyen tiré de ce qu'il n'a pas été fait droit à cette demande doit donc être écarté ;
Considérant, d'autre part, que, contrairement à ce que soutient la société de fait Laumet-Melotto, la notification de redressements précise les griefs qui sont faits à sa comptabilité et n'est donc pas insuffisamment motivée ;
En ce qui concerne le bien-fondé de ces rehaussements :
Considérant que la société de fait Laumet-Melotto ne conteste pas qu'elle n'a pas enregistré les recettes provenant de cette machine à sous ; que le service était donc fondé à reconstituer ces recettes ; que, pour établir le montant des redressements, l'administration s'est fondée sur les déclarations faites à la police par M. X..., selon lesquelles cette machine est restée dans l'établissement pendant environ six mois, d'octobre 1987 à mars 1988, et procurait environ 8000 F par mois de recettes ; que la société de fait Laumet-Melotto ne conteste pas sérieusement cette évaluation des recettes en faisant valoir que la part de ces recettes qui lui est revenue a été seulement de 900 F ; que l'administration apporte, par suite, la preuve du bien-fondé des impositions litigieuses en tant qu'elles procèdent du rehaussement, à hauteur de 24000 F pour 1987 et 18000 F pour 1988, des bases déclarées par la société de fait Laumet-Melotto ;
En ce qui concerne les pénalités afférentes à la partie des impositions qui procèdent du rehaussement des recettes "jeux" :
Considérant que, contrairement à ce que soutient la société de fait Laumet-Melotto, la motivation des pénalités, qui fait état du caractère grave et répété des insuffisances de recettes constatées, présente un caractère suffisant ; que la société de fait Laumet-Melotto ne saurait, en tout état de cause, se prévaloir, sur le fondement du décret du 28 novembre 1983, de la circulaire du premier ministre relative à la motivation des actes administratifs, qui n'ajoute rien à la loi ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE n'est fondé à demander le rétablissement des suppléments de taxe sur la valeur ajoutée en litige et des pénalités y afférentes qu'en tant que ces impositions procèdent du rehaussement, à concurrence d'une somme de 24000 F pour l'année 1987 et d'une somme de 18000 F pour l'année 1988, des bases d'imposition déclarées par la société de fait Laumet-Melotto, et la réformation, dans cette mesure, du jugement attaqué ;
Sur les conclusions de la société de fait Laumet-Melotto présentées sur le fondement de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat au paiement de frais irrépétibles ;
Article 1ER : Les suppléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquels la société de fait Laumet-Melotto a été assujettie et les pénalités y afférentes sont rétablis dans la mesure où ils procèdent du rehaussement, à concurrence d'une somme de 24000 F pour l'année 1987 et d'une somme de 18000 F pour l'année 1988, des bases d'imposition déclarées par la société de fait Laumet-Melotto.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse en date du 19 décembre 1996 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus du recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE, ainsi que les conclusions de la société de fait Laumet-Melotto présentées sur le fondement de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, sont rejetés.