Vu la requête, enregistrée le 26 mars 1997 au greffe de la Cour, présentée par M. Claude X... demeurant ... ;
M. X... demande à la Cour :
1?) d'annuler le jugement en date du 15 octobre 1996 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes tendant à la décharge, en droits et pénalités, d'une part du complément d'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre de l'année 1989, d'autre part du rappel de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été assigné au titre de la période du 1er janvier au 31 mai 1989 ;
2?) de lui accorder la décharge, subsidiairement la réduction, des impositions contestées ;
3?) subsidiairement, de fixer à 970 139 F toutes taxes comprises le montant de ses recettes annuelles au titre de l'année 1989 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n? 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 février 2000 :
- le rapport de M. BICHET ;
- et les conclusions de M. HEINIS, commissaire du gouvernement ;
Sur les redressements prononcés en matière de bénéfices industriels et commerciaux et de taxe sur la valeur ajoutée :
En ce qui concerne la charge de la preuve :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : "Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'un redressement, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou le redressement est soumis au juge" ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X... qui exploitait à Toulouse un commerce de vente au détail de vêtements, a vendu la totalité des marchandises qui étaient en stock au 1er janvier 1989, entre cette date et le 24 mai 1989, date de cessation de son activité ; que pour justifier du montant des recettes journalières enregistrées dans sa comptabilité au cours de cette période, il n'a été en mesure de présenter qu'un brouillard de caisse, tenu au crayon à papier, ne comportant pas la désignation des articles vendus mais seulement, pour la plupart des opérations enregistrées, la catégorie à laquelle ils appartiennent ; qu'en particulier y figurait une somme de 20 000 F dépourvue de toute indication du nombre et de la nature des articles qui auraient été cédés ; qu'eu égard à la nature du commerce concerné et des articles vendus, ces lacunes faisaient obstacle à la vérification de concordance des ventes avec les achats comptabilisés ; que la comptabilité du commerce exploité par M. X... était ainsi entachée, au cours de la période susmentionnée, de graves irrégularités, au sens de l'article L. 192 précité, la privant de toute valeur probante en ce qui concerne le montant des recettes ; que les suppléments d'impôt sur le revenu et les compléments de taxe sur la valeur ajoutée établis dans le cadre de la procédure contradictoire étaient conformes à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; que, par suite, le requérant a la charge de la preuve de l'exagération des impositions contestées ;
En ce qui concerne le bien fondé des impositions en litige :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, pour reconstituer les recettes du commerce de M. X... au cours de la période du 1er janvier au 24 mai 1989, l'administration a utilisé deux méthodes de reconstitution, la première consistant à déterminer un coefficient moyen pondéré de marge des articles en stock au 1er janvier 1989, la seconde, dite des manquants, consistant à déterminer le nombre, par catégorie, des articles vendus non comptabilisés, par rapprochement des marchandises en stock à l'ouverture de l'exercice et des articles figurant sur le brouillard de caisse, et à reconstituer les recettes ainsi regardées comme dissimulées en tenant compte des prix moyens de vente constatés ; que seuls les résultats obtenus à partir de la seconde méthode ont été retenus ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la première méthode serait entachée d'erreurs est inopérant ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que la valeur du stock au 1er janvier 1989 s'élevait à 257 570 F ; que la circonstance que la reconstitution des recettes ait abouti à évaluer la vente de la totalité des marchandises en stock à 339 546 F ne peut faire regarder cette méthode comme radicalement viciée, alors même que, selon le requérant, les marchandises auraient été démodées, et qu'il avait constitué, à la clôture de l'exercice précèdent, une provision pour dépréciation du stock de 50 % que le vérificateur s'est abstenu de réintégrer ;
Considérant, en deuxième lieu, que le requérant n'établit pas, par les seules attestations de tiers certifiant la présence de marchandises dans son commerce lors des jours précédant sa cessation d'activité, et en alléguant que la somme de 20 000 F inscrite sur le brouillard de caisse avec la mention "vente de tous les vêtements au prix de 20 000 F " correspondrait à la cession, le 24 mai 1989, du surplus des marchandises à un professionnel, d'ailleurs non identifié, contre paiement en espèces et sans facture, que cette somme proviendrait de la vente de marchandises en stock au 1er janvier 1989 ; qu'il n'est, par suite, fondé à soutenir ni que les importantes quantités de marchandises regardées comme manquantes par le vérificateur auraient en réalité fait globalement l'objet de la cession alléguée, ni que la méthode suivie par l'administration impliquait de retrancher du montant des recettes correspondant aux articles qualifiés de manquants la somme de 20 000 F ;
Considérant, en troisième lieu, que si le vérificateur a retenu un prix de vente moyen de 199 F pour les articles entrant dans la catégorie des pantalons, au titre de la première méthode, et de 299 F pour les pantalons, au titre de la seconde méthode, le requérant n'établit pas qu'il aurait ainsi commis une erreur dés lors qu'il a distingué, pour l'application de cette dernière méthode à la différence de la première, les pantalons et les " jeans ", retenus quant à eux pour le prix de 120 F ;
Considérant, toutefois, que doit être corrigée une erreur de calcul de 300 F commise en ce qui concerne la reconstitution des recettes provenant de la vente des ceintures ; qu'il s'ensuit que le redressement prononcé en matière de bénéfices industriels et commerciaux au titre de l'année 1989 doit être ramené, taxes comprises, de 191 452 F à 191 152 F , les bases taxables à la taxe sur la valeur ajoutée doivent être ramenées, quant à elles, de 161 394 F à 161 141 F ;
Sur la plus-value de cession du droit au bail :
Considérant qu'aux termes de l'article 151 septies du code général des impôts : "Les plus-values réalisées dans le cadre d'une activité ... commerciale ... par les contribuables dont les recettes n'excèdent pas le double des limites du forfait ... sont exonérées"; qu'aux termes de l'article 202 bis du même code : "En cas de cession ou de cessation de l'entreprise, les plus-values mentionnées à l'article 151 septies du présent code ne sont exonérées que si les recettes de l'année de réalisation, ramenées le cas échéant à douze mois, et celles de l'année précédente ne dépassent pas le double des limites ... du forfait" ;
Considérant que consécutivement au rehaussement apporté aux recettes du commerce de M. X... au titre de 1989, l'administration a assujetti à l'impôt sur le revenu, en application des dispositions susmentionnées, au taux spécifique de 16 % prévu par l'article 39 quindecies I-1 du code général des impôts, la plus-value à long terme de 1 900 000 F que ce dernier a réalisée au cours de la même année lors de la cession du droit au bail de son établissement ; que les recettes à prendre en compte au titre des 144 jours d'activité en 1989 s'élèvent, par suite de la réduction prononcée par le présent arrêt, à 402 440 F TTC soit, ramenées à 12 mois, à 1 020 074 F ; que ces recettes sont supérieures au double de la limite du forfait de bénéfice et de chiffre d'affaires visé à l'article 302 ter du code général des impôts ; que, par suite, M. X... n'est pas fondé à demander la décharge de ce chef de redressement ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. Claude X... est seulement fondé à demander la réduction de ses bases imposables, d'une part à l'impôt sur le revenu au titre de l'année 1989 d'un montant de 300 F, d'autre part à la taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier au 24 mai 1989, d'un montant de 253 F, et à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté, dans cette mesure, sa demande en décharge des impositions contestées ;
Sur les frais irrépétibles :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de M. X... tendant à la condamnation de l'Etat à lui payer la somme qu'il demande au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Article 1er : La base d'imposition à l'impôt sur le revenu assignée à M. Claude X... au titre de l'année 1989 est réduite de 300 F.
Article 2 : M. Claude X... est déchargé de la différence entre le montant de l'impôt sur le revenu, assorti de pénalités, qui lui a été assigné au titre de l'année 1989 et le montant qui résulte de la base fixée à l'article 1er ci-dessus.
Article 3: La base d'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée du commerce de M. X... au titre de la période du 1er janvier au 24 mai 1989 est réduite de 253 F.
Article 4 : Il est accordé décharge à M. Claude X... de la différence entre les droits de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier au 24 mai 1989 et les pénalités y afférentes et les droits calculés en exécution de l'article 3 ci-dessus.
Article 5 : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 15 octobre 1996 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt
Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête de M. Claude X... est rejeté.