Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour le 12 mai 1999, présentée pour M. Jean-Pierre X, demeurant au lieu-dit ... ;
M. X demande à la Cour :
- d'annuler le jugement en date du 4 février 1999 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande ;
- de lui accorder la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des rappels de TVA auxquels il a été assujetti pour la période du 1er janvier au 31 juillet 1991 ;
- de condamner l'Etat à lui verser la somme de 9 000 F en application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
................................................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Classement CNIJ : 19-04-02-01-06-02 C+
19-04-02-08-02
19-01-04-03
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 octobre 2003 :
- le rapport de Mme Texier, président-assesseur,
- les observations de Me Buils, avocat de M. Jean-Pierre X ;
- et les conclusions de Mme Boulard, commissaire du gouvernement ;
Considérant que M. X, qui donnait en location-gérance à la SA X, dont il détient près de 99 % du capital et dont il est le président-directeur général, le fonds de commerce de négoce de machines agricoles dont il était propriétaire, était imposé à ce titre sous le régime du forfait dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ; que, par acte sous-seing privé enregistré le 30 juillet 1991, il a vendu ledit fonds à la SA X pour la somme de 3 000 000 F ; qu'à l'issue de la vérification de comptabilité dont il a fait l'objet pour la période du 1er janvier au 31 juillet 1991, l'administration a rehaussé les recettes perçues par M. X et a estimé que le montant de ses recettes imposables excédait la limite du forfait, légalement fixé à la somme de 150 000 F ; qu'en outre, le service a estimé que le contribuable, dont le montant des recettes représentait plus du double du montant des limites du forfait, ne pouvait bénéficier de l'exonération prévue par l'article 151 septies du code général des impôts pour la plus-value réalisée à l'occasion de la vente du fonds de commerce ; qu'en conséquence, le forfait dont il bénéficiait a été déclaré caduc et M. X a été assujetti à des impositions supplémentaires au titre de l'impôt sur le revenu et de la taxe sur la valeur ajoutée ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que les redressements contestés ont été motivés par la circonstance qu'eu égard à la valeur vénale du fonds de commerce, révélée par son prix de vente et par l'évaluation de l'immeuble dans la déclaration de succession, le loyer perçu par M. X, d'un montant annuel de 73 772 F HT, était anormalement bas et devait être évalué à la somme annuelle de 360 000 F HT, et que l'absence de clause de révision du loyer dans le contrat de location-gérance conclu initialement en 1975 par le père de M. X constituait un acte anormal de gestion s'expliquant par l'étroite communauté d'intérêts liant le bailleur et le preneur ; que si le service a estimé que le maintien d'une redevance de location manifestement insuffisante a eu pour effet de faire bénéficier indûment M. X du régime du forfait et de l'exonération des plus-values, l'administration n'a à aucun moment soutenu que le contrat de location-gérance n'était pas un véritable contrat de location ni que le prix fixé ne présentait pas le caractère d'un loyer ; qu'elle n'a pas davantage allégué qu'en concluant ce contrat les parties aient eu pour objectif exclusif d'échapper à l'impôt ; qu'elle a seulement estimé qu'en l'absence de révision du loyer stipulé initialement, celui-ci ne correspondait plus à la valeur locative réelle des biens donnés en location ; que, dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'administration fiscale aurait entendu se prévaloir de l'existence d'un abus de droit ; que, par suite, il ne peut utilement soutenir que les impositions litigieuses auraient été établies selon une procédure irrégulière au motif qu'il n'aurait pas été fait application de la procédure prévue par les dispositions de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction, et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté que la contrepartie financière de la mise à la disposition de la SA X du fonds de commerce et des locaux commerciaux équipés dont M. X était propriétaire doit être évaluée à la somme de 426 960 F TTC ; qu'il est constant que ce montant excède la limite légale du forfait, fixée à 150 000 F ; que l'administration, qui apporte ainsi la preuve que le forfait de bénéfices industriels et commerciaux de M. X avait été fixé au vu de renseignements inexacts, était en droit de soumettre au régime réel les recettes de la période vérifiée ; que, par suite, le requérant ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance des règles applicables à la procédure de fixation des forfaits ; qu'il ne peut pas davantage, en tout état de cause, se prévaloir de la doctrine administrative qu'il invoque, et notamment des réponses ministérielles Ansquer et Amelin, relatives à la procédure de fixation des forfaits de bénéfices industriels et commerciaux et de taxes sur le chiffre d'affaires ;
Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 151 septies du code général des impôts : Les plus-values réalisées dans le cadre d'une activité agricole, artisanale, commerciale ou libérale par des contribuables dont les recettes n'excèdent pas le double de la limite du forfait ou de l'évaluation administrative sont exonérées, à condition que l'activité ait été exercée pendant au moins cinq ans, et que le bien n'entre pas dans le champ d'application de l'article 691. - Lorsque les conditions visées au premier alinéa ne sont pas remplies, il est fait application : des règles prévues aux articles 150 A à 150 S pour les terrains à bâtir et les terres à usage agricole ou forestier ; du régime fiscal des plus-values professionnelles prévu aux articles 39 duodecies à 39 quindecies et 93 quater pour les autres éléments de l'actif immobilisé ; qu' eu égard au montant non contesté des recettes réellement réalisées par M. X au cours de l'année 1991, celles-ci excèdent le double de la limite du forfait ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration fiscale a remis en cause l'exonération de la plus-value réalisée par le contribuable ;
Considérant, en quatrième lieu, que le bail commercial conclu avec la SA X prévoyait que les travaux d'amélioration qui seraient faits par le preneur avec l'autorisation du bailleur donneraient lieu, en cas d'éviction ou de non-renouvellement, à une indemnité correspondant au montant des travaux réalisés diminué de l'amortissement effectué conformément aux usages ; que l'administration apporte la preuve de l'existence d'aménagements réalisés par la SA X de 1975 à 1988 ; qu'il n'est pas contesté que ladite société n'a pas reçu d'indemnité de M. X ; que, par suite, le vérificateur a pu estimer que l'avantage résultant pour M. X de la remise de ces biens devait être regardé comme un loyer payé en nature à ce dernier ; qu'en évaluant ce loyer à la somme de 116 240 F, correspondant à la valeur comptable résiduelle des améliorations apportées par la SA X pour une valeur initiale de 203 522 F, l'administration doit être regardée comme établissant le montant de l'avantage en nature reçu par M. X ;
Considérant, enfin, que le maintien volontaire par M. X d'une redevance de location-gérance d'un montant anormalement bas, qui a eu pour effet de le faire bénéficier abusivement du régime du forfait, et la vente du fonds de commerce immédiatement après l'expiration du délai de cinq ans fixé par l'article 151 septies précité du code général des impôts, aux fins de bénéficier de l'exonération de la plus-value réalisée, démontrent la volonté du contribuable d'éluder l'impôt et établissent son absence de bonne foi ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la mauvaise foi ne serait pas établie n'est pas fondé et doit être écarté ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à obtenir la décharge des impositions en cause ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à verser à M. X la somme qu'il réclame sur le fondement dudit article ;
D E C I D E
Article 1er : La requête présentée par M. X est rejetée.
4
99BX01116