Vu l'arrêt de la cour en date du 11 septembre 2001, prescrivant un supplément d'instruction avant de statuer sur la requête, enregistrée le 21 juin 1999, présentée pour la COMMUNAUTE URBAINE DE BORDEAUX et tendant à ce que la cour annule le jugement n° 9801150 du 12 avril 1999 par lequel le Tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande en décharge de la taxe foncière sur les propriétés bâties à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1996 pour la station d'épuration du clos de Hilde à Bègles et lui accorde la décharge sollicitée ;
Vu le mémoire, enregistré le 9 novembre 2001, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, qui conclut au rejet de la requête ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 novembre 2004 :
- le rapport de M. Pouzoulet, rapporteur ;
- les observations de Me X..., pour la COMMUNAUTE URBAINE DE BORDEAUX ;
- et les conclusions de M. Chemin, commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par l'arrêt du 11 septembre 2001, la Cour a jugé que la station d'épuration du clos de Hilde, située sur le territoire de la commune de Bègles, ne pouvait bénéficier de l'exonération prévue par le 1° de l'article 1382 du code général des impôts ; que, par une décision du 27 mai 2002, le Conseil d'Etat a refusé l'admission d'un pourvoi de la COMMUNAUTE URBAINE DE BORDEAUX contre cet arrêt avant dire droit ;
Sur la méthode d'évaluation de la valeur locative de la station d'épuration :
Considérant qu'aux termes de l'article 1499 du code général des impôts : La valeur locative des immobilisations industrielles passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties est déterminée en appliquant au prix de revient de leurs différents éléments, revalorisé à l'aide des coefficients qui avaient été prévus pour la révision des bilans, des taux d'intérêt fixés par décret en Conseil d'Etat ... ; que l'article 1500 dudit code prévoit cependant : Par dérogation à l'article 1499, les bâtiments et terrains industriels qui ne figurent pas à l'actif d'une entreprise industrielle ou commerciale astreinte aux obligations définies à l'article 53-A sont évalués dans les conditions prévues à l'article 1498 ; que, selon l'article 1498 : La valeur locative de tous les biens autres que les locaux d'habitation ou à usage professionnel visés au I de l'article 1496 et que les établissements industriels visés à l'article 1999 est déterminée au moyen de l'une des méthodes indiquées ci-dessus : ... 2° a) Pour les biens loués à des conditions de prix anormales ou occupés par leur propriétaire, occupés par un tiers à un autre titre que la location, vacants ou concédés à titre gratuit, la valeur locative est déterminée par comparaison./ Les termes de comparaison sont choisis dans la commune. Ils peuvent être choisis hors de la commune pour procéder à l'évaluation des immeubles d'un caractère particulier ou exceptionnel ; b) La valeur locative des termes de comparaison est arrêtée : soit en partant du bail en cours à la date de référence de la révision lorsque l'immeuble type était loué normalement à cette date ; soit, dans le cas contraire, par comparaison avec des immeubles similaires situés dans la commune ou dans une localité présentant, du point de vue économique, une situation analogue à celle de la commune en cause et qui faisaient l'objet à cette date de locations consenties à des conditions de prix normales ; 3° A défaut de ces bases, la valeur locative est déterminée par voie d'appréciation directe ;
Considérant que selon l'article 324 Z de l'annexe III au code général des impôts : I. L'évaluation par comparaison consiste à attribuer à un immeuble ou un local donné une valeur locative proportionnelle à celle qui a été adoptée pour d'autres biens de même nature pris comme types./ II. Les types dont s'agit doivent correspondre aux catégories dans lesquelles peuvent être rangés les biens de la commune visés aux articles 324 Y à 324 AC, au regard de l'affectation, de la situation, de la nature de la construction, de son importance, de son état d'entretien et de son aménagement./ Ils sont inscrits au procès-verbal des opérations de la révision ; que l'article 324 AA ajoute : La valeur locative cadastrale des biens loués à des conditions anormales ou occupés par leur propriétaire, occupés par un tiers à un titre autre que celui de locataire, vacants ou concédés à titre gratuit est obtenue en appliquant aux données relatives à leur consistance... les valeurs unitaires arrêtées pour le type de la catégorie correspondante. Cette valeur est ensuite ajustée pour tenir compte des différences qui peuvent exister entre le type considéré et l'immeuble à évaluer... ; que l'article 324 AB de la même annexe dispose : Lorsque les autres moyens font défaut, il est procédé à l'évaluation directe de l'immeuble en appliquant un taux d'intérêt à sa valeur vénale, telle qu'elle sera constatée à la date de référence si l'immeuble est libre de toute location ou occupation./ Le taux d'intérêt susvisé est fixé en fonction du taux des placements immobiliers constatés dans la région à la date de référence pour des immeubles similaires ; qu'enfin, selon l'article 324 AC de la même annexe : En l'absence d'acte et de toute autre donnée récente faisant apparaître une estimation de l'immeuble à évaluer susceptible d'être retenue, sa valeur vénale à la date de référence est appréciée d'après la valeur vénale d'autres immeubles d'une nature comparable ayant fait l'objet de transactions récentes.../ La valeur vénale d'un immeuble peut également être obtenue en ajoutant à la valeur vénale du terrain, estimée par comparaison avec celle qui ressort de transactions récentes relatives à des terrains à bâtir situés dans une zone comparable, la valeur de reconstruction au 1er janvier 1970 dudit immeuble, réduite pour tenir compte, d'une part, de la dépréciation immédiate et, d'autre part, du degré de vétusté de l'immeuble et de son état d'entretien, ainsi que de la nature, de l'importance, de l'affectation et de la situation du bien ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'eu égard à la nature et à l'importance des moyens techniques mis en oeuvre, la station d'épuration du Clos de Hilde à Bègles présente un caractère industriel ; qu'il est constant que les bâtiments et terrains industriels dont s'agit, qui sont la propriété de la COMMUNAUTE URBAINE DE BORDEAUX et ont été affermés en 1994, ne figurent à l'actif d'aucune entreprise industrielle ou commerciale ; que, par suite, c'est à bon droit que le service a fait application de l'article 1498 du code général des impôts pour calculer la valeur locative de l'immeuble, servant de base à l'imposition contestée ;
Considérant qu'il ne résulte d'aucun des éléments versés au dossier que l'ensemble immobilier en litige peut être évalué par comparaison avec des immeubles similaires ou de même nature donnés en location à des conditions de prix normales à la date de référence ; qu'il convient, en conséquence, et alors qu'une évaluation irrégulière de la base d'imposition à la taxe contestée n'est susceptible que d'aboutir à une réduction et non à une décharge totale de la taxe, de comparer ladite base à celle qui résulte de la méthode de l'appréciation directe prévue par l'article 1498-3° du code général des impôts et dont les modalités d'application sont précisées par les articles 324 AB et 324 AC de l'annexe III au même code ;
Sur la détermination de la valeur locative :
En ce qui concerne la valeur vénale :
Considérant, d'une part, que le prix d'acquisition des terrains par la COMMUNAUTE URBAINE DE BORDEAUX ne peut, en l'absence de toute démonstration à cet égard, être regardé comme supérieur à leur valeur vénale ; que la communauté ne saurait ainsi utilement invoquer l'estimation, d'un montant inférieur, de ces biens par le service des Domaines peu avant leur acquisition ;
Considérant, d'autre part, que la COMMUNAUTE URBAINE DE BORDEAUX ne fournit pas d'éléments suffisamment précis et probants sur les terrains et équipements dont la valeur devrait être exclue de la base passible de la taxe foncière ; qu'en outre, elle ne critique pas sérieusement l'évaluation des constructions retenue par l'administration qui soutient, sans être contredite, qu'elle résulte des propres déclarations de la collectivité ;
En ce qui concerne la valeur de reconstruction au 1er janvier 1970 :
Considérant qu'il ne ressort pas de l'instruction que le recours à un indice spécialisé, relatif aux ouvrages d'art et fondations spéciales, préconisé par la communauté, serait plus approprié que l'indice INSEE du coût de la construction, dont rien ne permet d'affirmer qu'il serait étranger à la valeur de la reconstruction, retenu par l'administration, alors au surplus que le premier de ces indicateurs n'est disponible que depuis 1975 et non dès le 1er janvier 1970, date à laquelle s'apprécie la valeur de reconstruction, comme le prévoit l'article 324 AC ;
En ce qui concerne les abattements :
Considérant que si l'article 324 AC ne prévoit aucun abattement au titre de l'occupation du bien, il y a lieu d'admettre un abattement de 10 % représentatif de la dépréciation immédiate de l'immeuble et un abattement de 40 % en raison de la nature, de l'importance et de l'affectation du bien, soit un abattement global de 50 %, au lieu de la réfaction de 35 % proposée par l'administration ;
En ce qui concerne la valeur locative des terrains et constructions :
Considérant qu'il convient d'appliquer à la valeur vénale obtenue dans les conditions ci-avant décrites le taux d'intérêt prévu par l'article 324 AB, soit en l'espèce un taux de 4 %, que les parties admettent dans le dernier état de leurs écritures ; que la valeur locative des terrains s'élève ainsi à 9 945 euros (65 235 F) et celle des constructions à 103 226 euros (677 118 F), soit un total de 113 171 euros (742 353 F) correspondant à une valeur, après application des coefficients d'actualisation et de revalorisation, respectivement de 2,04 et de 2,328, de 537 462 euros (3 525 520 F) ; que la base d'imposition s'élève ainsi, après application de l'abattement de 50 % prévu par l'article 1388 du code et compte tenu des règles d'arrondissement, à 268 730 euros (1 762 760 F) ; que l'imposition contestée ayant été établie sur une base de 315 030 euros (2 066 480 F), la communauté peut prétendre à une décharge de droits déterminée sur la base de la différence entre ces deux sommes ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COMMUNAUTE URBAINE DE BORDEAUX est fondée à soutenir dans cette mesure que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner l'Etat à payer à la COMMUNAUTE URBAINE DE BORDEAUX une somme de 1 300 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Pour la détermination de la base de la taxe foncière sur les propriétés bâties due par la COMMUNAUTE URBAINE DE BORDEAUX au titre de l'année 1996, la valeur locative de la station d'épuration du clos de Hilde de Bègles est fixée, après application de la déduction de 50 %, à la somme de 268 730 euros.
Article 2 : La COMMUNAUTE URBAINE DE BORDEAUX est déchargée de la différence entre la taxe foncière sur les propriétés bâties à laquelle elle a été assujettie pour le bien dont s'agit et celle qui résulte de l'article 1er ci-dessus.
Article 3 : Le jugement n° 9801150 du Tribunal administratif de Bordeaux du 12 avril 1999 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera à la COMMUNAUTE URBAINE DE BORDEAUX une somme de 1 300 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de la COMMUNAUTE URBAINE DE BORDEAUX est rejeté.
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N° 99BX01494