Vu, enregistrée au greffe de la Cour le 18 février 2002, la requête présentée pour Mme veuve Pierre X, demeurant ..., Mme Francine X épouse Y, demeurant ... et Mme Geneviève X épouse Z, demeurant ... ; elles demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 17 décembre 2001 par lequel le Tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Réunion du 30 octobre 2000 en tant qu'il déclare cessibles les parcelles CU 18, CU 19 et CU 39 sises chemin Canal à Saint-Leu ;
2°) d'annuler l'arrêté de cessibilité litigieux en tant qu'il déclare cessibles les parcelles CU 18, CU 19 et CU 39 ;
3°) de condamner la société Semader à leur verser 7 622,45 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 janvier 2006 :
- le rapport de Mme Viard ;
- les observations de Me Tiphaine, collaborateur de Me Mirieu de Labarre, avocat de Mmes X ;
- et les conclusions de M. Pouzoulet, commissaire du gouvernement ;
Considérant que Mme veuve Pierre X née Antoinette A, usufruitière des parcelles cadastrées CU 18, CU 19 et CU 39, sises à Saint-Leu, Mme Francine X épouse Y et Mme Geneviève X épouse Z, nues-propriétaires des parcelles cadastrées CU 18 et CU 19, ont demandé au Tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion, par une requête commune, d'annuler l'arrêté du préfet de la Réunion du 30 octobre 2000 déclarant cessibles lesdites parcelles ; qu'elles font appel du jugement par lequel le tribunal a rejeté leur demande comme tardive ;
Considérant que le délai de deux mois dont dispose le propriétaire d'une parcelle mentionnée dans un arrêté de cessibilité pour demander au tribunal administratif l'annulation de cet arrêté ne court qu'à compter de la notification régulière de cet arrêté à ce propriétaire ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la société Semader, expropriant, a expédié le 7 décembre 2000, par lettre recommandée avec accusé de réception, l'arrêté de cessibilité litigieux à chacune des trois requérantes ; que le pli contenant cet arrêté et destiné à Mme veuve Pierre X a été présenté à son domicile le 9 décembre 2000 et a été retourné à la société Semader avec la mention « non réclamé, retour à l'envoyeur » ; que, Mme veuve Pierre X ne soutenant pas ne pas avoir été avisée de cette présentation et ne pas avoir été mise en mesure de retirer le pli, l'arrêté doit être regardé comme lui ayant été régulièrement notifié le 9 décembre 2000 ; qu'en tant qu'elle émanait de Mme veuve Pierre X, la demande présentée devant le tribunal administratif le 30 avril 2001 était donc tardive ; qu'en revanche, les plis adressés à Mme Francine X et Mme Geneviève X ont été retournés à la société Semader avec la mention « n'habite pas à l'adresse indiquée, retour à l'envoyeur » ; que, s'agissant d'un acte qui ne faisait pas suite à une demande des intéressées, le pli contenant l'arrêté de cessibilité ne peut être regardé comme ayant été présenté à leur domicile ; que le délai de recours contentieux n'a donc pu courir à leur encontre ; qu'il s'ensuit que c'est à tort que le Tribunal administratif de Saint ;Denis de la Réunion a rejeté comme tardive, en tant qu'elle émanait de Mmes Geneviève et Francine X, la demande présentée devant lui par celles-ci et par Mme veuve Pierre X ; que le jugement attaqué doit donc être annulé sur ce point ; qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mmes Francine et Geneviève X devant le Tribunal administratif de la Réunion ;
Considérant qu'aux termes de l'article R. 11-19 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : « L'expropriant adresse au préfet, pour être soumis à enquête parcellaire dans chacune des communes où sont situés les immeubles à exproprier : 1° un plan parcellaire régulier des terrains et bâtiments ; 2° la liste des propriétaires établie à l'aide d'extraits des documents cadastraux délivrés par le service du cadastre ou à l'aide des renseignements délivrés par le conservateur des hypothèques au vu du fichier immobilier ou par tous autres moyens » ; qu'aux termes de l'article R. 11-22 du même code : « Notification individuelle du dépôt du dossier à la mairie est faite par l'expropriant, sous pli recommandé avec demande d'avis de réception aux propriétaires figurant sur la liste établie en application de l'article R. 11-19 lorsque leur domicile est connu d'après les renseignements recueillis par l'expropriant ou à leurs mandataires, gérants, administrateurs ou syndics ; en cas de domicile inconnu, la notification est faite en double copie au maire qui en fait afficher une et, le cas échéant, aux locataires et preneurs à bail rural » ; que l'article R. 11-23 du même code dispose : « Les propriétaires auxquels notification est faite par l'expropriant du dépôt du dossier à la mairie sont tenus de fournir les indications relatives à leur identité, telles qu'elles sont énumérées soit par le premier alinéa de l'article 5, soit au premier alinéa de l'article 6 du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955 modifié portant réforme de la publicité foncière ou, à défaut, de donner tous renseignements en leur possession sur l'identité du ou des propriétaires actuels » ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que tous les propriétaires des parcelles concernées doivent recevoir notification de l'avis de dépôt en mairie du dossier d'enquête parcellaire et que ce n'est que lorsque le domicile de ces propriétaires demeure inconnu, malgré les recherches effectuées, que l'expropriant peut recourir à la formalité de l'affichage en mairie prévue par l'article R. 11-22 du code précité ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'avis de dépôt du dossier d'enquête parcellaire n'a pas été notifié à Mme Geneviève X ; que la société Semader n'établit ni même n'allègue avoir effectué les diligences nécessaires pour procéder à cette notification ; qu'il ressort également des pièces du dossier que le pli, contenant ledit avis, qui a été expédié à Mme Francine X a été retourné à l'envoyeur avec la mention « n'habite pas à l'adresse indiquée » ; que la société Semader n'établit ni même n'allègue qu'elle a tenté, le cas échéant après avoir effectué des recherches, de procéder à une nouvelle notification ; que, dans ces conditions, le domicile de Mmes Geneviève et Francine X ne pouvait être réputé inconnu au sens des dispositions précitées de l'article 11-22 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ; que, par suite, l'affichage en mairie de l'avis de dépôt du dossier d'enquête ne saurait être regardé comme s'étant valablement substitué, pour les intéressées, à la formalité de la notification ; qu'il s'ensuit que l'arrêté litigieux, qui a été pris à la suite d'une procédure irrégulière en ce qui concerne Mmes Geneviève et Francine X, est entaché d'illégalité en tant qu'il concerne les parcelles sur lesquelles celles-ci détiennent un droit de propriété ; que Mmes Geneviève et Francine X sont, dès lors, fondées à demander l'annulation dudit arrêté, mais seulement en tant qu'il déclare cessibles les parcelles dont elles sont nues-propriétaires, soit les parcelles cadastrées CU 18 et CU 19 ;
Considérant, enfin, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la société Semader à verser à Mmes Geneviève et Francine X la somme de 1 000 euros à chacune au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion en date du 17 décembre 2001 est annulé en ce qu'il rejette la demande présentée par les consorts X en tant qu'elle émane de Mmes Geneviève et Francine X.
Article 2 : L'arrêté du préfet de la Réunion en date du 30 octobre 2000 est annulé en tant qu'il déclare cessibles les parcelles cadastrées CU 18 et CU 19.
Article 3 : La société Semader versera à Mmes Geneviève et Francine X la somme de 1 000 euros à chacune sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus de la demande présentée par les consorts X devant le Tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion et de la requête présentée par les mêmes devant la Cour est rejeté.
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No 02BX00330