Vu la requête, enregistrée le 26 décembre 2006, présentée pour la SOCIETE BUSINESS CONSULTANCY SOFTWARE SOLUTIONS LIMITED, dont le siège est The Apple Barn-Langley Park Sutton Road Maidstone ME17 3NQ Kent, Grande-Bretagne ;
La SOCIETE BUSINESS CONSULTANCY SOFTWARE SOLUTIONS LIMITED demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 26 octobre 2006 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses demandes tendant, d'une part, à la décharge des cotisations d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice 2000, d'autre part, à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période allant du 1er mai 2000 au 31 décembre 2002 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
.................................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu la convention fiscale franco-britannique du 22 mai 1968 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 juin 2008 :
- le rapport de M. Margelidon, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Pouzoulet, commissaire du gouvernement ;
Considérant que la SOCIETE BUSINESS CONSULTANCY SOFTWARE SOLUTIONS LIMITED fait appel du jugement du 26 octobre 2006 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses demandes tendant, d'une part, à la décharge des cotisations d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2000, d'autre part, à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période allant du 1er mai 2000 au 31 décembre 2002 ;
Sur l'impôt sur les sociétés et la contribution additionnelle à cet impôt :
En ce qui concerne le principe de l'imposition en France :
Considérant qu'aux termes de l'article 209 du code général des impôts : « I. Sous réserve des dispositions de la présente section, les bénéfices passibles de l'impôt sur les sociétés sont déterminés d'après les règles fixées par les articles 34 à 45, 53A à 57 et 302 septies A bis et en tenant compte uniquement des bénéfices réalisés dans les entreprises exploitées en France ainsi que ceux dont l'imposition est attribuée à la France par une convention internationale relative aux doubles impositions... » ;
Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention franco-britannique modifiée du 22 mai 1968 : « 1. Au sens de la présente convention, l'expression « résident d'un Etat contractant » désigne toute personne qui, en vertu de la législation de cet Etat, y est assujettie à l'impôt en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction ou de tout autre critère de nature analogue. Toutefois, cette expression ne comprend pas les personnes qui ne sont assujetties, à l'impôt dans cet Etat que pour les revenus de source situées dans cet Etat. (...). 3. Lorsque, en vertu des dispositions du paragraphe 1, une personne autre qu'une personne physique est résident de chacun des deux Etats contractants, elle est considérée comme résident de l'Etat contractant où est situé son siège de direction effective » ; que l'article 6 de cette même convention stipule que « 1. Les bénéfices industriels et commerciaux d'une entreprise d'un Etat contractant ne sont imposables que dans cet Etat, à moins que l'entreprise exerce son activité dans l'autre Etat contractant par l'intermédiaire d'un établissement stable qui y est situé... » ;
Considérant que l'objet social de la société requérante, immatriculée en Grande-Bretagne depuis le 2 mai 2000, est la prestation de services en informatique ; qu'il résulte de l'instruction et notamment des éléments, non sérieusement contestés, que l'administration a pu obtenir auprès de l'autorité judiciaire dans le cadre de l'exercice de son droit de communication ainsi que des autorités anglaises sollicitées dans le cadre de l'assistance administrative, que, depuis sa création, ladite société n'a déposé aucune déclaration de résultats en Grande-Bretagne et n'y est pas immatriculée en tant que redevable de la taxe sur la valeur ajoutée ; que, si un expert comptable de nationalité britannique et exerçant en Grande-Bretagne est présenté comme le co-directeur de la société, il se borne à effectuer au profit de celle-ci des prestations en matière de comptabilité ; que, contrairement aux allégations de la société, il ne résulte pas de l'instruction que Mme X, domiciliée également en Grande-Bretagne, travaille effectivement en son sein ; qu'en revanche, M. Y, de nationalité française et domicilié en France, seul actionnaire de la société requérante, exerce ses activités en France où il est le dirigeant et l'unique associé des trois sociétés, implantées en France, qui ont conclu avec la société requérante des contrats de prestations de service ; que M. Y a signé tous les contrats qui ont engagé la société requérante à l'égard de ses clients et a, en outre, réalisé les prestations imputables à celle-ci ; que, dans le cadre de l'instruction judiciaire dont il a fait l'objet, il a reconnu ne s'être rendu en Grande-Bretagne qu'à une seule occasion pour formaliser la constitution juridique de la société requérante ; qu'aucun élément ne permet de conclure à l'existence d'une activité exercée par la société, au cours de l'exercice litigieux, en Grande-Bretagne ; que, dans ces conditions, la SOCIETE BUSINESS CONSULTANCY SOFTWARE SOLUTIONS LIMITED doit être regardée comme ayant eu en France au cours de cet exercice le siège de sa direction effective et son seul établissement stable ; que, par suite, et quand bien même l'administration fiscale britannique lui reconnaît-elle la qualité de résident fiscal britannique, les bénéfices réalisés par la société au titre dudit exercice doivent dans leur totalité, en vertu tant des dispositions précitées du code général des impôts que des stipulations également précitées de la convention fiscale franco-britannique, être imposés en France ;
En ce qui concerne la procédure d'imposition :
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que la société requérante a été à bon droit taxée d'office sur le fondement des dispositions du 2° de l'article 66 du livre des procédures fiscales, dès lors qu'elle n'a pas déposé dans le délai imparti par une mise en demeure la déclaration de résultats qu'elle était tenue de souscrire ;
Considérant, en deuxième lieu, que, ayant été à bon droit taxée d'office sur le fondement du 2° de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales, la société requérante ne peut utilement se prévaloir de ce que l'administration ne l'a pas invitée à désigner un représentant en France ainsi que le prévoit l'article L. 72 du livre des procédures fiscales ;
Considérant, en troisième lieu, que l'administration doit indiquer au contribuable soumis à une vérification de comptabilité l'origine et la teneur des informations recueillies auprès de tiers, notamment, dans l'exercice de son droit de communication, utilisées pour fonder les redressements notifiés au terme de la vérification, afin de lui permettre, avant la mise en recouvrement des impositions supplémentaires correspondantes, de demander communication des pièces qui en sont le cas échéant le support ; qu'il résulte de l'instruction que la notification de redressement du 17 décembre 2003 adressée à la société soulignait que, dans le cadre de l'exercice de son droit de communication auprès de l'autorité judiciaire, l'administration avait eu connaissance de documents, dont elle mentionnait précisément les références, révélant que celui qui était présenté comme le co-directeur de la société n'était en fait qu'un « homme de paille » ; que, dans ces conditions, la société, qui a été ainsi informée de l'origine et de la teneur des informations qui lui étaient opposées sur ce point, ne saurait utilement soutenir que l'administration ne l'a pas informée, avant l'établissement de l'impôt, de l'existence d'un courrier, postérieur à ladite notification de redressement, dans lequel le même co-directeur a fait savoir aux autorités fiscales britanniques qu'il n'était qu'un prestataire de services en matière comptable à l'égard de la société ;
Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales : « les bases ou les éléments servant au calcul des impositions d'office sont portés à la connaissance du contribuable, trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions, au moyen d'une notification qui précise les modalités de leur détermination » ; que la notification de redressement précise les modalités selon lesquelles a été déterminé le bénéfice imposable, décrit le détail des factures retenues, les montants en cause, le taux applicable en matière d'impôt sur les sociétés ainsi que le montant des redressements ; qu'une telle notification est suffisamment motivée ;
En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : « Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office, la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition » ;
Considérant qu'aux termes de l'article 39-1 du code général des impôts : « Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5 notamment : 1° les frais généraux de toute nature (...) » ;
Considérant qu'en se bornant à produire une déclaration n° 2047 des revenus encaissés à l'étranger en 2000 par M. Y, pour un montant de 857 101 F, et mentionnant la Grande-Bretagne comme territoire où lesdits revenus auraient été encaissés, la société requérante, alors surtout qu'elle n'a produit aucune comptabilité de son activité, ne peut être regardée comme produisant un élément suffisamment précis de nature à établir, d'une part, la réalité desdits revenus, d'autre part, leur caractère déductible au titre de l'exercice en cause ;
Sur la taxe sur la valeur ajoutée :
En ce qui concerne le principe de l'imposition en France :
Considérant qu'aux termes de l'article 259 du code général des impôts : « Le lieu des prestations de services est réputé se situer en France lorsque le prestataire a en France le siège de son activité ou un établissement stable à partir duquel le service est rendu ou, à défaut, son domicile ou sa résidence habituelle » ;
Considérant que si la société requérante soutient que toutes les prestations de services effectuées par ses soins ont été réalisées par une « équipe de travail » domiciliée en Grande-Bretagne, il résulte de l'instruction, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, que les prestations ont été réalisées par son gérant et seul actionnaire, M. Y, domicilié en France, pour le compte, au demeurant, de sociétés françaises dont il était également le dirigeant et seul actionnaire ; que, dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration a estimé que le lieu des prestations de services effectuées devait être regardé comme se situant en France ;
En ce qui concerne la régularité de la procédure :
Considérant que la société requérante a été à bon droit taxée d'office sur le fondement des dispositions du 3° de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales, dès lors qu'elle n'a pas procédé au dépôt dans le délai légal, et sans que l'administration soit tenue de lui adresser, préalablement, une mise en demeure, des déclarations en matière de taxe sur la valeur ajoutée qu'elle était tenue de souscrire en tant que redevable de ladite taxe ;
Considérant que la notification de redressement, qui précise les modalités selon lesquelles a été déterminée la base d'imposition de la taxe, décrit le détail des factures retenues, indique les montants en cause, le taux applicable en matière de taxe sur la valeur ajoutée ainsi que le montant des redressements, est suffisamment motivée ;
Considérant que, pour les mêmes raisons que celles indiquées ci-dessus, le moyen tiré du défaut d'information sur l'origine et la teneur des informations obtenues de tiers doit être écarté ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre, que la SOCIETE BUSINESS CONSULTANCY SOFTWARE SOLUTIONS LIMITED n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses demandes ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à verser à la SOCIETE BUSINESS CONSULTANCY SOFTWARE SOLUTIONS LIMITED la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SOCIETE BUSINESS CONSULTANCY SOFTWARE SOLUTIONS LIMITED est rejetée.
5
No 06BX02588