Vu la requête enregistrée le 30 août 2007, présentée pour la SOCIETE DES PETROLES SHELL, dont le siège social est situé Les Portes de la Défense, 307 rue Estienne d'Orves à Colombes Cedex (92708), par Me Courchinoux, avocat au barreau de Paris ; la SOCIETE DES PETROLES SHELL demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0600170-0600398-0700277 en date du 28 juin 2007 par lequel le Tribunal administratif de Limoges a rejeté ses demandes tendant à la décharge des sommes dont le paiement lui a été réclamé par trois titres de perception émis à son encontre les 25 octobre 2005 et 24 octobre 2006 par le directeur des services fiscaux de la Haute-Vienne, en vue d'obtenir le remboursement des cotisations de taxe foncière mises à la charge de l'Etat au titre des années 2002 à 2006 à raison de l'aire de service de « Bois Mandé », située sur l'autoroute A 20 dans la commune de Saint-Sulpice les Feuilles (Haute-Vienne) ;
2°) de prononcer ladite décharge ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du domaine de l'Etat ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu la loi n° 92-1476 du 31 décembre 1992 et notamment son article 98 ;
Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 septembre 2008 :
* le rapport de M. Kolbert, président-assesseur ;
* et les conclusions de M. Lerner, commissaire du gouvernement ;
Considérant que la SOCIETE DES PETROLES SHELL exploite, le long de l'autoroute A 20, les installations de l'aire de service de Bois Mandé sur le territoire de la commune de Saint-Sulpice les Feuilles (Haute-Vienne) selon un contrat de concession passé le 29 avril 1999 ; que cette aire relevant du domaine public routier national, l'Etat a acquitté, au titre des années 2002 à 2006, le montant de la taxe foncière sur les propriétés bâties correspondante, mais en a demandé le remboursement à la SOCIETE DES PETROLES SHELL par trois titres de perception rendus exécutoires le 25 octobre 2005 pour des montants de 21 234 euros (années 2002 à 2004), 7 501 euros (année 2005) et 7 806 euros (année 2006) ; que la SOCIETE DES PETROLES SHELL demande l'annulation du jugement en date du 28 juin 2007 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Limoges a rejeté ses demandes en décharge desdites sommes ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 222-1 du code de justice administrative : « Les jugements des tribunaux administratifs et les arrêts des cours administratives d'appel sont rendus par des formations collégiales, sous réserve des exceptions tenant à l'objet du litige ou à la nature des questions à juger ... » ; que si, en vertu des dispositions du 5° de l'article R. 222-13, il est statué par un magistrat jugeant seul sur les litiges relatifs aux impôts locaux autres que la taxe professionnelle, le litige dont la SOCIETE DES PETROLES SHELL avait saisi le Tribunal administratif de Limoges portait sur la contestation de l'obligation de remboursement mise à sa charge par le contrat de concession qui la liait à l'Etat, et non sur un litige relatif à la taxe foncière sur les propriétés bâties, nonobstant la circonstance que les sommes en cause fussent du même montant que la taxe que l'Etat avait préalablement acquittée ; qu'ainsi, il ne relevait pas de ces dispositions ni d'aucune autre disposition de nature législative ou réglementaire permettant de justifier qu'il ait été dérogé à la règle selon laquelle les jugements et arrêts sont rendus en formation collégiale ; qu'il en résulte que le jugement attaqué qui a été rendu par un magistrat statuant seul est irrégulier et doit être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu pour la Cour, de statuer par la voie de l'évocation ;
Sur la procédure de mise en recouvrement :
Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que le directeur des services fiscaux de la Haute-Vienne qui, avant de mettre en recouvrement les sommes litigieuses, a, dans les conditions prévues par les dispositions de l'article 98 de la loi n° 92-1476 du 31 décembre 1992 et du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 rendu exécutoires les titres de perception établis à l'encontre de la SOCIETE DES PETROLES SHELL aurait ainsi méconnu les dispositions applicables en matière de recouvrement des créances domaniales ;
Sur l'obligation de rembourser incombant à la SOCIETE DES PETROLES SHELL :
Considérant qu'aux termes de l'article 4-6 du contrat de concession du 29 avril 1999 relatif à l'aire de Bois Mandé : « Le concessionnaire acquittera directement ou fera acquitter par les tiers exploitants et sous sa seule responsabilité pendant toute la durée de la concession, les impôts et charges assimilées de toute nature exigibles du fait de l'existence et de l'utilisation des biens occupés par lui, et notamment toutes taxes foncière, d'habitation, professionnelle, licences et tous autres impôts ou contributions actuels et futurs, perçus ou à percevoir soit par l'Etat, soit par les collectivités locales » ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ces stipulations contractuelles qu'il était de la commune intention des parties de mettre à la charge finale du concessionnaire l'ensemble des taxes et impôts exigibles du fait de l'existence et de l'utilisation des biens concédés nonobstant la circonstance que l'Etat soit, le cas échéant, le redevable légal de certains d'entre eux ; que l'Etat était, dès lors, en droit de réclamer sur leur fondement, le remboursement par la SOCIETE DES PETROLES SHELL de la taxe foncière qu'il avait acquittée, ainsi qu'il en a justifié en cours d'instance, au titre des années 2002 à 2006, à raison de l'existence desdites installations occupées par cette société et situées sur son domaine public routier, ces créances présentant, par suite, le caractère de créances domaniales ;
Considérant, en second lieu, que, pour contester le bien-fondé de l'obligation de remboursement ainsi mise à sa charge sur le fondement des stipulations contractuelles précitées, la société appelante ne saurait utilement se prévaloir de l'exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties instituée par l'article 1382 du code général des impôts, en faveur des immeubles nationaux affectés à un service public ou d'utilité générale et non productifs de revenus, ni, en tout état de cause, de l'exonération de taxe foncière dont bénéficient « les grandes routes » en vertu des dispositions de l'article 103 de la loi du 3 Frimaire An VII, dès lors qu'un tel moyen ne saurait être soulevé que par l'Etat, redevable légal de la taxe, dans le cadre d'une réclamation relative au bien-fondé de celle-ci ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE DES PETROLES SHELL n'est pas fondée à demander la décharge des sommes dont le remboursement lui a été réclamé par les titres de perception litigieux ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à la SOCIETE DES PETROLES SHELL de quelque somme que ce soit au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 0600170-0600398-0700277 en date du 28 juin 2007 du Tribunal administratif de Limoges est annulé.
Article 2 : Les demandes de la SOCIETE DES PETROLES SHELL présentées devant le Tribunal administratif de Limoges et ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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N° 07BX01889