Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 21 décembre 2007 sous le numéro 07BX02622, présentée pour M. Ponnuthurai X, demeurant ... par la SCP d'avocats Dominique et Abel-Henri Pleinevert ;
M. X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Limoges du 25 octobre 2007 en ce qu'il a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier de Limoges à lui verser une somme de 100.000 euros en réparation des conséquences dommageables des interventions chirurgicales qu'il a subies le 26 août 2003 et le 30 avril 2004 ;
2°) de condamner le centre hospitalier de Limoges à lui verser cette somme ;
3°) de condamner le centre hospitalier de Limoges à lui verser la somme de 3.000 euros en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
4°) de condamner le centre hospitalier de Limoges aux dépens ;
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Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 octobre 2008,
le rapport de M. Verguet, premier conseiller ;
les observations de Me Pleinevert pour M. X ;
et les conclusions de Mme Viard, commissaire du gouvernement ;
Considérant que M. X a été opéré le 26 août 2003 dans le service de chirurgie orthopédique du centre hospitalier universitaire de Limoges pour soigner une fracture de doigts de la main gauche ; qu'il a subi le 30 avril 2004 une nouvelle intervention en vue de libérer le nerf ulnaire au niveau du coude gauche ; qu'à la suite de cette intervention est apparu un hématome sur le coude qui a nécessité un drainage chirurgical le 12 mai 2004 ; que les prélèvements bactériologiques réalisés lors de cette opération ont mis en évidence une infection par staphylocoque métisensible ; que M. X relève appel du jugement du Tribunal administratif de Limoges du 25 octobre 2007 en ce que le tribunal, après avoir estimé que la responsabilité du centre hospitalier était engagée sur le fondement des dispositions de l'article L.1142-1 du code de la santé publique, a rejeté sa demande tendant à être indemnisé du préjudice professionnel qu'il estimait avoir subi du fait de l'infection nosocomiale dont il a été victime ; que la Caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Vienne demande la confirmation de ce jugement ;
Sur la responsabilité :
Considérant, en premier lieu, que M. X soutient qu'il a conservé à la main gauche des séquelles de sa première opération en raison d'une pseudarthrose dont il aurait été victime du fait de la mauvaise qualité des soins reçus lors de son hospitalisation du 26 au 28 août 2003, révélée selon lui par le fait qu'il a été nécessaire de réaliser une nouvelle intervention le 30 avril 2004 ; qu'il résulte toutefois de l'instruction et notamment du rapport d'expertise produit par le requérant, soumis au débat contradictoire des parties, que cette nouvelle intervention, qui faisait seulement suite au diagnostic d'un syndrome de compression du nerf ulnaire au niveau du coude, ne présente aucun lien avec celle pratiquée le 26 août 2003 pour soigner sa fracture des doigts ; que l'expert a au surplus relevé que les actes médicaux et les soins post-opératoires dont M. X a bénéficié ont été réalisés conformément aux règles de l'art ; qu'ainsi, c'est à bon droit que le tribunal a jugé que le centre hospitalier n'avait pas commis de faute de nature à engager sa responsabilité lors de l'hospitalisation de M. X du 26 au 28 août 2003 ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction que l'infection nosocomiale dont le requérant a été victime a été diagnostiquée et traitée par antibiothérapie à l'hôpital dès le 21 mai 2004, date à laquelle a été connu le résultat des prélèvements bactériologiques réalisés quelques jours plus tôt pour drainer l'hématome apparu au coude ; que le traitement par antibiothérapie a été confirmé le 25 mai ; qu'ainsi, M. X bénéficiait d'un traitement adapté à son état lorsqu'il s'est présenté le 18 juin 2004 au service des urgences de l'hôpital en raison de douleurs au niveau du coude ; que si le requérant soutient avoir été mal pris en charge à cette occasion par le médecin de garde, il ne l'établit pas ; que M. X a été ensuite revu en consultation dans de courts délais et à plusieurs reprises par le chirurgien qui l'a opéré, lequel a constaté dès le 28 juin le succès du traitement par antibiothérapie administré depuis un mois ; que, dans ces conditions, le centre hospitalier n'a pas commis de retard fautif dans le diagnostic et le traitement de l'infection nosocomiale ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à juste titre que le tribunal a jugé que la responsabilité du centre hospitalier de Limoges ne pouvait être engagée à l'égard de M. X que sur le fondement des dispositions de l'article L.1142-1 du code de la santé publique ;
Sur le préjudice :
En ce qui concerne le préjudice professionnel :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X avait dû interrompre l'exercice de son activité professionnelle en raison d'une hépatite C, plusieurs mois avant qu'il ne contracte une infection nosocomiale ; que, selon l'expert, cette infection n'a laissé aucune séquelle ; que, dans ces conditions, le requérant n'établit pas avoir subi un préjudice professionnel du fait de l'infection nosocomiale dont il a été victime ;
En ce qui concerne les souffrances physiques :
Considérant que l'expert a évalué à 2 sur une échelle de 7 les souffrances physiques endurées par M. X du fait de l'infection nosocomiale ; qu'il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice, invoqué pour la première fois en appel, en l'évaluant à 1.300 euros ;
En ce qui concerne le préjudice moral :
Considérant que l'infection nosocomiale contractée par M. X a fait craindre à celui-ci une évolution grave de son état ; qu'il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice, invoqué pour la première fois en appel, en l'évaluant à 700 euros ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est fondé à demander l'annulation des dispositions de l'article 1er du jugement rejetant sa demande indemnitaire ;
Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Limoges la somme de 1.300 euros au titre des frais exposés par M. X et non compris dans les dépens ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Limoges la somme demandée par la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Vienne au même titre ;
DECIDE :
Article 1er : Les dispositions de l'article 1er du jugement du Tribunal administratif de Limoges du 25 octobre 2007 rejetant la demande indemnitaire de M. X sont annulées.
Article 2 : Le centre hospitalier universitaire de Limoges versera à M. X une somme de 2.000 euros en réparation de son préjudice.
Article 3 : Le centre hospitalier universitaire de Limoges versera à M. X une somme de 1.300 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions présentées par la Caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Vienne, relatives à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.
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07BX02622