Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 20 février 2007 sous le n° 07BX00377, présentée pour la SOCIETE DES AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE, dont le siège est 9 Place de L'Europe à Rueil-Malmaison (92851), par la SCP d'avocats La Sade-Clusan ;
La SOCIETE DES AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0500458 du 14 décembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Limoges l'a condamnée à verser à M. X la somme de 162.180,80 euros en réparation du préjudice lié à l'existence de l'autoroute A89 à proximité de sa propriété ;
2°) de rejeter la demande d'indemnisation présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Limoges ;
3°) de condamner M. X à lui verser la somme de 4.000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 octobre 2008,
- le rapport de Mme Lefebvre-Soppelsa, premier conseiller ;
- les observations de Me La Sade, avocat de la SOCIETE DES AUTOROUTES DU
SUD DE LA FRANCE ;
- les observations de Me Dias, avocat de M. X ;
- et les conclusions de M. Zupan, commissaire du gouvernement ;
Sur la recevabilité de la requête :
Considérant que le jugement du Tribunal administratif de Limoges en date du 14 décembre 2006 a été notifié à la SOCIETE DES AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE le 22 décembre 2006 ; que par suite, la requête, enregistrée le 20 février 2007 dans le délai d'appel d'une durée de deux mois, n'est pas tardive ;
Considérant que la requête, qui contient l'énoncé de faits et l'exposé de moyens, est suffisamment motivée ;
Sur les préjudices liés aux travaux de construction de l'autoroute :
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert désigné par le juge des référés du tribunal administratif, que la réalisation du remblai de l'autoroute, d'une hauteur d'environ deux mètres au droit de la propriété de M. X, a provoqué, par un phénomène de ravinement, d'importants apports terreux qui se sont progressivement déposés dans l'étang de la propriété de l'intéressé et l'ont progressivement envasé ; qu'en revanche il n'est pas établi que les travaux d'aménagement réalisés aux abords du plan d'eau par M. X ou un défaut d'entretien de l'étang auraient contribué au dommage ; qu'il s'ensuit que c'est à tort que les premiers juges ont limité à 80% la part de responsabilité de la SOCIETE DES AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE dans la réalisation de ce dommage ; qu'il y a lieu, en faisant droit aux conclusions d'appel incident de M. X et en rejetant par voie de conséquence les conclusions d'appel principal de la SOCIETE DES AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE, de reconnaître cette dernière entièrement responsable de ce chef de préjudice ;
Considérant que le coût de remise en état du plan d'eau et des prestations annexes s'élève à une somme, évaluée par l'expert à 83.709 euros hors taxe, qu'il y a lieu d'abonder du montant de la TVA et des frais de maîtrise d'oeuvre estimés à 8 %, soit au total 108.125 euros ; qu'il n'y a pas lieu, en revanche, d'inclure dans le montant de ce préjudice le coût de réalisation d'un bassin de rétention dont l'utilité n'est pas démontrée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le montant de l'indemnité due par la SOCIETE DES AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE au titre de l'ensablement de l'étang doit être porté de 92.700,80 euros à 108.125 euros ;
Considérant, en deuxième lieu, que la réalité d'une activité de pisciculture dans l'étang en cause n'a jamais été démontrée ; que la SOCIETE DES AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE est, par suite, fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Limoges l'a condamnée à verser à M. X une somme de 4.480 euros au titre d'un préjudice piscicole déterminé de manière strictement théorique ;
Considérant, en troisième lieu, que M. X n'établit pas, par la production d'une facture, que les travaux de remise en état d'une clôture et d'un panneau situés dans la partie est de la propriété seraient la conséquence de dégradations causées par la construction de l'autoroute ; qu'il n'est dès lors pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté ses conclusions tendant à l'allocation d'une indemnité de 8.669 euros de ce chef ;
Sur les préjudices liés à la présence de l'autoroute :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le chalet d'habitation implanté sur la propriété de M. X, à une distance de 50 mètres de l'emprise des voies, en contrebas de celles-ci, est exposé à de graves nuisances sonores qui excèdent les sujétions normales de voisinage et génèrent un préjudice anormal et spécial ; qu'en revanche l'autre maison d'habitation implantée sur la propriété, un ancien corps de ferme, située à plus de 150 mètres de l'emprise de l'autoroute, ne subit pas de nuisances sonores qui excéderaient les inconvénients normaux que sont amenés à supporter les riverains d'une autoroute ; qu'ainsi, la perte de valeur vénale des constructions ne pouvant ouvrir droit à réparation que pour autant qu'elle puisse être regardée comme la conséquence du caractère anormal des troubles de jouissance liés à la présence de l'ouvrage, c'est à bon droit que les premiers juges ont limité l'indemnisation de M. X du fait de la dépréciation de sa propriété, en raison de l'existence de l'autoroute A 89, à la seule perte de valeur vénale du chalet implanté à proximité de l'autoroute ;
Considérant qu'il résulte du rapport de l'expert désigné par le juge des référés du Tribunal administratif de Limoges que la dépréciation du chalet dont il s'agit doit être estimée à 65.000 euros, c'est-à-dire 42 % de la valeur initiale de la construction et du terrain d'agrément attenant ; que si la SOCIETE DES AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE critique cette évaluation, elle ne propose aucune méthode d'évaluation différente de celle utilisée par l'expert et ne discute pas efficacement les données retenues par celui-ci ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que ni la SOCIETE DES AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE, par la voie de l'appel principal, ni M. X, par la voie de l'appel incident, ne sont fondés à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont condamné la SOCIETE DES AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE à verser à M. X une indemnité de 65.000 euros au titre de la perte de valeur vénale de sa propriété ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X est seulement fondé à demander que le montant de l'indemnisation qui lui a été allouée par le Tribunal administratif de Limoges soit porté de 162.180,20 euros à 173.125 euros ; que par suite, les conclusions de la requête de la SOCIETE DES AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE tendant à l'annulation du jugement attaqué doivent être rejetées ;
Sur les frais d'expertise :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de laisser les frais de l'expertise taxée et liquidée par deux ordonnances du président du Tribunal administratif de Limoges en date du 18 octobre 2004 à la somme totale de 11 341,31 euros à la charge définitive de la SOCIETE DES AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE ;
Sur les frais exposés non compris dans les dépens :
Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M. X, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à verser à la SOCIETE DES AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE la somme qu'elle réclame sur leur fondement ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de M. X tendant au bénéfice de ces dispositions ;
DECIDE :
Article 1er : L'indemnité que la SOCIETE DES AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE est condamnée à verser à M. X est portée de 162.180,20 euros à 173.125 euros.
Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Limoges du 14 décembre 2006 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Les conclusions de la requête de la SOCIETE DES AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE et le surplus des conclusions incidentes de M. X sont rejetées.
Article 4 : Les frais d'expertise sont laissés à la charge définitive de la SOCIETE DES AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE.
Article 5 : Les conclusions de M. X tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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No 07BX00377