Vu, I, sous le n° 08BX02136, la requête, enregistrée le 11 août 2008, présentée pour M. Sory Ibrahim X, domicilié ..., par Me Raffard ; M. X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 08/3469 du 30 juillet 2008 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Gironde en date du 27 juillet 2008 décidant sa reconduite à la frontière à destination du Mali ;
2°) d'annuler ledit arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce qu'il soit statué sur son cas ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 200 € en application des articles 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ;
..........................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu, II, sous le n° 08BX02137, la requête, enregistrée le 11 août 2008, présentée pour M. Sory Ibrahim X, domicilié ..., par Me Raffard ; M. X demande à la Cour :
1°) de prononcer le sursis à exécution du jugement n° 08/3469 du 30 juillet 2008 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Gironde en date du 27 juillet 2008 décidant sa reconduite à la frontière à destination du Mali ;
2°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 000 € en application des articles 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ;
..........................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la décision du président de la Cour en date du 16 janvier 2009 portant désignation de M. Brunet, président de chambre, en qualité de juge habilité à statuer en matière d'appel des jugements de reconduite à la frontière ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code civil ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 mars 2009 :
* le rapport de M. Brunet, président de chambre ;
* les observations de Me Raffard, pour M. X ;
* les conclusions de M. Lerner, rapporteur public ;
* et les observations complémentaires de Me Raffard ;
Considérant que les requêtes n° 08BX02136 et n° 08BX02137 de M. X présentent à juger des questions semblables ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Sur l'aide juridictionnelle provisoire :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'admettre M. X au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « (...) II. L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré (...) » ;
Considérant que la circonstance que le jugement attaqué vise, en plus du 1°, le 2° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors que l'arrêté en litige ne visait que le 1°, est sans incidence sur la régularité dudit jugement, dès lors que le premier juge ne s'est fondé que sur le fait que M. X « n'a pu justifier d'une entrée régulière en France » pour estimer qu'il se trouvait dans le cas où le préfet pouvait ordonner sa reconduite à la frontière ;
Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté de reconduite à la frontière :
Considérant que M. X, de nationalité malienne, ne démontre pas être entré régulièrement en France ; qu'il n'incombe pas au préfet d'établir l'irrégularité de cette entrée ; que le requérant relevait ainsi de la situation prévue par les dispositions précitées du 1° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que le signataire de l'arrêté en litige ordonnant la reconduite à la frontière de M. X, M. Philippe Ramon, sous-préfet, a été habilité pour ce faire par délégation du préfet de la Gironde du 27 avril 2006 régulièrement publiée ;
Considérant que l'arrêté du préfet, qui comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, est suffisamment motivé ;
Considérant que M. X soutient que l'arrêté en litige avait pour motif déterminant de faire échec à la célébration de son mariage ; que, certes, la mesure d'éloignement a été prise à l'encontre du requérant par l'administration le 27 juillet 2008, alors que le maire de la commune de Castelnau-du-Médoc avait saisi le procureur de la République le 17 juillet 2008 et que celui-ci avait décidé en application des dispositions de l'article 175-2 du code civil qu'il serait sursis à la célébration du mariage pour une durée d'un mois le 22 juillet 2008 ; que, toutefois, il est constant que l'administration a pris connaissance de la situation irrégulière du requérant au regard du séjour à l'occasion des démarches entreprises par l'intéressé et sa compagne pour se marier ; que, par ailleurs, et alors même que la publication des bans était intervenue le 26 juin 2008, soit antérieurement à l'audition commune des futurs époux prévue par l'article 63 du code civil intervenue le 11 juillet 2008, il ne ressort pas de l'ensemble de ces éléments que le préfet de la Gironde aurait pris une mesure d'éloignement à l'encontre de M. X, qui séjournait irrégulièrement en France depuis 2002 selon ses dires, avec pour motif déterminant de faire échec à la célébration de son mariage, alors prévue le 30 août 2008, avec une Française ; que si le procureur de la République ne s'est finalement pas opposé à la célébration du mariage du requérant par décision adressée au maire de Castelnau-du-Médoc le 5 août 2008, si le mariage a effectivement été célébré le 30 août 2008 et si l'épouse du requérant est actuellement enceinte, ces événements, tous postérieurs à la date de la décision attaquée, sont sans incidence sur sa régularité ;
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) » ; que M. X, qui serait entré en France selon ses dires à l'âge de vingt-et-un ans et s'y est ensuite maintenu en situation irrégulière, avait pour projet, à la date de l'arrêté en litige, comme il a été dit, d'épouser une Française qu'il avait rencontrée quelques mois à peine auparavant ; qu'il ne conteste pas que des membres de sa famille proche vivent dans son pays d'origine ; que, par suite, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, la décision qu'il conteste n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ;
Considérant qu'en vertu de l'article 12 de la même convention : « À partir de l'âge nubile, l'homme et la femme ont le droit de se marier et de fonder une famille selon les lois nationales régissant l'exercice de ce droit » ; que, compte tenu notamment de ce qui a été dit, l'arrêté en litige n'a pas eu pour objet ni pour effet d'interdire à M. X de se marier ; que, dès lors, la décision qu'il conteste ne méconnaît pas les dispositions précitées de l'article 12 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant, en dernier lieu, que M. X soutient que le préfet a commis une erreur de droit en ne retenant pas son projet de mariage ; que, toutefois, à la date dudit arrêté, le requérant n'était pas encore marié ; que le préfet n'était pas tenu de prendre en compte l'éventuel mariage de l'intéressé, au seul motif qu'une fois marié, il aurait pu prétendre à la délivrance d'un titre de séjour en vertu du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant que les conclusions à fin d'annulation présentées par M. X étant rejetées, la présente décision n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par M. X doivent être également rejetées ;
Sur les conclusions à fin de sursis à exécution :
Considérant que la présente décision statue sur la requête n° 08BX02136 de M. X à fin d'annulation du jugement dont il est demandé le sursis à exécution ; que, dès lors, la requête n° 08BX02137 à fin de sursis à exécution du jugement est devenue sans objet ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions des articles 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par l'avocat de M. X ;
DÉCIDE :
Article 1er : L'aide juridictionnelle provisoire est accordée à M. X.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 08BX02137 de M. X.
Article 3 : La requête n° 08BX02136 de M. X est rejetée.
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08BX02136 - 08BX02137