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12/11/2009 | FRANCE | N°08BX01375

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 12 novembre 2009, 08BX01375


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 23 mai 2008 sous le n° 08BX01375, présentée pour l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG dont le siège est 20 avenue du stade de France à Saint-Denis (93200), par la S.E.L.A.R.L. d'avocats Michaud-Ravaut ;

L'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0400117 en date du 20 mars 2008 par lequel le Tribunal administratif de Limoges l'a condamné à verser à Mme Sylvie X et aux consorts Y la somme de 46.500 euros et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Corrèze la somme de 50.883,

43 euros ;

2°) de rejeter la demande présentée par les consorts Y devant le...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 23 mai 2008 sous le n° 08BX01375, présentée pour l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG dont le siège est 20 avenue du stade de France à Saint-Denis (93200), par la S.E.L.A.R.L. d'avocats Michaud-Ravaut ;

L'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0400117 en date du 20 mars 2008 par lequel le Tribunal administratif de Limoges l'a condamné à verser à Mme Sylvie X et aux consorts Y la somme de 46.500 euros et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Corrèze la somme de 50.883,43 euros ;

2°) de rejeter la demande présentée par les consorts Y devant le Tribunal administratif de Limoges, ainsi que les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de la Corrèze ;

.......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 octobre 2009,

- le rapport de M. Lafon, conseiller ;

- les observations de Me Michaud substituant Me Ravaut, avocat de l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG ;

- et les conclusions de M. Zupan, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée aux parties ;

Considérant que Jeanne Y, alors âgée de 51 ans, a été admise le 18 novembre 1987 à la polyclinique Saint-Damien de Tulle pour y subir une hystérectomie ; qu'au cours de cette hospitalisation des produits sanguins lui ont été administrés ; que le 5 mars 1992 une hépatite C était diagnostiquée ; que Jeanne Y est décédée le 30 juin 2003 des suites de cette contamination ; que l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG, venant aux droits du centre départemental de transfusion sanguine de la Corrèze, interjette appel du jugement en date du 20 mars 2008 par lequel le Tribunal administratif de Limoges l'en a déclaré responsable et l'a condamné à verser la somme de 46.500 euros aux ayants-droits de Jeanne Y et la somme de 50.883,43 euros à la caisse primaire d'assurance maladie de la Corrèze ; que les consorts Y sollicitent, par la voie de l'appel incident, une majoration de l'indemnité allouée ;

Considérant qu'aux termes de l'article 102 de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé : En cas de contestation relative à l'imputabilité d'une contamination par le virus de l'hépatite C antérieure à la date d'entrée en vigueur de la présente loi, le demandeur apporte des éléments qui permettent de présumer que cette contamination a pour origine une transfusion de produits sanguins labiles ou une injection de médicaments dérivés du sang. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que cette transfusion ou cette injection n'est pas à l'origine de la contamination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Le doute profite au demandeur. (...) ; qu'il résulte de ces dispositions qu'il appartient au demandeur, non pas seulement de faire état d'une éventualité selon laquelle sa contamination par le virus de l'hépatite C provient d'une transfusion, mais d'apporter un faisceau d'éléments conférant à cette hypothèse, compte tenu de toutes les données disponibles, un degré suffisamment élevé de vraisemblance ; que si tel est le cas, la charge de la preuve contraire repose sur le défendeur ; que ce n'est qu'au stade où le juge, au vu des éléments produits successivement par ces parties, forme sa conviction que le doute profite au demandeur ; que cette présomption légale s'applique à la relation de cause à effet entre une transfusion sanguine et la contamination par le virus de l'hépatite C ultérieurement constatée mais ne concerne pas l'existence même de la transfusion ; qu'il incombe donc au demandeur d'établir l'existence de la transfusion qu'il affirme avoir subie conformément aux règles de droit commun gouvernant la charge de la preuve devant le juge administratif ; que cette preuve peut être apportée par tout moyen et est susceptible de résulter, notamment dans l'hypothèse où les archives de l'hôpital ou du centre de transfusion sanguine ont disparu, de témoignages et d'indices concordants dont les juges du fond apprécient souverainement la valeur ;

Considérant qu'il est constant que Jeanne Y a subi, au cours de son hospitalisation à la polyclinique Saint-Damien de Tulle, plusieurs transfusions sanguines ; que pour admettre la responsabilité de l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG, le Tribunal administratif de Limoges a jugé que si l'enquête transfusionnelle a permis de retrouver neuf donneurs séronégatifs au virus de l'hépatite C, il a été impossible d'enquêter sur six autres produits sanguins également transfusés à Jeanne Y ; qu'il résulte toutefois de plusieurs pièces concordantes, et notamment du rapport de l'expertise ordonnée par le Tribunal de grande instance de Tulle, d'un courrier de la polyclinique Saint-Damien et de plusieurs notes médicales, que si quinze concentrés globulaires ont été commandés et facturés au nom de Jeanne Y, cette dernière n'a effectivement reçu le produit que de neuf lots ; qu'ainsi, et quelle que soit la date précise des transfusions réalisées, il n'est pas démontré, en l'absence de tout document médical ou de tout autre élément de nature à établir l'existence d'autres transfusions sanguines, que les produits de six autres lots lui auraient été effectivement administrés ;

Considérant qu'il résulte de l'enquête transfusionnelle effectuée en 1999 par l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG, et confirmée en 2008, que les neuf donneurs à l'origine des produits sanguins transfusés à Jeanne Y, tous contrôlés par les tests les plus récents, se sont révélés séronégatifs au virus de l'hépatite C ; qu'un complément à cette enquête a par ailleurs permis d'établir l'innocuité de l'ensemble des quinze produits sanguins commandés au nom de Jeanne Y ; qu'ainsi alors même que celle-ci ne présentait aucun antécédent hépatique et n'était exposée à aucun risque particulier de contamination eu égard à son mode d'existence, et compte-tenu de la diversité des modes de transmission de ce virus et du fait que la maladie peut se déclarer plusieurs années après la date effective de la contamination, l'existence d'un lien de causalité entre les transfusions sanguines reçues à l'occasion de l'hospitalisation en 1987 et la contamination de Jeanne Y ne peut être tenue pour établie ; que, dès lors, la responsabilité de l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG ne peut être engagée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de surseoir à statuer dans l'attente d'un arrêt de la Cour d'appel de Limoges, que l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Limoges l'a condamné à verser la somme de 46.500 euros aux ayants-droits de Jeanne Y et la somme de 50.883,43 euros à la caisse primaire d'assurance maladie de la Corrèze ; que, par voie de conséquence, les consorts Y ne sont pas fondés à soutenir, par la voie de l'appel incident, que le Tribunal administratif de Limoges a procédé à une évaluation insuffisante de leurs préjudices ; que la caisse primaire d'assurance maladie de la Corrèze n'est pas plus fondée à réclamer la confirmation du jugement attaqué et la condamnation de l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG à lui verser la somme de 955 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement aux consorts Y et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Corrèze des sommes qu'ils réclament sur leur fondement ;

DECIDE :

Article 1er : Les articles 1, 2, 3 et 5 du jugement en date du 20 mars 2008 du Tribunal administratif de Limoges sont annulés.

Article 2 : La demande des consorts Y et les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de la Corrèze présentées devant le Tribunal administratif de Limoges sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions d'appel incident des consorts Y sont rejetées.

Article 4 : Les conclusions présentées par la caisse primaire d'assurance maladie de la Corrèze devant la Cour sont rejetées.

Article 5 : Les conclusions des consorts Y et de la caisse primaire d'assurance maladie de la Corrèze tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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No 08BX01375


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08BX01375
Date de la décision : 12/11/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LEDUCQ
Rapporteur ?: M. Nicolas LAFON
Rapporteur public ?: M. ZUPAN
Avocat(s) : RAVAUT

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2009-11-12;08bx01375 ?
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