Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 11 juin 2010, présentée pour la SCI DE LA CHAPS, dont le siège est 2 rue de Colombey à Metz (57070), par Me Roth, avocat ;
La SCI DE LA CHAPS demande à la cour :
1°) de réformer le jugement du 13 avril 2010 du Tribunal administratif de Bordeaux, en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 4.419.100 euros avec intérêts de droit à compter du 29 mai 2005 en réparation du préjudice subi du fait de l'inscription, postérieure à la délivrance du permis de construire du 1er septembre 2003, du château Magne à Trélissac (Dordogne) sur l'inventaire supplémentaire des monuments historiques ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 4.419.100 euros avec intérêts de droit à compter du 29 mai 2005 ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 5.000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du patrimoine ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 avril 2011 :
- le rapport de M. Richard, premier conseiller ;
- les observations de Mme Rosier pour le ministre de la culture et de la communication ;
- et les conclusions de M. Gosselin, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée aux parties ;
Considérant que la SCI DE LA CHAPS fait appel du jugement du 13 avril 2010 du Tribunal administratif de Bordeaux, en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 4.419.100 euros avec intérêts de droit à compter du 29 mai 2005 en réparation du préjudice subi du fait de l'inscription, postérieure à la délivrance du permis de construire du 1er septembre 2003, du château Magne à Trélissac sur l'inventaire supplémentaire des monuments historiques ; que l'Etat fait appel incident du même jugement ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant que si la SCI DE LA CHAPS soutient qu'elle n'a pu obtenir la réouverture de l'instruction devant le tribunal administratif, en dépit de la production par le défendeur la veille de la clôture d'un mémoire de 26 pages assorti d'un montage photographique et d'une expertise effectuée par un expert honoraire près la cour d'appel de Bordeaux, ce mémoire ne contenait pas de conclusions et moyens nouveaux ; que, dès lors, les premiers juges n'étaient pas tenus de procéder à la réouverture de l'instruction et au renvoi de l'affaire ; qu'ainsi, le jugement attaqué n'est entaché d'aucune irrégularité ;
Sur les conclusions indemnitaires :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 621-7 du code du patrimoine : A compter du jour où l'autorité administrative notifie au propriétaire une instance de classement au titre des monuments historiques, tous les effets du classement s'appliquent de plein droit à l'immeuble visé. Ils cessent de s'appliquer si la décision de classement n'intervient pas dans les douze mois de cette notification ; qu'aux termes de l'article L. 621-25 du même code : Les immeubles ou parties d'immeubles publics ou privés qui, sans justifier une demande de classement immédiat au titre des monuments historiques, présentent un intérêt d'histoire ou d'art suffisant pour en rendre désirable la préservation peuvent, à toute époque, être inscrits, par décision de l'autorité administrative, sur un inventaire supplémentaire. Peut être également inscrit dans les mêmes conditions tout immeuble nu ou bâti situé dans le champ de visibilité d'un immeuble déjà classé ou inscrit au titre des monuments historiques ; qu'aux termes de l'article L. 621-27 du même code : L'inscription sur l'inventaire supplémentaire des monuments historiques est notifiée aux propriétaires et entraînera pour eux l'obligation de ne procéder à aucune modification de l'immeuble ou partie de l'immeuble inscrit, sans avoir, quatre mois auparavant, avisé l'autorité administrative de leur intention et indiqué les travaux qu'ils se proposent de réaliser. L'autorité administrative ne peut s'opposer auxdits travaux qu'en engageant la procédure de classement au titre des monuments historiques telle qu'elle est prévue par le présent titre. Toutefois, si lesdits travaux avaient pour dessein ou pour effet d'opérer le morcellement ou le dépeçage de l'édifice ou de la partie d'édifice inscrit à l'inventaire dans le seul but de vendre en totalité ou en partie les matériaux ainsi détachés, l'autorité administrative dispose d'un délai de cinq années pour procéder au classement au titre des monuments historiques et peut, en attendant, ordonner qu'il soit sursis aux travaux dont il s'agit ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SCI DE LA CHAPS a acquis, suivant acte notarié reçu le 16 mai 2000, le château Magne sis à Trélissac pour y créer, après adaptation, des logements d'habitation ; qu'après avoir obtenu, le 1er septembre 2003, le permis de construire devant lui permettre la réalisation de cette opération, le château en cause a été placé sous le régime de l'instance de classement par une décision du ministre de la culture et de la communication du 15 décembre 2003 ; que par un arrêté du 29 novembre 2004, le préfet de la région Aquitaine a inscrit cet immeuble en totalité sur l'inventaire supplémentaire des monuments historiques en application des dispositions susmentionnées de l'article L. 621-25 du code du patrimoine ; que la société requérante a finalement vendu son bien le 12 août 2005 ; qu'elle demande l'indemnisation de son préjudice résultant notamment de la perte de patrimoine et de défiscalisation ;
Considérant que l'inscription sur l'inventaire supplémentaire des monuments historiques du château Magne n'a pas par elle-même porté atteinte aux droits acquis par la SCI DE LA CHAPS, y compris les droits acquis du fait de la délivrance le 1er septembre 2003 d'un permis de construire permettant la création par adaptation dans le château de logements, n'a fait peser sur ladite SCI aucune charge spéciale et exorbitante hors de proportion avec les justifications d'intérêt général tenant à la nécessaire protection du château et n'a pas eu par elle-même pour conséquence d'imposer à ladite société de renoncer à son projet de logements locatifs et de vendre son bien ; que, dans ces conditions, il n'existe aucun lien de causalité entre la décision d'inscription sur l'inventaire supplémentaire des monuments historiques du château Magne et le préjudice allégué par la société requérante ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de sa demande devant le Tribunal administratif de Bordeaux, que la SCI DE LA CHAPS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 13 avril 2010, le Tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 4.419.100 euros avec intérêts de droit à compter du 29 mai 2005 en réparation du préjudice subi du fait de l'inscription, postérieure à la délivrance du permis de construire du 1er septembre 2003, du château Magne à Trélissac sur l'inventaire supplémentaire des monuments historiques ; qu'en revanche, le ministre de la culture et de la communication est fondé à demander, par la voie de l'appel incident, l'annulation du même jugement en tant qu'il a condamné l'Etat à verser à la SCI DE LA CHAPS la somme de 2.000 euros en réparation de son préjudice moral ;
Sur les conclusions tendant à la suppression de passages injurieux :
Considérant que, par jugement du 13 avril 2010 du Tribunal administratif de Bordeaux, les passages du mémoire de la SCI DE LA CHAPS enregistré le 7 novembre 2007 commençant par En effet, compte tenu des responsabilités et se terminant par iconoclaste (page 5), et commençant par Ce n'est donc manifestement pas et se terminant par mieux introduits (page 8), ont été regardés comme présentant un caractère injurieux et outrageant ; que, par suite, le tribunal administratif a prononcé leur suppression ; que, dès lors, les conclusions présentées en appel tendant à la suppression de ces mêmes passages sont sans objet ; qu'il n'y a pas lieu d'y statuer ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à la SCI DE LA CHAPS la somme qu'elle demande au titre des frais exposés non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'affaire, de condamner la SCI DE LA CHAPS à verser à l'Etat la somme qu'il demande sur le même fondement ;
DECIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions du ministre de la culture et de la communication et du préfet de la Gironde tendant à la suppression de passages injurieux.
Article 2 : L'article 1er du jugement du 13 avril 2010 du Tribunal administratif de Bordeaux est annulé.
Article 3 : La requête de la SCI DE LA CHAPS et la demande de la SCI DE LA CHAPS devant le Tribunal administratif de Bordeaux sont rejetées.
Article 4 : Les conclusions du préfet de la région Aquitaine tendant à la condamnation de la SCI DE LA CHAPS à verser à l'Etat une somme en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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No 10BX01400