Vu la requête, enregistrée le 26 juillet 2010, présentée pour M. Fouad A alias B, demeurant au centre de rétention à Le Lamentin (97232), par Me Germany ;
M. Fouad A alias B, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n°1000394 en date du 19 juin 2010 par lequel le tribunal administratif de Fort-de-France a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral en date du 16 juin 2010 par lequel le préfet de la région Martinique a décidé sa reconduite à la frontière et la décision du même jour fixant le pays de destination de la reconduite ;
2°) d'annuler ledit arrêté ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 avril 2011 :
- le rapport de Mme Flecher-Bourjol, président-rapporteur,
- et les conclusions de M. Vié, rapporteur public ;
Considérant que M. A ressortissant jordanien, né le 23 octobre 1981 à Zarqua (Jordanie), fait appel du jugement en date du 19 juin 2010 par lequel le tribunal administratif de Fort-de-France a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral en date du 16 juin 2010 par lequel le préfet de la région Martinique a décidé sa reconduite à la frontière et la décision du même jour fixant le pays de destination de la reconduite ;
Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, de nationalité jordanienne, a fait l'objet d'une mesure de reconduite exécutée le 5 mars 2008, qu'il est revenu sur le territoire français sous l'identité de Fuad B, de nationalité palestinienne sous couvert d'un visa touristique d'une durée de validité de 20 jours, prorogé pour un mois le 1er octobre 2008 ; qu'il s'est maintenu sur le territoire au-delà de la date de validité de son visa ; que, dans ces conditions, le requérant qui est entré en France sous un faux nom ne peut justifier d'une entrée régulière sur le territoire français ; qu'ainsi, il entrait dans le champ d'application des dispositions précitées du 1° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui permettent au préfet de décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Sur la légalité de la reconduite à la frontière :
Considérant, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ;
Considérant que si M. A fait valoir qu'il est entré en France pour la première fois en 1997 et que le centre de ses attaches familiales et personnelles se situe désormais en Martinique où résident ses enfants, son épouse ressortissante française ainsi que son père et son frère, il n'apporte pas d'éléments probants établissant la réalité de la communauté de vie avec sa présumée deuxième épouse et qu'il contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de ses quatre enfants ; qu'en revanche, le requérant n'établit pas être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine ; que l'intéressé a fait l'objet de nombreuses condamnations pénales notamment pour des faits de détention d'armes, d'abus de l'ignorance ou de la faiblesse d'une personne vulnérable pour l'obliger à un acte ou une abstention néfaste, de vol facilité par l'état d'une personne facilement vulnérable, de contrefaçon ou falsification de chèque, de vol aggravé et usage de chèques contrefait ou falsifié, de bigamie et infraction à la législation sur les étrangers ; que ces faits graves et répétés révèlent, outre le trouble à l'ordre public une absence d'intégration à la société française ; que dans les circonstances de l'espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier que, compte tenu notamment de la durée et des conditions de son séjour en France, le préfet de la Martinique ait porté au droit de l'intéressé au respect de la vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a pris l'arrêté attaqué ; que, dès lors, M. A n'est pas fondé à prétendre que le préfet aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Fort-de-France a rejeté sa demande ;
Sur la décision fixant la Jordanie comme pays de renvoi :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'étranger qui est obligé de quitter le territoire français ou qui doit être reconduit à la frontière est éloigné : 1o A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; 2° Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; 3o Ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. A est né à Zarqua en Jordanie et est entré en France sous couvert d'un passeport jordanien ; qu'il a été reconduit en Jordanie le 5 mars 2008, suite à un refus de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français en date du 22 juin 2007 ; que la circonstance qu'il serait revenu en France sous l'identité de Fouad B muni d'un passeport palestinien ne saurait établir qu'il n'est pas de nationalité jordanienne ; qu'en tout état de cause il ne soutient pas qu'en étant reconduit en Jordanie il serait empêché de rejoindre la Palestine dont il se prétend ressortissant ; que, par suite, l'intéressé ne saurait fonder ses conclusions, dirigées contre la décision fixant la Jordanie comme pays à destination duquel il doit être reconduit, sur la circonstance qu'il ne serait pas un ressortissant jordanien ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ;
Considérant que si M. A soutient qu'il court des risques en cas de retour dans son pays d'origine, il résulte des pièces du dossier qu'il n'apporte aucun élément donnant corps à un risque d'être exposé à des peines ou traitements contraires à l'article précité, risques dont l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile n'ont d'ailleurs pas reconnu l'existence ; que, dès lors, ce moyen ne peut qu'être écarté ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Fort-de-France a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
Considérant que le présent arrêt, par lequel la cour rejette les conclusions de M. A tendant à l'annulation de l'arrêté attaqué, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions aux fins d'injonction présentées par l'intéressé doivent également être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande M. A au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
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N°10BX01870