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24/11/2011 | FRANCE | N°11BX00344

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 24 novembre 2011, 11BX00344


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 4 février 2011 sous le n° 11BX00344, présentée pour M. François, Marie Daniel A et Mme Marie-Thérèse B épouse A, demeurant à ..., par Me Fribourg, avocat ;

M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°0804506 du 13 janvier 2011 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision du 12 août 2008 par laquelle le ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire a refusé de réduire de 3,2

5 mètres à 1,50 mètre l'assiette de la servitude de marchepied qui grève les parcel...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 4 février 2011 sous le n° 11BX00344, présentée pour M. François, Marie Daniel A et Mme Marie-Thérèse B épouse A, demeurant à ..., par Me Fribourg, avocat ;

M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°0804506 du 13 janvier 2011 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision du 12 août 2008 par laquelle le ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire a refusé de réduire de 3,25 mètres à 1,50 mètre l'assiette de la servitude de marchepied qui grève les parcelles cadastrées ZA n° 183, 300 et 302 leur appartenant situées sur le territoire de la commune de Saint Sulpice de Faleyrens ;

2°) d'annuler la décision attaquée ;

3°) d'enjoindre à l'administration de réduire à 1,50 mètre l'assiette de la servitude de marchepied qui grève leur propriété, sous astreinte dont la juridiction fixera le montant et les modalités de paiement ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1.500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le premier protocole additionnel à cette convention ;

Vu le code général de la propriété des personnes publiques, modifié par la loi n° 2006-1772 du 30 décembre 2006 sur l'eau et les milieux aquatiques ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 octobre 2011 :

- le rapport de M. Péano, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Katz, rapporteur public ;

Considérant que M. et Mme A relèvent appel du jugement n° 0804506 du 13 janvier 2011 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision du 12 août 2008 par laquelle le ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire a refusé de réduire de 3,25 mètres à 1,50 mètre l'assiette de la servitude de marchepied qui grève les parcelles cadastrées ZA n° 183, 300 et 302 leur appartenant situées en bordure de la Dordogne sur le territoire de la commune de Saint Sulpice de Faleyrens ;

Considérant d'une part, qu'aux termes de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. / Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général.. " ; que si les stipulations précitées ont pour objet d'assurer un juste équilibre entre l'intérêt général et les impératifs de sauvegarde du droit de propriété, elles laissent aux autorités publiques une marge d'appréciation tant pour choisir les modalités de mise en oeuvre d'une protection du domaine public fluvial et d'une politique d'aménagement et de mise en valeur de ce dernier, que pour juger si leurs conséquences se trouvent légitimées, dans l'intérêt général, par le souci d'atteindre les objectifs poursuivis ;

Considérant d'autre part, qu'aux termes de L. 2131-2 du code général de la propriété des personnes publiques, dans la rédaction issue de la loi du 30 décembre 2006 sur l'eau et les milieux aquatiques applicable à la date de la décision attaquée : " Les propriétaires riverains d'un cours d'eau ou d'un lac domanial ne peuvent planter d'arbres ni se clore par haies ou autrement qu'à une distance de 3,25 mètres. Leurs propriétés sont grevées sur chaque rive de cette dernière servitude de 3,25 mètres, dite servitude de marchepied. Tout propriétaire, locataire, fermier ou titulaire d'un droit réel, riverain d'un cours d'eau ou d'un lac domanial est tenu de laisser les terrains grevés de cette servitude de marchepied à l'usage du gestionnaire de ce cours d'eau ou de ce lac, des pêcheurs et des piétons. La responsabilité civile des riverains visés au deuxième alinéa ne peut être engagée au titre des dommages causés ou subis à l'occasion du passage des pêcheurs ou des piétons qu'en raison de leurs actes fautifs (...) ; qu'aux termes de l'article L. 2131-3 du même code : " Lorsque l'exercice de la pêche, le passage des piétons et les nécessités d'entretien et de surveillance du cours d'eau ou du lac le permettent, la distance de 3,25 mètres mentionnée à l'article L. 2131-2 pour la servitude de marchepied peut être exceptionnellement réduite, sur décision de l'autorité gestionnaire, jusqu'à 1,50 mètre " ;

Considérant que, compte tenu notamment de la nécessité de faire respecter les règles applicables en matière d'aménagement du territoire et de protection de l'environnement, particulièrement pour organiser l'accès du public, la servitude de marchepied, régie par l'article L. 2131-2 du code général de la propriété des personnes publiques, dans sa rédaction issue de l'article 2 de la loi n° 2006-1772 du 30 décembre 2006 sur l'eau et les milieux aquatiques désignant les piétons comme étant au nombre des bénéficiaires de la servitude, n'entraîne, pour les propriétaires des biens ainsi grevés, aucune charge hors de proportion avec l'objectif d'intérêt général poursuivi ; que, par suite, l'article L. 2131-2 du code général de la propriété des personnes publiques dans la rédaction issue de la loi du 30 décembre 2006, ne peut être regardé comme étant incompatible avec les stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il appartient toutefois à la Cour de rechercher si, en refusant de réduire l'ampleur de la servitude dont l'usage a été ouvert à un nombre plus important de personnes postérieurement à l'acquisition de la propriété des requérants, l'autorité domaniale a porté en l'espèce une atteinte disproportionnée au droit de propriété de M et Mme C ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. et Mme C ont édifié en 2005 sur la propriété qu'ils ont acquise en 2002 une piscine implantée en limite de la servitude, et ont édifié en 2006, sans requérir l'autorisation prévue par le code de l'urbanisme, une clôture qui empiète sur le terrain grevé de servitude ; que le passage laissé aux piétons et aux engins nécessaires pour entretenir les berges de la Dordogne sur les parcelles cadastrées ZA n° 183, 300 et 302 appartenant à M. et Mme A est délicat et que la présence des aménagements qu'ils ont édifiés à proximité fragilise ces berges ; que, par suite, la décision du 12 août 2008 refusant pour ce motif une réduction de la servitude de marchepied qui, au regard de la configuration des lieux, s'avérerait dangereuse, n'est entachée d'aucune erreur d'appréciation et ne méconnaît ni l'article 1er du premier protocole annexé à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions précitées du code général de la propriété des personnes publiques ;

Considérant qu'au soutien du moyen déjà soulevé en première instance tiré de ce que le signataire de la décision attaquée n'aurait pas bénéficié d'une délégation régulière, les requérants ne se prévalent devant la Cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le tribunal administratif ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, M. et Mme A ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande ; que, par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction et celles présentées par M. et Mme A tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme A est rejetée.

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No 11BX00344


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11BX00344
Date de la décision : 24/11/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

ACTES LÉGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - DIFFÉRENTES CATÉGORIES D'ACTES - ACTES ADMINISTRATIFS - NOTION - ACTES À CARACTÈRE DE DÉCISION - ACTES PRÉSENTANT CE CARACTÈRE - EXTENSION DE LA SERVITUDE DE MARCHEPIED AUX PIÉTONS : CONVENTIONNALITÉ.

01-01-05-02-01 L'article 2 de la loi n° 2006-1772 du 30 décembre 2006 sur l'eau et les milieux aquatiques a désigné les piétons comme étant au nombre des bénéficiaires de la servitude de marchepied, régie par l'article L. 2131-2 du code général de la propriété des personnes publiques. Compte tenu notamment de la nécessité de faire respecter les règles applicables en matière d'aménagement du territoire et de protection de l'environnement, particulièrement pour organiser l'accès du public, l'article 2 de la loi du 30 décembre 2006 étendant le bénéfice de la servitude de marchepied aux piétons n'entraîne, pour les propriétaires des biens riverains des cours d'eau domaniaux, aucune charge hors de proportion avec l'objectif d'intérêt général poursuivi et ne peut, par suite, être regardé comme étant incompatible avec les stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales protégeant le droit de propriété. Eu égard au caractère dangereux des lieux, le refus de réduire la servitude de marchepied grevant une propriété riveraine d'un cours d'eau domanial n'est entaché d'aucune erreur d'appréciation et ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de propriété garanti par l'article 1er du premier protocole annexé à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, alors même que le bénéfice de la servitude a été ouvert à un nombre plus important de personnes postérieurement à l'acquisition du terrain.

DROITS CIVILS ET INDIVIDUELS - DROIT DE PROPRIÉTÉ - SERVITUDES - INSTITUTION DES SERVITUDES.

26-04-01-01-05

DROITS CIVILS ET INDIVIDUELS - CONVENTION EUROPÉENNE DES DROITS DE L'HOMME - DROITS GARANTIS PAR LES PROTOCOLES - DROIT AU RESPECT DE SES BIENS (ART - 1ER DU PREMIER PROTOCOLE ADDITIONNEL).

26-055-02-01


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. Didier PEANO
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : FRIBOURG

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2011-11-24;11bx00344 ?
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