Vu, I) la requête, enregistrée le 11 février 2011, présentée pour la SARL JUDE FRERES, ayant son siège Lieu dit Lonclement à La Roche Chalais (24490), représentée par son gérant en exercice, par Me Thomas, avocat ;
La SARL JUDE FRERES demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0702108 du 2 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux l'a, d'une part, condamnée solidairement avec la Sarl Sol Hydro Environnement à verser à la commune de La Roche-Chalais la somme de 403 052 euros au titre de travaux de reprise réalisés en exécution d'un marché de maîtrise d'oeuvre pour la réalisation d'un nouvel ouvrage de captage d'eaux souterraines, et la somme de 12 900,48 euros au titre des frais d'expertise et a d'autre part, condamné la Sarl Sol Hydro Environnement à la garantir à hauteur de 10 % des condamnations mises à sa charge ;
2°) de retenir la responsabilité de la Sarl Sol Hydro Environnement et de la condamner à la garantir à hauteur de 50 % des conséquences dommageables laissées à la charge des entreprises ;
3°) de retenir la responsabilité de la commune et de prononcer un partage de la responsabilité entre elle, la commune et la Sarl Sol Hydro ;
4°) de mettre à la charge de la Sarl Sol Hydro et de la commune de La Roche-Chalais la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu, II) la requête, enregistrée au greffe de la cour le 11 février 2011, présentée pour la SOCIETE JUDE FRERES, ayant son siège lieu dit Lonclement à La Roche Chalais (24490), représentée par son gérant en exercice, par Me Thomas, avocat ;
La SARL JUDE FRERES demande à la cour :
1°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement du 2 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux l'a, d'une part, condamnée solidairement avec la Sarl Sol Hydro à verser à la commune de La Roche-Chalais la somme de 403 052 euros au titre de travaux de reprise réalisés en exécution d'un marché de maîtrise d'oeuvre pour la réalisation d'un nouvel ouvrage de captage d'eaux souterraines, et la somme de 12 900,48 euros au titre des frais d'expertise et a d'autre part, condamné la Sarl Sol Hydro Environnement à la garantir à hauteur de 10 % des condamnations mises à sa charge ;
2°) de condamner la commune de la Roche-Chalais et la société Sol Hydro Environnement à lui payer la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu les ordonnances fixant en dernier lieu les clôtures d'instruction au 05 décembre 2011 et 08 juillet 2011 à 12h00 ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le décret n° 93-1268 du 29 novembre 1993 relatif aux missions de maîtrise d'oeuvre ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 mars 2012:
- le rapport de M. Antoine Bec, président assesseur ;
- les conclusions de M. Olivier Gosselin, rapporteur public ;
- les observations de Me Novo avocat de la commune de la Roche-Chalais et de
Me Grand avocat de la Sarl Sol Hydro Environnement ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 17 avril 2012, produite pour la Sarl Sol Hydro Environnement ;
Considérant que les requêtes n° 11BX00421 et 11BX00422 sont dirigées contre un même jugement du tribunal administratif de Bordeaux ; qu'elles ont suivi une instruction commune et présentent à juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu par suite de les joindre pour y statuer par un même arrêt ;
Considérant que la SARL JUDE FRERES demande à la cour d'annuler le jugement du 2 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux l'a condamnée solidairement avec la Sarl Sol Hydro Environnement à verser à la commune de La Roche-Chalais la somme de 403 052 euros au titre de travaux de reprise, et à garantir la Sarl Sol Hydro à hauteur de 10 % des condamnations prononcées à son encontre ;
Considérant que, par deux marchés distincts, la commune de La Roche-Chalais a confié à la Sarl Sol Hydro Environnement l'étude d'un ouvrage de captage d'eaux souterraines et à la SARL JUDE FRERES les travaux de reconnaissance hydrogéologique et de réalisation du forage ; que le montant de ce dernier marché, qui s'élevait initialement à 310 480,45 euros HT, a été porté à 351 278, 80 euros HT par avenant du 8 décembre 2004, la SARL JUDE FRERES ayant préconisé le remplacement du tubage en PVC par un tubage en acier inoxydable, et ayant réclamé de réaliser le cimentage annulaire du forage, que le maître d'oeuvre avait prévu de confier à une société spécialisée ; que la SARL JUDE FRERES demande que la responsabilité de la Sarl Sol Hydro Environnement soit portée à 50% du préjudice, et qu'elle soit condamnée à la garantir intégralement, ou subsidiairement à hauteur de 10% ; que, par la voie de l'appel, incident, la commune de La Roche-Chalais demande que la condamnation solidaire de la SARL JUDE FRERES et de la Sarl Sol Hydro Environnement soit portée à 745 706 euros TTC au titre des dépenses liées aux travaux de reprise de l'ouvrage, et à 185 667 euros TTC, au titre de la réparation des préjudices subis en raison de la mauvaise exécution du marché ; que, par la voie de l'appel incident, la Sarl Sol Hydro Environnement demande à être relevée indemne de toute condamnation ;
Sur les conclusions à fin d'indemnisation :
Sur la responsabilité :
Considérant qu'à la suite du déroulement défectueux de la cimentation annulaire du tube de forage et de captage des eaux souterraines, réalisée le 14 avril 2005, le chantier a dû être interrompu avant la réception des travaux ; que, dans ces conditions, les désordres dont la commune de La Roche-Chalais demande réparation engagent la seule responsabilité contractuelle des intervenants au marché ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport de l'expert désigné par le tribunal, que l'envahissement du tube de forage, sur une hauteur de 80 m, par le laitier de ciment destiné à assurer son étanchéité et sa protection extérieure résulte, d'une part, de l'absence de connexion des cannes d'injection au sabot anti refoulement positionné à l'extrémité inférieure du tube et d'autre part, du défaut d'étanchéité du tube de forage à l'origine de la vidange partielle de la colonne d'eau destinée à le pressuriser ; qu'à l'issue des opérations de cimentation, les cannes d'injection sont restées prises dans le ciment et n'ont pu être retirées ; que c'est à la SARL JUDE FRERES qu'il appartenait de raccorder les cannes d'injection au sabot de cimentation, conformément à l'article 11-1 du cahier des clauses techniques générales applicables au marché, et d'assurer le vissage des tubes filetés selon les règles de l'art préconisées par le fabricant, afin de garantir leur étanchéité ; que les manquements de la SARL JUDE FRERES à ses obligations contractuelles est de nature à engager sa responsabilité à l'égard de la commune ; que la SARL JUDE FRERES ne saurait s'exonérer, même partiellement, de sa responsabilité à l'égard du maître de l'ouvrage en faisant valoir que la commune aurait entendu limiter abusivement le coût du forage, alors que la commune a accepté les modifications du marché demandées par la SARL JUDE FRERES et d'en supporter le coût supplémentaire ;
Considérant, en deuxième lieu, que la Sarl Sol Hydro Environnement, à qui incombait, en application de l'article 1-6 du cahier des clauses administratives particulières et de l'article 7 des spécifications techniques détaillées, la direction des travaux et le pilotage du chantier, devait s'assurer, conformément au 6 de l'annexe III de l'arrêté du 21 décembre 1993, que l'exécution des travaux était conforme aux prescriptions du marché ; que ni le serrage des tubes, qui devait être effectué conformément aux indications du fabricant, ni la cimentation, qui devait être effectuée selon un procédé classique et était détaillée aux articles 11-1 à 11-10 de l'avenant n°1, ne nécessitaient la formalisation d'un processus particulier, qui relevait des règles de l'art dont la SARL JUDE FRERES revendiquait la maîtrise ; que, de même, la connexion du sabot de cimentation aux cannes d'injection constituait pour l'entreprise une obligation prévue par l'arrêté interministériel du 11 septembre 2003 et la norme NF X10-999 ; qu'il n'est pas contesté que, le 14 avril 2005, la SARL JUDE FRERES a avancé le début des opérations de cimentation, ce qui a fait obstacle à la vérification par la Sarl Sol Hydro Environnement des dispositions prises pour la réalisation de cette phase cruciale des travaux ; que le représentant de la Sarl Sol Hydro Environnement, qui est resté jusqu'à la fin de la cimentation, n'avait pas à superviser les opérations de retrait des cannes d'injection, qui n'auraient présenté aucune difficulté si la SARL JUDE FRERES n'avait pas multiplié les erreurs qui ont rendu ce retrait impossible dès la fin des opérations d'injection ; que la Sarl Sol Hydro Environnement ne saurait, dans ces conditions, être regardée comme ayant méconnu l'étendue de ses obligations contractuelles tant à l'égard de la SARL JUDE FRERES que de la commune de La Roche Chalais ; que les conclusions de la SARL JUDE FRERES tendant à l'augmentation de la part de responsabilité laissée à la charge de la Sarl Sol Hydro Environnement, et au partage de responsabilité avec la commune de la Roche-Chalais doivent par suite être rejetées ;
Sur l'appel incident de la Sarl Sol Hydro Environnement :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la Sarl Sol Hydro Environnement n'a pas commis de faute de conception, de direction ou de surveillance du marché ; que c'est sur les instructions de la commune qu'elle a rédigé les avenants au marché relatifs à la modification des tuyaux et à la réalisation de la cimentation ; qu'elle est, par suite, fondée à demander à être relevée indemne de toute condamnation solidaire au profit de la commune, et de toute garantie au profit de la SARL JUDE FRERES ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SARL JUDE FRERES n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux l'a condamnée à réparer le préjudice causé à la commune de La Roche-Chalais ;
Sur le préjudice :
En ce qui concerne les travaux de reprise de l'ouvrage :
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert désigné par le président du tribunal administratif, que la solution techniquement et économiquement la plus appropriée consiste à récupérer le forage après sectionnement et retrait des cannes d'injection, fraisage et décapage du tube et achèvement de la cimentation annulaire à partir de la partie supérieure de l'ouvrage ; que l'expert remet à une inspection par camera le soin de déterminer si, à l'issue des opérations de fraisage, les parois ont été ou non détériorées ; que dans ces conditions, l'opération de fraisage ne peut être regardée comme impliquant nécessairement le chemisage du tube de forage ; que les conclusions de la commune de La Roche-Chalais tendant à ce que la condamnation prononcée à l'encontre de la SARL JUDE FRERES soit portée à la somme de 623 500 euros HT pour inclure les travaux de chemisage doivent, par suite, être rejetées ;
En ce qui concerne les autres préjudices dont la commune demande réparation :
Considérant que, si la commune de La Roche-Chalais fait valoir qu'elle n'a pas pu réceptionner le captage à la date prévue, qu'elle a dû recourir à des installations de pompage dans la Dronne pour l'alimentation de la population en eau potable, et qu'elle se trouverait exposée aux frais inhérents à la passation d'un nouveau marché de travaux pour la réalisation des travaux de reprise, elle ne justifie ces préjudices supplémentaires ni dans leur existence ni dans leur montant ; qu'enfin, eu égard aux incertitudes sur le vieillissement de l'installation, il n'est pas établi qu'un chemisage pourrait se révéler dans le futur nécessaire à la prolongation de la durée d'exploitation du captage ; qu'ainsi la commune n'établit pas que le caractère prématuré de ce chemisage réduirait la durée de vie de l'ouvrage ; que les conclusions à fin d'indemnisation de ces divers préjudices doivent par suite être rejetés ;
Sur les conclusions à fin de sursis :
Considérant que par le présent arrêt, la cour statue sur la requête de la SARL JUDE FRERES et sur les conclusions de la Sarl Sol Hydro Environnement ; que, par suite, il n'y a pas lieu de statuer sur leurs conclusions à fin de sursis à exécution du jugement attaqué ;
Sur le bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de La Roche-Chalais et la Sarl Sol Hydro Environnement, qui ne sont pas dans la présente instance les parties perdantes, soit condamnées à payer à la SARL JUDE FRERES une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la SARL JUDE FRERES à verser à la commune de La Roche-Chalais et à la Sarl Sol Hydro Environnement, chacune, la somme de 1 500 euros sur le fondement des mêmes dispositions ;
DECIDE
Article 1er : L'article 3 du jugement du tribunal administratif de Bordeaux est annulé.
Article 2 : La requête de la SARL JUDE FRERES et les conclusions de la commune de La Roche-Chalais sont rejetées.
Article 3 : La SARL JUDE FRERES versera la somme de 1 500 euros respectivement à la commune de La Roche-Chalais et à la Sarl Sol Hydro Environnement au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête de la SARL JUDE FRERES tendant au sursis à exécution du jugement attaqué.
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Nos 11BX00421, 11BX00422