Vu la requête enregistrée sous forme de télécopie le 11 mai 2012 et régularisée par courrier le 21 mai 2012 présentée pour Mme Marcilène X demeurant chez M. Y ..., par Me Germany ;
Mme X demande à la cour :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 1200182 en date du 10 avril 2012 par laquelle le président du tribunal administratif de Fort-de-France a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté, en date du 17 janvier 2012, par lequel le préfet de la région Martinique lui a enjoint de quitter le territoire français dans les trente jours, d'autre part, la décision du même jour ayant fixé le pays de renvoi ;
2°) de faire droit à sa demande ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Martinique de lui délivrer un titre de séjour provisoire ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 novembre 2012 :
- le rapport de Mme Florence Demurger, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Olivier Gosselin, rapporteur public ;
1. Considérant que Mme X, de nationalité haïtienne, est entrée irrégulièrement en Martinique, le 22 novembre 2007, selon ses déclarations ; que, le 11 août 2008, sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ; que l'intéressée a alors fait l'objet d'un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français, par arrêté du 26 septembre 2008 ; qu'elle a déposé le 1er avril 2009 une demande de titre de séjour en qualité de parent d'enfant français ; que, par arrêté du 17 janvier 2012, le préfet de la région Martinique lui a enjoint de quitter le territoire français dans les trente jours et a fixé le pays de renvoi ; que Mme X interjette régulièrement appel de l'ordonnance par laquelle le président du tribunal administratif de Fort-de-France a, sur le fondement des dispositions de l'article R. 221-1 du code de justice administrative, rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents de tribunal administratif (...) peuvent, par ordonnance : (...) 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé (...) " ;
En ce qui concerne la légalité externe :
3. Considérant qu'il ressort des motifs de son ordonnance que le président du tribunal administratif de Fort-de-France, après avoir relevé que le signataire de l'arrêté attaqué bénéficiait d'une délégation de signature régulièrement publiée, a jugé que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté litigieux était manifestement infondé ; qu'en appel, Mme X se borne à reprendre le moyen de légalité externe soulevé en première instance sans critiquer l'ordonnance attaquée ;
En ce qui concerne la légalité interne :
4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger (...) qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui- ci ou depuis au moins deux ans (...) " et qu'aux termes de l'article L. 623-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le fait de contracter un mariage ou de reconnaître un enfant aux seules fins d'obtenir, ou de faire obtenir, un titre de séjour ou le bénéfice d'une protection contre l'éloignement, ou aux seules fins d'acquérir, ou de faire acquérir, la nationalité française est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende. Ces peines sont également encourues lorsque l'étranger qui a contracté mariage a dissimulé ses intentions à son conjoint. / Ces mêmes peines sont applicables en cas d'organisation ou de tentative d'organisation d'un mariage ou d'une reconnaissance d'enfant aux mêmes fins. / Elles sont portées à dix ans d'emprisonnement et à 750 000 euros d'amende lorsque l'infraction est commise en bande organisée. " ;
5. Considérant que, si un acte de droit privé opposable aux tiers est en principe opposable dans les mêmes conditions à l'administration tant qu'il n'a pas été déclaré nul par le juge judiciaire, il appartient cependant à l'administration, lorsque se révèle une fraude commise en vue d'obtenir l'application de dispositions de droit public, d'y faire échec même dans le cas où cette fraude revêt la forme d'un acte de droit privé ; que ce principe peut conduire l'administration, qui doit exercer ces compétences sans pouvoir renvoyer une question préjudicielle à l'autorité judiciaire, à ne pas tenir compte, dans l'exercice desdites compétences, d'actes de droit privé opposables aux tiers ; que tel est le cas pour la mise en oeuvre de l'article L. 313-11, 6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui n'a pas entendu écarter l'application des principes ci-dessus rappelés ; que, dès lors, si la reconnaissance d'un enfant par un ressortissant français est opposable aux tiers et s'impose donc en principe à l'administration tant qu'elle n'a pas été annulée par le juge judiciaire, il appartient néanmoins au préfet, s'il est établi de façon certaine lors de l'examen d'une demande présentée sur le fondement de l'article L. 313-11, 6°, que la reconnaissance d'un enfant est intervenue dans le but exclusif d'obtenir un titre de séjour, de faire échec à cette fraude et de refuser à l'intéressé, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, le titre de séjour ;
6. Considérant que, pour rejeter le moyen tiré de ce que le préfet de la Martinique n'aurait pas tenu compte de la reconnaissance de l'enfant de Mme X par un ressortissant français, le président du tribunal administratif de Fort-de-France a ainsi motivé sa décision :
" Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'enfant de Mme X, Rachelle Z née le 2 septembre 2008, a été reconnue par M. Frédéric Z, de nationalité française, le 17 juin 2008 ; que M. Z a reconnu le 20 octobre 2010, dans le cadre d'une enquête relative à des reconnaissances frauduleuses d'enfants, avoir reconnu Rachelle Z dans le but exclusif de permettre à la mère de l'enfant d'obtenir un titre de séjour ; que Mme X a confirmé que M. Z n'était pas le père de son enfant dans des déclarations faites à la police les 20 octobre 2010 et 12 janvier 2012 ; que, dans ces conditions, le moyen de la requête tiré de ce que le préfet de la région Martinique devait tenir compte de la reconnaissance susmentionnée de l'enfant de la requérante, n'est assorti que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien " ;
7. Considérant qu'en appel, Mme X se borne à reprendre son argumentation de première instance, sans apporter d'élément de nature à remettre en cause les motifs par lesquels le tribunal administratif a estimé, à bon droit, que le moyen qu'elle lui avait soumis n'était pas assorti de faits susceptibles de venir à leur soutien ; qu'il y a lieu, dès lors, par adoption des motifs retenus par le tribunal, d'écarter ledit moyen ;
8. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; que l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ;
9. Considérant qu'après avoir relevé que Mme X, née en 1972, était entrée irrégulièrement sur le territoire français, avait quatre enfants qui résidaient toujours en Haïti et que l'intéressée ne démontrait pas être dans l'impossibilité d'emmener avec elle son dernier enfant, le président du tribunal administratif de Fort-de-France a jugé que les moyens soulevés par l'intéressée, tirés de ce que l'arrêté attaqué avait été pris en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des 6° et 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'étaient assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ; qu'en se bornant à soutenir qu'il lui serait difficile d'être séparée de son enfant et qu'elle entretient des liens amicaux avec plusieurs personnes résidant en Martinique, Mme X ne critique pas utilement l'ordonnance attaquée ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée prise sur le fondement des dispositions précitées de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, le président du tribunal administratif de Fort-de-France a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
11. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté litigieux, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions à fin d'injonction présentées par Mme X ne peuvent être accueillies ;
Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :
12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à verser à Mme X la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme X est rejetée.
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No 12BX01214