Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 11 mai 2011 et 5 août 2011, présentés pour M. A...C..., demeurant..., par MeB... ;
M. C...demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n°0803061 du 9 février 2011 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la communauté urbaine de Bordeaux à lui verser la somme de 89 005,16 euros en réparation du préjudice subi du fait des travaux de réalisation de la ligne C du tramway ;
2°) de condamner la communauté urbaine de Bordeaux à lui verser, en réparation du préjudice économique ayant résulté pour lui des travaux de réalisation de la ligne C du tramway, la somme de 29 005,16 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 23 juillet 2008 et de la capitalisation de ces intérêts au 7 janvier 2010 ;
3°) de mettre à la charge de la communauté urbaine de Bordeaux le versement de la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- le jugement est entaché d'irrégularités au regard du code de justice administrative ;
- le jugement est entaché d'une erreur sur la matérialité des faits quant à la date de début des travaux autour de son immeuble ;
- les travaux d'extension de la ligne C ont débuté entre le milieu et la fin de l'année 2004 et étaient en cours d'exécution autour de son immeuble en février 2005 ;
- il a effectué des démarches en vue de relouer ses locaux après août 2004, mais elles n'ont pu aboutir ; son bien était attrayant en 2001 et a fait l'objet de demandes pour être louées jusqu'au milieu de 2004 ;
- la circonstance que le local est resté inoccupé de décembre 1999 à septembre 2001 est sans incidence sur le dommage subi ;
- le lien de causalité entre les travaux de réalisation du tramway et l'absence de location du local est certain ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense enregistré le 6 janvier 2012 présenté pour la communauté urbaine de Bordeaux, représentée son président en exercice, par Me Raux, qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de M. C...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- le requérant se contredit en demandant à la fois la reprise intégrale de ses écritures de première instance et la condamnation de la communauté urbaine de Bordeaux à lui verser la somme de 29 005,16 euros, ce qui implique renonciation à réclamer une indemnisation du préjudice résultant de la perte d'accès automobile ;
- la reprise intégrale par M. C...de ses conclusions indemnitaires de première instance est irrecevable en ce qu'il n'est pas propriétaire des garages pour lesquels il demande l'indemnisation de la perte d'accès ;
- le lien de causalité entre le dommage invoqué et les travaux de réalisation du tramway n'est pas démontré ; le requérant n'apporte aucun commencement de preuve de ce que les travaux ou leur perspective aurait conduit son locataire à interrompre son bail ; le locataire est parti en août 2004 alors que le 15 février 2005 les travaux des réseaux souterrains venaient de commencer dans le quartier et que les travaux n'avaient pas débuté autour de l'immeuble ; l'existence de deux demandes de location en 2001 ne peut suffire à démonter l'existence d'un préjudice lié à la survenance des travaux alors qu'en 2010 encore, plusieurs années après l'achèvement des travaux, le local n'a pas retrouvé de preneur ;
- le caractère anormal et spécial du dommage n'est pas établi ;
Vu le mémoire, enregistré le 8 février 2012, présenté pour M. C... par Me D...qui tend aux mêmes fins par les mêmes moyens ;
Il ajoute que :
- son locataire a anticipé les difficultés générées par les travaux sur l'accessibilité de son commerce alors que sa volonté initiale était de demeurer dans les lieux de manière pérenne ;
- l'impossibilité de trouver un nouveau locataire est liée aux travaux entrepris par la communauté urbaine de Bordeaux à partir de 2005 ;
- il a subi, en sa qualité de riverain, un préjudice spécial et anormal directement en lien avec les travaux du tramway ;
Vu l'ordonnance fixant en dernier lieu la clôture de l'instruction au 10 avril 2012 à 12 heures ;
Vu les autres pièces au dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 janvier 2013 :
- le rapport de M. Philippe Cristille, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public ;
- les observations de Me Raux, avocat de M.C... ;
1. Considérant que M. C...est usufruitier de différents lots situés dans un immeuble en copropriété faisant l'angle du cours Evrard de Fayolle au n° 32 et de la rue du Jardin public aux n° 125-127 à Bordeaux ; que ces lots comprennent, outre un appartement et un garage donnant rue du Jardin public, un local en façade du cours Evrard de Fayolle que M. C...a occupé jusqu'en 1980 en y exploitant un fonds de commerce de garage et de réparation de véhicules et qu'il a donné en location, par la suite et en dernier lieu de septembre 2001 à août 2004, à la société à l'enseigne " Comme un bruit qui court " qui exerçait l'activité de dépôt-vente de vêtements ; que, par un jugement du 9 février 2011, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté la demande de M.C... tendant à la condamnation de la communauté urbaine de Bordeaux, maître d'ouvrage de l'opération de construction du tramway, à lui verser une indemnité de 89 005,16 euros en réparation du préjudice lié à la perte d'accessibilité aux voitures et à la perte de loyers qu'il estime avoir subi à raison des travaux de construction de la ligne C du tramway cours Evrard de Fayolle ; que M. C...relève appel de ce jugement en tant seulement que le tribunal administratif n'a pas fait droit à ses conclusions tendant à la réparation de la perte des revenus procurés par la location du local ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant que si M. C...soutient que le jugement attaqué a été rendu au terme d'une procédure entachée " d'irrégularités au regard des exigences du code de justice administrative ", il n'assortit ses affirmations d'aucune précision permettant à la cour d'en apprécier le bien fondé ; que, par suite, ce moyen ne peut qu'être écarté ;
Au fond :
3. Considérant qu'il appartient au riverain d'une voie publique qui entend obtenir réparation des dommages qu'il estime avoir subis à l'occasion d'une opération de travaux publics à l'égard de laquelle il a la qualité de tiers d'établir, d'une part, le lien de causalité entre cette opération et les dommages invoqués et, d'autre part, le caractère anormal et spécial de son préjudice, les riverains des voies publiques étant tenus de supporter sans contrepartie les sujétions normales qui leur sont imposées dans un but d'intérêt général ;
4. Considérant que M. C...soutient que les travaux de construction du tramway ont eu pour conséquence à la fois le départ anticipé de son locataire qui a donné son congé au mois d'août 2004 et l'impossibilité de louer à nouveau le local, ce qui a entraîné pour lui une perte de revenus ;
5. Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction et notamment des constatations du procès-verbal dressé à la demande de M. C...par un huissier le 14 février 2005 et des clichés photographiques que ce document contient, que les travaux sur le cours Evrard de Fayolle n'avaient pas encore débuté à cette même date ; qu'il ne résulte d'aucune pièce versée au dossier que la société " Comme un bruit qui court " aurait, en dénonçant le bail dont elle était titulaire, souhaité prévenir les difficultés prévisibles générées par les travaux du tramway ; qu'ainsi, le lien de causalité entre le départ du locataire au mois d'août 2004 et les travaux de réalisation de la ligne C du tramway n'est pas établi ;
6. Considérant, d'autre part, que pour justifier qu'il a été dans l'impossibilité de relouer son local en raison des travaux de réalisation du tramway, M. C...se prévaut d'annonces demeurées sans effet, successivement publiées au mois de septembre 2004 dans un journal d'annonces gratuites, au mois d'avril et de mai 2005 dans le journal Sud-Ouest, et au cours de l'année 2007 pendant deux semaines dans cinq numéros du même journal d'annonces, ainsi que d'une proposition de services du 24 mai 2005 émanant d'une société spécialisée en immobilier d'entreprises ; qu'il produit également des clichés photographiques de la banderole qu'il a placée sur la façade de l'immeuble pour faire connaître que le local était à louer ; qu'il résulte, toutefois, de l'instruction que le local de M. C...est précédemment resté inoccupé entre décembre 1999 et septembre 2001, que la proposition de service susmentionnée du 24 mai 2005 n'évoque aucune difficulté liée aux travaux en cause et que le dossier ne fait pas ressortir que le local serait loué à ce jour alors que les travaux ont pris fin en juin 2007 et que le tramway est en service depuis novembre 2007 sur cette portion ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que c'est à juste titre que le tribunal administratif a estimé que le lien de causalité entre les difficultés rencontrées pour louer le local et les travaux de réalisation de la ligne C du tramway n'était pas davantage établi ;
7. Considérant de tout ce qui précède que M. C...ne justifie pas du lien de causalité entre la perte de loyers qu'il invoque et la réalisation des travaux du tramway ; que, par suite, il n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la communauté urbaine de Bordeaux qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. C...demande en remboursement des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du requérant les sommes que la communauté urbaine de Bordeaux demande en remboursement des frais de même nature exposés par elle ;
DECIDE :
Article 1er : La requête M. C... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la communauté urbaine de Bordeaux présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C...et à la communauté urbaine de Bordeaux.
Délibéré après l'audience du 8 janvier 2013, à laquelle siégeaient :
M. Aymard de Malafosse, président,
M. Philippe Cristille, premier conseiller,
Mme Marie-Thérèse Lacau, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 5 février 2013.
Le rapporteur,
Philippe CRISTILLELe président,
Aymard de MALAFOSSE
Le greffier,
Virginie MARTY
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition certifiée conforme.
Le greffier,
Virginie MARTY
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N°11BX01141