Vu la requête, enregistrée le 17 janvier 2014, présentée pour le service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de la Gironde, dont le siège est situé 22 boulevard Pierre 1er à Bordeaux (33081) Cedex, par Me Ruffié ;
Le SDIS de la Gironde demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1101130 du 19 novembre 2013, en ce que le tribunal administratif de Bordeaux a, sur la demande du centre hospitalier universitaire de Bordeaux, (CHU) annulé le titre exécutoire de recettes complémentaire d'un montant de 997 395 euros émis le 29 décembre 2010 par lui à l'encontre du CHU ;
2°) à titre principal, de rejeter les prétentions du CHU et de ramener subsidiairement à la somme de 883 554 euros le montant du titre exécutoire en litige et d'annuler la décision implicite de rejet du 3 septembre 2012 ;
3°) à titre subsidiaire et avant-dire droit, d'ordonner au SDIS de communiquer l'ensemble des compte rendus de sortie de 2006, de désigner un collège d'experts médicaux qui aura notamment pour mission de prendre connaissance des documents produits, de les croiser avec les critères d'intervention hors situations d'urgence et de donner mission à l'expert judiciaire de déposer un pré-rapport et de réserver les dépens ;
4°) à titre très subsidiaire et reconventionnel, de condamner le CHU à lui verser la somme de 997 395 euros et, à titre encore plus subsidiaire, la somme de 883 554 euros, ladite condamnation devant être assortie des intérêts en vigueur à la date de l'émission du titre exécutoire avec capitalisation de ces intérêts ;
5°) de mettre à la charge du CHU de Bordeaux la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens ;
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier car les premiers juges ont statué sur un argument non soulevé par les parties ; le CHU n'a en effet jamais fait valoir que les parties avaient eu recours à une concertation qui aurait abouti ; au contraire, le CHU a appuyé la demande d'expertise du SDIS ; la prétendue concertation n'a jamais abouti ; c'est bien parce que le CHU a fait obstacle aux discussions que le SDIS a été contraint d'émettre le titre en litige ; en outre, l'argument qu'a utilisé le tribunal est erroné car il ne pouvait considérer que le paiement des acomptes équivalait à un accord tacite du SDIS ; aucun texte ni principe juridique n'interdit l'émission d'un titre de recettes de régularisation ;
- contrairement à ce qu'indique le tribunal, le nombre d'interventions effectuées et justifié ; le CHU, donneur d'ordre des secours, est dans l'incapacité d'apporter le moindre justificatif concernant le nombre de carences sanitaires ayant entraîné une intervention du SDIS ; il est incontestablement de la responsabilité du CHU de réguler l'ensemble des appels reçus via le 15 ou le 18 ; les dysfonctionnements de la régulation sont avérés ; il y a donc dès l'origine une faute de l'établissement hospitalier qui n'assure pas convenablement la régulation, en contradiction avec les dispositions législatives et les conventions conclues ; eu égard à sa carence, le CHU propose systématiquement un chiffrage sous-évalué des transports effectués par le SDIS ; le chiffrage initial étant ridicule, le CHU reconnaît explicitement qu'il est nécessaire de procéder à une réévaluation ; le CHU ne remplit aucune de ses obligations de détermination et s'abrite derrière un calcul aléatoire ; le tribunal ne pouvait donc écarter la faute du CHU en considérant que le nombre d'interventions avait été arrêté d'un commun accord ;
- le SDIS a correctement évalué le nombre d'interventions qu'il a effectuées sur demande de la régulation médicale du CHU ; le CHU s'est opposé de manière expresse à une évaluation contradictoire de la situation ; au titre de 2006, le SDIS est intervenu 15 681 fois au titre de la carence des transports sanitaires privés, chiffre établi par la SDIS en l'absence d'éléments contraires du CHU ; il ne s'agit pas d'interventions au titre de l'urgence ; le CHU met en péril les missions partagées du SDIS, mais aussi ses missions propres et fait peser sur le contribuable girondin des sujétions qui relèvent de l'assurance-maladie ;
- le chiffrage aléatoire du CHU occulte en outre l'intervention des médecins libéraux qui exercent la régulation médicale pour le compte du SDIS ; le défaut d'organisation du CHU est patent à cet égard ; conformément à l'article L. 1424-42 du code général des collectivités territoriales, les sollicitations de ces médecins libéraux régulateurs au titre de la carence doivent être financièrement prises en charge par le CHU ; cela constitue également une faute du CHU ;
- le CHU occulte l'augmentation du nombre d'affaires régulées sur l'année ; le chiffrage du CHU est en totale contradiction avec le rapport d'activité 2006 qu'il a lui-même établi, qui montre une augmentation nette de tous les types de régulation ; en outre, le CHU admet que les médecins libéraux ont sollicité l'intervention de plus de 1 000 véhicules par mois, soit a minima près de 12 000 interventions à l'année ;
- le CHU fixe de manière complètement aléatoire le nombre d'interventions en les sous-évaluant ; il a, dans un premier temps, admis une augmentation de 100 % puis, une seconde fois, de 50 % ; d'ailleurs, il ne justifie pas d'une surévaluation des estimations du SDIS ; cela constitue une faute justifiant à elle seule l'émission du titre exécutoire ;
- le CHU n'a jamais donné suite à la saisine de l'ISPED alors même que le SDIS a largement collaboré en transmettant l'ensemble de ses données ; en s'obstinant à faire obstacle à l'issue d'une telle saisine, le CHU a commis une nouvelle faute ; il ne peut donc être reproché au SDIS de ne pas établir que l'échec de la consultation serait dû au CHU ;
- le SDIS est en mesure de justifier de l'ensemble des 15 681 sorties qu'il revendique, puisqu'il établit un compte-rendu à chaque sortie ; il appartient au juge, avant dire droit, d'en ordonner leur communication à la juridiction ; le SDIS tient les 15 681 bulletins à disposition de la cour ; c'est à tort que le tribunal n'en a pas ordonné la communication ; il a affirmé de façon contradictoire que le SDIS ne rapportait aucune preuve sans en demander la communication, violant ainsi les obligations de la juridiction administrative ; la réformation du jugement s'impose donc de ce point de vue ;
- sur la base de la production qui sera ordonnée par la cour, celle-ci nommera un collège d'experts médicaux, choisis parmi des professionnels de santé en dehors du département de la Gironde ; l'utilité d'une telle mesure ne fait aucun doute dès lors que le CHU se borne à un dénombrement aléatoire ; elle est d'autant plus nécessaire que le SDIS a accepté la saisine de l'ISPED, à la demande du CHU ; les membres du collège devront avoir pour mission de prendre connaissance des documents produits et couverts par le secret médical et de croiser les compte-rendus avec les critères de l'intervention hors situation d'urgence ; c'est sans la moindre motivation que le tribunal s'est contenté d'indiquer que cette mesure ne présentait aucune utilité ;
- l'application de 105 euros au titre de l'année 2006 est justifiée et est conforme à le réglementation applicable ; néanmoins et en admettant qu'il soit fait référence à la précédente décision du tribunal du 6 mai 2013, le SDIS invite subsidiairement la juridiction à ramener à 883 554 euros la somme sollicitée, correspondant à 8 757 interventions à 92 euros pour la période du 1er janvier au 30 novembre et à 742 interventions à 105 euros pour le mois de décembre 2006 ;
- à titre reconventionnel, la cour condamnera le CHU ; ce n'est en effet qu'à titre très subsidiaire que la cour observera qu'en bafouant les conventions conclues avec le SDIS, le CHU a commis de multiples fautes au préjudice de son cocontractant ; la mise en oeuvre de cette responsabilité est indéniable dès l'instant où le CHU ne recense pas rigoureusement les interventions effectuées par le SDIS ; en outre, le simple fait de refuser de payer est une faute contractuelle susceptible d'engager la responsabilité du CHU, car contrevenant à l'article 1er de la convention du 4 février 2005 ; ces fautes impliquent pour le SDIS un préjudice résultant des 15 681 interventions effectuées réalisées en situation de carence et pourtant non prises en charge intégralement par le CHU ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense enregistré le 10 juillet 2014, présenté pour le centre hospitalier universitaire de Bordeaux, par Me Bernadou, qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge du SDIS de la Gironde au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il fait valoir que :
- le tribunal n'a pas statué ultra petita, le CHU ayant bien soulevé un moyen tiré de ce que les bases de liquidation du titre de recettes étaient erronées ;
- les parties ont bien eu recours à la phase de concertation prévue par la convention les liant ;
- le tribunal a bien cherché à apprécier si les 15 681 transports en carence pour lesquels le SDIS réclame paiement étaient justifiés ; sa motivation n'est donc en rien erronée ;
- le nombre d'interventions effectuées n'est pas justifié ; le chiffrage du SDIS est à la fois variable et contraire à la convention du 4 février 2005, la facturation ne respectant pas les procédures de son article 4 ; ce chiffrage repose sur les prescriptions médicales du médecin régulateur et englobe les missions qui relèvent de sa mission d'intérêt général ; le SDIS se livre à une interprétation personnelle de la notion de carence ;
- il n'y a eu aucun dysfonctionnement de la régulation médicale ; les méthodes de calcul qui ont servi au CHU pour formuler des propositions de règlement amiable s'inscrivaient parfaitement dans la procédure de concertation prévue par la convention du 4 février 2005 ;
- les transports réalisés en dehors des carences doivent être facturés par le SDIS aux bénéficiaires de l'intervention ; le SDIS doit donc, non pas solliciter le paiement de ces interventions auprès du CHU, à partir de financements de l'assurance maladie, mais le facturer directement auprès des patients, en vertu de l'article 42 de la loi n° 96-369 du 3 mai 1996 relative aux services d'incendie et de secours ; le CHU n'est pas responsable de ce que les pompiers partent en intervention sans aval du régulateur et tentent après coup de faire qualifier leur mission ; cette anomalie a déjà été relevée par le rapport public thématique de la Cour des comptes de novembre 2011 ;
- la position du CHU de Bordeaux et sa lecture des textes sont conformes à la jurisprudence dégagée par la plupart des cours ; en l'espèce, le CHU ne saurait être considéré que comme un tiers, seul le patient ayant bénéficié de la prestation ; dès lors que le SDIS ne rapporte pas la preuve qu'il est intervenu à la demande expresse du médecin régulateur, il ne peut émettre de titre exécutoire à l'encontre du CHU et doit nécessairement se retourner contre chacune des personnes secourues ;
- le tarif de 105 euros ne trouve à s'appliquer qu'à compter du 1er décembre 2006, date d'entrée en vigueur de l'arrêté du 30 novembre 2006 ;
- la demande d'expertise doit être rejetée ; si le CHU s'était initialement associé à cette demande en première instance, le tribunal l'a rejetée en considérant que l'échec de la concertation, tant au travers des courriers échangés que de l'intervention de l'ISPED, ôtait toute utilité à cette mesure ; la cour confirmera cette analyse, dès lors que le SDIS ne peut détenir d'éléments susceptibles d'établir ou non la disponibilité des transporteurs sanitaires au moment de son intervention et si ses services sont intervenus ou non à la demande du centre 15 ;
- la faute contractuelle dont le SDIS se prévaut n'est pas démontrée ; le CHU a mis en oeuvre la procédure contradictoire prévue par l'article 4 de la convention puis a pris l'initiative de saisir l'ISPED ; dès lors, le refus de payer le titre exécutoire pour des transports en carence non admis par le CHU, lequel a réglé les transports en carence contradictoirement admis, ne peut constituer un manquement contractuel ;
Vu le mémoire en production de pièce enregistré le 29 avril 2015, présenté pour le centre hospitalier de Bordeaux ;
Vu le mémoire, enregistré le 30 avril 2015 et les mémoires de production de pièces, enregistrés et le 3 juin 2015, présentés pour le SDIS, qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens que ses précédentes écritures ;
Vu l'ordonnance fixant la clôture de l'instruction au 30 avril 2015 ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu l'arrêté du 30 novembre 2006 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 juin 2015 :
- le rapport de Mme Florence Rey-Gabriac, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Pierre Bentolila, rapporteur public ;
- les observations de Me Ruffié, avocat du SDIS de la Gironde et de Me Bernadou, avocat du CHU de Bordeaux ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 10 juin 2015, présentée pour le SDIS de la Gironde ;
1. Considérant que le service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de la Gironde et le centre hospitalier universitaire (CHU) de Bordeaux ont conclu, le 4 février 2005, en application de l'article L. 1424-42 du code général des collectivités territoriales, une convention pour la prise en charge financière par le CHU des transports sanitaires effectués par le SDIS en situation de carence des ambulanciers privés ; que les parties ont conclu un avenant, le 5 mars 2008, ayant notamment pour objet l'application, pour une durée de trois ans à compter du 1er décembre 2006, des dispositions de l'arrêté du 30 novembre 2006 fixant les modalités d'établissement de la convention entre les services d'incendie et de secours et les établissements de santé siège des SAMU mentionnée à l'article L. 1424-42 du code général des collectivités territoriales, tel que modifié par l'arrêté du 20 mars 2012, lequel préconise pour chaque mission un montant de 105 euros au titre de l'année 2006 ; que dans ce cadre, le SDIS de la Gironde a émis à l'encontre du CHU de Bordeaux, le 29 décembre 2010, un titre exécutoire de recettes complémentaires d'un montant de 997 395 euros correspondant selon lui au solde des sommes dues par le CHU pour l'année 2006, après application du tarif unitaire de 105 euros aux 15 681 transports qu'il soutient avoir effectués à la demande de la régulation médicale du centre 15 en raison de la carence des transporteurs privés ; que le SDIS de la Gironde fait appel du jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 19 novembre 2013 qui a annulé le titre exécutoire en litige, en demandant à titre subsidiaire, de ramener à la somme de 883 554 euros le montant du titre exécutoire en litige, à titre plus subsidiaire, que la cour ordonne, avant-dire droit, une expertise aux fins de déterminer le nombre d'interventions effectuées par le SDIS en 2006 au titre de la carence des transports privés et sur demande du médecin régulateur du centre 15, et à titre encore plus subsidiaire, de faire droit à ses conclusions reconventionnelles tendant à ce que la CHU soit condamné à lui verser la somme de 997 395 euros ou, à tout le moins, la somme de 883 554 euros, en réparation du préjudice résultant de la faute contractuelle qu'il aurait commise;
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant, en premier lieu, que, pour annuler le titre de recettes en litige, les premiers juges ont retenu le moyen, soulevé par le CHU, tiré d'une base de liquidation erronée ; qu'ils ont, en particulier, retenu, au soutien de ce moyen, l'argument selon lequel les parties avaient eu recours à la phase de concertation prévue par la convention les liant ; que, contrairement à ce que soutient le SDIS, le CHU avait, dans son mémoire introductif d'instance, rappelé l'échec de cette concertation comme celui de la consultation de l'institut de santé publique d'épidémiologie et de développement (ISPED), saisi par son directeur ; que dans ces conditions, le moyen tiré de ce que les premiers juges auraient statué au-delà des arguments présentés par les parties doit être écarté ;
3. Considérant, en deuxième lieu, que si le SDIS fait valoir que le tribunal administratif n'aurait pas utilisé ses pouvoirs d'instruction en ne sollicitant pas la production de ses comptes-rendus d'intervention, il appartenait au SDIS de produire les documents en cause, qu'il indique détenir, les premiers juges devant ensuite apprécier si des obstacles, tenant notamment au respect de la vie privée invoqué par le service requérant, empêchaient la communication de ces documents au CHU ; que dans ces conditions, le moyen tiré de l'absence d'utilisation, par les premiers juges, de leurs pouvoirs d'instruction, doit être écarté ;
4. Considérant, en troisième lieu, que, par le considérant 3 de leur jugement, les premiers juges ont exposé de façon détaillée les raisons pour lesquelles ils ont estimé que le titre exécutoire émis par le SDIS était fondé sur une base de liquidation erronée ; qu'à ce titre, ils ont retenu qu'avaient été mises en oeuvre une procédure de concertation avec le CHU, ainsi qu'une consultation de l'institut de santé publique d'épidémiologie et de développement (ISPED) ; qu'ils ont également relevé que le SDIS n'apportait aucun élément probant de nature à justifier le nombre de transports qu'il invoque au titre de la carence et, en particulier, n'établissait pas que l'échec de la consultation de l'ISPED serait imputable au seul CHU, puis en ont déduit que la base de liquidation du titre en litige devait être regardée comme erronée, sans qu'il y ait besoin, dans ces conditions, d'ordonner la mesure d'expertise demandée par le SDIS, laquelle ne présentait pas un caractère utile à la solution du litige ; qu'ils ont ainsi suffisamment motivé la raison pour laquelle ils ont écarté la demande d'expertise présentée par le SDIS ;
5. Considérant, en dernier lieu, qu'en ayant, d'une part, considéré que le SDIS n'apportait aucun élément probant de nature à justifier le nombre de 15 681 transports qu'il invoque et, d'autre part, rejeté la demande d'expertise du SDIS tendant à ce qu'il lui soit ordonné de produire les justificatifs de ces interventions qu'il prétend détenir, les premiers juges n'ont pas entaché leur jugement d'une contradiction de motifs, dès lors qu'il appartenait au SDIS d'apporter tout élément probant à l'appui de ses prétentions ;
6. Considérant que, dans ces conditions, les moyens tirés de ce que le jugement attaqué serait entaché d'irrégularités doivent être écartés ;
Sur les conclusions dirigées contre l'annulation du titre exécutoire :
7. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 1424-2 du code du code général des collectivités territoriales : " Les services d'incendie et de secours sont chargés de la prévention, de la protection et de la lutte contre les incendies. / Ils concourent, avec les autres services et professionnels concernés, à la protection et à la lutte contre les autres accidents, sinistres et catastrophes, à l'évaluation et à la prévention des risques technologiques ou naturels ainsi qu'aux secours d'urgence. Dans le cadre de leurs compétences, ils exercent les missions suivantes : / 1° La prévention et l'évaluation des risques de sécurité civile ; / 2° La préparation des mesures de sauvegarde et l'organisation des moyens de secours ; / 3° La protection des personnes, des biens et de l'environnement ; / 4° Les secours d'urgence aux personnes victimes d'accidents, de sinistres ou de catastrophes ainsi que leur évacuation. " ; qu'aux termes de l'article L. 1424-42 du même code : " Le service départemental d'incendie et de secours n'est tenu de procéder qu'aux seules interventions qui se rattachent directement à ses missions de service public définies à l'article L1424-2. / S'il a procédé à des interventions ne se rattachant pas directement à l'exercice de ses missions, il peut demander aux personnes bénéficiaires une participation aux frais, dans les conditions déterminées par délibération du conseil d'administration / Les interventions effectuées par les services d'incendie et de secours à la demande de la régulation médicale du centre 15, lorsque celle-ci constate le défaut de disponibilité des transporteurs sanitaires privés, et qui ne relèvent pas de l'article L. 1424-2, font l'objet d'une prise en charge financière par les établissements de santé, sièges des services d'aide médicale d'urgence. / Les conditions de cette prise en charge sont fixées par une convention entre le service départemental d'incendie et de secours et l'hôpital siège du service d'aide médicale d'urgence, selon des modalités fixées par arrêté conjoint du ministre de l'intérieur et du ministre chargé de la sécurité sociale. / (...) " ;
8. Considérant, d'autre part, que l'article 1er de la convention conclue le 4 février 2005 entre le CHU et le SDIS prévoit que : " A compter du 1er janvier 2004, pour l'ensemble du département de la Gironde, les parties conviennent que les transports sanitaires effectués par le SDIS, à la demande de la régulation médicale du centre 15, et en cas de constat de carence par des transports sanitaires privés, seront pris en charge par le CHU, dans les conditions fixées par les articles suivants " ; que l'article 2 de cette même convention précise que " les transports concernés par la convention relèvent des situations de carence avérées, lorsque les entreprises de transports sanitaires privées sont dans l'impossibilité de répondre à la demande du CRRA 15 faute de moyens matériels et humains mobilisables dans des délais compatibles avec l'état de santé du patient " ; que l'article 4 de ladite convention relatif à la facturation, stipule que " les titres de recettes sont adressés par le SDIS, tous les trois mois, à terme échu, à partir d'une liste mensuelle établie conjointement après analyse contradictoire... " ; qu'aux termes de l'article 8 de cette même convention : " En cas de litige, les parties conviennent de saisir en préalable et par écrit Monsieur le préfet de la Gironde ainsi que Monsieur le directeur de l'agence régionale d'hospitalisation (...) " ;
9. Considérant qu'il résulte ainsi des dispositions conventionnelles que, pour déterminer le nombre de transports sanitaires relevant des situations de carence, le CHU et le SDIS doivent procéder à partir d'une liste mensuelle établie conjointement après analyse contradictoire des données issues du fichier du centre 15 et de celles issues du fichier du SDIS ; que s'agissant de l'année 2006, et contrairement à ce que soutient le SDIS en appel, une telle procédure de concertation a eu lieu ainsi qu'il résulte des différents courriers échangés par les parties entre 2006 et 2010 ; qu'en effet, après avoir estimé dans un premier temps le nombre de transports à 7 750, alors que le CHU proposait de retenir le nombre de 6 082, le SDIS a finalement admis 5 635 interventions " de carence " pour les onze premiers mois de l'année 2006 et 547 interventions pour décembre 2006, soit 6 182 interventions au total, ainsi qu'il résulte tout autant des courriers qu'il a adressés au CHU les 7 mars 2008 et 24 décembre 2009 que du titre exécutoire émis le 16 avril 2008 à l'encontre du CHU, dont ce dernier a d'ailleurs réglé le montant ; qu'il résulte également de l'instruction que le CHU a, en mai 2008, saisi pour évaluation et avis l'institut de santé publique d'épidémiologie et de développement (ISPED), organisme universitaire dont la consultation, si elle n'a pas non plus abouti à une conciliation entre les parties, a néanmoins été acceptée par le SDIS ; que le SDIS, qui se borne à contester la mise en oeuvre de la régulation médicale par le centre 15 et à alléguer de dysfonctionnements dans la régulation ainsi mise en oeuvre par le CHU, n'apporte aucun élément probant de nature à justifier le nombre de 15 681 transports invoqué, notamment en se référant à des rapports d'activités du centre 15 pour l'année 2011 ; que si le SDIS produit notamment quelques comptes-rendus d'interventions ainsi que, sur support informatique, un récapitulatif des interventions permettant d'identifier les sorties effectuées, il n'établit pas, pour la part de transports au titre de la carence des transporteurs sanitaires privés excédant les 6 182 interventions ayant donné lieu à prise en charge financière par le CHU, avoir respecté la procédure prévue à l'article 4 de la convention, à savoir, avoir adressé au CHU tous les trois mois, à terme échu, à partir d'une liste mensuelle établie conjointement après analyse contradictoire, les titres de recettes ; que la circonstance que le rapport d'activité du CHU au titre de l'année 2006 ferait état d'une augmentation nette de tous les types de régulation ne suffit pas à justifier le nombre d'intervention revendiquée par le SDIS pour cette même année au titre de la carence des transporteurs sanitaires privés ; que si le SDIS a présenté des conclusions à titre subsidiaire tendant à ce que la cour lui ordonne de communiquer l'ensemble des comptes-rendus de sortie correspondant, rien ne faisait obstacle à ce qu'il produise de lui-même ces documents pour établir l'exactitude des bases de liquidation revendiquées en demandant à la cour, le cas échéant, de ne pas les soumettre au débat contradictoire, compte-tenu du secret médical couvrant, selon lui, ces documents ; que dans ces conditions, et sans qu'il soit besoin d'ordonner la mesure d'expertise à nouveau sollicitée en appel par le SDIS, dès lors qu'elle ne présente pas un caractère utile à la solution du litige, le SDIS n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont fait droit à la demande du CHU tendant à l'annulation du titre exécutoire contesté ;
Sur les conclusions reconventionnelles du SDIS de la Gironde :
10. Considérant que le SDIS demande à titre reconventionnel que le CHU soit condamné, sur le fondement de la responsabilité contractuelle, à l'indemniser par le versement d'une somme de 997 395 euros et, à titre subsidiaire, d'une somme de 883 554 euros, en réparation du préjudice qu'il subit du fait des 15 681 interventions qu'il aurait effectuées en 2006 au titre de la carence des transporteurs sanitaires privés ; que ni la circonstance que la Cour des comptes ait relevé au plan national un dysfonctionnement dans l'organisation de la régulation des transports sanitaires par le centre 15, ni celle que le CHU aurait mal organisé cette régulation conduisant ainsi à une sous évaluation des transports effectué par le SDIS au titre de la carence ne sont de nature à elles seules à établir l'existence d'une faute par le centre hospitalier dans l'application de la convention en cause ; que, par suite, en l'absence de faute contractuelle du CHU, les conclusions reconventionnelles du SDIS ne peuvent qu'être rejetées ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le SDIS de la Gironde n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont annulé le titre exécutoire de recettes complémentaire d'un montant de 997 395 euros qu'il avait émis le 29 décembre 2010 à l'encontre du CHU de Bordeaux et rejeté ses conclusions à fin d'expertise ainsi que ses conclusions reconventionnelles ;
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions des parties présentées sur ce fondement ;
Sur les conclusions présentées au titre de l'article R. 761-1 du code de justice administrative :
13. Considérant que le SDIS de la Gironde ne justifie pas avoir engagé, dans la présente instance, des frais mentionnés à l'article R. 761-1 du code de justice administrative ; que, dès lors, ses conclusions, tendant à la condamnation du CHU aux entiers dépens, ne peuvent, en tout état de cause, qu'être rejetées ;
DECIDE
Article 1er : La requête du SDIS de la Gironde et les conclusions présentées par le CHU de Bordeaux au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au service départemental d'incendie et de secours de la Gironde et au centre hospitalier universitaire de Bordeaux. Copie en sera transmise au préfet de la Gironde et à l'administrateur général des finances publiques de la Gironde.
Délibéré après l'audience du 8 juin 2015 à laquelle siégeaient :
M. Jean-Louis Joecklé, président,
M. Olivier Gosselin, président-assesseur,
Mme Florence Rey-Gabriac, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 1er juillet 2015.
Le rapporteur,
Florence Rey-GabriacLe président,
Jean-Louis Joecklé
Le greffier,
Cindy Virin La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition certifiée conforme.
Le greffier,
Cindy Virin
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No 14BX00172