Vu la requête enregistrée le 17 octobre 2013, présentée pour M. C...A...demeurant..., par Me B...;
M. A...demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1101005 du 22 août 2013 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 23 février 2011 du préfet de la région Aquitaine portant sanction administrative pour non respect des modalités de pêche sur les gisements de pétoncles des Pertuis Charentais ;
2°) d'annuler la décision contestée ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens ;
Il soutient que :
- il n'a pas été entendu le jour du constat de l'infraction qui lui est reprochée, comme en atteste le procès-verbal d'infraction en date du 20 décembre 2010 ;
- la matérialité des faits qui lui sont reprochés n'est pas établie dès lors qu'aucune constatation ou vérification n'a été effectuée sur le lieu prétendu de l'infraction par les agents verbalisateurs, qui n'ont fait qu'observer au moyen d'une longue vue ;
- la décision attaquée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation en ce que les agents des affaires maritimes ont commis une erreur d'observation ; les mauvaises conditions météorologiques du 20 décembre 2010, ajoutées à la distance importante entre les agents verbalisateurs et la zone du navire, ne permettaient pas d'apprécier avec précision l'activité du chalutier " Peu-Tit-Oms " ce jour-là ; il n'est pas justifié que la longue-vue utilisée ait subi un contrôle technique tel que prévu par le décret du 3 mai 2001 et l'arrêté du 31 décembre 2001 modifiés ; le navire, s'il était bien en mer ce jour-là, n'était pas en action de pêche dès 9 heures 45, contrairement à ce qu'ont retenu les agents des affaires maritimes ; il n'a jamais été constaté de poissons dans la fune du bateau ;
Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 28 avril 2014, présenté par le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie qui conclut au rejet de la requête ;
Il fait valoir que :
- la requête de M. A...est irrecevable dès lors qu'elle n'expose aucun moyen d'appel et se borne à reproduire à l'identique sa demande de première instance ;
- les agents assermentés n'étaient pas tenus de procéder à un examen sur place pour constater le manquement ;
- il ne ressort d'aucune disposition que le contrevenant doit être entendu sur le moment et sur les lieux de la constatation du manquement ;
- les deux agents assermentés se trouvaient dans de bonnes conditions de visibilité et disposaient d'un équipement suffisant pour procéder aux opérations de surveillance et de contrôle dont ils sont chargés et leurs constats ne peuvent pas être remis en cause ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 25 juillet 2014, présenté pour M. A...;
Vu l'ordonnance en date du 5 mars 2014 fixant la clôture de l'instruction au 6 mai 2014, à 12 heures ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code rural et de la pêche maritime ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 juin 2015 :
- le rapport de M. Antoine Bec, président-assesseur ;
- les conclusions de M. Nicolas Normand rapporteur public ;
1. Considérant que M. A...relève appel du jugement du 22 août 2013 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 23 février 2011 du préfet de la région Aquitaine portant sanction administrative pour non respect des modalités de pêche sur les gisements de pétoncles des Pertuis Charentais ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 912-1 du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction issue de la loi du 27 juillet 2010 de modernisation de l'agriculture et de la pêche, applicable à la date de la décision contestée : " Les membres des professions qui, quel que soit leur statut, se livrent aux activités de production des produits des pêches maritimes et des élevages marins adhèrent obligatoirement à une organisation professionnelle des pêches maritimes et des élevages marins. / Cette organisation comprend un comité national, des comités régionaux et des comités départementaux ou interdépartementaux, dotés de la personnalité morale et de l'autonomie financière. / Les comités régionaux sont créés au niveau d'une ou de plusieurs régions administratives disposant d'une façade maritime. (...) ; qu'aux termes de l'article L. 921-2-2 du même code : " Lorsqu'elles réglementent la pêche des espèces soumises à un total autorisé de captures ou à des quotas de captures en application d'un règlement de l'Union européenne, les mesures prévues par le présent livre et les textes pris pour son application sont soumises pour avis au comité national mentionné à l'article L. 912-1 et aux comités régionaux d'outre-mer concernés. / Pour les autres espèces, l'autorité administrative peut, après avis du comité national ou des comités régionaux mentionnés à l'article L. 912-1, prendre les mesures nécessaires à la mise en oeuvre du présent livre et des textes pris pour son application, ou rendre obligatoires les délibérations adoptées à cette fin à la majorité des membres des conseils du comité national et des comités régionaux. " ; qu'aux termes de l'article L. 946-2 dudit code : " Les manquements aux mesures prises par l'autorité administrative en application de l'article L. 921-2-1, du second alinéa de l'article L. 921-2-2 et aux délibérations rendues obligatoires en application des articles L. 912-10 et L. 921-2-1 et du second alinéa de l'article L. 921-2-2 peuvent donner lieu au prononcé par l'autorité administrative d'une amende administrative dont le montant unitaire ne peut dépasser le maximum prévu pour la contravention de la 5e classe. L'amende est appliquée autant de fois qu'il y a de quintaux de produits capturés, débarqués, détenus, acquis, transportés ou mis sur le marché. Le produit de ces amendes est versé à l'Etablissement national des invalides de la marine. " ;
3. Considérant que par délibération du 14 octobre 2010, le comité régional des pêches maritimes et élevages marins de Poitou-Charentes a fixé l'organisation de la pêche aux pétoncles sur les gisements naturels coquilliers des Pertuis Charentais pour la campagne des mois d'octobre, novembre et décembre 2010, en autorisant notamment la pêche des pétoncles sur le gisement naturel coquillier du Pertuis d'Antioche, le lundi 20 décembre 2010 entre 10 heures 30 et 12 heures 30 ; qu'en application des dispositions de l'article L. 921-2-2 du code rural et de la pêche maritime, le préfet de la région Aquitaine, par un arrêté du 22 octobre 2010, a rendu cette délibération obligatoire ; que le navire dénommé " Le Peu-Tit-Oms ", dont le patron est M. A..., a fait l'objet, le 20 décembre 2010 d'un procès-verbal d'infraction dressé par deux agents de l'unité littorale de surveillance de la direction départementale des territoires et de la mer de la Charente-Maritime pour non respect des heures d'ouverture de la pêche aux pétoncles ; que, par une décision du 23 février 2011, le préfet de la région Aquitaine a prononcé à l'encontre de M. A...une amende administrative de 1 500 euros ;
4. Considérant en premier lieu qu'aux termes de l'article L. 946-5 du code rural et de la pêche maritime : " Les intéressés sont avisés au préalable des faits relevés à leur encontre, des dispositions qu'ils ont enfreintes et des sanctions qu'ils encourent. L'autorité compétente leur fait connaître le délai dont ils disposent pour faire valoir leurs observations écrites et, le cas échéant, les modalités s'ils en font la demande selon lesquelles ils peuvent être entendus. Elle les informe de leur droit à être assisté du conseil de leur choix. " ; que le respect du principe général des droits de la défense implique que la personne concernée, après avoir été informée des griefs formulés à son encontre, soit mise à même de demander la communication de son dossier et dispose de la faculté de pouvoir présenter utilement ses observations avant que l'autorité disposant du pouvoir de sanction se prononce ; qu'il résulte de l'instruction que M. A...a été informé des faits relevés à son encontre, des dispositions auxquelles il ne s'était pas conformé ainsi que des sanctions encourues, et a pu présenter ses observations orales lors d'un entretien en date du 19 janvier 2011 ; que, dans ces conditions, et alors qu'aucune disposition n'imposait aux agents verbalisateurs de recueillir ses observations le jour du constat de l'infraction, M. A...a été régulièrement mis en mesure de contester, préalablement à l'intervention de la sanction administrative litigieuse, les manquements à la réglementation sur l'exercice de la pêche maritime qui lui étaient reprochés ;
5. Considérant, en second lieu, que la longue-vue utilisée pour la constatation de l'infraction ne constitue pas un instrument qui mesurerait directement ou indirectement des grandeurs, rapports ou fonctions de ces grandeurs et n'est donc pas soumis au contrôle technique prévu par le décret du 3 mai 2001 et l'arrêté du 31 décembre 2001 modifiés; que, par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure ne peut qu'être écarté ;
6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 942-1 du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision attaquée : " I. - Sans préjudice des compétences des officiers et agents de police judiciaire, sont habilités à rechercher et à constater les infractions prévues et réprimées par le présent livre : (...) 4° Les syndics des gens de mer. (...) " ; et qu'aux termes de l'article L. 942-11 du même code : " Les procès-verbaux signés par les agents mentionnés à l'article L. 942-1 font foi jusqu'à preuve contraire. " ;
7. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les faits constitutifs de l'infraction ont été constatés le 20 décembre 2010 par deux syndics des gens de mer affectés à l'unité littorale de surveillance de la direction départementale des territoires et de la mer de la Charente-Maritime, qui ont relevé que le navire " Peu-Tit-Oms " était en action de pêche à 9 heures 45, soit en dehors des horaires réglementaires, fixés ce jour-là de 10 heures 30 à 12 heures 30, précisant que la fune du navire était à l'eau et que les marins à bord s'affairaient à remonter et à vider la drague sur la plage arrière ; que ces faits, révélateurs d'une action de pêche en cours, sont constitutifs de l'infraction prévue par les dispositions précitées de l'article L. 946-2 du code rural et de la pêche maritime; qu'ils ont été consignés dans un procès-verbal établi par des agents assermentés qui fait ainsi foi jusqu'à preuve du contraire ; que si M. A...soutient qu'aucune constatation n'a été effectuée sur place par les agents verbalisateurs, que ceux-ci étaient positionnés trop loin du lieu où était situé le navire et n'ont pu apprécier avec suffisamment de précision l'activité du chalutier, que les conditions météorologiques du 20 décembre 2010 ne permettaient pas d'avoir une vision claire et précise du déroulement des opérations sur le lieu du gisement de pétoncles du Pertuis Charentais, que l'équipage se bornait à préparer les apparaux de pêche, et qu'il n'a pas été constaté la présence de poissons dans la drague, il n'établit pas l'absence de matérialité de l'infraction en produisant des témoignages d'équipages présents sur place et eux-mêmes contrevenants ; que les relevés météorologiques ne permettent pas de conclure à une réduction de la visibilité incompatible avec les constatations effectuées par les agents de surveillance ; que M. A... n'apportant ainsi aucun élément probant de nature à démontrer que les faits consignés dans le procès-verbal seraient inexacts, le moyen tiré de ce que la décision contestée serait entachée d'erreur de fait ne peut qu'être écarté ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée en défense par le ministre, que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. A...demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...et au ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.
Délibéré après l'audience du 18 juin 2015 à laquelle siégeaient :
Mme Michèle Richer, président,
M. Antoine Bec, président-assesseur,
Mme Catherine Monbrun, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 2 juillet 2015.
Le président-assesseur,
Antoine BEC
Le président,
Michèle RICHER
Le greffier,
Florence DELIGEY
La République mande et ordonne au ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
''
''
''
''
2
N° 13BX02799