Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...C..., a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler d'une part, l'arrêté du 2 mars 2015 par lequel le préfet du Gers a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans lui octroyer de délai de départ volontaire et a fixé le pays de renvoi, d'autre part, la décision du même jour prononçant son assignation à résidence.
Par un jugement n° 1500511 du 6 mars 2015, le tribunal administratif de Pau a annulé les décisions du 2 mars 2015 par lesquelles le préfet du Gers a refusé d'accorder à M. C...un délai de départ volontaire et l'a assigné à résidence et a rejeté le surplus de ses conclusions.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 31 mars 2015, M.C..., représenté par MeE..., demande à la cour :
1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;
2°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 6 mars 2015 en tant qu'il a rejeté ses conclusions dirigées contre les décisions du 2 mars 2015 lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ;
3°) d'annuler ces décisions ;
4°) d'enjoindre au préfet du Gers de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou subsidiairement, de réexaminer sa situation administrative ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil au titre des articles L.761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
S'agissant de la mesure d'éloignement :
- elle est insuffisamment motivée en fait et en droit dans la mesure où elle ne comporte aucun élément relatif à sa situation personnelle et familiale, ne mentionne pas l'autorisation provisoire de séjour délivrée à son père le 26 février 2015 à la suite de sa demande de titre de séjour en qualité d'étranger malade et elle ne vise pas l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant alors qu'il réside sur le territoire national avec ses six frères et soeurs dont il s'occupe quotidiennement ;
- cette décision est entachée d'une erreur de fait dans la mesure où elle indique qu'il ne justifie pas " d'un début d'insertion " au plan professionnel alors qu'il s'est investi bénévolement au sein du secours populaire français 32 et a multiplié les recherches d'emploi ;
- elle porte une atteinte disproportionnée à son droit de mener une vie privée et familiale normale, en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dans la mesure où il ne pourra mener une vie privée et familiale normale hors de France compte tenu des risques qu'il encourt dans son pays d'origine ; le tribunal ne pouvait se fonder, pour justifier la mesure d'éloignement prise à son encontre, sur le fait que ses parents faisaient également l'objet de telles mesures dès lors que celles-ci ont été annulées par un jugement rendu le même jour ; il entretient une relation sérieuse avec une ressortissante française depuis plusieurs mois ; enfin, il justifie d'une insertion sociale et professionnelle, ainsi qu'en témoigne son implication au sein de l'association secours populaire français 32 ;
- cette décision méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant dès lors qu'elle aura pour conséquence de l'éloigner de ses six frères et soeurs dont il s'occupe régulièrement compte tenu de l'état de santé de son père ;
S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :
- elle est insuffisamment motivée dès lors qu'elle ne mentionne pas les risques qu'il encourrait en cas de retour au Kosovo ;
- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L.513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile compte des risques encourus dans son pays d'origine ; les forces de l'ordre avaient d'ailleurs refusé de protéger sa famille contre l'hostilité de la population albanaise à l'encontre des personnes d'origine rom ;
Par ordonnance du 14 avril 2015, la clôture d'instruction a été fixée au 17 juin 2015 à 12h00.
M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 16 avril 2015.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Sabrina Ladoire, premier conseiller.
Considérant ce qui suit :
1. M.C..., ressortissant kosovar, déclare être entré en France le 6 janvier 2014 accompagné de ses parents et de ses six frères et soeurs. Le préfet de la Haute-Garonne ayant, par une décision du 6 février 2014, refusé son admission au séjour en qualité de demandeur d'asile au motif qu'il avait la nationalité d'un pays d'origine sûr, sa demande d'asile a été instruite dans le cadre de la procédure prioritaire. Cette demande a été rejetée par une décision du directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 22 mai 2014 confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 19 décembre 2014. Ainsi, par un arrêté du 2 mars 2015, le préfet du Gers a refusé de délivrer à M. C...un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans lui accorder de délai de départ volontaire, a fixé le pays de renvoi et a, par une décision distincte du même jour, prononcé son assignation à résidence. Par un jugement n° 1500511 du 6 mars 2015, le tribunal administratif de Pau a annulé l'arrêté du 2 mars 2015 en tant qu'il a refusé d'accorder à M. C...un délai de départ volontaire et la décision du même jour l'ayant assigné à résidence. M. C...relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 2 mars 2015 lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi.
Sur l'aide juridictionnelle provisoire :
2. M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Bordeaux du 16 avril 2015. Par suite, ses conclusions tendant à son admission provisoire à l'aide juridictionnelle sont devenues sans objet.
Sur la légalité de l'arrêté :
3. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
4. Il ressort des pièces du dossier, que par un jugement n° 1500508-1500509 rendu le même jour que celui attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Pau, après avoir constaté que le préfet du Gers ne s'était pas encore prononcé sur la demande de titre de séjour pour raisons de santé que M. G...C..., le père du requérant, avait présentée le 26 février 2015, a annulé les décisions du 2 mars 2015 par lesquelles le préfet avait enjoint aux parents de M. C...de quitter le territoire français. Dans ces conditions, et eu égard au fait que le requérant, alors âgé de 19 ans, serait ainsi isolé dans son pays d'origine, ses parents et ses six frères et soeurs étant autorisés à séjourner provisoirement en France durant l'instruction de la demande de titre de séjour présentée par M. G...C..., les décisions faisant obligation à M. C...de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ont porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elles ont été prises et ont ainsi méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
5. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que M. C...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 2 mars 2015 lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi.
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
6. Aux termes de l'article L.512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Si l'obligation de quitter le territoire français est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues aux articles L. 513-4, L. 551-1, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 et l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas. ".
7. L'exécution du présent arrêt implique seulement, en application des dispositions précitées de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, qu'il soit enjoint au préfet du Gers de délivrer une autorisation provisoire de séjour à M. C...et de réexaminer sa situation administrative dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les conclusions tendant à l'application des articles L .761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
8. M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle par une décision en date du 16 avril 2015. Ainsi, son avocat peut se prévaloir des dispositions combinées de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me E...renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros en application de ces dispositions.
DECIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. C...tendant à son admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Article 2 : Le jugement n° 1500511 du 6 mars 2015 du tribunal administratif de Pau est annulé en tant qu'il a rejeté la demande de M. C...tendant à l'annulation des décisions du 2 mars 2015 du préfet du Gers lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi.
Article 3 : Les décisions du 2 mars 2015 du préfet du Gers faisant obligation à M. C...de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi sont annulées.
Article 4 : Il est enjoint au préfet du Gers de réexaminer la situation administrative de M. C...dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 5 : L'Etat versera la somme de 1 000 euros à MeE..., en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me E...renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l 'Etat à l'aide juridictionnelle.
Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C...est rejeté.
Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C..., au ministre de l'intérieur, à Me E...et au préfet du Gers.
Délibéré après l'audience du 1er septembre 2015, à laquelle siégeaient :
M. Aymard de Malafosse, président,
Mme F...et Mme Sabrina Ladoire, premiers conseillers,
Lu en audience publique, le 29 septembre 2015
Le rapporteur,
Mme Sabrina LADOIRE Le président,
M. Aymard de MALAFOSSELe greffier,
Mme D...B...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 15BX01064