Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B...M'ze Mogne a demandé au tribunal administratif de Mayotte d'annuler la décision du 8 novembre 2012 par laquelle le ministre de l'intérieur l'a exclu temporairement de ses fonctions pour une durée de trois mois, dont deux mois avec sursis.
Par un jugement n° 1300035 du 10 juin 2014, le tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 12 septembre 2014 et 10 août 2015, M. M'ze Mogne, représenté par Me D..., demande à la cour d'annuler ce jugement du 10 juin 2014 du tribunal administratif de Mayotte et d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision contestée.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 ;
- le décret n° 86-592 du 18 mars 1986 ;
- le décret n° 95-654 du 9 mai 1995 ;
- l'arrêté du 6 juin 2006 portant règlement général d'emploi de la police nationale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Marie-Thérèse Lacau,
- les conclusions de M. David Katz, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Gardien de la paix, M. M'ze Mogne fait appel du jugement du 10 juin 2014 par lequel le tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 8 novembre 2012 par laquelle le ministre de l'intérieur l'a exclu temporairement de ses fonctions pour une durée de trois mois, dont deux mois avec sursis.
Sur la régularité du jugement :
2. M. M'ze Mogne invoque " la nullité du jugement pour violation du droit de la preuve ". Toutefois cette critique concerne le bien-fondé des motifs dont le contrôle est opéré par la voie de l'effet dévolutif de l'appel et est sans incidence sur la régularité du jugement.
Sur la légalité externe de la sanction :
3. En premier lieu, en vertu de l'article 8 du décret n° 84-961 du 25 octobre 1984, le conseil de discipline émet un avis motivé sur les suites qui lui paraissent devoir être réservées à la procédure disciplinaire engagée. En l'espèce, conformément à ces prescriptions, les mentions du procès-verbal de la réunion du conseil de discipline permettaient de connaître de manière suffisamment précise les faits reprochés soumis au conseil de discipline.
4. En second lieu, aux termes de l'article 5 du décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 : " Lorsque le conseil de discipline examine l'affaire au fond, son président porte, en début de séance, à la connaissance des membres du conseil les conditions dans lesquelles le fonctionnaire poursuivi et, le cas échéant, son ou ses défenseurs ont exercé leur droit à recevoir communication intégrale du dossier individuel et des documents annexes. Le rapport établi par l'autorité ayant pouvoir disciplinaire ou par un chef de service déconcentré ayant reçu délégation de compétence à cet effet et les observations écrites éventuellement présentées par le fonctionnaire sont lus en séance. /Le conseil de discipline entend séparément chaque témoin cité. A la demande d'un membre du conseil, du fonctionnaire poursuivi ou de son ou de ses défenseurs, le président peut décider de procéder à une confrontation des témoins, ou à une nouvelle audition d'un témoin déjà entendu. Le fonctionnaire et, le cas échéant, son ou ses défenseurs peuvent, à tout moment de la procédure devant le conseil de discipline, demander au président l'autorisation d'intervenir afin de présenter des observations orales. Ils doivent être invités à présenter d'ultimes observations avant que le conseil ne commence à délibérer. ". L'article 6 du même décret prévoit que le conseil de discipline délibère à huis clos hors la présence du fonctionnaire poursuivi, de son ou de ses défenseurs et des témoins.
5. Le conseil de discipline s'est réuni le 25 avril 2012. Il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intervention, au demeurant immédiatement censurée par le président, du commandant Maussan, chef du centre de rétention administrative, qui n'était pas membre, et la présence au délibéré du représentant de l'autorité disciplinaire, qui n'a pas pris part au vote et aux débats, auraient exercé une influence sur le sens de l'avis.
6. Le dernier alinéa de l'article 5 du décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 prévoit que le fonctionnaire et, le cas échéant, son ou ses défenseurs peuvent, à tout moment de la procédure devant le conseil de discipline, demander au président l'autorisation doivent être invités à présenter d'ultimes observations avant que le conseil ne commence à délibérer. Si M. M'ze Mogne fait valoir qu'il n'a pas pris la parole en dernier, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait présenté une demande en ce sens ou qu'il aurait été empêché de faire valoir ses observations. En tout état de cause, il n'apparaît pas que cette circonstance aurait exercé une influence sur le sens de la décision. Enfin, il ne ressort ni du procès-verbal du conseil de discipline ni d'aucune autre pièce du dossier que le président aurait manifesté une animosité personnelle ou fait preuve de partialité à l'égard de M. M'ze Mogne.
Sur la légalité interne :
7. Aux termes de l'article 66 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes. (...) Troisième groupe : (...) - l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois mois à deux ans (...) ". Aux termes de l'article 6 du décret n° 86-592 du 18 mars 1986 : " Tout manquement aux devoirs définis par le présent code expose son auteur à une sanction disciplinaire, sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale. ".
8. Il est fait grief à M. M'ze Mogne d'avoir, lors d'une patrouille de la brigade anti-criminalité, d'une part, refusé à deux reprises d'exécuter les ordres de son supérieur qui lui demandait de prendre le volant pour remplacer un collègue puis d'aider à transférer à l'hôpital une personne placée en salle de dégrisement, d'autre part, d'avoir incité cette personne à la rébellion en lui parlant dans son dialecte. La matérialité des faits d'insubordination est établie par les déclarations précises et concordantes de témoins directs recueillies dans le cadre de l'enquête administrative. Quand bien même la matérialité des faits d'incitation à la rébellion ne serait pas établie par les seuls témoignages des collègues qui comprenaient le shimaoré, il résulte de l'instruction que l'autorité disciplinaire aurait pris la même décision si elle s'était seulement fondée sur la première série de griefs. De tels faits étaient de nature à justifier légalement une sanction disciplinaire. Eu égard tant aux fonctions de l'intéressé que de sa manière de servir qui avait déjà créé des tensions au sein de la section d'intervention et de la brigade de nuit, la sanction de l'exclusion temporaire pour une durée de trois mois, dont deux mois avec sursis n'est pas disproportionnée.
9. M. M'ze Mogne fait valoir que l'autorité disciplinaire, s'abstenant de s'interroger sur les faits de violence sur un prévenu menotté qu'il avait dénoncés, a au contraire cherché à les " couvrir " en lui infligeant à lui-même une sanction. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que la sanction aurait été prise pour des motifs étrangers à l'intérêt du service. Elle n'est donc pas entachée de détournement de pouvoir.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. M'ze Mogne n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa demande.
DECIDE
Article 1er : La requête de M. M'ze Mogne est rejetée.
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N° 14BX2674