Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La commune de Dax a demandé au tribunal administratif de Pau de condamner solidairement M. A... et la société Dagouassat à lui verser la somme de 68 827,94 euros au titre des travaux de remise en état d'un auvent réalisé sur la place des Carmes et la somme de 3 084,72 euros au titre des frais d'expertise.
Par un jugement n° 1200990 du 1er avril 2014, le tribunal administratif de Pau a condamné la société Dagouassat à verser à la commune de Dax la somme de 65 754,22 euros, a mis les frais d'expertise d'un montant de 3 084,72 euros à la charge de la société et rejeté le surplus de la demande de la commune.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 22 juin 2014 et 30 septembre 2015, la commune de Dax, représentée par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 1er avril 2014 ;
2°) de condamner solidairement M. A...et la société Dagouassat à lui verser la somme de 71 912,66 euros, augmentée des intérêts au taux légal, eux-mêmes capitalisés, en réparation de son préjudice ;
3°) de condamner respectivement M. A...et la société Dagouassat à lui verser la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des marchés publics,
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Marianne Pouget,
- les conclusions de Mme Frédérique Munoz-Pauziès, rapporteur public,
- et les observations de MeC..., représentant la commune de Dax.
Considérant ce qui suit :
1. En vue de l'aménagement d'un espace public à l'angle de la rue des Carmes et de la rue d'Eyros, la commune de Dax a confié à M.A..., architecte, la conception d'un projet d'auvent abritant le public et des locaux commerciaux et la maîtrise d'oeuvre de celui-ci, par un acte d'engagement du 2 janvier 2003. Le 26 janvier 2004, la société Dagouassat s'est vu attribuer le lot n°2 " couverture-étanchéité " du marché public de travaux d'aménagement de la place des Carmes, ledit lot consistant en la pose d'une couverture sur l'auvent implanté sur la place. A la suite de la liquidation judiciaire de la société attributaire le 23 mars 2005, le marché conclu avec cette dernière a été résilié le 21 juillet 2005. Des désordres dus à des infiltrations provenant des eaux de pluies endommageant le plafond en bois de l'auvent sont apparus et ont donné lieu, à la demande de la commune de Dax, à la désignation d'un expert par une ordonnance du juge des référés du 27 septembre 2006. Se fondant, à titre principal, sur la responsabilité contractuelle des constructeurs et, à titre subsidiaire, sur la responsabilité décennale, la commune de Dax a demandé que la société Dagouassat et M. A...soient déclarés solidairement responsables de ces désordres et solidairement condamnés à lui payer la somme de 68 827,94 euros en réparation desdits désordres et la somme de 3 084,72 euros au titre des frais d'expertise. Par jugement du 1er avril 2014 dont la commune de Dax fait appel, le tribunal administratif de Pau a admis que la responsabilité contractuelle de la société Dagouassat était engagée, l'a condamnée à payer à la commune de Dax, en réparation des désordres constatés, la somme globale de 65 784,22 euros, avec intérêt au taux légal à compter du 25 mai 2012 et a mis à sa charge les frais d'expertise. La commune, qui conserve un intérêt à demander qu'un autre des constructeurs soit condamné à supporter la charge de la réparation, soutient que la responsabilité contractuelle de M.A..., qui a contribué à la réalisation des désordres, doit être retenue et que l'intéressé doit être condamné solidairement avec la société Dagouassat à lui payer la somme de 71 912,66 euros englobant les désordres et les frais d'expertise.
En ce qui concerne la responsabilité :
2. En l'absence de réception des travaux, le tribunal administratif a jugé à bon droit que la commune de Dax était fondée à rechercher la responsabilité contractuelle des constructeurs.
3. Il résulte de l'acte d'engagement du marché de maîtrise d'oeuvre signé le 22 janvier 2003 comme du cahier des clauses administratives particulières, que M. A...s'est vu attribuer, non pas seulement comme l'a jugé le tribunal administratif, les études d'esquisse (ESQ), l'avant-projet sommaire (APS), l'avant-projet définitif (APD), les études de projet (PRO), l'assistance pour la passation des contrats de travaux (ACT), les études d'exécution (EXE) et la confection du dossier des ouvrages exécutés (DOE) mais aussi une mission complète englobant, dès lors, contrairement à ce qui est dit au point 19 du jugement attaqué, la direction de l'exécution des travaux (DET).
4. Il ressort des pièces du dossier et notamment du rapport de l'expert que les infiltrations d'eau proviennent des plaques en polycarbonate qui ont été posées par la société Dagouassat sur l'auvent. L'expert attribue ces désordres à la mise en place défectueuse de la couverture réalisée par cette société et à la qualité même des plaques dont il s'est avéré, à la fin des opérations de pose, qu'il s'agissait d'un matériau " bas de gamme qui n'était pas sous avis technique ". Il relève ainsi parmi les causes des désordres que " l'utilisation de plaques en polycarbonate utilisées en couverture ou en paroi inclinée est du domaine non traditionnel. Aucun justificatif (avis technique) sur les plaques mises en oeuvre n'a été fourni " et s'agissant de l'imputabilité des désordres que " la conception n'a pas été mise en cause, ni le défaut de surveillance. Il s'agit d'une mauvaise exécution des travaux avec l'utilisation de plaques en polycarbonates dont l'avis technique n'a jamais été fourni ". Ainsi, il est établi que l'absence de production d'un avis technique permettant au maître d'oeuvre de déterminer les modalités adéquates de pose des plaques en polycarbonate afin de s'assurer notamment de leur parfaite étanchéité a contribué à la mise en place défectueuse de la couverture de l'auvent par la société Dagouassat et partant, aux désordres qui ont été constatés. Dans ces conditions, la commune de Dax est fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont estimé que les désordres ne trouvaient leur cause que dans les manquements commis par la société Dagouassat dans la pose de la couverture.
5. Dans le cadre de la mission ACT qui lui était confiée, M. A...avait notamment l'obligation d'analyser les offres des entreprises soumissionnaires. Alors que la société Dagouassat, seule entreprise soumissionnaire, proposait de réaliser la verrière non en plaques ondulées en verre armé comme l'exigeaient les prescriptions du cahier des clauses techniques particulières mais en polycarbonate, sans spécifier davantage le matériau qu'elle entendait mettre en oeuvre, d'une part, et que son offre était inférieure de 68 % à l'estimation du marché d'autre part, le maître d'oeuvre a conclu à la possibilité de déclarer fructueux le lot n°2. Eu égard aux caractéristiques de l'offre présentée par la société Dagouassat, non conforme au CCTP, et dont l'architecte a néanmoins préconisé l'acceptation en l'absence de toute spécification sur le produit proposé, M. A...a manqué à son obligation de conseil et a, en conséquence, commis une faute de nature à engager sa responsabilité, les désordres ayant notamment pour cause la mise en oeuvre d'un matériau non traditionnel dont ni la qualité ni le procédé d'installation n'ont pu être vérifiés en l'absence de tout avis technique joint à l'offre de la société.
6. Par ailleurs, il est constant que l'entreprise Dagouassat, qui n'a participé à aucune des réunions de chantier, n'a pas produit, malgré les demandes répétées du maître d'oeuvre et de la société Bureau Véritas chargée du contrôle technique, les avis techniques des plaques de polycarbonate mises en oeuvre alors que dès la première réunion de chantier, le contrôleur technique les avait exigés eu égard au caractère non traditionnel des matériaux et avait émis le 18 juin 2004 un " avis réservé sur le procédé en l'absence des éléments suivants : avis technique avec portées admissibles, caractéristiques mécaniques des encadrements métalliques (faisant office de chevrons), adéquation du matériau en couverture, jeux de dilatation minimaux, prises en feuillures minimales, épaisseur des plaques prévues, entraxes des éléments porteurs, justification des éléments porteurs (les plans et coupes devront être également cotés ". Dans ces conditions, la commune de Dax est fondée à soutenir qu'en ne s'opposant pas à l'exécution des travaux alors que la qualité des matériaux employés et leur procédé de pose n'avaient pu être contrôlés, de sorte qu'il se trouvait dans l'incapacité de diriger correctement les travaux de mise en oeuvre du matériau qui nécessitaient d'autant plus d'attention que son utilisation en couverture était inhabituelle, le maître d'oeuvre a commis une deuxième négligence de nature à engager sa responsabilité.
7. Il résulte de ce qui précède que, eu égard à la carence de la maîtrise d'oeuvre dans l'exercice de son devoir de conseil et de sa mission de direction de l'exécution des travaux, il y a lieu de faire droit aux conclusions de la commune de Dax et de condamner M.A..., solidairement avec la société Dagouassat, à réparer l'intégralité des conséquences des désordres affectant l' auvent en litige.
Sur le préjudice :
8. La somme de 65 754,22 euros destinée à l'exécution des travaux propres à remédier aux désordres a été déterminée par les premiers juges, sur la base du rapport de l'expertise, en ne retenant que les travaux nécessaires à la réparation de l'ouvrage et consistant en la dépose de la couverture, la pose dans les règles de l'art de nouvelles plaques en polycarbonate faisant l'objet de l'avis technique 2/03-1048 et l'application d'un traitement lasure destiné à restaurer le plafond en bois. Aucun des constructeurs n'apporte d'éléments de nature à remettre en cause cette évaluation.
9. En revanche, si la commune de Dax demande le versement de la somme de 3 073,72 euros en réparation des travaux qu'elle aurait dû faire exécuter en 2012 par la société Massy pour éviter l'aggravation des désordres, il résulte de l'instruction qu'il pouvait être procédé aux travaux destinés à la réparation des désordres à la date du dépôt du rapport de l'expert, soit le 23 octobre 2009. Par suite, la commune de Dax n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont écarté ce chef de préjudice et fixé à 65 754, 22 euros le montant de son préjudice.
Sur les frais d'expertise :
10. Il y a lieu de faire droit à la demande de la commune de Dax tendant à la condamnation solidaire de la société Dagouassat et de M. A...à lui verser la somme de 3 084,72 euros au titre des frais d'expertise.
Sur les intérêts et leur capitalisation :
11. Comme l'a jugé à bon droit le tribunal administratif, la commune de Dax a droit aux intérêts au taux légal sur la somme de 65 754,22 euros à compter de la date d'enregistrement de sa requête, soit le 25 mai 2012. La capitalisation des intérêts a été demandée dès l'enregistrement de sa requête. Si cette capitalisation peut être demandée à tout moment devant le juge, elle ne peut, toutefois, prendre effet que lorsque les intérêts sont dus pour une année entière. La capitalisation s'accomplit ensuite de nouveau à chaque échéance annuelle ultérieure sans qu'il soit besoin de formuler une nouvelle demande. Ainsi, il y a lieu de faire droit à la demande de capitalisation de la commune de Dax à compter du 25 mai 2013, date à laquelle il était dû une année entière d'intérêts.
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".
13. M.A..., qui est la partie perdante, versera 1 500 euros à la commune de Dax au titre des frais de procès de cette dernière. Les conclusions présentées par la commune de Dax sur le même fondement, dirigées contre la société Dagouassat, de même que les conclusions de M. A... tendant à la condamnation de la commune de Dax, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, à lui verser la somme de 2 000 euros au titre des frais de procès, sont rejetées.
DECIDE
Article 1er : M. A...versera solidairement avec la société Dagouassat la somme de 65 754,22 euros à la commune de Dax. Cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 25 mai 2012 capitalisés à compter du 25 mai 2013 et à chaque échéance annuelle.
Article 2 : Les frais d'expertise d'un montant de 3 084,72 euros sont mis à la charge solidaire de M. A...et de la société Dagouassat.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Pau n° 1200990 du 1er avril 2014 est réformé en ce qu'il a de contraire aux dispositions qui précèdent.
Article 4 : M. A...versera à la commune de Dax la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de la commune de Dax et les conclusions présentées par M. A...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.
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N° 14BX01827