Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler l'arrêté du préfet de La Réunion du 31 août 2015 portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de renvoi.
Par un jugement n° 1500927 du 28 janvier 2016, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté la demande présentée par MmeA....
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 10 mars 2016, MmeA..., représentée par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de La Réunion du 28 janvier 2016 ;
2°) d'annuler l'arrêté précité du 31 août 2015 ;
3°) d'enjoindre au préfet de La Réunion de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ou, subsidiairement, de réexaminer sa situation, dans un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;
- l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Florence Rey-Gabriac,
- les conclusions de M. Pierre Bentolila, rapporteur public,
- et les observations de MeC..., représentant MmeA....
Considérant ce qui suit :
1. Mme B...A..., ressortissante malgache, née en 1951, est entrée en France le 16 avril 2011 sous couvert d'un visa touristique valable du 15 avril au 17 août 2011. En raison de son état de santé, elle a bénéficié, à compter du 11 juillet 2011, de titres de séjour " étranger malade " régulièrement renouvelés jusqu'au 26 mars 2015, date à laquelle elle a sollicité le renouvellement de ce titre. Après avis défavorable du médecin de l'agence régionale de santé et invitation du préfet de La Réunion à l'intéressée à lui présenter sous quinzaine tout élément susceptible de permettre un réexamen de sa situation, ce préfet a, par un arrêté du 31 août 2015, refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a enjoint de quitter le territoire français dans le délai de trente jours en fixant le pays de renvoi. Mme A...fait appel du jugement du tribunal administratif de La Réunion, qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne le refus de séjour :
2. En premier lieu, aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent (...) ". Aux termes de l'article 3 de cette même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".
3. La décision de refus de séjour mentionne, d'une part, les textes, notamment la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en particulier ses articles 3 et 8, ainsi que le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en particulier ses articles L. 313-11, 11° et L. 511-1-I, et, d'autre part, les considérations de fait, qui en constituent le fondement. Elle énonce la teneur de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé et précise qu'à la suite de cet avis, Mme A...ayant été invitée, par courrier du préfet 10 avril 2015, à produire tout élément susceptible de permettre un réexamen de sa situation personnelle, les éléments produits n'ont pas permis de remettre en cause l'appréciation qui avait été faite de sa situation. Par suite, et contrairement à ce que soutient la requérante, le préfet a exposé la raison pour laquelle il ne lui avait pas délivré le titre de séjour sollicité. Enfin, et alors que l'autorité préfectorale n'est pas tenue d'énoncer l'ensemble des éléments relatifs à la situation de l'étranger dont elle pourrait avoir connaissance, il ressort de la décision litigieuse que le préfet a bien pris en compte la situation familiale de l'intéressée. Dans ces conditions, le refus de séjour attaqué n'a pas été pris en méconnaissance des exigences de la loi du 11 juillet 1979.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat. ". Aux termes de l'article R. 313-22 de ce code : " (...) le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé (...). / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. (... ) ". L'arrêté du 9 novembre 2011 pris pour l'application de ces dernières dispositions, en vigueur à la date de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé, prévoit que le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale, si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, s'il existe dans le pays dont l'étranger est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale.
5. Par un avis du 7 avril 2015, le médecin inspecteur de santé publique de l'agence de santé Océan indien a estimé que l'état de santé de Mme A...nécessitait une prise en charge médicale, que le défaut de prise en charge pouvait entraîner des conséquences graves, que l'intéressée pouvait accéder à une prise en charge adaptée dans son pays d'origine maintenant que la phase critique était passée et qu'en conséquence, il émettait un avis défavorable au renouvellement de son titre de séjour " étranger malade ", sous réserve que Mme A...puisse revenir à La Réunion pour un bilan annuel. Comme cela a déjà été dit ci-dessus, à la suite de cet avis, le préfet de la Réunion a, le 10 avril 2015, adressé un courrier à l'intéressée en l'invitant, sous quinzaine, à présenter ses observations ou à produire tout document susceptible de conduire au réexamen de sa situation personnelle.
6. Si Mme A...fait valoir que l'avis de ce médecin est entaché d'irrégularité, " dès lors qu'il ne comporte pas les précisions requises par l'arrêté du 8 juillet 1999 ", ce moyen est inopérant, dès lors que ce texte n'est plus applicable. En tout état de cause, Mme A...ne précise pas en quoi cet avis serait insuffisamment précis, alors au contraire qu'il est circonstancié et nuancé et comporte les précisions requises par l'arrêté précité du 9 novembre2011, sa rédaction démontrant ainsi, contrairement à ce qu'allègue la requérante, que le médecin de l'agence régionale de santé s'est livré à un examen attentif de sa situation médicale.
7. Il résulte de l'invitation formulée à Mme A...par le préfet dans son courrier du 10 avril 2015 que celui-ci, pour édicter le refus de séjour en litige, ne s'est pas senti lié par l'avis du médecin inspecteur de santé publique de l'agence de santé Océan indien.
8. Il ressort des pièces du dossier que Mme A...présentait une pathologie cardiaque sévère, à savoir un important rétrécissement mitral, qui a nécessité une intervention chirurgicale effectuée en novembre 2011 à La Réunion, qui a consisté en un remplacement valvulaire biologique. Si l'état de santé de Mme A...s'est ainsi amélioré, il est constant qu'il requiert néanmoins l'administration quotidienne d'un anticoagulant. Il est également constant, comme le montrent les certificats médicaux produits par MmeA..., que la prise de ces médicaments doit se faire sous surveillance biologique de son INR (" International Normalized Ratio "), qui est un des indicateurs de la coagulation sanguine, dès lors que la prise régulière d'anticoagulants est susceptible d'entraîner un risque hémorragique, toutes choses que ne conteste pas le préfet. Cependant, celui-ci affirme sans être contredit que les anticoagulants sont disponibles à Madagascar. La requérante, qui ne conteste ni la disponibilité de cette classe de médicaments, ni la possibilité de faire un bilan de l'INR dans son pays d'origine, se borne à faire valoir que, vivant en province, dans la ville d'Antalaha, distante de près de 600 km de la capitale, elle ne pourra ainsi avoir un accès effectif à cette surveillance biologique. Toutefois, les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 ne font pas obligation au préfet d'examiner l'accessibilité effective aux soins de l'intéressé dès lors qu'il existe un traitement approprié dans son pays d'origine. Dans ces conditions, et alors que rien ne s'oppose à ce que Mme A...vienne chaque année à La Réunion où vit sa fille, de nationalité française, le préfet de La Réunion n'a pas, en ayant refusé à Mme A...le renouvellement de son titre de séjour " étranger malade ", méconnu les dispositions de l'article L. 313-11, 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
9. En dernier lieu, aux termes du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1.- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2.- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
10. Mme A...fait valoir qu'elle vit à La Réunion depuis bientôt cinq ans et y a construit ses repères, qu'elle y vit avec sa fille, de nationalité française, aide-soignante au centre hospitalier universitaire de La Réunion, qui dispose de revenus et d'un logement suffisants pour pouvoir la prendre en charge, qu'à Madagascar, elle vit très loin de la capitale et ne pourra voir accès au suivi nécessaire de son traitement et qu'elle n'a pas non plus les moyens de venir tous les ans à La Réunion. Il ressort cependant des pièces du dossier que Mme A...a vécu près de soixante ans dans son pays d'origine, où elle ne démontre pas être dépourvue d'attaches familiales et personnelles, et où, comme cela a été dit ci-dessus, elle ne démontre pas que les médicaments ou la surveillance biologique dont elle a besoin ne sont pas disponibles. Dans ces conditions, eu égard à la durée de son séjour, le préfet de La Réunion n'a pas, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée et n'a pas méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il ne résulte pas non plus, au vu de ce qui précède, que le préfet aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure sur la situation personnelle de l'intéressée.
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
11. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance (...) d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; ( ...) L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l' objet d'une motivation (... ) ".
12. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que Mme A...ne peut utilement exciper de l'illégalité dont serait entachée la décision portant refus de séjour au soutien de ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français.
13. En second lieu, en application du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la motivation de la décision portant obligation de quitter le territoire français se confond avec celle du refus de titre de séjour, dont elle découle nécessairement, quand elle a été prise sur le fondement du 3° de ce I, comme en l'espèce. Par suite, dès lors que ce refus est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent d'assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, la motivation d'une telle obligation n'implique pas de mention spécifique pour respecter l'exigence de motivation des actes administratifs. Ainsi qu'il a été dit, la motivation du refus de séjour opposé à Mme A...par le même arrêté est conforme aux prescriptions de la loi du 11 juillet 1979. Dans ces conditions, la décision attaquée est suffisamment motivée.
14. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
15. Le présent arrêt rejette les conclusions en annulation présentées par MmeA.... Par suite, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ne peuvent être accueillies.
Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
16. Ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande Mme A...sur ce fondement.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.
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N° 16BX00895