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29/12/2016 | FRANCE | N°16BX02982

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 29 décembre 2016, 16BX02982


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 7 avril 2016 par lequel le préfet du Gers a refusé le renouvellement de sa carte de résident, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n°1600821 du 5 juillet 2016, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 30 août 2016, M.A..., représenté par Me

D'Hers, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1600821 du tribunal administrat...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 7 avril 2016 par lequel le préfet du Gers a refusé le renouvellement de sa carte de résident, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n°1600821 du 5 juillet 2016, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 30 août 2016, M.A..., représenté par Me D'Hers, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1600821 du tribunal administratif de Pau du 5 juillet 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Gers du 7 avril 2016 ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de résident " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions combinées de l'article L 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement du tribunal administratif de Pau est entaché d'un défaut de motivation et les premiers juges n'ont pas procédé à un examen objectif de son dossier ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation et une erreur de droit en refusant de renouveler sa carte de résident au motif qu'il aurait séjourné plus de trois années en dehors du territoire français, alors qu'il a été contraint de se rendre au Liban en 2010 pendant quatre ans pour y recevoir des soins ;

- il n'a pas été informé par le préfet de la possibilité de solliciter une prolongation du délai mentionné à l'article L. 314-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il devait bénéficier d'une procédure contradictoire ;

- cette décision méconnaît les dispositions des articles L.311-7, L.314-1, L.314-7,L.511-1, L.511-4, L.512-1,L.512-2 , L.513-1, L.513-2 et L.513-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il vit en France depuis près de trente ans, que ses trois enfants sont nés en France, qu'il y a étudié puis travaillé plusieurs années en qualité de professeur de mathématiques, que son épouse a obtenu une carte de résident en 2000 et que sa fille aînée, mariée à un ressortissant français, vit également en France et va y donner naissance à son premier enfant ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire méconnaît les dispositions des 5° et 8° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il vit en France de manière régulière depuis 1987, soit plus de vingt ans ; c'est à tort que les premiers juges et le préfet ont considéré qu'une présence continue sur le sol français était nécessaire dès lors que le texte ne prévoit qu'une présence " régulière " ; le préfet aurait dû considérer qu'il vivait en France depuis près de trente ans et ne pouvait donc pas faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français et ce nonobstant le fait que sa carte de résident n'avait pas été prolongée ;

- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le Liban comme pays de renvoi méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que la situation au Liban est instable et présente un risque de guerre civile.

Par ordonnance du 13 septembre 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 14 novembre 2016 à midi.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Catherine Girault a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.A..., ressortissant libanais, né le 28 août 1967, est entré en France en 1987 sous couvert d'un titre de séjour étudiant et a obtenu une carte de résident le 9 septembre 1995, renouvelée le 16 août 2005. Le 5 août 2015, il a sollicité le renouvellement de sa carte de résident. Par un arrêté du 7 avril 2016, le préfet du Gers a rejeté cette demande, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. A...relève appel du jugement n°1600821 du 5 juillet 2016 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Il ressort des termes mêmes du jugement attaqué que les premiers juges, qui n'ont omis de statuer sur aucun des moyens soulevés devant eux, ont relevé que : " M. A...a quitté le territoire français au cours de l'année 2010 pour s'établir au Liban, où réside(sic) son épouse et deux de ses enfants (...) que M. A...soutient que son état de santé l'a contraint à rester au Liban (...) cette circonstance ne faisait pas obstacle à ce qu'il sollicitât la prolongation de sa carte durant son séjour au Liban (...) " et ont ensuite ajouté que " M. A...soutient avoir résidé en France pendant plus de trente années et que sa fille aînée est mariée à un ressortissant français ; que, toutefois, l'intéressé, qui est entré en France, pour la dernière fois, en août 2015, n'établit pas être dépourvu d'attaches au Liban ". Ils ont, ce faisant, suffisamment motivé leur jugement.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

En ce qui concerne la décision portant refus de renouvellement de la carte de résident :

3. Aux termes de l'article L. 314-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de résident est valable dix ans. Sous réserve des dispositions des articles L. 314-5 et L. 314-7, elle est renouvelable de plein droit. ". Selon l'article L. 314-7 du même code : " La carte de résident d'un étranger qui a quitté le territoire français et a résidé à l'étranger pendant une période de plus de trois ans consécutifs est périmée (...). / La période mentionnée ci-dessus peut être prolongée si l'intéressé en a fait la demande soit avant son départ de France, soit pendant son séjour à l'étranger (...) ".

4. Il ressort des pièces du dossier que M.A..., qui est entré en France en 1987 sous couvert d'un titre de séjour étudiant, a quitté le territoire français en 2010 pour recevoir des soins au Liban jusqu'en 2015. Si le requérant soutient que son état de santé l'a contraint à rester au Liban et l'a mis dans l'impossibilité de revenir en France, il n'établit pas, en A...état de cause, avoir été mis dans l'impossibilité de solliciter la prolongation du délai de trois ans prévu par les dispositions précitées. En outre, la circonstance que le préfet ne l'ait pas informé de cette possibilité est sans influence sur la légalité de la décision contestée, dès lors qu'une telle obligation n'est prévue par aucun texte. Dans ces conditions, c'est sans commettre d'erreur de droit ni d'erreur manifeste d'appréciation que le préfet du Gers a estimé que la carte de résident de M. A...était périmée.

5. L'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

6. M. A...fait valoir qu'il réside en France depuis 1987, que ses trois enfants sont nés en France, qu'il y a travaillé plusieurs années, que son épouse a obtenu une carte de résident en 2000 et que sa fille aînée, mariée à un ressortissant français et enceinte, vit également en France. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que M. A...n'établit pas être dépourvu d'attaches au Liban, où vivent son épouse et deux de ses enfants, et n'établit aucune insertion récente en France, où il n'a présenté qu'une promesse d'embauche en qualité de vendeur alors qu'il a exercé le métier de professeur de mathématiques. Dès lors, au vu de l'ensemble de ces éléments, le préfet du Gers n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et pas davantage les dispositions de l'article L. 313-11 (7°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à supposer que M. A...ait entendu les invoquer en visant l'article " L.311-7 " de ce code.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

7. L'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 4° L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans, sauf s'il a été, pendant toute cette période, titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " ; 5° L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de vingt ans ;(..) 8° L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans et qui, ne vivant pas en état de polygamie, est marié depuis au moins trois ans avec un ressortissant étranger relevant du 2°, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage ".

8. Compte tenu de ce qui a été dit au point 4, à la date de la décision attaquée M. A...ne pouvait pas se prévaloir d'une résidence régulière en France depuis plus de 10 ans, dès lors que, contrairement à ce qu'il soutient, une telle résidence implique la continuité de son séjour.

9. Pour les mêmes motifs que ceux développés au point 6, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée serait entachée d'une violation de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par ailleurs, le moyen tiré d'une violation de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'est assorti d'aucune précision de nature à permettre à la cour d'en apprécier le bien-fondé. Il en va de même de l'invocation des dispositions de procédure contentieuse des articles L.512-1, L.512-2, L.513-1 et L.513-4 du même code .

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

10. M. A...se borne à soutenir que la situation politique au Liban est instable et qu'elle laisserait présager un risque de guerre civile. Toutefois, en invoquant seulement la situation politique au Liban, M. A...n'établit pas qu'il risquerait, en cas de retour dans son pays d'origine, d'être soumis à des traitements prohibés par les stipulations de l'article 3 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, l'article L.513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'a pas été méconnu.

11. Il résulte de A...ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte, de même que celles tendant à l'application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Gers.

Délibéré après l'audience du 1er décembre 2016 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, président,

M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur,

M. Paul-André Braud, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 29 décembre 2016.

Le président-assesseur,

Jean-Claude PAUZIÈSLe président-rapporteur,

Catherine GIRAULT

Le greffier,

Delphine CÉRON

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

No 16BX02982


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX02982
Date de la décision : 29/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Catherine GIRAULT
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : D'HERS

Origine de la décision
Date de l'import : 17/01/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2016-12-29;16bx02982 ?
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