Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D...E...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 6 février 2017 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 1701313 du 6 juillet 2017, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 5 octobre 2017, MmeE..., représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 6 juillet 2017 ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 6 février 2017 du préfet de la Gironde susmentionné ;
3°) d'enjoindre à l'autorité préfectorale, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " et, à titre subsidiaire de se prononcer à nouveau sur son droit au séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, à verser à son conseil, sur le fondement des dispositions combinées de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
En ce qui concerne l'arrêté pris dans son ensemble :
- l'arrêté contesté est entaché d'une incompétence de son signataire dès lors que le pouvoir de prendre un refus de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire n'appartient qu'au préfet du département et, qu'en l'espèce, la décision contestée a été prise par le secrétaire général, Monsieur C...B... ;
En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :
- la décision contestée a été prise en violation des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'elle est arrivée en France au mois de janvier 2012 et s'y maintient depuis, que, de sa relation avec un compatriote titulaire d'une carte de résident est née une enfant le 27 janvier 2016 et, qu'elle est parfaitement intégrée sur le territoire français ;
- la décision contestée a été prise en violation des stipulations de l'article 3-1 de la convention de New-York relative aux droits de l'enfant dès lors qu'elle a inévitablement pour conséquence de séparer l'enfant de l'un de ses parents ;
- la décision contestée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situations personnelle ;
En ce qui concerne la décision l'obligeant à quitter le territoire français :
- la décision contestée est illégale dès lors qu'elle aurait du bénéficier de plein droit d'un titre de séjour en raison de sa vie familiale ;
- la décision contestée a été prise en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'elle est en France depuis plus de cinq ans au jour de la décision contestée, mère d'une enfant née au mois de janvier 2016 de sa relation avec un compatriote, parfaitement intégrée sur le territoire français où réside son frère de nationalité française et isolée dans son pays d'origine ;
- la décision contestée a été prise en violation des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant dès lors que la décision contestée a pour conséquence de séparer l'enfant de l'un de ses deux parents.
Par un mémoire en défense enregistré le 10 novembre 2017, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête, comme non fondée.
Mme E...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 septembre 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 modifiée et le décret n°91-1266 du 19 décembre 1991 pris pour son application ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Christine Mège a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme E...ressortissante congolaise, née le 18 octobre 1985 à Pointe Noire (Congo) est entrée irrégulièrement en France, selon ses déclarations, au mois de janvier 2012. Elle a sollicité son admission au séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par arrêté du 6 février 2017, le préfet de la Gironde a pris une décision portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Elle relève appel du jugement n°1701313 du 6 juillet 2017 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
Sur le moyen dirigé contre l'arrêté pris dans son ensemble :
2. Mme E...reprend en appel le moyen déjà soulevé en première instance et tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté contesté. Elle ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le tribunal. Par suite, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.
Sur les moyens dirigés contre la décision portant refus de titre de séjour :
3. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ".
4. En application de ces stipulations et de ces dispositions, il appartient à l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France d'apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.
5. Pour soutenir que la décision en litige a porté une atteinte disproportionnée à son droit à une vie privée et familiale, Mme E...se prévaut de sa présence en France depuis janvier 2012 et de la naissance de sa fille le 27 janvier 2016 de sa relation avec un compatriote titulaire d'une carte de résident. Toutefois, alors que l'appelante indique elle-même vivre désormais séparée du père de sa fille sans préciser ni la durée de cette union ni la date de cette séparation, aucune des pièces du dossier n'établit l'existence d'une vie commune à la date du refus de titre de séjour ni que le père participerait à l'entretien et à l'éducation de sa fille. La seule production d'une attestation du père de l'enfant certifiant qu'il s'occupe de sa fille et d'une demande de souscription de Livret A de la part de celui-ci au bénéfice de sa fille ne saurait, en effet, suffire à établir la participation effective à l'entretien et l'éducation de l'enfant mineur. Si Mme E...se prévaut également de sa bonne intégration sur le territoire français où réside son frère de nationalité française ainsi que ses quatre enfants, également de nationalité française, elle ne l'établit pas. Elle n'établit pas non plus, l'intensité et la stabilité de ses liens avec son frère ainsi que ses neveux et nièces. En outre, il ressort des pièces du dossier que la requérante n'est pas dépourvue d'attache familiale dans son pays d'origine où réside son fils, mineur, issu d'une précédente union, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que celui-ci réside avec sa famille paternelle. Dans ces conditions, la décision contestée, au regard des buts qu'elle poursuit, n'a pas portée une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, pas plus qu'elle n'est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation. Dès lors, les moyens tirés de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'erreur manifeste d'appréciation ne peuvent qu'être écartés.
6. En second lieu, aux termes des dispositions de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant susvisée : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. / 2. Les Etats parties s'engagent à assurer à l'enfant la protection et les soins nécessaires à son bien-être, compte tenu des droits et des devoirs de ses parents, de ses tuteurs ou des autres personnes légalement responsables de lui, et ils prennent à cette fin toutes les mesures législatives et administratives appropriées". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
7. La mesure prise à l'encontre de Mme E...n'a pas pour effet de la séparer de sa fille mineure. En tout état de cause, si elle soutient que la mesure a nécessairement pour conséquence de séparer l'enfant de son père, il n'est pas établi par les pièces du dossier que celui-ci contribuerait à l'entretien et à l'éducation de sa fille ni même qu'il entretiendrait des liens affectifs avec elle. Par suite, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ne peut être qu'écarté.
Sur les moyens dirigés contre la décision l'obligeant à quitter le territoire français :
8. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que Mme E...n'est pas fondée à soutenir qu'elle devait bénéficier de plein droit d'un titre de séjour en raison de sa vie privée et familiale.
9. En second lieu, au vu des circonstances relatées au point 5 du présent arrêt, l'obligation de quitter le territoire français n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des buts qu'elle poursuit pas plus qu'elle n'est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation. Dès lors, les moyens tirés de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation ne peuvent qu'être écartés.
10. En troisième et dernier lieu et ainsi qu'il l'a été dit au point 7 du présent arrêt, si l'appelante soutient que la mesure a nécessairement pour conséquence de séparer l'enfant de son père, il n'est pas établi par les pièces du dossier que celui-ci contribuerait à l'entretien et à l'éducation de sa fille ni même qu'il entretiendrait des relations affectives avec elle. Par suite, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ne peut être qu'écarté.
11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme E...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme E...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...E..., à Me A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur. Copie en sera transmise au préfet de la Gironde.
Délibéré après l'audience du 28 novembre 2017, à laquelle siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, président,
Mme Christine Mège, président-assesseur,
M. Frédéric Faïck, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 19 décembre 2017.
Le rapporteur,
Christine MègeLe président,
Elisabeth Jayat
Le greffier,
Evelyne Gay-Boissières
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt
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N° 17BX03240