Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler, d'une part, l'arrêté du 19 juillet 2017 par lequel le préfet de la Haute-Vienne lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an, d'autre part, l'arrêté du 20 juillet 2017 par lequel cette même autorité l'a assigné à résidence pour une durée de 45 jours comprise entre le 24 juillet 2017 et le 7 septembre 2017 et lui a fait obligation de se présenter quotidiennement au commissariat de Limoges, à l'exception des dimanches et des jours fériés.
Par un jugement n°s1701072, 1701073 du 27 juillet 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges a constaté qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté du 20 juillet 2017 portant assignation à résidence, et a rejeté le surplus des conclusions.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 28 août 2017, M.A..., représenté par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges en date du 27 juillet 2017 en tant qu'il a rejeté ses conclusions en annulation dirigées contre l'arrêté du 19 juillet 2017 du préfet de la Haute-Vienne ;
2°) d'annuler cet arrêté du préfet de la Haute-Vienne du 19 juillet 2017 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Vienne de lui délivrer une carte de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou à défaut de lui enjoindre de réexaminer sa situation dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, et dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée en droit et en fait ;
- le préfet de la Haute-Vienne ne justifie pas avoir vérifié s'il entrait dans les catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement telles que définies par l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les articles L. 211-1 et L. 511-1 (I 1°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 6-5 de l'accord franco-algérien compte tenu de son ancienneté de séjour en France de six ans, de sa relation avec une ressortissante française depuis deux ans, de ses attaches familiales en France en les personnes de son oncle et de sa tante qui l'ont élevé ; il appartient au préfet de la Haute-Vienne de rapporter la preuve de la réalité et de l'intensité des liens qu'il entretiendrait avec sa famille résidant en Algérie ;
- pour les mêmes motifs, la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision portant refus d'accorder un délai de départ volontaire n'est pas motivée ;
- cette décision doit être annulée du fait de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- en refusant de lui accorder un délai de départ au volontaire au motif qu'il existerait un risque de soustraction et qu'il ne présenterait pas des garanties suffisantes de représentation, le préfet de la Haute-Vienne a commis une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision d'interdiction de retour est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle et familiale ;
- cette décision est entachée d'illégalité dès lors que son comportement ne constitue pas une menace à l'ordre public ; sa condamnation révèle une implication minime.
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 novembre 2017, le préfet de la Haute-Vienne conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par lettres du 29 novembre 2017, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour est susceptible de soulever d'office d'une part l'irrecevabilité de la demande tendant à l'annulation de la décision de refus de délai de départ volontaire en l'absence de moyens soulevés contre cette décision et d'autre part l'irrecevabilité des conclusions en annulation dirigées contre la décision portant interdiction de retour sur le territoire français, lesquelles sont nouvelles en appel.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer les conclusions à l'audience.
Les parties on été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Cécile Cabanne ;
- et les observations de MeD..., représentant M.A....
Considérant ce qui suit :
1. M. C...A..., ressortissant algérien né le 14 mai 1997, est entré sur le territoire français selon ses déclarations en 2008. A la suite de son interpellation le 19 juillet 2017 par la gendarmerie de Saint-Léonard-de-Noblat pour des faits de tentative de vol, l'irrégularité de son séjour a été constatée. Par un arrêté du même jour, le préfet de la Haute-Vienne a prononcé à son encontre une obligation de quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de renvoi et a également édicté une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an. Par un arrêté du 20 juillet 2017, le préfet de la Haute-Vienne a assigné M. A...à résidence dans ce département pour une durée de quarante-cinq jours du 24 juillet 2017 au 7 septembre 2017, lui a fait obligation de se présenter quotidiennement au commissariat de police de Limoges à l'exception des dimanches et jours fériés et lui a interdit de sortir du département de la Haute-Vienne sans autorisation. Par deux demandes enregistrées sous les numéros 1701072 et 1701073, M. A...a sollicité l'annulation de ces arrêtés. Entre-temps, en raison de son incarcération à la maison d'arrêt de Limoges le 20 juillet 2017, à la suite de sa condamnation à quatre mois d'emprisonnement par le tribunal de grande instance de Limoges, le préfet de la Haute-Vienne a, par arrêté du 24 juillet 2017, abrogé l'arrêté d'assignation à résidence. Par jugement n° 1701072, et 1701073 du 27 juillet 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges a décidé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur la demande tendant à l'annulation de la décision d'assignation à résidence et, d'autre part, a rejeté le surplus de sa demande. M. A...relève appel du jugement en tant qu'il n'a pas fait droit à sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 juillet 2017 du préfet de la Haute-Vienne.
Sur les conclusions en annulation :
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
2. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : 1° Si l' étranger ne peut pas justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d 'un titre de séjour en cours de validité (...) ". Aux termes de l'article L. 211-1 du même code : " Pour entrer en France, tout étranger doit être muni : / 1° Des documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; (...) ".
3. La mesure d'éloignement, qui vise le 1° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et précise que M. A...ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français et se trouve dépourvu de titre de séjour en cours de validité, est suffisamment motivée au regard des exigences du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
4. Il ressort des termes mêmes de la décision litigieuse que le préfet de la Haute-Vienne, qui a vérifié, au vu du procès-verbal d'audition de M.A..., si cette mesure ne portait pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale, a procédé à un examen particulier de la situation de M. A...avant de l'obliger à quitter le territoire français.
5. Si M. A...a déclaré lors de son audition à la compagnie de gendarmerie départementale de Limoges le 19 juillet 2017 qu'il était entré régulièrement sur le territoire français muni d'un visa et qu'il était également titulaire d'un titre de séjour, il ne produit aucune pièce de nature à corroborer ces dires, qu'il n'a au demeurant pas repris devant la cour. Dans ces conditions, M. A...entrait bien dans le champ d'application des dispositions précitées sur le fondement desquelles le préfet de la Haute-Vienne lui a fait obligation de quitter le territoire français.
6. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". L'article 6 de l'accord franco algérien du 27 décembre 1968 susvisé prévoit que : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5° au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ".
7. Se prévalant de son droit à mener une vie privée et familiale normale, M. A...fait valoir qu'il a été élevé par son oncle et sa tante résidant en France en vertu d'un acte de kafala, et qu'il conserve avec eux des liens étroits. A supposer que cet acte de recueil légal, non daté, produit au dossier soit valide, et s'il ne peut être contesté la réalité de ses liens familiaux, M. A... n'établit sa présence sur le territoire qu'au plus tôt en mai 2013, soit depuis quatre ans à la date de la décision attaquée, les témoignages de ses oncle et cousins étant insuffisamment probants pour établir une scolarité suivie en France. La relation sentimentale qu'il allègue entretenir depuis plus d'un an avec une ressortissante française, qu'il n'a pas évoquée lors de son entretien en gendarmerie, est également récente. Il est constant que le couple n'a pas d'enfant. M. A...ne démontre pas, en outre, avoir déployé des efforts sérieux pour s'intégrer en France, alors qu'il a déclaré être connu par les services de police pour vol en 2013 et 2015 et qu'il a été condamné le 20 juillet 2017 par le tribunal de grande instance de Limoges à une peine de quatre mois d'emprisonnement pour vol par ruse, effraction ou escalade dans un local d'habitation ou un lieu d'entrepôt aggravé par une autre circonstance, en l'occurrence la conduite d'un véhicule sans permis. Il n'est pas dépourvu d'attaches familiales en Algérie où résident, a minima, ses parents. Dans ces conditions, la décision contestée n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de M. A...une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis et n'a donc méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien.
En ce qui concerne la décision de refus de délai de départ volontaire :
8. Si, dans son mémoire introductif d'appel, M. A...a soulevé des moyens contre la décision refusant de fixer un délai de départ volontaire, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé n'avait soulevé aucun moyen, en première instance, à l'encontre de cette décision. Dès lors, sa demande tendant à l'annulation de cette décision était irrecevable. Par suite, les moyens soulevés en appel sont nécessairement irrecevables.
En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pendant un an :
9. Si M. A...entend demander à la cour l'annulation de la décision du 19 juillet 2017 lui interdisant de revenir sur le territoire français pendant un délai d'un an, il n'a toutefois présenté devant le tribunal administratif de Limoges aucune conclusion dirigée contre cette décision. Par suite, ces conclusions sont nouvelles en appel et doivent, dès lors, être rejetées comme irrecevables.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de la Haute-Vienne lui faisant obligation de quitter sans délai le territoire français et fixant le pays de renvoi. Par conséquent, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Vienne.
Délibéré après l'audience du 14 décembre 2017 à laquelle siégeaient :
Mme Catherine Girault, président,
M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur,
Mme Cécile Cabanne, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 11 janvier 2018.
Le rapporteur,
Cécile CABANNELe président,
Catherine GIRAULT
Le greffier,
Virginie MARTY
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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No 17BX02950