Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... C...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision par laquelle le préfet du Tarn a implicitement refusé de lui délivrer un titre de séjour sur sa demande présentée en mai 2016, l'arrêté du 30 mai 2017 par lequel le préfet du Tarn a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ainsi que la décision du préfet du Tarn du 19 septembre 2017 portant assignation à résidence dans le département du Tarn.
Par un jugement n° 1702916 du 26 septembre 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté les conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire, la décision fixant le pays de renvoi et la décision portant assignation à résidence.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 31 octobre 2017, M. B... C..., représenté par
MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 26 septembre 2017 ;
2°) d'annuler la décision du préfet du Tarn du 30 mai 2017 l'obligeant à quitter le territoire français ;
3°) d'annuler la décision du préfet du Tarn du 19 septembre 2017 portant assignation à résidence dans le département du Tarn ;
4°) enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour temporaire dans un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé ce délai, subsidiairement de réexaminer sa situation et lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;
5°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 800 euros en application de
l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les décisions de refus de titre de séjour sur la base desquelles l'obligation de quitter le territoire a été prise sont illégales pour, la première, être insuffisamment motivée, la seconde, être insuffisamment motivée, entachée d'une erreur de fait, d'une erreur de droit, d'une méconnaissance du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, d'une violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- l'obligation de quitter le territoire méconnaît elle-même l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'assignation à résidence est privée de base légale du fait de l'illégalité du refus de titre et de l'obligation de quitter le territoire, méconnaît le principe général du droit d'être entendu, est entachée d'une erreur de fait et d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 22 février 2018, le préfet du Tarn conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. C...ne sont pas fondés.
Un mémoire présenté pour M. C...a été enregistré le 5 mars 2018, postérieurement à la clôture d'instruction.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M.A...,
- et les observations de Me D...représentant M.C....
Une note en délibéré présentée pour M. C...a été enregistrée le 8 mars 2018.
Considérant ce qui suit :
1. M. C...ressortissant algérien né le 3 juillet 1958 est entré en France, le
25 octobre 2014, pour y rejoindre son épouse. Il a bénéficié d'une autorisation provisoire de séjour le 4 juin 2015 en raison de l'état de santé de sa conjointe, régulièrement renouvelée jusqu'au 3 avril 2017. Par un arrêté du 30 mai 2017, le préfet du Tarn a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit. Puis, par un arrêté du 19 septembre 2017, le préfet du Tarn a assigné M. C...à résidence. Ce dernier relève appel du jugement
du 26 septembre 2017 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire, la décision fixant le pays de renvoi et la décision portant assignation à résidence, les conclusions dirigées contre les refus de titre de séjour étant laissées à la compétence de la formation collégiale du tribunal.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
En ce qui concerne le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité des refus de titres :
2. L'arrêté du 30 mai 2017 par lequel le préfet du Tarn a expressément rejeté la demande de titre de séjour présentée par M. C...s'est entièrement substitué à la décision implicite née du silence initialement gardé sur cette demande. L'appelant ne peut donc utilement se prévaloir au soutien de ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire de l'illégalité de cette décision implicite.
3. En l'absence d'éléments nouveaux en appel venant au soutien du moyen soulevé devant le tribunal tiré de l'insuffisance de motivation de la décision de refus de séjour
du 30 mai 2017, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinemment retenus par le premier juge.
4. Aux termes du b) de l'article 7 de l'accord franco-algérien : " Les ressortissants algériens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée reçoivent après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les services du ministre chargé de l'emploi, un certificat de résidence valable un an pour toutes professions et toutes régions, renouvelable et portant la mention " salarié " : cette mention constitue l'autorisation de travail exigée par la législation française ".
5. Il ressort des pièces du dossier que le directeur des services chargés de l'emploi dans le département du Tarn a rendu, le 30 août 2016, un avis défavorable à la demande initiale
de M. C...d'un certificat de résidence algérien portant la mention " salarié " au regard de la situation défavorable de l'emploi dans le domaine de l'aide à la personne alors que l'intéressé présentait un contrat de travail dans ce champ d'activité. Alors qu'il est constant que la situation de l'emploi n'avait pas changé au 30 mai 2017, date du refus de séjour litigieux, M. C...qui persiste à présenter un contrat de travail dans le même domaine d'activité, n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait commis une erreur de fait ou une erreur de droit en rejetant sa demande présentée sur le fondement des stipulations précitées du b) de l'article 7 de l'accord franco-algérien.
6. L'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 régit d'une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et à y exercer une activité professionnelle, ainsi que les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés et leur durée de validité, et les conditions dans lesquelles leur conjoint et leurs enfants mineurs peuvent s'établir en France. Il suit de là que les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui sont relatives aux différents titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers en général et aux conditions de leur délivrance, ne sont, à l'exception de certaines dispositions de procédure qui s'appliquent à tous les étrangers qui n'ont pas été écartées par une disposition contraire expresse contenue dans cet accord, pas applicables aux ressortissants algériens, lesquels relèvent des règles fixées par l'accord précité. Ainsi, M. C...ne peut utilement invoquer les dispositions de
l'article L. 311-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à l'encontre de la décision de refus de certificat de résidence algérien du 30 mai 2017.
7. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, où à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) / Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ". Pour l'application des stipulations précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine. ".
8. M. C...est entré en France récemment à l'âge de 56 ans. S'il se prévaut de la présence régulière de son épouse en France, celle-ci a déclaré, lors de sa propre demande de renouvellement de titre du 8 décembre 2016, vivre séparément de son conjoint tant sur l'imprimé cerfa que sur une attestation manuscrite et elle est connue des services de la caisse d'allocations familiales comme vivant séparée depuis 2003. À supposer que la communauté de vie ait repris à la date de la décision litigieuse, la durée en est nécessairement faible. Si l'appelant se prévaut également de la présence de ses enfants en France, ces derniers sont majeurs et n'ont pas vécu avec leur père depuis l'année 2003 de sorte que l'appelant ne justifie pas de l'intensité des liens qui les unissent. Il n'est, par ailleurs, pas dépourvu d'attaches personnelles et familiales dans son pays d'origine, où il a vécu la majeure partie de sa vie et où résident ses soeurs. Dans ces conditions, la décision portant refus de certificat de résidence ne porte pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts qu'elle poursuit et ne méconnaît donc ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien. Pour les mêmes motifs, elle n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M.C....
9. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré par voie d'exception de l'illégalité des décisions portant refus de certificat de résidence algérien, doit être écarté.
En ce qui concerne l'autre moyen :
10. Pour les mêmes motifs que ceux qui ont été développés au point 8, l'appelant n'est pas fondé à soutenir que l'obligation de quitter le territoire prise à son encontre méconnaîtrait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Sur la décision portant assignation à résidence :
11. L'appelant qui n'établit pas l'illégalité des décisions portant refus de certificat de résidence algérien et obligation de quitter le territoire du 19 septembre 2017, n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté portant assignation à résidence serait privé de base légale.
12. Il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne que le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union. Il appartient aux États membres, dans le cadre de leur autonomie procédurale, de déterminer les conditions dans lesquelles le respect de ce droit est assuré. Ce droit se définit comme celui de toute personne de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours d'une procédure administrative avant l'adoption de toute décision susceptible d'affecter de manière défavorable ses intérêts. Il ne saurait cependant être interprété en ce sens que l'autorité nationale compétente est tenue, dans tous les cas, d'entendre l'intéressé lorsque celui-ci a déjà eu la possibilité de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur la décision en cause.
13. M. C...soutient qu'il n'a pas été mis en mesure de faire valoir ses observations faisant obstacle à une assignation à résidence. Cependant, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait sollicité en vain un entretien avec les services de la préfecture et qu'il aurait ainsi été empêché de faire valoir ses observations. Par suite, le moyen tiré du non-respect des droits de la défense ne peut qu'être écarté.
14. En l'absence d'éléments nouveaux en appel venant au soutien des moyens soulevés devant le tribunal tirés de l'erreur de fait et de l'erreur d'appréciation, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinemment retenus par le premier juge.
15. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire, la décision fixant le pays de renvoi et la décision portant assignation à résidence. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera transmise pour information au préfet du Tarn.
Délibéré après l'audience du 6 mars 2018 à laquelle siégeaient :
M. Éric Rey-Bèthbéder, président,
M. Didier Salvi, président-assesseur,
Mme Aurélie Chauvin, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 3 avril 2018
Le rapporteur,
Didier A...
Le président,
Éric Rey-BèthbéderLe greffier,
Vanessa Beuzelin
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
2
N° 17BX03446