Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D...A...B...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 11 septembre 2017 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 1704408 du 29 décembre 2017, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 25 janvier 2018, M. A...B..., représenté par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 29 décembre 2017 ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 11 septembre 2017 du préfet de la Gironde ;
3°) d'enjoindre à l'autorité préfectorale de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en application des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, à verser à son conseil, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'une erreur de droit dès lors que le préfet de la Gironde a ajouté la condition du " voyage sans risque " aux trois conditions légalement posées par les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; de plus, il n'a pas examiné la condition de l'accès effectif aux soins alors qu'il y était légalement tenu ; il a rendu sa décision sur la base d'un avis incomplet du collège de médecins, lequel ne s'est pas prononcé sur ce point ;
- le préfet de la Gironde a commis une erreur de droit dès lors qu'il s'est estimé lié par l'avis, au demeurant incomplet et imprécis, du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;
- la décision contestée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il a subi un état de stress post-traumatique et qu'il est, à ce titre, régulièrement suivi depuis juillet 2016 et, surtout, que son état de santé est difficile à traiter et que les soins nécessaires ne sont guères accessibles au Cameroun et que, même si c'était le cas, il n'y aurait pas effectivement accès en raison de sa situation financière ;
- la décision l'obligeant à quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;
- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation en raison des conséquences qu'aurait son exécution sur son état de santé.
Par un mémoire en défense, enregistré le 1er mars 2018, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués par M. A...B...ne sont pas fondés en renvoyant à ses écritures de première instance.
Par ordonnance du 9 février 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 6 mars 2018 à 12h00.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux ;
- le code de justice administrative.
Par décision du 1er mars 2018, le président de la cour a désigné M. Frédéric Faïck pour exercer temporairement les fonctions de rapporteur public en application des articles R. 222-24 et R. 222-32 du code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Elisabeth Jayat a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. D...A...B..., ressortissant camerounais né le 20 décembre 1983, est entré en France à une date indéterminée et a sollicité le 15 novembre 2016 son admission au séjour dans le cadre des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par arrêté du 11 septembre 2017, le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. A... B... relève appel du jugement du 29 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions dirigées contre la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. Chaque année, un rapport présente au Parlement l'activité réalisée au titre du présent 11° par le service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ainsi que les données générales en matière de santé publique recueillies dans ce cadre. ". L'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant: a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; d) la durée prévisible du traitement. Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Cet avis mentionne les éléments de procédure. Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".
3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que, par avis du 2 août 2017, sur lequel le préfet s'est appuyé pour fonder l'arrêté contesté, le collège des médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que si l'état de santé de M. A...B...nécessite une prise en charge médicale, le défaut d'une telle prise en charge ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'au vu des éléments de son dossier, l'état de santé de l'intéressé peut lui permettre de voyager sans risque vers le pays d'origine. Dès lors qu'il estimait que la condition concernant la gravité des conséquences d'un défaut de prise en charge n'était pas remplie, le préfet de la Gironde n'était pas tenu d'examiner la troisième condition, relative à l'accès effectif au traitement approprié dans le pays d'origine. L'avis du collège des médecins n'avait pas davantage à se prononcer sur ce point dès lors que le collège estimait que le défaut de prise en charge médicale ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. En outre, en se fondant sur la circonstance de ce que l'état de santé de M. A...B...lui permettait de voyager sans risque vers son pays d'origine, le préfet de la Gironde n'a pas ajouté une condition aux dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile mais s'est contenté de prendre en compte tous les éléments relatifs à la situation de l'intéressé et de vérifier si l'arrêté en litige pouvait légalement être pris. Dès lors, en refusant de délivrer un titre de séjour à l'intéressé, le préfet de la Gironde ne s'est pas fondé sur un avis incomplet et n'a pas commis d'erreur de droit.
4. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Gironde se serait cru lié par l'avis du collège des médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration en date du 2 août 2017. Dès lors, le moyen tiré de ce que le préfet de la Gironde aurait commis une erreur de droit ne peut qu'être écarté.
5. En troisième lieu, pour infirmer l'avis du 2 août 2017 du collège des médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, l'appelant verse au dossier des ordonnances, des documents généraux et non circonstanciés concernant son état de stress post traumatique, une torsion du testicule, les effectifs en terme de médecins spécialistes au Cameroun, l'état des hôpitaux publics dans ce pays ainsi que le profil pharmaceutique de celui-ci, plusieurs attestations décrivant son état de stress, ainsi qu'un certificat médical en date du 22 septembre 2017 du docteur Maury, praticien hospitalier, se contentant d'affirmer que le requérant est régulièrement suivi depuis juillet 2016 pour un état de stress post-traumatique qui nécessite un suivi et un traitement psychotrope par antidépresseur et neuroleptique anxiolytique. Aucun de ces éléments ne porte sur les conséquences qu'aurait un arrêt de traitement sur la santé de M. A...B...et n'est ainsi de nature à remettre en cause l'appréciation portée par le préfet. Dans ces conditions, le préfet de la Gironde n'a pas méconnu les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen doit être écarté.
Sur les conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français :
6. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. A...B...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour à l'encontre de la décision l'obligeant à quitter le territoire français.
7. En deuxième lieu, il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que l'exécution de la mesure d'éloignement serait impossible du fait de l'état de santé du requérant.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, sa requête doit être rejetée y compris ses conclusions à fin d'injonction et ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A...B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...A...B..., au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur. Copie en sera transmise au préfet de la Gironde.
Délibéré après l'audience du 20 mars 2018, à laquelle siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, président,
M. Pierre Bentolila, président-assesseur,
Mme Florence Madelaigue, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 3 mai 2018.
Le président-assesseur,
Pierre BentolilaLe président-rapporteur
Elisabeth JayatLe greffier,
Evelyne Gay-Boissières
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 18BX00325