Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E...D...a demandé par une requête du 20 novembre 2017 au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 20 octobre 2017 par lequel le préfet de la Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait renvoyé.
Par un jugement n°1702626 du 7 mars 2018, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 27 mars 2018, M.D..., représenté par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 7 mars 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Vienne du 20 octobre 2017 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Vienne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou à défaut, de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de 48 heures sous la même astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du
10 juillet 1991.
Il soutient que :
En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :
- elle a été signée par une autorité incompétente dès lors que la décision ne vise pas de délégation donnée à M. C...par le préfet ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle a été prise en méconnaissance de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle a été prise en méconnaissance de l'article L. 313-11 7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation sur sa situation personnelle ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire :
- elle a été signée par une autorité incompétente dès lors que la décision ne vise pas de délégation donnée à M. C...par le préfet ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle a été prise en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation sur sa situation personnelle ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
- elle a été signée par une autorité incompétente dès lors que la décision ne vise pas de délégation donnée à M. C...par le préfet ;
- elle est insuffisamment motivée.
Par un mémoire en défense, enregistré le 25 mai 2018, le préfet de la Vienne conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens du requérant n'est fondé.
Par ordonnance du 24 avril 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 23 mai 2018 à 12 heures.
M. D...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 avril 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme F...a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M.D..., né le 10 janvier 1999 et de nationalité malienne, est entré en France le 21 avril 2015 selon ses déclarations. Il a été pris en charge par le service de l'aide sociale à l'enfance jusqu'à sa majorité le 11 janvier 2017. Le 24 mai 2017 il a demandé un titre de séjour au titre de " ses liens personnels et familiaux ". Par un arrêté du 20 octobre 2017, le préfet de la Vienne a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination. M. D...relève appel du jugement du 7 mars 2018 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa requête tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la compétence du signataire de l'arrêté attaqué :
2. M. A...C..., sous-préfet hors classe, secrétaire général de la préfecture de la Vienne, signataire de l'arrêté contesté, bénéficiait d'une délégation de signature du préfet de la Vienne par arrêté du 4 septembre 2017 régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture. Cet arrêté de délégation prévoit en son article 3 que, s'agissant du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, délégation de signature est consentie à M. A...C...pour signer les refus de séjour et obligations de quitter le territoire. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte contesté doit être écarté.
Sur la décision de refus de titre de séjour :
3. En premier lieu, l'acte contesté vise les articles de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, du code des relations entre le public et l'administration et du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont il fait application. L'arrêté indique ensuite que M. D...est entré irrégulièrement en France le 21 avril 2015 ; qu'il a été pris en charge par le service de l'Aide sociale à l'enfance du 22 avril 2015 au 11 janvier 2017. Par ailleurs, le préfet a relevé que M. D...est célibataire et sans charge de famille et qu'il n'est plus pris en charge par l'Aide sociale à l'enfance en raison de sa majorité et qu'il n'est pas inscrit dans un cycle d'études supérieures ; qu'il ne démontre pas avoir créé en France des liens personnels et familiaux stables, anciens et intenses et aussi que, faute de disposer de ressources et d'exercer une activité, son insertion dans la société française n'est pas établie. Ce faisant, le préfet, qui n'était pas tenu de retracer en détail le parcours en France de M.D..., a suffisamment motivé sa décision en droit comme en fait.
4. En deuxième lieu, M. D...reprend en appel, dans des termes identiques, sans invoquer d'éléments de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée en première instance et sans critiquer la réponse qui lui a été apportée par le tribunal administratif, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué a été pris en méconnaissance de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...). ".
6. M. D...soutient qu'il n'a jamais connu son père et n'a pas de frères et soeurs, qu'il vit en France depuis deux ans et demi et suit des cours de français pour acquérir une plus grande autonomie et s'insérer dans la société française et qu'il a tissé des liens importants en France notamment auprès d'associations d'aides aux jeunes migrants. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé, prise en charge par l'aide sociale à l'enfance jusqu'au
11 janvier 2017, date de sa majorité, a suivi une scolarité en CAP cuisine entre 2015 et 2017 sans obtenir de diplôme. Sa demande de prise en charge dans le cadre d'un contrat jeune majeur n'a pas été acceptée. Alors qu'il est célibataire et sans charge de famille, l'intéressé n'établit pas qu'il serait dépourvu d'attaches familiales au Mali où réside à tout le moins sa mère. Dans ces conditions, la décision attaquée n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de M. D...une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis et n'a donc pas méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, cette décision n'est pas entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire :
7. En vertu des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour. Cette dernière décision comporte, ainsi qu'il a été dit au point 3, l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles l'autorité préfectorale s'est fondée pour refuser de délivrer un titre de séjour à M.D.... Ainsi, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation ne peut qu'être écarté.
8. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 6, la décision portant obligation de quitter le territoire français attaquée n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus qui lui est opposé, n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle du requérant.
Sur la décision fixant le pays de renvoi :
9. La décision fixant le pays de renvoi qui mentionne l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et indique que M. D...n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention, est suffisamment motivée et révèle que le préfet a examiné la situation du requérant au regard de ces stipulations.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du
10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E...D...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Vienne.
Délibéré après l'audience du 8 juin 2018 à laquelle siégeaient :
M. Philippe Pouzoulet, président,
Mme Marianne Pouget, président-assesseur,
Mme Caroline Gaillard, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 22 juin 2018.
Le rapporteur,
Caroline F...
Le président,
Philippe Pouzoulet
Le greffier,
Florence Deligey La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N°18BX01233