Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée Atelier carrosserie industrielle du Limousin (ACIL) a demandé au tribunal administratif de Limoges de prononcer la décharge de cotisations supplémentaires de taxe professionnelle auxquels elle a été assujettie au titre de l'année 2009, de cotisation foncière des entreprises auxquels elle a été assujettie au titre des années 2010, 2011 et 2012 et de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquels elle a été assujettie au titre des années 2011 et 2012.
Par un jugement n° 1301334 du 19 mai 2016, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 21 juillet 2016, et un mémoire complémentaire, enregistré le 22 juin 2017, l'EURL ACIL, représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Limoges du 19 mai 2016 ;
2°) de prononcer la décharge des rappels d'imposition en litige ;
3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient qu'elle ne peut pas être qualifiée d'établissement industriel au sens de l'article 1499 du code général des impôts.
Par des mémoires, enregistrés le 16 janvier 2017 et le 18 octobre 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Un mémoire, présenté pour l'EURL ACIL, a été enregistré le 24 octobre 2018, postérieurement à la clôture de l'instruction.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Romain Roussel, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme Sabrina Ladoire, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée Atelier carrosserie industrielle du Limousin (ACIL) a pour activité la réparation et la transformation de remorques de camions. Elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité pour la période du 1er avril 2007 au 31 mars 2010, à l'issue de laquelle l'administration fiscale a rectifié la valeur locative de ses biens au titre de plusieurs impôts. L'EURL ACIL relève appel du jugement du 19 mai 2016 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à la décharge de cotisations supplémentaires de taxe professionnelle auxquels elle a été assujettie au titre de l'année 2009, de cotisation foncière des entreprises auxquels elle a été assujettie au titre des années 2010, 2011 et 2012 et de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquels elle a été assujettie au titre des années 2011 et 2012, procédant de ce contrôle.
Sur les conclusions à fin de décharge portant sur les taxes foncières des années 2011 et 2012 :
2. Il résulte des dispositions du 4° de l'article R. 811-1 du code de justice administrative, dans leur rédaction applicable au litige, que si le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort sur les litiges concernant la taxe foncière, les jugements relatifs à cette taxe peuvent toutefois faire l'objet d'un appel devant la cour administrative d'appel lorsque le premier juge a statué par un seul jugement, d'une part, sur des conclusions relatives à la taxe foncière, d'autre part, sur des conclusions relatives soit à la taxe professionnelle, soit à la cotisation foncière des entreprises à la demande du même contribuable, et que ces impositions reposent, en tout ou partie, sur la valeur des mêmes biens appréciée la même année.
3. Le tribunal administratif de Limoges a, par le jugement attaqué, statué sur les conclusions de la requérante portant sur les cotisations supplémentaires de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2011 et 2012, et a statué, par ce même jugement, sur des conclusions relatives aux cotisations foncières des entreprises au titre des années 2011 et 2012 lesquelles, en vertu de l'article 1467 A du code général des impôts, sont assises sur la valeur locative des biens appréciée en 2009 et 2010. Ainsi, la cour n'est pas compétente pour connaître du jugement attaqué en tant qu'il statue sur les conclusions de la requête relatives aux cotisations supplémentaires de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles l'EURL ACIL a été assujettie au titre des années 2011 et 2012. Par suite, il y a lieu de transmettre ces conclusions au Conseil d'Etat.
Sur le surplus des conclusions en décharge :
4. En vertu de l'article 1469 du code général des impôts, pour le calcul de la taxe professionnelle et de la cotisation foncière des entreprises, la valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière est calculée suivant les règles fixées pour l'établissement de cette taxe. Les règles suivant lesquelles est déterminée la valeur locative des biens passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties sont définies à l'article 1496 du code général des impôts pour les " locaux affectés à l'habitation ou servant à l'exercice d'une profession autre qu'agricole, commerciale, artisanale ou industrielle ", à l'article 1498 pour " tous les biens autres que les locaux d'habitation ou à usage professionnel visés au I de l'article 1496 et que les établissements industriels visés à l'article 1499 " et à l'article 1499 pour les " immobilisations industrielles ". Revêtent un caractère industriel, au sens de ces articles, les établissements dont l'activité nécessite d'importants moyens techniques, non seulement lorsque cette activité consiste dans la fabrication ou la transformation de biens corporels mobiliers, mais aussi lorsque le rôle des installations techniques, matériels et outillages mis en oeuvre, fût-ce pour les besoins d'une autre activité, est prépondérant.
5. Il résulte de l'instruction que, lors des opérations de vérification de comptabilité dont a fait l'objet l'EURL ACIL, le service a constaté que l'entreprise procédait non seulement à des travaux de réparation mais également à l'adaptation et à la transformation de remorques à la demande de ses clients, nécessitant parfois la réalisation de pièces, conçues à partir d'un logiciel informatique de dessin. Le service a également constaté que, pour ce faire, l'EURL ACIL a recours à des matériels et outillages importants, consistant notamment en une cabine et une fosse inscrits au bilan pour une valeur de 162 823 euros, des ponts roulants inscrits au bilan pour une valeur de 31 140 euros, une presse plieuse d'une valeur de 33 388 euros, une cisaille guillotine
d'un montant de 24 715 euros, une presse hydraulique qu'elle a achetée 13 794 euros, une poinçonneuse dont le coût s'élève à 12 622 euros, une machine à bois d'un montant de 11 000 euros et une compresse de 11 400 euros. Le prix de revient global de son matériel, inscrit à l'activité du bilan de cette société, est de 191 499 euros. Dans ces conditions, et alors que quatre employés sont affectés à cette activité, le rôle des moyens techniques mis en oeuvre apparaît prépondérant par rapport à l'intervention du personnel.
6. La circonstance, dont se prévaut l'EURL ACIL, selon laquelle le montant de la main d'oeuvre correspond à 76 à 87 % de son chiffre d'affaires selon les années, celle tirée de ce qu'elle effectue un faible nombre de réceptions de véhicules au sens de l'article R. 321-15 du code de la route, celle tirée de ce qu'elle achète à des constructeurs des remorques déjà immatriculées et déjà peintes, le fait que l'acquisition du matériel en litige n'a eu pour but que de satisfaire aux exigences de la législation relative aux conditions de travail et à la sécurité des personnes ou encore son inscription au répertoire des métiers sont sans incidence sur le critère déterminant relatif au caractère prépondérant du rôle des matériels et outillages.
7. Dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration a regardé la requérante comme un établissement industriel au sens de l'article 1499 du code général des impôts pour l'établissement des bases d'imposition.
8. Il résulte de tout ce qui précède que l'EURL ACIL n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges, qui n'était pas tenu d'ordonner des mesures d'instruction, a rejeté sa demande.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande l'EURL ACIL au titre des frais exposés par l'EURL ACIL et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : Les conclusions de l'EURL ACIL tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Limoges du 19 mai 2016 en tant qu'il a rejeté ses demandes relatives aux cotisations supplémentaires de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2011 et 2012 sont renvoyées au Conseil d'État.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de l'EURL ACIL est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée Atelier carrosserie industrielle du Limousin et au ministre de l'action et des comptes publics. Copie en sera adressée au président de la section du contentieux du Conseil d'État et à la direction spécialisée de contrôle fiscal sud-ouest.
Délibéré après l'audience du 26 octobre 2018 à laquelle siégeaient :
M. Philippe Pouzoulet, président,
Mme Sylvande Perdu, premier conseiller,
M. Romain Roussel, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 30 novembre 2018.
Le rapporteur,
Romain Roussel
Le président,
Philippe Pouzoulet
La greffière,
Catherine Jussy
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 16BX02401