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20/12/2018 | FRANCE | N°17BX00198

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 20 décembre 2018, 17BX00198


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Toulouse, d'une part, de condamner l'Etat à lui verser, à titre de provision, la somme de 35 926,10 euros au titre des travaux d'isolation phonique de son domicile, d'autre part, de mettre à la charge de l'Etat les frais d'expertise taxés et liquidés à la somme de 6 433,28 euros, et une somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1500279 du 20 décembre 2016, le trib

unal administratif de Toulouse a rejeté la demande de M. A...et a mis les fra...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Toulouse, d'une part, de condamner l'Etat à lui verser, à titre de provision, la somme de 35 926,10 euros au titre des travaux d'isolation phonique de son domicile, d'autre part, de mettre à la charge de l'Etat les frais d'expertise taxés et liquidés à la somme de 6 433,28 euros, et une somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1500279 du 20 décembre 2016, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté la demande de M. A...et a mis les frais d'expertise à sa charge.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 19 janvier 2017 et le 15 juin 2018, M. A..., représenté par la SELARL LA CLE DES CHAMPS, demande à la cour :

1°) de réformer ce jugement n° 1500279 du tribunal administratif de Toulouse du 20 décembre 2016 ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser à la somme de 35 926,10 euros au titre des travaux de protection phonique ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 6 433,28 euros au titre du remboursement des frais d'expertise judiciaire ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- en qualité de propriétaire de l'immeuble en cause, il justifie d'un intérêt pour agir et la fin de non recevoir opposée par la DREAL doit être écartée ;

- contrairement à ce que relève l'étude d'impact de 1999 réalisée par l'Etat lors de la réalisation du projet de mise à 2x2 voies de la route nationale 88 et conformément à l'expertise de février 2013, le niveau sonore de la circulation sur cette route dépassera les seuils réglementaires en 2025 compte tenu de l'augmentation du trafic attendu ; l'Etat aurait dû, dès lors, prévoir un dispositif de protection phonique de sa maison, qui avait été envisagé dans l'hypothèse où la route n'était pas déplacée 50 m plus à l'est ;

- la circonstance qu'il demande l'indemnisation d'un préjudice futur n'empêche pas l'indemnisation dès lors que ce préjudice présente un caractère certain ;

- l'expert a chiffré les travaux de remplacement de menuiseries et installation de climatisation dans sa maison à 35 926,10 euros.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 18 juillet 2017 et le 19 juillet 2018, le ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- M. A...n'était pas recevable à former une nouvelle demande de provision devant le tribunal administratif de Toulouse dès lors que ce dernier avait déjà statué sur une demande identique rejetée par une ordonnance du 25 novembre 2013, rejet confirmé par une ordonnance de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 6 mars 2014 ;

- le préjudice de M. A...n'apparaît qu'hypothétique et n'est, à ce titre, pas indemnisable ; les chiffres relatifs au trafic routier estimé en 2025, retenus par l'expert, présentent un caractère erroné.

Par ordonnance du 18 juin 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 31 juillet 2018 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-Claude Pauziès,

- et les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. A...est propriétaire d'une maison d'habitation sur le territoire de la commune de Rosières dans le département du Tarn, située à environ 150 mètres du bord de la route nationale n° 88. La route nationale 88 a fait l'objet d'une mise à 2x2 voies et le tronçon aménagé à proximité du domicile de M. A...a été mis en service au mois de juin 2006. Parmi les options envisagées, il a été décidé de reculer le tracé de 50 m à l'est, portant la distance du lieu-dit " Les Gaillards " de 100 à 150 m de la route, pour éviter la création d'un merlon ou écran anti-bruit. M. A...a saisi d'une demande d'expertise le tribunal administratif de Toulouse, qui a fait droit à cette demande par une ordonnance du 18 février 2010. Sur la base de l'étude réalisée par l'expert désigné par le tribunal, M. A...a, par une requête en référé au titre de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, demandé la condamnation de l'Etat à lui verser une provision d'un montant de 35 926,10 euros ainsi que la somme de 6 433,28 euros au titre des frais d'expertise. Par ordonnance du 25 novembre 2013, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a rejeté la demande de provision de M.A.... Cette ordonnance a été confirmée par une ordonnance du juge des référés de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 6 mars 2014. Le 21 janvier 2015, M. A...a saisi le tribunal administratif de Toulouse de conclusions tendant à la réparation de son préjudice futur issu du dépassement des seuils réglementaires de niveau sonore causé par la route nationale n° 88 à l'horizon 2025. Il relève appel du jugement du 20 décembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Sur le principe de la responsabilité :

2. Le maître d'ouvrage est responsable, même en l'absence de faute, des dommages que les ouvrages publics dont il a la garde peuvent causer aux tiers, tant en raison de leur existence que de leur fonctionnement.

3. Pour demander la réparation des préjudices liés aux nuisances sonores provoquées par la route nationale 88, M.A..., qui ne conteste pas que les mesures acoustiques effectuées au droit de sa propriété ne révèlent aucun dépassement des seuils réglementaires, se fonde sur les prévisions de trafic établies dans le cadre de l'expertise judiciaire pour soutenir que le niveau des nuisances sonores sera excessif en 2025. Il résulte toutefois de l'instruction qu'en retenant la présence de 3 518 véhicules par jour en fin d'année 2009 comparée à la moyenne de 7 721 par jour constatée en 2011 pour en déduire une augmentation de trafic entre 2009 et 2011 de 220 %, l'expert s'est livré à une évaluation du trafic sur la route nationale 88 en 2025 manifestement erronée. En effet, et d'une part, le préfet a produit devant le tribunal des chiffres sur les trois derniers mois de l'année 2009, recensant respectivement 7 719, 6 974 et 6461 véhicules par jour, ce qui démontre que l'expert n'a retenu comme base de ses calculs qu'un seul sens de circulation. D'autre part, le recensement de la circulation sur le réseau routier national entre 2002 et 2011 ne constate quant à lui sur la route nationale 88 qu'une augmentation de 0,9 % par an du trafic. Par suite, les premiers juges ont pu retenir à juste titre que les conclusions de l'expertise se fondant sur des chiffres erronés et des estimations très aléatoires et hypothétiques de l'évolution du trafic routier sur la route nationale 88, le caractère certain du préjudice futur invoqué par M. A... n'était pas établi.

4. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre, que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande.

Sur les dépens:

5. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de revenir sur la dévolution des frais d'expertise effectuée par les premiers juges.

Sur les frais exposés par les parties à l'occasion du litige :

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. A...réclame sur le fondement de ces dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de la transition écologique et solidaire. Copie en sera adressée à M. C...D..., expert.

Délibéré après l'audience du 29 novembre 2018 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, président,

M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur,

Mme Nathalie Gay-Sabourdy, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 20 décembre 2018.

Le rapporteur,

Jean-Claude PAUZIÈSLe président,

Catherine GIRAULT

Le greffier,

Virginie MARTY

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et solidaire, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

4

N° 17BX00198


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17BX00198
Date de la décision : 20/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

67-02 Travaux publics. Règles communes à l'ensemble des dommages de travaux publics.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. Jean-Claude PAUZIÈS
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : SELARL "LA CLE DES CHAMPS"

Origine de la décision
Date de l'import : 01/01/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-12-20;17bx00198 ?
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