Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... B... épouse A... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 24 janvier 2018 par lequel le préfet des Hautes-Pyrénées a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n°1800634 du 31 mai 2018, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 2 novembre 2018, Mme A..., représentée par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement n°1800634 du tribunal administratif de Pau du 31 mai 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 24 janvier 2018 du préfet des Hautes-Pyrénées ;
3°) d'enjoindre au préfet des Hautes-Pyrénées à titre principal, de lui délivrer le titre de séjour sollicité dans le délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- les deux mémoires en défense du préfet ne lui ont été communiqués que les 16 et 17 mai 2018 alors que la clôture de l'instruction intervenait le 19 mai. Sa demande de report de la clôture de l'instruction a été rejetée. Elle n'a pas disposé d'un délai raisonnable pour répliquer aux mémoires en défense alors qu'ils contenaient une pièce essentielle. Ainsi le droit à la défense, le droit au procès équitable et le droit à l'égalité des armes ont été méconnus ;
- les premiers juges ont commis une omission à statuer sur le moyen tiré du vice de procédure résultant de la méconnaissance desarticles R. 313-22 et R. 313-24 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision portant refus de renouvellement d'un titre de séjour est entachée d'une erreur de droit en tant que le préfet s'est estimé lié par l'avis de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;
- la décision portant refus de renouvellement de titre de séjour est entaché d'une erreur de droit en tant qu'elle méconnaît l'article L. 313-11 11° dès lors qu'elle établit la réalité de sa résidence habituelle en France, que le défaut de prise en charge entraînerait des conséquences d'une exceptionnelle gravité, que ses troubles seraient anciens et n'auraient pas été pris correctement en charge au Kosovo, que sa situation s'est améliorée, que la nécessité d'un traducteur n'est pas incontournable, et qu'elle justifie ne pas pouvoir accéder de manière effective à un traitement approprié dans son pays d'origine ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation de sa situation et porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale tel que garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'elle ne pourrait mener une vie familiale normale dans son pays d'origine où elle a été victime de violences sexuelles, alors qu'elle a appris le français, a un emploi et ne présente aucune menace pour l'ordre public en France ;
- la décision portant refus de titre séjour est entachée d'un défaut de motivation, méconnaissant ainsi l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ;
- la décision portant refus de séjour est entaché d'un vice de procédure en méconnaissance des articles R. 313-22 et R. 313-24 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en tant qu'il n'est pas possible d'établir qu'aucun des médecins signataires de l'avis n'a rédigé le rapport médical initial ;
- la décision fixant le pays de destination est entaché d'un défaut de motivation en raison de l'absence d'indication des risques qu'elle encourt en cas de retour dans son pays d'origine ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est dépourvue de base légale dès lors qu'elle est justifiée par la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour qui sera annulée ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est également entachée d'une erreur de droit au regard de l'article L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour les mêmes motifs que la méconnaissance de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale tel que garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision fixant le pays de destination est dépourvue de base légale dès lors qu'elle est justifiée par les décisions portant refus de délivrance d'un titre de séjour et obligation de quitter le territoire français qui seront annulées ;
- la décision fixant le pays de destination porte atteinte au droit de ne pas être soumis à des traitements inhumains et dégradants tels que garanti par l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et méconnaît l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense, enregistré le 18 janvier 2019, le préfet des Hautes-Pyrénées conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- son arrêté contient les éléments de droit et de fait sur lesquels il s'est fondé ;
- il démontre que la procédure prévue par le code de séjour des étrangers et du droit d'asile a bien été respectée, dès lors que le médecin ayant établi le rapport médical était un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration non signataire de l'avis ;
- il ne s'est pas estimé lié par l'avis de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dès lors que les certificats médicaux ne font état d'aucun élément précis ni d'aucune circonstance particulière qui empêcherait l'intéressée de bénéficier effectivement d'une prise en charge médicale dans son pays d'origine, et qu'il est indiqué par l'avis de l'Office français de l'immigration et de l'intégration que le défaut de prise en charge ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité ;
- il n'est pas porté atteinte à la vie privée et familiale de la requérante dès lors que sa présence en France est de courte durée, sans aucune intensité particulière et que son époux étant sous le coup d'une mesure similaire, rien ne s'oppose à ce que le foyer puisse mener une vie privée et familiale normale au Kosovo, où résident ses parents, alors qu'elle n'est pas intégrée en France ;
- en ce qui concerne les décisions portant obligation de quitter le territoire et fixant le pays de destination, elles ne sont pas dépourvues de base légale ;
- en ce qui concerne la décision fixant le pays de destination elle est suffisamment motivée : il n'a pas méconnu l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme, dès lors qu'elle ne produit aucun élément probant permettant de constater une atteinte à sa vie ou sa liberté en cas d'éloignement vers le Kosovo.
Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 4 octobre 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Par décision du 1er septembre 2018, le président de la cour a désigné Mme E... pour exercer temporairement les fonctions de rapporteur public en application des articles R. 222-24 et R. 222-32 du code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Paul-André Braud, premier-conseiller ;
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., épouse A..., ressortissante kosovare née le 13 juin 1973 est entrée irrégulièrement avec son mari en France le 5 février 2015, selon ses déclarations. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision du 31 août 2015 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 24 mars 2016. Elle a bénéficié, à la suite de sa demande présentée sur le fondement de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, d'un titre de séjour d'un an en qualité d'étranger malade. Le 18 septembre 2017 elle a sollicité le renouvellement de ce titre. A la suite de l'avis émis le 5 janvier 2018 par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et l'intégration, le préfet des Hautes-Pyrénées a pris le 24 janvier 2018 un arrêté portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixation du pays de destination. Mme B... épouse A... relève appel du jugement du 23 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 5 du code de justice administrative : " L'instruction des affaires est contradictoire. Les exigences de la contradiction sont adaptées à celles de l'urgence (...) ". Aux termes de l'article R. 611-1 de ce code : " (...) La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues aux articles R. 611-3, R. 611-5 et R. 611-6 (...) " Aux termes du premier alinéa de l'article R. 613-2 du même code : " Si le président de la formation de jugement n'a pas pris une ordonnance de clôture, l'instruction est close trois jours francs avant la date de l'audience indiquée dans l'avis d'audience prévu à l'article R. 711-2. Cet avis le mentionne ". Enfin, aux termes du premier alinéa de l'article R. 613-4 de ce code : " Le président de la formation de jugement peut rouvrir l'instruction par une décision qui n'est pas motivée et ne peut faire l'objet d'aucun recours. Cette décision est notifiée dans les mêmes formes que l'ordonnance de clôture ".
3. Lorsque, pour les besoins de l'instruction, il invite les parties à produire des observations, le juge administratif doit leur laisser un délai suffisant à cette fin, en tenant compte de l'objet des observations demandées. Lorsque l'affaire est déjà inscrite au rôle d'une audience, il lui incombe, si le respect de cette obligation l'exige, soit de rayer l'affaire du rôle, soit de différer la clôture de l'instruction prévue de plein droit, en application de l'article R. 613-2 du code de justice administrative, trois jours francs avant la date de l'audience, en indiquant aux parties quand l'instruction sera close, cette clôture pouvant être reportée au plus tard à la date de l'audience, soit après que les parties ou leurs mandataires ont formulé leurs observations orales, soit, si ces parties sont absentes ou ne sont pas représentées, après l'appel de leur affaire.
4. Il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué a été rendu à l'issue d'une audience publique en date du 23 mai 2018. En l'absence d'ordonnance précisant la date de clôture de l'instruction, l'instruction a été close, en application des dispositions précitées, trois jours francs avant la date d'audience, soit le samedi 19 mai 2018 à minuit. Le préfet des Hautes-Pyrénées a produit pour la première fois un mémoire en défense le 16 mai 2018 à 12h04, comprenant notamment l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et un courrier explicatif de la décision rendue par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration , un deuxième mémoire en défense le même jour à 17h59, complétant le premier mémoire en défense notamment par le certificat médical confidentiel de la requérante, et un troisième mémoire en défense le 17 mai 2018 à 9h10, justifiant de la composition du collège de médecins. Eu égard à la teneur de ces mémoires et à la date de la clôture de l'instruction, Mme A... n'a pas disposé d'un délai suffisant pour répondre aux mémoires en défense du préfet des Hautes-Pyrénées. Il en résulte que le jugement attaqué a été rendu en méconnaissance du respect du caractère contradictoire de la procédure. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen invoqué, le jugement attaqué est entaché d'irrégularité et doit être annulé.
5. Il y a donc lieu, pour la cour, de statuer par la voie de l'évocation sur les conclusions de Mme A... à fin d'annulation de l'arrêté du préfet des Hautes-Pyrénées du 24 janvier 2018.
Sur la légalité de l'arrêté du 24 janvier 2018 :
En ce qui concerne la décision portant refus de renouvellement de titre de séjour :
6. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ".
7. Mme A... soutient que le refus de renouvellement de son titre de séjour n'est pas suffisamment motivé en fait faute de comporter suffisamment d'éléments relatifs à sa situation personnelle en France et au Kosovo. Toutefois, il résulte des dispositions précitées de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration que le préfet est tenu de mentionner seulement les considérations de fait sur lesquelles il se fonde et non de manière exhaustive tous les éléments afférents à la situation personnelle et familiale de l'intéressée. En l'espèce, s'agissant de la situation de l'intéressée, l'arrêté rappelle tous les éléments énoncés au point 1, et précise que selon l'avis émis par le collège de médecins, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale, le défaut de prise en charge médicale ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que l'état de santé de l'intéressée peut lui permettre de voyager sans risque vers son pays d'origine, reprenant ainsi l'intégralité de l'avis émis par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Il est également précisé que Mme A... est entrée en France en 2015 avec son époux sous le coup d'une mesure identique. Ainsi, contrairement à ce que soutient Mme A..., l'arrêté litigieux comporte l'énoncé des considérations de fait fondant le refus de renouvellement de son titre de séjour.
8. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. (...)". En vertu de l'article R. 313- 22 de ce code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ". Selon l'article R. 313-23 du même code : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre (...) Il transmet son rapport médical au collège de médecins. Sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le service médical de l'office informe le préfet qu'il a transmis au collège de médecins le rapport médical. (...) La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. (...) L'avis est rendu par le collège dans un délai de trois mois à compter de la transmission par le demandeur des éléments médicaux (...) ".
9. D'une part, il ressort de l'attestation du médecin coordonnateur de la zone Sud-Ouest de l'Office français de l'immigration et de l'intégration que les rapports médicaux afférents aux demandes provenant de l'ex département de la région Midi-Pyrénées sont établis par le docteur Borhane Ferjani, dont il ressort de l'arrêté du ministère de l'intérieur du 21 août 2017 qu'il est médecin auprès de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Or, il ressort de l'avis du collège de médecins, qui indique sa composition, que ce médecin n'a pas siégé au sein du collège. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en raison de l'irrégularité de la composition du collège de médecins doit être écarté.
10. D'autre part, Mme A... n'établit ni même n'allègue avoir adressé au préfet des Hautes-Pyrénées, préalablement à l'arrêté litigieux, des documents lui permettant d'apprécier son état de santé ou sur la circonstance qu'elle ne pourrait avoir effectivement accès à un traitement approprié dans son pays d'origine. Dans ces conditions, le préfet des Hautes-Pyrénées ne pouvait se fonder que sur l'avis émis par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Dès lors, la reprise des termes de l'avis dans l'arrêté en litige, ne permet pas à elle seule d'établir que le préfet se serait estimé lié par celui-ci et aurait ainsi méconnu l'étendue de sa compétence.
11. En troisième lieu, Mme A... soutient qu'elle souffre d'un syndrome de stress post-traumatique consécutif à des viols répétés commis sur sa personne pour lequel elle suit un traitement dans le cadre d'un suivi psychiatrique, et qu'elle ne pourra bénéficier effectivement d'un traitement adapté à cette pathologie au Kosovo. Pour contester l'avis émis le 5 janvier 2018 par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration selon lequel le défaut de prise en charge médicale ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, la requérante produit un certificat médical du docteur Le Grusse du 5 janvier 2016, un certificat médical du Docteur Battaglia du 23 février 2016 et cinq certificats médicaux du docteur Elouadifi dont trois pour l'année 2016, un transmis en 2017 à l'Office français de l'immigration et de l'intégration et un postérieur à la décision attaquée. Il ressort du certificat médical de 2017, qu'à la date de l'arrêté, son état de santé s'est amélioré, Mme A... ne souffrant plus d'un épisode dépressif d'intensité sévère mais qu'il persiste des troubles d'anxiété généralisés et des éléments post traumatique avec idéation suicidaire lors des périodes de recrudescence anxieuse. Il ne ressort cependant nullement de certificat que le défaut de prise en charge médicale devrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Mme A... ne peut par ailleurs utilement se prévaloir du certificat médical établi en 2018 qui se rapporte à une situation de fait postérieure à l'arrêté litigieux. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
12. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". En vertu de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". L'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale, garantie par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313 11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.
13. Il ressort des pièces du dossier que même si la requérante se prévaut d'une insertion professionnelle par la production d'une promesse d'embauche pour transformer son contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée, à la date de l'arrêté contesté, Mme A... réside en France depuis moins de trois années et elle ne fait état d'aucune attache familiale en France en dehors de son mari, lequel fait également l'objet d'une mesure d'éloignement. En outre, elle n'établit pas être dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où elle a vécu pendant 42 ans et où il n'est pas contesté que ses parents résident. Ainsi, le refus litigieux n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été opposé. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés. Le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation de sa situation doit être écarté pour les mêmes motifs.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire :
14. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré du défaut de base légale de l'obligation de quitter le territoire français en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour doit être écarté.
15. En deuxième lieu, aux termes l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; (...) ".
16. Ainsi qu'il a été énoncé au point 11, si l'état de santé de Mme A... nécessite une prise en charge médicale, son absence ne devrait pas entraîner des conséquences d'une extrême gravité. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français aurait méconnu les dispositions précitées du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
17. En troisième lieu, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation de sa situation doivent être écartés pour les motifs énoncés au point 13.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
18. En premier lieu, l'arrêté vise le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il indique le rejet de sa demande d'asile par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides puis par la Cour nationale du droit d'asile Il mentionne que la requérante n'établit pas qu'elle serait soumise à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et également qu'elle a vécu jusqu'à l'âge de 42 ans dans son pays d'origine, où elle ne démontre pas être dépourvue de liens personnels et familiaux. Dans ces conditions, l'arrêté énonce les considérations de droit et de fait fondant la décision fixant le pays de destination qui est donc suffisamment motivée.
19. En deuxième lieu, il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le pays de destination est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français et du refus de titre de séjour qui la fondent.
20. En troisième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ". Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui est obligé de quitter le territoire français ou qui doit être reconduit à la frontière est éloigné : 1º A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Commission des recours des réfugiés lui a reconnu le statut de réfugié ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; 2º Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; 3º Ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". Ces dispositions et stipulations font obstacle à ce que puisse être légalement désigné comme pays de renvoi d'un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement un Etat pour lequel il existe des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé s'y trouverait exposé à un risque réel pour sa personne soit du fait des autorités de cet Etat, soit même du fait de personnes ou groupes de personnes ne relevant pas des autorités publiques, dès lors que, dans ce dernier cas, les autorités de l'Etat de renvoi ne sont pas en mesure de parer à un tel risque par une protection appropriée.
21. Mme A... soutient avoir été victime de violences sexuelles perpétrées par son beau-frère et que son retour l'exposerait de nouveau à de telles violences et entraînerait une vendetta. Toutefois, elle ne produit au soutien de son récit aucun élément permettant d'établir l'existence d'un risque actuel en cas de retour au Kosovo. Si Mme A... soutient également que son état de santé va inéluctablement se dégrader au Kosovo où ont été commis les faits à l'origine de son syndrome de stress post-traumatique, il ressort cependant des pièces du dossier qu'après être allé en Autriche en 2009, M. et Mme A... sont retournés au Kosovo et que, par ailleurs, Mme A... a commencé son traitement en 2010 au Kosovo. Dans ces circonstances, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peuvent être accueillis.
22. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 24 janvier 2018 du préfet des Hautes-Pyrénées. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens doivent être rejetés.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n°1800634 du 31 mai 2018 du tribunal administratif de Pau est annulé.
Article 2 : Les conclusions de première instance de Mme A... et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... B... épouse A... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet des Hautes-Pyrénées.
Délibéré après l'audience du 2 juillet 2019 à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Pouget, président,
M. Paul-André Braud, premier-conseiller,
M. David-Katz, premier-conseiller.
Lu en audience publique, le 27 août 2019.
Le rapporteur,
Paul-André BraudLe président,
Marianne Pouget
Le greffier,
Florence Faure
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
2
No 18BX03803