Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner la commune de Lévignac, d'une part, à remettre en état sa propriété, notamment par la démolition des clôtures longeant la berge du canal d'amenée et par l'enlèvement de la barrière apposée devant l'entrée du chemin privé conduisant au moulin et, d'autre part, à lui verser une indemnité de 360 000 euros en réparation des préjudices causés par la privation de son bien.
Par un jugement n° 1404804 du 14 juin 2017, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 17 juillet 2017 et le 29 août 2018, M. E... A..., représenté par Me F..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 14 juin 2017 ;
2°) de condamner la commune de Lévignac à lui verser une indemnité de 414 000 euros en réparation des préjudices causées par la privation de son bien ;
3°) de condamner la commune de Lévignac à supprimer les clôtures longeant la berge du canal d'amenée ou à lui en permettre l'accès par un portail et à enlever la barrière apposée devant l'entrée du chemin privé conduisant au moulin ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Lévignac la somme de 4 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le juge administratif est compétent pour connaître des litiges afférents aux emprises irrégulières ;
- la commune de Lévignac s'est appropriée le chemin privé reliant sa propriété. Le classement de ce chemin dans le domaine public communal par délibération du 7 septembre 2015 est sans incidence, la commune n'étant pas propriétaire dudit chemin ;
- il résulte de l'expertise que les droits d'eau rattachés au moulin sont imprescriptibles. Par conséquent, la prise d'eau réalisée par la mairie constitue une emprise irrégulière ;
- il en va de même pour l'installation d'une clôture le long des berges du canal ;
- la vanne de décharge est hors service sans que l'origine de ce désordre ait pu être identifiée ;
- ces emprises ne l'ont pas dépossédé de son bien mais font obstacle à la libre jouissance de celui-ci ;
- il a accès à son moulin par le seul chemin litigieux. Il n'est propriétaire ni des parcelles 36 et 542 ni de la voie desservant ces parcelles. Les deux propriétés privées sont d'ailleurs séparées par une palissade. Il ne pouvait donc avoir accès à son moulin de sorte que le préjudice résultant de la privation de jouissance de son bien est établi ;
- l'existence de la prise d'eau est établie par le rapport d'expertise ;
- l'expert a estimé que la clôture faisait obstacle à l'entretien de l'ouvrage.
Par deux mémoires en défense, enregistrés le 15 janvier 2018 et le 19 février 2019, la commune de Lévignac, représentée par Me D... G..., conclut :
- au rejet de la requête ;
- à ce que soit mise à la charge de M. A... les frais d'expertise ainsi que la somme de 10 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens invoqués ne sont pas fondés et soutient que l'appel est irrecevable au motif qu'il ne constitue qu'une reproduction des écritures de première instance.
Par ordonnance du 21 janvier 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 21 février 2019 à midi.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. H... B...,
- et les conclusions de M. Axel Basset, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... a fait l'acquisition le 25 avril 1979 de plusieurs parcelles dont la parcelle cadastrée section AB 543 située sur le territoire de la commune de Lévignac et sur laquelle se trouvent un ancien moulin, un canal d'amenée, un canal de fuite et un local à usage de débarras. Eu égard à l'état du moulin, le maire de Lévignac a, par un arrêté du 11 avril 1994, interdit la circulation sur la " voie communale ", dont M. A... soutient être propriétaire, jusqu'à la réparation du moulin. Après avoir décidé d'autres mesures conservatoires, dont l'interdiction d'accès au pont par arrêté du 15 novembre 2010, une nouvelle procédure de péril imminent a été engagée et le maire de Lévignac, par un arrêté du 27 janvier 2011, a mis en demeure M. A... de réaliser les travaux nécessaires pour lever l'état de péril de l'immeuble situé sur la parcelle cadastrée section AB 543. Par un courrier du 11 mai 2011, M. A... contestait l'arrêté de péril au motif que la voie reliant les parcelles cadastrées section AB 543 et AB 544 n'est pas une voie communale mais une voie privée de sorte que sa propriété ne peut faire l'objet d'un arrêté de péril imminent. La commune de Lévignac a assigné le 23 mai 2012 M. A... devant le tribunal de grande instance de Toulouse afin d'obtenir le rétablissement de la circulation publique sur cette voie. L'expertise diligentée dans le cadre de cette instance ayant conclu le 27 février 2014 à ce que le chemin soit rattaché à la propriété du moulin, M. A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse, d'une part, de condamner la commune de Lévignac à lui verser une indemnité de 360 000 euros en réparation des préjudices causés par la privation de jouissance de son bien et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint à cette commune de procéder à la remise en état de sa propriété en démolissant les clôtures longeant la berge du canal d'amenée et en enlevant la barrière apposée devant l'entrée du chemin conduisant au moulin. M. A... relève appel du jugement du 14 juin 2017 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes.
Sur la responsabilité :
2. Pour engager la responsabilité de la commune de Lévignac, M. A... soutient que cette dernière a occupé irrégulièrement le chemin desservant sa propriété, qu'elle a effectué une prise d'eau en amont du barrage sans son accord, qu'elle a installé des clôtures le long des berges du canal d'amenée sans son accord et que la vanne de décharge est hors service. Le dommage invoqué par M. A... est la privation de la jouissance de son bien. Cependant M. A... ne détaille ni n'explique en quoi consiste cette privation alors qu'il résulte de l'instruction, et notamment des rapports d'expertise, que, depuis son acquisition en 1979, le moulin sis sur la parcelle cadastrée section AB 543 n'est ni utilisé ni même entretenu. Dès lors, l'unique préjudice allégué ne pouvant être regardé comme étant établi, les conclusions indemnitaires présentées par M. A... ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
3. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution (...) ".
4. M. A... reprend en appel, sans invoquer d'éléments nouveaux par rapport à l'argumentation développée en première instance et sans critiquer la réponse apportée par le tribunal administratif, ses conclusions à fin d'injonction tendant à ce que la commune de Lévignac retire les clôtures longeant la berge du canal d'amenée et enlève la barrière apposée à l'entrée du chemin conduisant au moulin. Il y a donc lieu de rejeter ces conclusions par adoptions des motifs d'irrecevabilité retenus à bon droit par le tribunal administratif.
5. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir tirée du défaut de motivation de la requête d'appel opposée par la commune de Lévignac, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande indemnitaire.
Sur les dépens :
6. La commune de Lévignac demande à ce que soient mis à la charge de M. A... les frais de l'expertise réalisée par M. C.... Cependant cette expertise ne peut être rattachée aux dépens de la présente instance dans la mesure où elle a été diligentée par une ordonnance du juge des référés du tribunal de grande instance de Toulouse du 28 février 2012. Dès lors, cette demande ne peut qu'être rejetée.
Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Lévignac, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par M. A... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. En revanche, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A..., la somme demandée par la commune de Lévignac, au même titre.
DECIDE
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la commune de Lévignac est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... A... et à la commune de Lévignac.
Délibéré après l'audience du 7 octobre 2019, à laquelle siégeaient :
M. Pierre Larroumec, président,
Mme Karine Butéri, président-assesseur,
M. H... B..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 4 novembre 2019.
Le rapporteur,
Paul-André B...
Le président,
Pierre Larroumec
Le greffier,
Cindy Virin
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 17BX02262