Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E... B... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 5 février 2015 par lequel le préfet des Pyrénées-Atlantiques a constaté l'état de ruine du moulin Eyheraberry.
Par un premier jugement du 11 avril 2017, le tribunal administratif de Pau, avant de statuer sur les conclusions de la demande de M. B..., a ordonné une expertise en vue d'apprécier la réalité des éléments de la force motrice du moulin existants et la possibilité de les restaurer.
Par ordonnance du 1er février 2018, le président du tribunal administratif de Pau a liquidé et taxé les frais et honoraires de l'expert à la somme de 2 500 euros.
Par un jugement n° 1500755 du 27 février 2018, le tribunal administratif de Pau a rejeté la demande de M. B... et a mis à sa charge les frais de l'expertise.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 24 avril 2018, et deux mémoires complémentaires, enregistrés les 10 juillet et 17 septembre 2019, M. B..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 27 février 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Pyrénées-Atlantiques du 5 février 2015.
Il soutient que :
- il n'a pas été mis à même de présenter ses observations avant la prise de décision par le préfet ;
- le préfet avait reconnu son droit d'exploiter le moulin dans un courrier du 25 mars 2005 ; dès lors, il ne pouvait pas, par l'arrêté en litige, retirer les droits acquis nés de cette reconnaissance ;
- la construction de la passe à poissons dans la fosse du moulin n'a pas changé l'affectation des ouvrages essentiels du moulin ;
- les ouvrages essentiels du moulin, que sont le barrage, les pertuis, la fosse et le canal de fuite, ne sont pas en état de ruine ;
- il résulte du rapport d'expertise la possibilité d'une remise en service du moulin en dehors de toute reconstruction des ouvrages essentiels utilisant la force motrice de l'eau.
Par un mémoire, enregistré le 19 août 2019, le ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- le moyen tiré du défaut de contradictoire est irrecevable en appel ;
- les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 18 septembre 2019, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 11 octobre 2019 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Romain Roussel, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Sylvande Perdu, rapporteur public,
- et les observations de Me C..., représentant M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., propriétaire du moulin Eyheraberry à Saint-Jean-Pied-de-Port, a informé le préfet des Pyrénées-Atlantiques de son intention d'utiliser la force hydraulique de la Nive de Béhérobie. Par arrêté du 5 février 2015, le préfet a constaté l'état de ruine du moulin. M. B... relève appel du jugement du 27 février 2018 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Au fond :
2. En premier lieu, il résulte de l'instruction que le préfet a adressé à l'intéressé le constat dressé sur place et un projet d'arrêté, en lui laissant quinze jours pour produire ses observations. Dans ces conditions, et en tout état de cause, le moyen tiré de la méconnaissance du principe du contradictoire doit être écarté.
3. En deuxième lieu, contrairement à ce que soutient M. B..., par le courrier du 25 mars 2005, le préfet des Pyrénées-Atlantiques s'est borné à prendre acte de la volonté de l'intéressé d'obtenir la reconnaissance d'un droit fondé en titre et a constaté, au regard des documents à sa disposition, que le moulin Eyheraberry était susceptible de relever de ce régime juridique. Dès lors, et en tout état de cause, l'arrêté en litige ne saurait être analysé comme revenant sur la reconnaissance par le préfet en 2005 d'un droit fondé en titre.
4. En troisième lieu, la force motrice produite par l'écoulement d'eaux courantes ne peut faire l'objet que d'un droit d'usage et en aucun cas d'un droit de propriété. Il en résulte qu'un droit fondé en titre se perd lorsque la force motrice du cours d'eau n'est plus susceptible d'être utilisée par son détenteur, du fait de la ruine ou du changement d'affectation des ouvrages essentiels destinés à utiliser la pente et le volume de ce cours d'eau. Ni la circonstance que ces ouvrages n'aient pas été utilisés en tant que tels au cours d'une longue période de temps, ni le délabrement du bâtiment auquel le droit d'eau fondé en titre est attaché, ne sont de nature, à eux seuls, à remettre en cause la pérennité de ce droit. L'état de ruine, qui conduit en revanche à la perte du droit, est établi lorsque les éléments essentiels de l'ouvrage permettant l'utilisation de la force motrice du cours d'eau ont disparu ou qu'il n'en reste que de simples vestiges, de sorte qu'elle ne peut plus être utilisée sans leur reconstruction complète.
5. Il résulte de l'instruction qu'une passe à poissons a été réalisée en 2000 à l'intérieur du moulin Eyheraberry. Bien que l'une soit simplement murée, il ressort des photographies prises lors de cette opération de réalisation de la passe à poissons que l'autre vanne motrice a été entièrement détruite ainsi qu'une partie du canal de fuite et la fosse du moulin, qui constituait le canal de jonction entre l'amont et l'aval du moulin, dont l'emplacement est entièrement occupé par les installations de la passe à poissons, et qui ne pourrait, aux termes du rapport d'expertise ordonné en première instance, être rétablie qu'en la reconstruisant sur un autre emplacement ou en déplaçant la passe à poissons. Dans ces conditions, alors même que le barrage est en bon état, des éléments essentiels de l'ouvrage ont disparu et l'utilisation de la force motrice de l'eau nécessiterait leur reconstruction complète. Dès lors, c'est à bon droit que le préfet a estimé que le droit fondé en titre en litige était éteint.
6. Enfin, contrairement à ce que soutient le requérant, il résulte de l'instruction que l'ancienne propriétaire avait donné son accord à la réalisation de la passe à poissons à l'intérieur du moulin. Les conditions de légalité de la réalisation de cette passe à poissons en 2000 sont au demeurant sans incidence sur le constat de l'état de ruine du moulin et sur la consistance du droit revendiqué par M. B.... Le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi.
7. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... B... et au ministre de la transition écologique et solidaire. Copie sera transmise au préfet des Pyrénées-Atlantiques.
Délibéré après l'audience du 27 novembre 2019 à laquelle siégeaient :
Mme D... A..., présidente,
M. Frédéric Faïck, président assesseur,
M. Romain Roussel, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 17 décembre 2019.
Le rapporteur,
Romain RousselLa présidente,
Elisabeth A...Le greffier,
Virginie Marty
La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et solidaire en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 18BX01682