Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... D... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler, d'une part, l'arrêté du 16 avril 2019 par lequel le préfet de la Haute-Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle sera renvoyée et, d'autre part, l'arrêté du 2 juillet 2019 par lequel le préfet de la Haute-Vienne l'a assignée à résidence.
Par un jugement n° 1900855-1901193 du 10 juillet 2019, le tribunal administratif de Limoges a rejeté ses demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 5 août 2019, Mme D..., représentée par Me E..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Limoges du 10 juillet 2019 en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Vienne du 16 avril 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Haute-Vienne du 16 avril 2019 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Vienne de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 75 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 200 euros, à verser à son conseil, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ne portait pas la mention du nom du médecin qui a établi le rapport médical prévu par l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté en litige mentionne un avis du 21 août 2018 alors que le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a rendu son avis le 27 août 2018 ;
- la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;
- la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour ;
- la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;
- la décision fixant le pays de renvoi est insuffisamment motivée ;
- la décision fixant le pays de renvoi est illégale en raison de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français.
Par un mémoire, enregistré le 19 décembre 2019, le préfet de la Haute-Vienne conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 13 décembre 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 27 janvier 2020 à 12h00.
Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 21 novembre 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Romain Roussel, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme D..., ressortissante géorgienne née le 14 juillet 1984, est entrée irrégulièrement en France le 15 avril 2011. Après le rejet de sa demande d'asile par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et le rejet par la Cour nationale du droit d'asile de sa demande tendant à l'annulation de cette décision, elle a obtenu un titre de séjour en raison de son état de santé. Le 9 janvier 2018, elle a sollicité le renouvellement de son titre de séjour. Par arrêté du 16 avril 2019, le préfet de la Haute-Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle sera renvoyée. Mme D... relève appel du jugement du tribunal administratif de Limoges du 10 juillet 2019 en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité de la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ". Aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ". Aux termes de l'article R. 313-23 du même code : " Le rapport médical mentionné à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement le demandeur ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22. Le médecin de l'office peut solliciter, le cas échéant, le médecin qui suit habituellement le demandeur ou le médecin praticien hospitalier (...) / Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège (...) ".
3. Il ne résulte ni du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni des articles R. 313-22 et R. 313-23 de ce code, ni de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016, non plus que d'aucun principe, que l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration devrait porter mention du nom du médecin qui a établi le rapport médical, prévu par l'article R. 313-22, qui est transmis au collège de médecins de l'Office. Au demeurant, l'avis rendu en l'espèce par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration mentionne le nom du médecin qui a établi le rapport. Il résulte des mentions figurant sur l'avis rendu par le collège, lesquelles font foi jusqu'à preuve du contraire, que ce médecin n'a pas siégé au sein de celui-ci. Enfin, si l'arrêté en litige mentionne que l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a été rendu le 21 août 2018 alors qu'il est daté du 27 août 2018, cette simple erreur de plume est sans incidence sur sa légalité.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales : " 1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée (...) ".
5. Mme D... est entrée irrégulièrement en France le 15 avril 2011 à l'âge de 26 ans. Sa demande d'asile a été rejetée. Si elle a bénéficié d'un titre de séjour en raison de son état de santé de décembre 2014 à mars 2018, il ressort de l'avis, que l'intéressé ne conteste plus en appel, rendu par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration sur sa demande de renouvellement de titre de séjour que si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, elle peut bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Il est constant que son époux, présent à ses côtés en France, fait également l'objet d'un arrêté préfectoral refusant de lui délivrer un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français. Si leurs enfants, nés en 2014 et 2016, sont scolarisés en France, il ne ressort d'aucune pièce du dossier qu'ils ne pourraient pas poursuivre leur scolarité dans leur pays d'origine. Dans ces conditions, alors même qu'elle prend des cours de français, qu'elle fait du bénévolat et qu'elle a entrepris des démarches pour obtenir un emploi, en refusant de renouveler le titre de séjour de Mme D..., le préfet n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise.
6. En troisième lieu, eu égard aux circonstances exposées au point précédent, en refusant de renouveler le titre de séjour de Mme D..., le préfet n'a pas entaché l'arrêté en litige d'une erreur manifeste d'appréciation de la situation de l'intéressée.
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
7. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de la décision portant refus de séjour à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
8. En second lieu, eu égard aux circonstances exposées au point 5, en faisant obligation à Mme D... de quitter le territoire français, le préfet n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise. Il n'a pas davantage commis d'erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle de la requérante.
Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :
9. En premier lieu, l'arrêté en litige comporte l'énoncé des motifs de droit et de fait qui en constituent le fondement. Il vise notamment la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment son article 3, et précise que Mme D... n'établit pas qu'elle serait soumise à des traitements contraires à cet article en cas de retour dans son pays d'origine. Dans ces conditions, la décision fixant le pays à destination duquel elle sera renvoyée est suffisamment motivée.
10. En second lieu, il résulte de ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français à l'encontre de la décision fixant le pays à destination duquel elle sera renvoyée.
11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D..., à Me E... et au ministre de l'intérieur. Copie sera transmise au préfet de la Haute-Vienne.
Délibéré après l'audience du 18 février 2020 à laquelle siégeaient :
Mme C... A..., présidente,
M. Frédéric Faïck, président assesseur,
M. Romain Roussel, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 19 mai 2020.
La présidente,
Elisabeth A...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
2
N° 19BX02986