Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme F... B... épouse A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 29 mai 2019 par lequel le préfet de la Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait reconduite.
Par un jugement n° 1903105 du 17 mars 2020, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 18 juin 2020, Mme B... épouse A..., représentée par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 17 mars 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 29 mai 2019 par lequel le préfet de la Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait reconduite ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de 15 jours, à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard passé ce délai, subsidiairement de réexaminer sa demande et de prendre une nouvelle décision dans un délai d'un mois et de lui remettre une autorisation provisoire de séjour dans un délai de 48 heures, le tout sous une astreinte de 150 euros par jour de retard passé ces délais ;
4°) de mettre à la charge de l'État le paiement de la somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
s'agissant de l'ensemble des décisions litigieuses :
- elle sont entachées d'un vice d'incompétence et d'une insuffisance de motivation ;
s'agissant du refus de titre de séjour :
- la décision méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
s'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :
- son état de santé l'empêche de voyager ;
- le préfet a méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Un mémoire présenté par le préfet de la Vienne a été enregistré le 7 septembre 2020, postérieurement à la clôture d'instruction.
Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 mai 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. E... C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., ressortissante togolaise née le 13 décembre 1953, est entrée en France le 3 juillet 2015 sous couvert d'un visa de court séjour. Le 4 novembre 2015, elle a présenté une demande de titre de séjour en raison de son état de santé. Elle a bénéficié d'une autorisation provisoire de séjour d'une durée de huit mois sur l'avis rendu par un médecin de l'agence régionale de santé le 5 février 2016. Elle a ensuite été admise au séjour en France, sur l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 23 mai 2017, pour une durée de douze mois aux fins de poursuite des soins dont elle bénéficiait en France. Le 26 mars 2018, Mme A... a déposé une nouvelle demande de titre de séjour en qualité d'étranger malade mais, par un arrêté du 29 mai 2019, le préfet de la Vienne a refusé de lui délivrer le titre sollicité, l'a obligée à quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait reconduite à l'issue de ce délai. Mme A... relève appel du jugement du 17 mars 2020 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité de l'arrêté pris dans son ensemble :
2. L'appelante se borne à reprendre en appel, au soutien de ses conclusions dirigées contre l'ensemble des décisions litigieuses, les moyens tirés du vice d'incompétence et de l'insuffisance de motivation, sans apporter d'éléments de fait ou de droit nouveaux. Dans ces conditions, il y a lieu, par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges, d'écarter ces moyens.
Sur la légalité du refus de titre de séjour :
3. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° À l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. ".
4. D'une part, il ressort des termes mêmes de la décision litigieuse que le préfet a, pour refuser de délivrer le titre de séjour sollicité par Mme A..., considéré qu'elle pourra effectivement bénéficier d'un traitement adapté à son état de santé dans son pays d'origine, et non que le défaut de traitement ne devrait pas avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité. À cet égard, l'emploi inverse de cette formulation quant aux possibilités pour Mme A... de voyager, qui ne constitue au demeurant qu'une erreur de plume, est sans incidence sur l'appréciation portée par le préfet sur le droit au séjour de l'intéressée.
5. D'autre part, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.
6. Il ressort des pièces du dossier que le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que si l'état de santé de Mme A... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, toutefois Mme A... pouvait effectivement bénéficier d'un traitement adapté dans son pays d'origine. Les certificats médicaux produits par Mme A..., notamment celui du 9 septembre 2019 par lequel le praticien hospitalier qui la suit mentionne la nécessité de poursuivre des auto-sondages urinaires quotidiens, des séances de kinésithérapie et un traitement médicamenteux, ne sont pas de nature à contredire l'avis rendu collégialement sur l'accès effectif à un traitement approprié au Togo alors que le préfet a justifié devant les premiers juges que le Togo dispose de structures de soins adaptées à l'état de santé de l'intéressée. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
7. L'appelante se borne à reprendre en appel les moyens tirés de ce que son état de santé ne lui permet pas de voyager et de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, sans apporter d'éléments de fait ou de droit nouveaux. Dans ces conditions, il y a lieu, par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges, d'écarter ces moyens.
8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F... B... épouse A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera transmise, pour information, au préfet de la Vienne.
Délibéré après l'audience du 10 septembre 2020 à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Hardy, président,
M. E... C..., président-assesseur,
Mme Nathalie Gay-Sabourdy, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 8 octobre 2020.
Le rapporteur,
Didier C...
Le président,
Marianne HardyLe greffier,
Stéphan Triquet
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 20BX01938