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22/10/2020 | FRANCE | N°18BX04522,19BX00199

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 22 octobre 2020, 18BX04522,19BX00199


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... et Mme G... H... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la délibération du 4 janvier 2017 par laquelle le conseil municipal d'Abjat-sur-Bandiat a exercé le droit de préemption sur les parcelles cadastrées section B n° 1278, 1279, 1280 et 1281 appartenant à M. et Mme F....

Par un jugement n° 1700901 du 6 novembre 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

I - Par une requête enregistrée sous le n°

18BX04522 le 21 décembre 2018, et des mémoires présentés les 21 janvier 2019, 6 mars 2020, 8 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... et Mme G... H... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la délibération du 4 janvier 2017 par laquelle le conseil municipal d'Abjat-sur-Bandiat a exercé le droit de préemption sur les parcelles cadastrées section B n° 1278, 1279, 1280 et 1281 appartenant à M. et Mme F....

Par un jugement n° 1700901 du 6 novembre 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

I - Par une requête enregistrée sous le n° 18BX04522 le 21 décembre 2018, et des mémoires présentés les 21 janvier 2019, 6 mars 2020, 8 mai 2020, 10 juin 2020 et 7 septembre 2020, M. A... B..., puis Mme G... H..., représentés par Me C..., demandent à la cour :

1°) d'engager la procédure prévue à l'article R. 633-1 du code de justice administrative et de surseoir à statuer dans l'attente que le juge judiciaire se prononce sur leur plainte déposée notamment pour faux en écriture privée en raison de la production d'un devis de l'EURL Barnabé Chepeau antidaté du 16 mars 2017 ;

2°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 6 novembre 2018 ;

3°) d'annuler la délibération du 4 janvier 2017 par laquelle le conseil municipal d'Abjat-sur-Bandiat a exercé le droit de préemption sur les parcelles cadastrées section B n° 1278, 1279, 1280 et 1281 appartenant à M. et Mme F... ;

4°) de mettre à la charge de la commune d'Abjat-sur-Bandiat le paiement de la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, au titre tant des frais exposés en première instance qu'en appel.

Ils soutiennent que :

- le jugement attaqué est entaché d'irrégularité, d'une part, en raison d'un défaut de motivation, d'autre part, en raison d'une contradiction de motifs ;

- l'opération envisagée d'un déplacement des ateliers municipaux ne peut être considérée comme une opération d'aménagement ayant pour objet de réaliser un équipement collectif, de sorte que le projet ne répond pas à un intérêt général suffisant et que les dispositions de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme ont été méconnues ;

- la réalité de l'opération, eu égard notamment au caractère conditionnel mentionné par la délibération, n'est pas établie au jour de cette délibération ;

- le devis de l'EURL Barnabé Chepeau produit à l'instance en pièce n° 6 par la commune est antidaté du 16 mars 2017 et constitue un faux.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 5 juillet 2019, 19 avril 2020, 22 avril 2020 et 21 juillet 2020, la commune d'Abjat-sur-Bandiat, représentée par Me I..., conclut au rejet de la requête et, en outre, à ce qu'il soit mis à la charge de M. B... et de Mme H... le paiement de la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens soulevés par M. B... et Mme H... ne sont pas fondés ;

- elle entend continuer à se prévaloir de la pièce n° 6 qu'elle a produite.

II. Par une requête, enregistrée sous le n° 19BX00199 le 10 janvier 2019, et des mémoires présentés les 6 mars 2020, 8 mai 2020, 10 juin 2020 et 7 septembre 2020 M. B... et Mme H..., représentés par Me C..., demandent à la cour :

1°) d'engager la procédure prévue à l'article R. 633-1 du code de justice administrative et de surseoir à statuer dans l'attente que le juge judiciaire se prononce sur leur plainte déposée notamment pour faux en écriture privée en raison de la production d'un devis de l'EURL Barnabé Chepeau antidaté du 16 mars 2017 ;

2°) de surseoir à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 6 novembre 2018 ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Abjat-sur-Bandiat le paiement de la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, au titre tant des frais exposés en première instance qu'en appel.

Ils soutiennent que :

- les conditions posées par l'article R. 811-17 du code de justice administrative sont remplies dès lors que l'exécution du jugement attaqué aurait pour eux des conséquences difficilement réparables et que le jugement est tant irrégulier que mal-fondé ;

- le devis de l'EURL Barnabé Chepeau produit à l'instance en pièce n° 6 par la commune est antidaté du 16 mars 2017 et constitue un faux.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 4 février 2020, 19 avril 2020, 22 avril 2020 et 21 juillet 2020, la commune d'Abjat-sur-Bandiat, représentée par Me I..., conclut au rejet de la requête et, en outre, à ce qu'il soit mis à la charge de M. B... et de Mme H... le paiement de la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable en tant qu'elle est présentée par Mme H... ;

- les moyens soulevés par M. B... et Mme H... ne sont pas fondés ;

- elle entend continuer à se prévaloir de la pièce n° 6 qu'elle a produite.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de l'urbanisme ;

- l'arrêté du 5 décembre 2016 relatif aux opérations d'acquisitions et de prises en location immobilières poursuivies par les collectivités publiques et divers organismes ;

- le code de justice administrative.

Le président de chambre a décidé, en application de l'article R. 222-29 du code de justice administrative, d'inscrire la demande de sursis à exécution présentée par M. B... et Mme H... au rôle d'une chambre siégeant en formation de jugement.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. E... D...,

- les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., représentant M. B... et Mme H..., et les observations de Me I..., représentant la commune d'Abjat-sur-Bandiat.

Une note en délibéré présentée pour M. B... et Mme H... pour chacune des requêtes a été enregistrée le 24 septembre 2020.

Une note en délibéré présentée pour la commune d'Abjat-sur-Bandiat pour la requête 18BX04522 a été enregistrée le 25 septembre 2020.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 4 janvier 2017, le conseil municipal d'Abjat-sur-Bandiat (Dordogne) a exercé le droit de préemption de la commune sur les parcelles cadastrées section B n° 1278 à 1281. Par leur requête enregistrée sous le n° 18BX04522, M. B... et Mme H..., acquéreurs évincés, relèvent appel du jugement du 6 novembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cette délibération. Par leur requête enregistrée sous le n° 19BX00199, M. B... et Mme H... demandent à la cour de sursoir à l'exécution du même jugement du tribunal. Ces deux requêtes ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un seul arrêt.

Sur la régularité du jugement :

2. Il résulte des termes mêmes du jugement attaqué que pour répondre au moyen soulevé par M. B... et Mme H..., tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme, le tribunal administratif de Bordeaux a mentionné, au point 7 de son jugement, que la décision de préemption en litige avait été motivée par le projet de déplacement des ateliers municipaux, alors situés dans le même bâtiment que la caserne des pompiers, afin de permettre l'extension de cette dernière. Les premiers juges ont ensuite retenu que ce projet, dont la réalité était suffisamment établie notamment par l'avis du service départemental d'incendie et de secours (SDIS) du 3 janvier 2017, constituait un projet d'aménagement répondant aux exigences des dispositions invoquées. Par suite, le tribunal, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments, a suffisamment motivé son jugement sur ce point.

3. Si M. B... et Mme H... soutiennent que le jugement attaqué est entaché d'une contradiction de motifs, ce moyen qui a trait au bien-fondé du jugement est sans incidence sur sa régularité.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. Aux termes de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme : " Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L. 300-1, à l'exception de ceux visant à sauvegarder ou à mettre en valeur les espaces naturels, ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d'aménagement. (...) Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé. (...) ". Aux termes de l'article L. 300-1 du même code : " Les actions ou opérations d'aménagement ont pour objets de mettre en oeuvre un projet urbain, une politique locale de l'habitat, d'organiser le maintien, l'extension ou l'accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs ou des locaux de recherche ou d'enseignement supérieur, de lutter contre l'insalubrité, de permettre le renouvellement urbain, de sauvegarder ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels. / L'aménagement, au sens du présent livre, désigne l'ensemble des actes des collectivités locales ou des établissements publics de coopération intercommunale qui visent, dans le cadre de leurs compétences, d'une part, à conduire ou à autoriser des actions ou des opérations définies dans l'alinéa précédent et, d'autre part, à assurer l'harmonisation de ces actions ou de ces opérations ".

5. Les collectivités titulaires du droit de préemption urbain peuvent légalement exercer ce droit, d'une part, si elles justifient, à la date à laquelle elles l'exercent, de la réalité d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement répondant aux objets mentionnés à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme, alors même que les caractéristiques précises de ce projet n'auraient pas été définies à cette date, et, d'autre part, si elles font apparaître la nature de ce projet dans la décision de préemption.

6. Il ressort des pièces du dossier que par une délibération du 21 juin 2013, le conseil d'administration du SDIS de Dordogne a décidé de réaliser une opération consistant en un réaménagement des vestiaires-sanitaires de plusieurs centres d'incendie et de secours du département. Le 3 janvier 2017, le directeur départemental du SDIS a confirmé au maire d'Abjat-sur-Bandiat l'intérêt que représenterait pour cet établissement public la possibilité pour le centre de première intervention d'Abjat-sur-Bandiat de disposer de l'ensemble des locaux jusqu'alors partagés avec les services techniques de la commune. La délibération litigieuse mentionne ainsi que le projet de préemption consiste, en vue de permettre l'extension du centre de secours, en un déménagement des services techniques communaux sur les parcelles en cause, lesquelles répondent aux critères de situation et d'accessibilité requis pour l'installation de tels services. Dès lors, la commune d'Abjat-sur-Bandiat justifie, à la date de la délibération litigieuse, de la réalité de ce projet de déménagement, quand bien même la date de réalisation effective de cette opération ne pouvait encore être précisément déterminée. Par ailleurs, un équipement collectif doit s'entendre comme une installation ou une construction dont le fonctionnement ou la destination permettent d'assurer un service d'intérêt général destiné à répondre à un besoin collectif de la population. L'opération en cause, qui est nécessaire à l'exécution par la collectivité de ses missions d'intérêt général en vue de répondre aux besoins collectifs de ses administrés, doit ainsi être regardée comme ayant pour objet la réalisation d'un équipement collectif au sens de l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme et répond à un intérêt général suffisant. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées du code de l'urbanisme doit être écarté.

7. Sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de la requête en tant qu'elle est présentée par Mme H..., et sans qu'il y ait lieu de surseoir à statuer en raison de la demande d'inscription de faux que les appelants ont présentée dès lors que le présent arrêt ne dépend pas du devis produit par la commune en pièce n° 6 arguée de faux, il résulte de tout ce qui précède que M. B... et Mme H... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande.

Sur le sursis à exécution du jugement :

8. Par le présent arrêt, la cour statuant sur les conclusions de la requête de M. B... et de Mme H... tendant à l'annulation du jugement attaqué, les conclusions de leur requête tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement deviennent sans objet. Par suite, il n'y a pas lieu d'y statuer.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune d'Abjat-sur-Bandiat, qui n'est pas partie perdante à l'instance, la somme que demandent M. B... et Mme H... au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.

10. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, en application des mêmes dispositions, de mettre à la charge de M. B... et de Mme H..., parties perdantes à l'instance, la somme de 2 000 euros à verser à la commune d'Abjat-sur-Bandiat au titre des frais qu'elle a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 19BX00199.

Article 2 : La requête n° 18BX04522 est rejetée.

Article 3 : M. B... et Mme H... verseront à la commune d'Abjat-sur-Bandiat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Mme G... H..., à la commune d'Abjat-sur-Bandiat et à M. et Mme F....

Délibéré après l'audience du 24 septembre 2020 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, président,

M. E... D..., président-assesseur,

Mme Nathalie Gay-Sabourdy, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 22 octobre 2020.

Le rapporteur,

Didier D...

Le président,

Marianne HardyLe greffier,

Sophie Lecarpentier

La République mande et ordonne au préfet de la Dordogne en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 18BX04522, 19BX00199


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18BX04522,19BX00199
Date de la décision : 22/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-02-01-01-01 Urbanisme et aménagement du territoire. Procédures d'intervention foncière. Préemption et réserves foncières. Droits de préemption. Droit de préemption urbain.


Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: M. Didier SALVI
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : LAVALETTE AVOCATS CONSEILS

Origine de la décision
Date de l'import : 05/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-10-22;18bx04522.19bx00199 ?
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