Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
L'association Vive la forêt a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 1er août 2016 par lequel le préfet de la Gironde a autorisé la société Solaire de Bouzac, sur le fondement de l'article L. 214-3 du code de l'environnement, à aménager une centrale photovoltaïque à Saint-Laurent-Médoc.
Par un jugement n° 1605252 du 20 décembre 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 13 février 2019, et des mémoires enregistrés le 21 et le 29 septembre 2020, l'association Vive la forêt, représentée par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 20 décembre 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Gironde du 1er août 2016 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- en tant qu'association agréée au titre de la protection de l'environnement, et compte tenu de l'objet que définissent ses statuts, elle a intérêt à agir ; son président a été mandaté par le conseil d'administration ;
- le jugement n'est pas suffisamment motivé quant à l'insuffisance de l'étude d'impact, aux impacts du projet sur les zones humides et à la mise en oeuvre de la séquence éviter-réduire-compenser ;
- le jugement est entaché de contradictions de motifs en ce qui concerne la création de pistes de secours ; le tribunal a jugé à tort que l'autorisation ne conduisait pas à une dissociation du projet, a commis une erreur d'appréciation sur le caractère suffisant de l'étude d'impact, a dénaturé les éléments du dossier en considérant que le pétitionnaire avait répondu à l'ensemble des griefs faits au projet s'agissant des zones humides, a commis une erreur quant à l'appréciation portée sur l'indépendance de l'autorité environnementale et sur l'information du public au regard de cet avis et a également entaché son jugement d'erreur en estimant que l'absence d'avis obligatoires ne privait pas le public d'une garantie ;
- l'étude d'incidence loi sur l'eau est insuffisante au regard de l'article R. 214-6 du code de l'environnement alors même qu'un dossier de demande de dérogation à l'interdiction des atteintes aux espèces protégées devait être présenté par ailleurs ; l'état initial a été étudié en 2010, cinq ans avant l'enquête publique et est obsolète ; les surfaces imperméabilisées n'ont pas été calculées, les pistes n'ont pas été prises en compte et l'existence de zones humides n'a pas été précisée ; l'étude aurait dû mentionner la rubrique 3.3.1.0 ; l'impact du projet sur les zones humides n'a, de ce fait, pas été étudié ; la commission locale de l'eau a d'ailleurs émis un avis défavorable au projet pour cette raison ; le dossier n'apporte pas de précision sur les effets du raccordement à un réseau enterré sur le fonctionnement des zones humides ; le commissaire enquêteur a souligné cette insuffisance ; l'étude ne prévoit pas de mesures de compensation à l'atteinte portée aux zones humides et ne comporte aucune évaluation des pertes d'habitat et de l'atteinte à l'avifaune, à la mammalofaune et à la flore ;
- les pistes de lutte contre l'incendie qui impactaient 8 hectares de zones humides, ont été supprimées du projet pour que l'étude d'impact ne puisse pas être qualifiée d'insuffisante quant aux effets des pistes sur les zones humides et l'arrêté contesté renvoie s'agissant des pistes à un dossier à présenter ultérieurement, mais il en résulte que la décision ne respecte plus l'interdiction de dissociation d'un projet posée par l'article R. 214-42 du code de l'environnement ou que l'obligation de prévoir les moyens d'intervention en cas d'incident ou accident posée par l'article R. 214-6 du même code a été méconnue ; l'autorisation aurait dû porter sur la rubrique 3.3.1.0 ;
- l'enquête publique a été irrégulière ; le dossier d'enquête ne comportait pas l'avis de la commission locale de l'eau en méconnaissance des articles L. 123-12, R. 123-8 et R. 214-10 du code de l'environnement alors que cet avis était éclairant sur les manquements de l'étude d'impact ;
- l'avis rendu par l'autorité environnementale est irrégulier dès lors que cette autorité ne disposait pas de l'indépendance exigée par les directives n° 2001/42/CE du 27 juin 2001 et n° 2011/92/UE du 13 décembre 2011 ; le préfet de la Gironde est en effet à la fois l'autorité décisionnaire et l'autorité qui, en qualité de préfet de région, a donné l'avis en tant qu'autorité environnementale ; aucune disposition n'organise l'autonomie de la DREAL vis-à-vis du préfet de région ; cette absence d'impartialité a privé le public d'une garantie ;
- les éléments complémentaires fournis par le pétitionnaire sur les zones humides n'ont pas été soumis à la commission locale de l'eau ni à l'autorité environnementale ; le public a été privé de l'avis de ces autorités sur les zones humides et donc d'une garantie d'information complète ; ce vice a également été de nature à exercer une influence sur le sens de la décision ;
- le projet est incompatible avec le SDAGE Adour-Garonne, en méconnaissance de l'article L. 212-1 du code de l'environnement, au regard de l'atteinte aux zones humides ; les prescriptions ZH5 et R2 du SAGE Estuaire de la Gironde et milieux associés et les prescriptions du SAGE Lacs médocains, opposables en application de l'article L. 121-5-2 du code de l'environnement, sont méconnues ;
- les prescriptions de l'arrêté sont insuffisantes et les mesures de compensation sont absentes en méconnaissance des articles L. 211-1, L. 122-1-1, L. 163-1 et R. 214-15 du code de l'environnement.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 22 avril et 30 octobre 2020, la société Solaire de Bouzac, société à responsabilité limitée représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête ou, subsidiairement, à une annulation partielle ou à ce qu'il soit sursis à statuer sur la requête en application de l'article L. 181-18 du code de l'environnement pour permettre la régularisation de la décision ou à l'annulation partielle de l'arrêté, limitée à l'avis de l'autorité environnementale et à la fixation de mesures compensatoires, et, en toute hypothèse, à ce que soit mis à la charge de l'association Vive la forêt le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'association, dont l'agrément est expiré depuis le 28 janvier 2019, antérieurement à la requête d'appel, ne justifie pas d'un intérêt à agir dès lors que le projet n'aura aucun effet dommageable sur l'environnement ;
- aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Par un courrier du 21 octobre 2020, les parties ont été invitées à indiquer si une décision était intervenue sur la demande de la société Solaire de Bouzac de dérogation à l'interdiction de destruction des espèces protégées et de leurs habitats.
Par courrier du 21 octobre 2020, les parties ont été invitées à présenter leurs observations sur l'éventualité d'un sursis à statuer sur la requête en vue de la régularisation des vices tenant à l'absence de demande de la société Solaire de Bouzac au titre de la rubrique 3.3.1.0 de la nomenclature annexée à l'article R. 214-1 du code de l'environnement à raison de l'imperméabilisation de zones humides notamment par la pose de longrines et à l'absence d'analyse dans l'étude d'impact concernant cette imperméabilisation.
Par un mémoire enregistré le 27 octobre 2020, l'association Vive la forêt présente ses observations à la suite des courriers susvisés.
Elle soutient que :
- aucune dérogation ne semble avoir été accordée à la société au titre de l'article L. 411-2 du code de l'environnement et ainsi, l'autorisation doit être annulée en tant qu'elle ne comporte pas cette dérogation ;
- une annulation totale se justifie en ce qui concerne l'imperméabilisation de zones humides ;
- l'article L. 181-18 du code de l'environnement semble ne pas devoir s'appliquer lorsque l'acte est entaché de plus d'un vice.
Par un mémoire et un courrier enregistrés le 28 octobre 2020, la société Solaire de Bouzac présente ses observations sur une éventuelle régularisation en soutenant que la rubrique 3.3.1.0 ne s'applique pas au projet et, subsidiairement, qu'un sursis à exécution permettrait une régularisation sur ce point et informe la cour que sa demande de dérogation au titre de l'article L. 411-2 du code de l'environnement est en cours d'instruction.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 octobre 2020, le ministre de la transition écologique présente ses observations à la suite des courriers susvisés et conclut à titre principal au rejet de la requête et, subsidiairement, à ce qu'il soit sursis à statuer en vue d'une régularisation de l'arrêté contesté.
Il soutient que :
- une régularisation n'est pas nécessaire, le projet ne relevant pas de la rubrique 3.3.1.0 ; en effet le système des longrines a été abandonné par le pétitionnaire et l'arrêté impose des fixations par pieux battus ;
- la demande de dérogation à l'interdiction de destruction des espèces protégés et de leurs habitats est en cours d'instruction.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la directive n° 2011/92/UE du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement ;
- le code de l'environnement ;
- l'ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017 relative à l'autorisation environnementale ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme E... B...,
- les conclusions de Mme Sylvande Perdu, rapporteur public,
- et les observations de Me D... se substituant à Me C..., représentant l'association Vive la Forêt, et de Me A..., représentant la société Solaire de Bouzac.
Une note en délibéré présentée pour l'association Vive la Forêt a été enregistrée le 3 novembre 2020.
Considérant ce qui suit :
1. Par arrêté du 1er août 2016, le préfet de la Gironde a délivré à la société Solaire de Bouzac, au titre de l'article L. 214-3 du code de l'environnement, une autorisation de rejet dans trois bassins versants, des eaux pluviales captées sur une superficie totale de 85 hectares correspondant à la surface d'une centrale photovoltaïque aménagée sur quatre sites du territoire de la commune de Saint-Laurent-Médoc dénommés la Baraque Nord, situé dans le sous-bassin versant de la Jalle du Breuil, les Parcs de Haut-Bouzac Est et Peynadan, situés dans le sous-bassin versant de la Jalle du Nord ou de l'Horte et le Jonc, situé en tête du sous-bassin versant des Lacs de Carcans et d'Hourtin. L'association Vive la forêt fait appel du jugement du 20 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté préfectoral du 1er août 2016.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Le tribunal, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments exposés par l'association demanderesse, décrit au point 10 du jugement le contenu de l'étude d'impact notamment en ce qui concerne les landes humides relictuelles et lagunes permanentes, en particulier du point de vue des impacts du projet et des mesures prévues pour supprimer, réduire et compenser ces impacts. Le jugement souligne également que l'autorité environnementale a noté la volonté du pétitionnaire d'intégrer la séquence " éviter, réduire, compenser " et d'éviter les zones humides et indique que la société a complété son dossier de demande en précisant la localisation des zones humides, leurs surfaces totales et celles impactées par l'emprise des projets et l'analyse des effets cumulés avec d'autres projets, en actualisant les données recueillies en 2010, en procédant à un recensement des mesures de réduction des impacts sur les zones humides et en complétant les données de présentation cartographique. Le tribunal a encore indiqué que dès lors que le dossier complété indiquait la surface des zones humides du secteur et celles impactées par le projet, le dossier ne pouvait pas être regardé comme insuffisant du seul fait qu'il n'indiquait pas les critères de délimitation des zones humides. Dans ces conditions, contrairement à ce que soutient l'association Vive la forêt, le jugement répond de façon suffisamment motivée à la branche du moyen qu'elle avait soulevé, tenant à l'insuffisance de l'étude d'impact s'agissant des impacts du projet sur les zones humides et la mise en oeuvre de la séquence éviter-réduire-compenser.
Sur le fond :
3. Aux termes de l'article R. 214-42 du code de l'environnement : " Si plusieurs ouvrages, installations, catégories de travaux ou d'activités doivent être réalisés par la même personne sur le même site, une seule demande d'autorisation ou une seule déclaration peut être présentée pour l'ensemble de ces installations. / Il en est obligatoirement ainsi lorsque les ouvrages, installations, travaux ou activités envisagés dépendent de la même personne, de la même exploitation ou du même établissement et concernent le même milieu aquatique, si leur ensemble dépasse le seuil fixé par la nomenclature des opérations ou activités soumises à autorisation ou à déclaration, alors même que, pris individuellement, ils sont en dessous du seuil prévu par la nomenclature, que leur réalisation soit simultanée ou successive. La demande d'autorisation fait alors l'objet d'une seule enquête (...) ". Il résulte de ces dispositions que pour déterminer si les ouvrages, installations, travaux ou activités sont soumis à déclaration ou à autorisation au regard de la nomenclature définie à l'article R. 214-1 du code de l'environnement, l'administration est tenue d'inviter le pétitionnaire à former une demande unique pour le ou les projets formant ensemble une seule et même opération, dès lors que ces projets dépendent de la même personne, exploitation ou établissement et concernent le même milieu aquatique.
4. L'étude d'impact concernant le projet indique que les pistes d'accès aux sites seront stabilisées mais non imperméabilisées et que les surfaces imperméabilisées seront d'environ 700 m² correspondant pour l'essentiel aux locaux techniques. Si la société a présenté son projet initial comme devant comporter la fixation des panneaux sur des longrines en béton de 40 cm de large par 4 m de long, il résulte de l'instruction que le pétitionnaire a finalement abandonné ce procédé et l'article 2 de l'arrêté contesté dispose que les panneaux reposeront sur des structures supports fixées au sol par des pieux battus et que le point bas des tables sera placé à 80 cm au-dessus du terrain naturel. Ainsi, aucune imperméabilisation ne résultera du mode de fixation ainsi prescrit. Alors même que l'association régionale de défense des forêts contre l'incendie d'Aquitaine a préconisé, dans son avis du mois de janvier 2010, la desserte du projet par des pistes carrossables, il ne résulte d'aucun élément de l'instruction que la superficie que la société envisage d'imperméabiliser pour l'aménagement de pistes porterait en réalité la surface imperméabilisée à plus de 1 000 m² ni, par suite, que le dossier de demande présenté par la société aurait dû mentionner la rubrique 3.3.1.0 de la nomenclature annexée à l'article R. 214-1 du code de l'environnement. De plus, l'arrêté d'autorisation du 1er août 2016 indique dans son article 6 qu'il n'autorise pas la création de pistes de desserte internes aux sites ou de pistes périphériques autour des sites par des voies stabilisées en grave. Si l'arrêté contesté ajoute, dans ce même article, que si la création de pistes stabilisées en grave était nécessaire à l'opération, " ces aménagements devront faire l'objet d'un dossier loi sur l'eau avec actualisation de l'étude d'impact ", ces indications ne méconnaissent pas les dispositions précitées dès lors qu'elles n'induisent aucune erreur dans la détermination du régime juridique applicable au projet au regard de la nomenclature définie à l'article R. 214-1 du code de l'environnement et que l'autorisation délivrée le 1er août 2016 ne fait pas, par elle-même, obstacle à ce que le pétitionnaire présente ultérieurement une demande pour la réalisation d'ouvrages qui ne sont pas au nombre de ceux autorisés en l'espèce.
5. Aux termes de l'article R. 214-6 du code de l'environnement : " I.- Toute personne souhaitant réaliser une installation, un ouvrage, des travaux ou une activité soumise à autorisation adresse une demande au préfet du département ou des départements où ils doivent être réalisés. II.- Cette demande (...) comprend : (...) 4° Un document : a) Indiquant les incidences directes et indirectes, temporaires et permanentes, du projet sur la ressource en eau, le milieu aquatique, l'écoulement, le niveau et la qualité des eaux, y compris de ruissellement, en fonction des procédés mis en oeuvre, des modalités d'exécution des travaux ou de l'activité, du fonctionnement des ouvrages ou installations, de la nature, de l'origine et du volume des eaux utilisées ou affectées et compte tenu des variations saisonnières et climatiques ; b) Comportant l'évaluation des incidences du projet sur un ou plusieurs sites Natura 2000, au regard des objectifs de conservation de ces sites. Le contenu de l'évaluation d'incidence Natura 2000 est défini à l'article R. 414-23 et peut se limiter à la présentation et à l'exposé définis au I de l'article R. 414-23, dès lors que cette première analyse conclut à l'absence d'incidence significative sur tout site Natura 2000 ; c) Justifiant, le cas échéant, de la compatibilité du projet avec le schéma directeur ou le schéma d'aménagement et de gestion des eaux et avec les dispositions du plan de gestion des risques d'inondation mentionné à l'article L. 566-7 et de sa contribution à la réalisation des objectifs visés à l'article L. 211-1 ainsi que des objectifs de qualité des eaux prévus par l'article D. 211-10 ; d) Précisant s'il y a lieu les mesures correctives ou compensatoires envisagées ; e) Les raisons pour lesquelles le projet a été retenu parmi les alternatives ainsi qu'un résumé non technique (...) Lorsqu'une étude d'impact est exigée en application des articles R. 122-2 et R. 122-3, elle est jointe à ce document, qu'elle remplace si elle contient les informations demandées (...) ".
6. Les études d'impact jointes au dossier de demande comportent, pour chacun des quatre sites, l'étude des incidences du projet, prévue par les dispositions précitées. Elles évaluent l'importance des impacts sur l'avifaune et la mammalofaune en qualifiant notamment ces impacts de faibles à moyens et précisent les mesures d'évitement ou de réduction des impacts ainsi que les mesures d'accompagnement prévues. L'importance des impacts sur les habitats et la flore est également évaluée et les mesures d'évitement, réduction ou compensation sont exposées, les études précisant en particulier que les terrassements sont très limités et qu'une parcelle à l'est de l'aérodrome sera restaurée afin de favoriser la diversification des habitats. La circonstance que l'étude ne précise pas les caractéristiques de cette parcelle ne suffit pas à entacher cette étude d'insuffisance dès lors que la parcelle est suffisamment identifiée. Ces études portent, comme l'a relevé le tribunal, sur les impacts du projet sur les milieux aquatiques, et notamment les fossés, les mares et leurs berges, les prairies méso-hygrophiles, les landes humides, ou les landes à Molinie. Elles recensent de façon précise les espèces végétales et animales de ces milieux et expose leur valeur écologique et leur protection. Elles exposent que les zones humides remarquables, celles des sites n° 1 et 2, sont totalement évitées, y compris s'agissant du raccordement, le parc n° 2 ayant été éloigné de la mare située dans le secteur, et qu'une bande d'au moins 2 mètres sera évitée autour de la mare du site n° 3. Elles précisent, enfin, les mesures de compensation prises sur ce point, consistant notamment dans le recreusement ou la réhabilitation de lagunes, et la création de mares et dépressions. Ces études ont été complétées en 2015 par un document joint au dossier de l'enquête publique qui s'est déroulée du 25 janvier au 25 février 2016 comme l'indique le rapport du commissaire enquêteur, lequel document, notamment, recense et situe les zones humides présentes dans les secteurs concernés en indiquant leur superficie totale, la superficie de zones humides sur l'emprise des projets et la superficie de zones humides évitées, actualise les données relevées sur le terrain lors de l'étude initiale, intègre les données concernant la zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF) " Landes médocaines entre Hourtin, Carcans et Saint-Laurent-Médoc ", créée en 2014, postérieurement à l'étude initiale réalisée en 2010, en exposant les impacts du projet sur cette zone, précise la superficie des différentes formations végétales identifiées, détaille l'impact du projet sur les mares situées en limite nord du secteur d'étude n° 3 ainsi que les mesures prévues pour les réduire, précise pour quelles raisons le projet n'aura aucun impact sur les zones humides situées à proximité des sites et mentionne les espèces et habitats d'espèces protégées pour lesquels une demande de dérogation à l'interdiction de destruction doit être présentée au titre de l'article L. 411-2 du code de l'environnement. Cette étude complète l'analyse de l'étude initiale s'agissant de l'impact sur la Linotte mélodieuse, la Fauvette grisette et la Pie-grièche écorcheur et confirme les mesures de réduction prises en faveur de ces espèces, dont il est précisé que les populations et leur cycle de reproduction ne seront pas remis en cause. S'agissant des espèces de papillons impactées et de leur habitat, l'étude complémentaire précise les impacts, consistant notamment en la destruction d'individus en période de travaux et en l'altération réversible d'habitats en période d'exploitation, les espèces pouvant continuer à fréquenter le site mais avec des populations plus faibles, et rappelle également les mesures de suivi, d'évitement, de réduction et de compensation prises par le pétitionnaire. Ce document apporte des précisions sur les raisons pour lesquelles l'incidence du raccordement des installations au réseau de distribution d'électricité est considérée comme négligeable. Au demeurant, le raccordement d'une installation de production d'électricité aux réseaux de transport de distribution et de transport d'électricité, qui incombe aux gestionnaires de ces réseaux et qui relève d'une autorisation distincte, n'a pas à faire l'objet d'une analyse dans l'étude d'incidence réalisée au titre de la loi sur l'eau. Cette étude complémentaire précise par ailleurs, en réponse à l'avis de la commission locale de l'eau du schéma d'aménagement et de gestion des eaux " Estuaire de la Gironde et milieux associés ", les critères qui ont été retenus pour délimiter les zones humides. S'agissant des superficies imperméabilisées, les études d'impact précisent que les locaux techniques ne nécessiteront pas de fondations mais seront posés sur une couche de sable ou gravier, à l'exclusion de béton, et que les chemins d'accès, la piste interne de circulation et la piste périmétrale externe " ne seront pas imperméabilisées ". Les études mentionnent la surface de chacun des parcs photovoltaïques et leur surface totale de 78,8 ha, ainsi que la surface des sols imperméabilisée, soit au total " environ 704 m² " correspondant principalement aux locaux techniques. Par ailleurs, et ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la pose de longrines en béton pour fixer les panneaux solaires a été abandonnée au profit de fixations par des pieux battus, les tables étant situées à 80 cm au-dessus du niveau du sol. Ce mode de fixation n'appelait aucune analyse particulière au regard de l'imperméabilisation des zones humides dès lors qu'il n'a pas d'impact à cet égard. Dans ces conditions, l'association Vive la forêt n'est pas fondée à soutenir que l'étude d'impact serait entachée d'insuffisance.
7. En application de l'article R. 214-6 du code de l'environnement dans sa rédaction applicable, la demande présentée par le pétitionnaire doit comporter les moyens de surveillance prévus et, si l'opération présente un danger, les moyens d'intervention en cas d'incident ou d'accident.
8. Les études d'impact jointes au dossier de demande comportaient pour chaque site une étude des risques pour la sécurité et notamment du risque incendie ainsi qu'une description des pistes de desserte de chaque site, prévues pour être stabilisées mais non imperméabilisées. Si l'article 6 de l'arrêté d'autorisation indique que n'est pas autorisée la création de pistes de desserte interne aux sites ou de pistes périphériques autour des sites par des voies stabilisées en grave, cette interdiction, à supposer qu'elle vise l'une des modalités de protection du site contre l'incendie prévues par le pétitionnaire, n'a pas pour effet de rendre irrégulière la composition du dossier de demande qui comportait, conformément à l'article R. 214-6 du code de l'environnement, les moyens d'intervention en cas d'incident ou d'accident.
9. Aux termes du paragraphe 1 de l'article 6 de la directive du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement : " Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les autorités susceptibles d'être concernées par le projet, en raison de leurs responsabilités spécifiques en matière d'environnement, aient la possibilité de donner leur avis sur les informations fournies par le maître d'ouvrage et sur la demande d'autorisation. À cet effet, les États membres désignent les autorités à consulter, d'une manière générale ou au cas par cas. (...) ". L'article L. 122-1 du code de l'environnement, pris pour la transposition des articles 2 et 6 de cette directive, dispose, dans sa rédaction applicable en l'espèce, que " I. - Les projets de travaux, d'ouvrages ou d'aménagements publics et privés qui, par leur nature, leurs dimensions ou leur localisation sont susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement ou la santé humaine sont précédés d'une étude d'impact. (...) / III. - Dans le cas d'un projet relevant des catégories d'opérations soumises à étude d'impact, le dossier présentant le projet, comprenant l'étude d'impact et la demande d'autorisation, est transmis pour avis à l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement. (...). / IV.- La décision de l'autorité compétente qui autorise le pétitionnaire ou le maître d'ouvrage à réaliser le projet prend en considération l'étude d'impact, l'avis de l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement et le résultat de la consultation du public (...) ". En vertu du III de l'article R. 122-6 du même code dans sa rédaction applicable à la date de la décision attaquée : " Dans les cas ne relevant pas du I ou du II, l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement mentionnée à l'article L. 122-1 est le préfet de la région sur le territoire de laquelle le projet de travaux, d'ouvrage ou d'aménagement doit être réalisé. (...) ".
10. La directive 2011/92/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics ou privés sur l'environnement a pour finalité de garantir qu'une autorité compétente et objective en matière d'environnement soit en mesure de rendre un avis sur l'évaluation environnementale des plans et programmes ou sur l'étude d'impact des projets susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement, avant leur approbation ou leur autorisation, afin de permettre la prise en compte de ces incidences. Les dispositions de l'article 6 de la directive du 13 décembre 2011, si elles ne font pas obstacle à ce que l'autorité publique compétente pour autoriser un projet ou en assurer la maîtrise d'ouvrage soit en même temps chargée de la consultation en matière environnementale, imposent cependant que, dans une telle situation, une séparation fonctionnelle soit organisée au sein de cette autorité, de manière à ce qu'une entité administrative, interne à celle-ci, dispose d'une autonomie réelle, impliquant notamment qu'elle soit pourvue de moyens administratifs et humains qui lui sont propres, et soit ainsi en mesure de remplir la mission de consultation qui lui est confiée et de donner un avis objectif sur le projet concerné.
11. L'avis de l'autorité environnementale du 29 octobre 2015 sur l'étude d'impact a été élaboré par la direction régionale de l'équipement, de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) Aquitaine, laquelle relève de l'autorité du préfet de la région Aquitaine qui est aussi préfet du département de la Gironde, auteur de l'autorisation en litige. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que la DREAL ait concrètement bénéficié de l'autonomie qui lui était nécessaire pour préparer et adopter son avis sur l'étude d'impact dans des conditions répondant aux exigences de la directive 2011/92/UE du 13 décembre 2011.
12. Toutefois, les irrégularités qui entachent un élément qui, tel l'avis de l'autorité environnementale, doit être joint au dossier de l'enquête publique, sont de nature à vicier la procédure, et donc à entraîner l'illégalité de la décision si elles ont eu pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont pu exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative. Il ressort en l'espèce de l'examen de l'avis rendu le 29 octobre 2015 que l'autorité environnementale a souligné un certain nombre d'insuffisances et de lacunes dans l'étude d'impact, qu'elle a préconisé, s'agissant des effets du projet sur l'environnement, la réalisation de mesures de compensation s'ajoutant à celles déjà prévues par la société pétitionnaire et qu'elle a souligné les effets négatifs du projet sur l'environnement, en particulier sur deux espèces de papillons, le Fadet des laîches et le Damier de la succise. Dans ces conditions, l'absence d'autonomie de la DREAL n'a pas été, dans les circonstances de l'espèce, de nature à nuire à l'information complète du public ni à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.
13. L'autorité environnementale a souligné s'agissant de l'étude d'impact, l'absence de l'analyse des effets cumulés du projet avec d'autres projets connus, de mise à jour des données recueillies en 2010, d'analyse des impacts du raccordement, d'inventaire des fossés, d'identification de la ZNIEFF " Landes médocaines entre Hourtin, Carcans et Saint-Laurent-Médoc ", d'analyse des continuités écologiques, de recensement des zones humides potentiellement impactées, d'analyse des impacts sur les mares situées au nord du site n° 3, de précision sur la surface des différentes formations végétales, de représentation graphique de l'implantation des parcs avec les différents relevés, de données et de cartographie du projet de schéma régional de cohérence écologique et de comparatif entre les différentes technologies de supports des panneaux photovoltaïques. L'étude complémentaire réalisée en 2015 par la pétitionnaire à la suite des observations de l'autorité environnementale et de la commission locale de l'eau répond précisément à chacune de ces observations et les compléments apportés n'ont pas pour objet de combler des lacunes d'une importance telle que l'autorité environnementale ne pouvait, en leur absence, rendre un avis sur la demande d'autorisation en ce qui concerne ses effets sur l'environnement. L'autorité environnementale a d'ailleurs rendu un avis circonstancié sur ce point. Ces compléments n'induisent par ailleurs aucune remise en cause de l'économie générale du projet. Dans ces conditions, le préfet n'avait à consulter à nouveau ni l'autorité environnementale ni la commission locale de l'eau après la production de ces compléments d'étude, alors même que celle-ci, après avoir émis un avis d'incompatibilité du projet avec le schéma d'aménagement et de gestion des eaux, avait demandé, dans son avis du 20 novembre 2015, à être re-consultée après complément d'analyse sur les zones humides.
14. En application de l'article R. 123-8 du code de l'environnement, le dossier soumis à l'enquête publique doit comporter, " lorsqu'ils sont rendus obligatoires par un texte législatif ou réglementaire préalablement à l'ouverture de l'enquête, les avis émis sur le projet plan, ou programme ". Si le dossier d'enquête ne comportait pas l'avis de la commission locale de l'eau, en méconnaissance de ces dispositions, il résulte de l'instruction, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, que l'étude complémentaire d'incidences du projet figurait parmi les pièces du dossier soumis à l'enquête. Dès lors que cette étude complémentaire indique apporter une réponse aux observations émises par la commission locale de l'eau, lesquelles étaient partiellement identiques à celles émises par l'autorité environnementale, l'absence au dossier d'enquête publique de l'avis de la commission locale de l'eau n'a pas pu avoir en l'espèce pour effet de nuire à l'information complète de la population et n'a pas été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.
15. Dès lors que la technique de supports sur des longrines en béton a été abandonnée et est exclue par l'arrêté préfectoral contesté, qu'il ne résulte d'aucun élément de l'instruction que les pistes de desserte du projet doivent être imperméabilisées, et que l'arrêté contesté interdit d'ailleurs expressément la création de pistes stabilisées en grave, la superficie imperméabilisée résultant du projet ne peut être regardée, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, comme supérieure à 1 000 m². L'autorisation délivrée à la société Solaire de Bouzac n'avait donc pas à porter sur la rubrique 3.3.1.0 de la nomenclature annexée à l'article R. 214-1 du code de l'environnement.
16. Il résulte des dispositions de l'article L. 212-1 du code de l'environnement que le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE), d'une part, fixe, pour chaque bassin ou groupement de bassins, les objectifs de qualité et de quantité des eaux ainsi que les orientations permettant d'assurer une gestion équilibrée et durable de la ressource en eau, et d'autre part, détermine à cette fin les aménagements et les dispositions nécessaires. En outre, lorsque cela apparaît nécessaire pour respecter ses orientations et ses objectifs, le SDAGE peut être complété, pour un périmètre géographique donné, par un schéma d'aménagement des eaux (SAGE) qui doit lui être compatible et qui comporte, en vertu de l'article L. 212-5-1, d'une part, un plan d'aménagement et de gestion durable de la ressource en eau et des milieux aquatiques, et d'autre part, un règlement pouvant édicter les obligations définies au II de cet article. En vertu du XI de l'article L. 212-1 et de l'article L. 212-5-2 du code de l'environnement, les décisions administratives prises dans le domaine de l'eau, dont celles prises au titre de la police de l'eau en application des articles L. 214-1 et suivants du même code, sont soumises à une simple obligation de compatibilité avec le SDAGE et avec le plan d'aménagement et de gestion durable du SAGE. Pour apprécier cette compatibilité, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle du territoire pertinent pour apprécier les effets du projet sur la gestion des eaux, si l'autorisation ne contrarie pas les objectifs et les orientations fixés par le schéma, en tenant compte de leur degré de précision, sans rechercher l'adéquation de l'autorisation au regard chaque orientation ou objectif particulier. En revanche, les décisions administratives prises au titre de la police de l'eau en application des articles L. 214-1 et suivants sont soumises à une obligation de conformité au règlement du SAGE et à ses documents cartographiques, dès lors que les installations, ouvrages, travaux et activités en cause sont situés sur un territoire couvert par un tel document.
17. L'association requérante soutient que le projet ne respecte pas la disposition D 40 du SDAGE Adour-Garonne, qui vise à " éviter, réduire ou, à défaut, compenser l'atteinte aux fonctions des zones humides ". La règle R2 du SAGE Estuaire de la Gironde et milieux associés, en vue de réaliser l'objectif Zh5 du plan d'aménagement et de gestion durable de la ressource en eau et des milieux aquatiques, impose d'" éviter, ou à défaut, compenser l'atteinte grave aux zones humides ".
18. Il résulte de l'instruction que le site de la Baraque Nord occupera 22,4 hectares de zones humides sur les 29,5 hectares que comporte le secteur, que le site des Parcs de Haut-Bouzac Est occupera 21,4 hectares de zones humides sur les 51 hectares que comporte le secteur, que le site de Peynadan occupera 12,8 hectares sur les 13,4 hectares que comporte le secteur et que le site du Jonc occupera 10,8 hectares sur les 12,1 hectares que comporte le secteur. Toutefois, il résulte également de l'instruction que la société a réduit de 30 hectares son projet initial afin de préserver des landes humides atlantiques, que les travaux d'installation doivent se dérouler entre septembre et février, en dehors de la période de vol des espèces de papillons les plus sensibles présentes dans les zones concernées, et que si le projet aura pour effet une altération réversible de l'habitat du Damier de la succise et du Fadet des laîches, la société a prévu le recreusement et la réhabilitation de lagunes, la création de mares et dépressions, une réhabilitation en lande et moliniaie de 12 hectares au lieu-dit Bouzac et une gestion écologique des parcelles préservées afin de conserver leur fonctionnalité vis-à-vis des espèces. Il résulte également de l'instruction que si l'occupation de ces zones humides entraînera une fréquentation moindre des zones concernées par les deux espèces de papillons susmentionnées, ainsi que par certains autres insectes, l'impact résiduel du projet sur les zones humides peut être regardé pour le reste comme négligeable dès lors que ce projet ne comporte ni drainage, ni pompage, que la surface imperméabilisée est faible, que le couvert herbacé et les fossés sont maintenus et qu'aucun produit polluant ne doit être employé. Dans ces conditions, ce projet qui doit, par ailleurs, faire l'objet d'une procédure de dérogation à la destruction d'espèces protégées et de leurs habitats en application de l'article L. 411-2 du code de l'environnement, n'est pas incompatible avec le SDAGE Adour-Garonne et n'est pas davantage contraire aux dispositions invoquées du SAGE Estuaire de la Gironde et milieux associés. Si l'association invoque également la méconnaissance de dispositions du SAGE Lacs médocains, elle n'assortit son moyen d'aucune précision, notamment sur celles des dispositions de ce SAGE qui seraient méconnues.
19. Aux termes de l'article L. 211-1 du code de l'environnement : " I.- Les dispositions des chapitres Ier à VII du présent titre ont pour objet une gestion équilibrée et durable de la ressource en eau ; cette gestion prend en compte les adaptations nécessaires au changement climatique et vise à assurer :1° La prévention des inondations et la préservation des écosystèmes aquatiques, des sites et des zones humides ; on entend par zone humide les terrains, exploités ou non, habituellement inondés ou gorgés d'eau douce, salée ou saumâtre de façon permanente ou temporaire, ou dont la végétation, quand elle existe, y est dominée par des plantes hygrophiles pendant au moins une partie de l'année (...) ". L'article L. 163-1 du même code dispose que : " I. - Les mesures de compensation des atteintes à la biodiversité sont les mesures prévues au 2° du II de l'article L. 110-1 et rendues obligatoires par un texte législatif ou réglementaire pour compenser, dans le respect de leur équivalence écologique, les atteintes prévues ou prévisibles à la biodiversité occasionnées par la réalisation d'un projet de travaux ou d'ouvrage ou par la réalisation d'activités ou l'exécution d'un plan, d'un schéma, d'un programme ou d'un autre document de planification. / Les mesures de compensation des atteintes à la biodiversité visent un objectif d'absence de perte nette, voire de gain de biodiversité. Elles doivent se traduire par une obligation de résultats et être effectives pendant toute la durée des atteintes. Elles ne peuvent pas se substituer aux mesures d'évitement et de réduction. Si les atteintes liées au projet ne peuvent être ni évitées, ni réduites, ni compensées de façon satisfaisante, celui-ci n'est pas autorisé en l'état (...) ".
20. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus au point 18 que le pétitionnaire a prévu des mesures de compensation des atteintes portées à la fonctionnalité des zones humides du fait de la baisse de leur fréquentation par certaines espèces. Il ne résulte pas de l'instruction que ces mesures, consistant dans le recreusement de lagunes, dans la création de mares et dépressions, dans la réhabilitation en lande et moliniaie de 12 hectares au lieu-dit Bouzac et dans une gestion écologique des parcelles préservées afin de conserver leur fonctionnalité vis-à-vis des espèces, ne seraient pas suffisantes au regard de l'objectif d'absence de perte nette de biodiversité prévu par l'article L. 163-1 précité du code de l'environnement ni que le préfet aurait dû imposer sur ce point des prescriptions complémentaires.
21. En vertu des dispositions de l'article 15 de l'ordonnance du 26 janvier 2017 : " Les dispositions de la présente ordonnance entrent en vigueur le 1er mars 2017, sous réserve des dispositions suivantes : / 1° Les autorisations délivrées au titre du chapitre IV du titre Ier du livre II (...), avant le 1er mars 2017, sont considérées comme des autorisations environnementales relevant du chapitre unique du titre VIII du livre Ier de ce code, avec les autorisations, enregistrements, déclarations, absences d'opposition, approbations et agréments énumérés par le I de l'article L. 181-2 du même code que les projets ainsi autorisés ont le cas échéant nécessités ; les dispositions de ce chapitre leur sont dès lors applicables, notamment lorsque ces autorisations sont contrôlées, modifiées, abrogées, retirées, renouvelées, transférées, contestées ou lorsque le projet autorisé est définitivement arrêté et nécessite une remise en état (...) ". Il résulte de ces dispositions que les autorisations délivrées au titre de la police de l'eau en application de l'article L. 214-3 du code de l'environnement, antérieurement au 1er mars 2017, date d'entrée en vigueur de l'ordonnance du 26 janvier 2017, sont considérées, à compter de cette date, comme des autorisations environnementales. Dès lors que l'autorisation environnementale créée par cette ordonnance tient lieu des diverses autorisations, enregistrements, déclarations, absences d'opposition, approbations et agréments énumérés au I de l'article L. 181-2 du code de l'environnement, dont la dérogation à l'interdiction de destruction d'espèces animales non domestiques et de leurs habitats prévue à l'article L. 411-2 du code de l'environnement, l'autorisation environnementale issue de l'autorisation délivrée le 1er août 2016 au titre de la police de l'eau peut être utilement contestée en tant qu'elle n'incorpore pas cette dérogation dont il est constant qu'elle était requise pour le projet en cause et qu'elle a d'ailleurs été sollicitée.
22. Il résulte de tout ce qui précède que l'association requérante est seulement fondée à demander l'annulation de l'arrêté contesté en tant qu'il n'incorpore pas, à la date du présent arrêt, la dérogation à l'interdiction de destruction d'espèces animales non domestiques et de leurs habitats prévue à l'article L. 411-2 du code de l'environnement.
Sur la mise en oeuvre des dispositions de l'article L. 181-18 du code de l'environnement :
23. En vertu du II de l'article L. 181-18 du code de l'environnement : " En cas d'annulation ou de sursis à statuer affectant une partie seulement de l'autorisation environnementale, le juge détermine s'il y a lieu de suspendre l'exécution des parties de l'autorisation non viciées ".
24. Il y a lieu de mettre en oeuvre les pouvoirs résultant des dispositions précitées et de suspendre l'exécution de l'arrêté du préfet de la Gironde du 1er août 2016, devenu autorisation environnementale, en tant qu'il autorise le projet au titre de la police de l'eau, jusqu'à la délivrance de la dérogation prévue à l'article L. 411-2 du code de l'environnement.
Sur les frais liés à l'instance :
25. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a lieu ni de mettre à la charge de l'association requérante la somme que demande la société Solaire de Bouzac en application de des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ni de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme que demande l'association Vive la forêt sur le même fondement.
DECIDE :
Article 1er : L'arrêté du 1er août 2016 du préfet de la Gironde est annulé en tant qu'il n'incorpore pas la dérogation à l'interdiction de destruction d'espèces animales non domestiques et de leurs habitats prévue à l'article L. 411-2 du code de l'environnement.
Article 2 : L'exécution de l'arrêté du préfet de la Gironde du 1er août 2016, devenu autorisation environnementale, en ce qu'il autorise le projet au titre de la police de l'eau, est suspendue jusqu'à la délivrance de la dérogation prévue à l'article L. 411-2 du code de l'environnement.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 20 décembre 2018 est réformé en ce qu'il est contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de l'association Vive la forêt est rejeté.
Article 5 : Les conclusions de la société Solaire de Bouzac tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Vive la forêt, au ministre de la transition écologique et à la société Solaire de Bouzac. Une copie en sera adressée au préfet de la Gironde.
Délibéré après l'audience du 3 novembre 2020 à laquelle siégeaient :
Mme E... B..., présent,
M. Frédéric Faïck, président-assesseur,
Mme Caroline Gaillard, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er décembre 2020.
Le président-rapporteur,
Elisabeth B...
La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 19BX00522