Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 24 février 2020 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans.
Par un jugement n° 2001237 du 3 juillet 2020, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 24 juillet 2020, M. A..., représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 3 juillet 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 24 février 2020 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, à son profit, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le refus de séjour est entaché d'une erreur d'appréciation dans l'application des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'obligation de quitter le territoire est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle porte atteinte à son droit à un procès équitable et aux droits de la défense ;
- l'interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans est disproportionnée.
Par un mémoire en défense enregistré le 21 octobre 2020, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 17 septembre 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 et notamment son article 5 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme E... C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A..., ressortissant tunisien né le 26 mars 1985, est entré en France de manière irrégulière, en 2010 selon ses déclarations. Il a obtenu un titre de séjour, valable du 5 septembre 2018 au 4 mars 2019, sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en raison de son état de santé. A la suite d'une demande de renouvellement de ce titre de séjour, le préfet de la Gironde a, par un arrêté du 24 février 2020, refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans. M. A... relève appel du jugement du 3 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur le refus de séjour :
2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° À l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'État (...) ".
3. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.
4. Pour rejeter la demande de M. A... tendant au renouvellement de son titre de séjour en qualité d'étranger malade, le préfet de la Gironde s'est fondé, notamment, sur un avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui a estimé que si l'état de santé de l'intéressé nécessitait une prise en charge médicale, le défaut d'une telle prise en charge ne devrait pas entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que son état de santé lui permettait de voyager sans risque à destination de son pays d'origine, la Tunisie. Si M. A... fait valoir que l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a été établi plus d'un an avant la décision contestée, il n'invoque aucune disposition législative ou réglementaire qui aurait été méconnue et qui fixerait un délai entre la date de cet avis et la décision de l'autorité préfectorale et il ne ressort pas des pièces du dossier que son état de santé aurait évolué de manière notable pendant cette période, nécessitant une nouvelle consultation du collège. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que M. A... souffre d'un syndrome de stress post-traumatique et de séquelles en lien avec une agression subie le 1er octobre 2017. L'appelant verse au dossier quatre certificats médicaux établis par un médecin généraliste qui indiquent que l'état de santé de M. A... n'est pas compatible avec son activité professionnelle ainsi qu'un certificat établi par un praticien hospitalier du centre d'accueil spécialisé dans le repérage et le traitement des traumatismes psychiques qui décrit sa pathologie et l'ajustement de son traitement. Toutefois ces pièces, qui se bornent à décrire l'état de santé de M. A..., ne se prononcent pas sur la nécessité d'un suivi de l'intéressé. Enfin, si M. A... se prévaut de nouvelles pièces médicales en appel, ces documents, au demeurant postérieurs à l'arrêté attaqué, ne se prononcent pas plus sur les conséquences d'un défaut de prise en charge médicale de l'intéressé. Dans ces conditions, les éléments fournis par l'appelant ne sont pas de nature à remettre en cause l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Par suite, le préfet n'a pas entaché sa décision d'une erreur d'appréciation dans l'application des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
5. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent qu'il ne peut être tenu pour établi que les pathologies dont souffre M. A... nécessiteraient une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Si M. A... soutient que la décision attaquée lui fait courir un risque excessif dès lors que l'épidémie de coronavirus a particulièrement touché les pays d'Afrique du Nord, cette circonstance, intervenue postérieurement à la décision attaquée, est sans incidence sur sa légalité qui doit s'apprécier à la date à laquelle elle a été prise. Dans ces conditions, le préfet n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.
6. Enfin, la mesure d'éloignement contestée ne fait pas obstacle à ce que M. A... puisse, par le biais d'un conseil, se faire représenter dans le cadre de toute action judiciaire qui pourrait être menée à la suite de l'éventuelle arrestation des auteurs de l'agression dont il a été victime. Par suite, le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français porterait atteinte aux droits de la défense et au droit au procès équitable doit être écarté.
Sur l'interdiction de retour :
7. M. A... reprend en appel, sans invoquer des éléments de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée en première instance, et sans critiquer les réponses apportées par le tribunal administratif, le moyen tiré de la disproportion de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pendant deux ans. Dès lors, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera transmise au préfet de la Gironde.
Délibéré après l'audience du 10 décembre 2020 à laquelle siégeaient :
Mme E... C..., président,
M. Didier Salvi, président-assesseur,
Mme Charlotte Isoard, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 décembre 2020.
Le président,
Marianne C...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 20BX02330 2