Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 16 juin 2020 par lequel le préfet de la Charente-Maritime lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement.
Par un jugement n° 2001754 du 7 janvier 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 3 février 2021, et un mémoire, enregistré le 24 septembre 2021, ce dernier n'ayant pas été communiqué, M. A..., représenté par Me Domingues, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 7 janvier 2021 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 16 juin 2020 par lequel le préfet de la Charente-Maritime lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Charente-Maritime de lui délivrer un titre de séjour ou à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois et sous astreinte de 100 euros par jour ;
M. A... soutient que :
S'agissant du refus de titre de séjour,
- la décision méconnaît le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il souffre de graves pathologies qui ne peuvent être soignées en Arménie ;
- son état de santé ne lui permet pas de voyager ;
- la décision méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français, elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
S'agissant du pays de renvoi, la décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
Par décision du 1er avril 2021, M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C... A..., de nationalité arménienne, est entré pour la première fois en France, de façon irrégulière, en 2014, et a déposé, le 5 mai 2014, une demande d'asile, rejetée par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 7 juillet 2014, confirmée le 22 décembre 2014 par la Cour nationale du droit d'asile. M. A... a alors quitté la France, avant de revenir sur le territoire français, selon ses dires, en 2018. Le 31 mai 2019, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté pour irrecevabilité sa demande de réexamen de sa demande d'asile. Le 31 juillet 2019, M. A... a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade. Le 12 septembre 2019, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a rendu un avis selon lequel les soins nécessaires à l'état de santé de l'intéressé devaient être poursuivis en France pendant une durée de six mois. M. A... a déposé une nouvelle demande de titre de séjour le 22 février 2020, et, dans son avis du 5 juin 2020, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que les soins nécessaires à son traitement étaient disponibles en Arménie. Par arrêté du 16 juin 2020, le préfet de la Charente-Maritime lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement. M. A... relève appel du jugement du 7 janvier 2021 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la décision portant refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté litigieux : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° À l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ". Aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ".
3. L'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 5 juin 2020 mentionne que l'état de santé de M. A... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais que, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié et que l'état de santé de l'intéressé peut lui permettre de voyager sans risque vers son pays d'origine. M. A... produit de nombreux certificats médicaux qui font état de la gravité des affections dont il souffre, laquelle n'est pas contestée. À l'appui de son moyen tiré de ce qu'il ne pourrait recevoir de traitement approprié en Arménie, il produit le certificat d'un médecin généraliste du 24 janvier 2020, qui atteste que " À l'examen clinique il présente des pathologies nécessitant des soins en France ", celui d'un autre médecin généraliste du 13 janvier 2021, qui décrit son état de santé et conclu " En conséquence, il ne peut quitter le territoire français pour ces raisons médicales ", et celui d'un médecin travaillant au sein du service de soins de suite de la clinique de l'Atlantique du 22 février 2021, qui affirme que le traitement " n'existe pas dans son pays en Arménie où il ne peut même pas se procurer des sondes urinaires à usage unique pour la réalisation de ses auto-sondages ". Il produit également les certificats d'un médecin spécialisé en médecine physique et de la réadaptation, rédigés en des termes identiques et datés des 17 septembre 2020 et 18 janvier 2021, qui attestent que le traitement de M. A... n'existe pas en Arménie. Ces certificats, rédigés de façon peu circonstanciée, ainsi que les documents généraux dont se prévaut l'intéressé, tels que le rapport " Immersion en communauté ", rédigé en 2005, et donc déjà ancien, et l'article du 6 octobre 2017, intitulé " Un expert de l'ONU appelle à des approches modernes pour transformer les soins de santé en Arménie et remédier aux inégalités ", dont l'auteur et le média de publication n'apparaissent pas, ne permettent pas de contredire l'appréciation portée par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et le préfet sur la possibilité d'être traité dans son pays d'origine. Dans un mémoire en réplique, l'intéressé produit de nouveaux certificats médicaux, rédigés dans des termes similaires à ceux annexés à sa requête, et un courrier du ministère de la santé arménien, lequel souligne, contrairement à ce que soutient l'appelant, que " les injections intravésicales à l'aide de Botox ou des substances de substitution sont effectuées dans un certain nombre de clinique de la ville d'Eravan, à condition que les injections soient prescrites ". Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intéressé, contrairement à ce que précise le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, ne serait pas en état de voyager. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 11 de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
5. M. A... fait valoir sa " grande capacité à s'intégrer à un collectif ", dont atteste la note sociale rédigée le 30 juin 2020 par une éducatrice spécialisée, ainsi que la circonstance qu'il suit des cours de français au sein d'une association depuis 2019. Cependant, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé est entrée irrégulièrement en France selon ses dires en 2018, à l'âge de 43 ans, qu'il est célibataire et sans enfant et n'établit ni avoir créé des liens sur le territoire français, ni être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine. Dès lors, dans les circonstances de l'espèce, le moyen tiré de ce que le refus de titre de séjour attaqué porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par la décision et méconnaîtrait par suite les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté.
6. En troisième lieu, M. A... reprend en appel, sans l'assortir d'arguments nouveaux ou de critique utile du jugement, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il convient d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.
Sur les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi :
7. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 :Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur. Une copie en sera adressée au préfet de la Charente-Maritime.
Délibéré après l'audience du 7 octobre 2021 à laquelle siégeaient :
M. Éric Rey-Bèthbéder, président,
Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente-assesseure,
Mme Florence Rey-Gabriac, première conseillère
Rendu public après dépôt au greffe le 4 novembre 2021.
La rapporteure,
Frédérique B...Le président
Éric Rey-Bèthbéder
La greffière,
Angélique Bonkoungou
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 21BX00465