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18/10/2022 | FRANCE | N°21BX04052

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre, 18 octobre 2022, 21BX04052


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme H... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 29 juin 2020 par lequel le préfet de la Charente-Maritime a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 2100678 du 30 juin 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 26 o

ctobre 2021, Mme F..., représentée par Me Marques-Melchy, demande à la cour :

1°) d'annuler le ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme H... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 29 juin 2020 par lequel le préfet de la Charente-Maritime a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 2100678 du 30 juin 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 26 octobre 2021, Mme F..., représentée par Me Marques-Melchy, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 30 juin 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 29 juin 2020 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Charente-Maritime de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la décision à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de

l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- l'arrêté contesté a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière, l'avis de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 10 juin 2020 étant incomplet en l'absence de mention de la convocation pour examen ou des examens complémentaires demandés ; le préfet a en outre omis de produire le rapport médical ayant fondé cet avis ;

- la décision de refus de titre de séjour méconnait le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; l'état de santé du quatrième enfant de la requérante nécessite une prise en charge dont le défaut pourrait entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité, d'autant qu'elle ne pourrait pas bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;

- la décision de refus de titre de séjour méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision de refus de titre de séjour méconnait l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnait le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision fixant le pays de destination méconnait l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le pays de destination méconnait l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

Mme F... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 septembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Au cours de l'audience publique a été entendu le rapport de Mme E... A....

Considérant ce qui suit :

1. Mme F..., ressortissante congolaise, née le 15 mai 1989, est entrée irrégulièrement sur le territoire français le 22 novembre 2017, accompagnée de ses quatre enfants. Sa demande d'asile, déposée le 20 décembre 2017, a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) le 29 février 2018, décision qui a fait l'objet d'un recours devant la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) rejeté le 19 novembre 2018. Mme F... a fait l'objet d'une décision l'obligeant à quitter le territoire français le 18 janvier 2019 contestée devant le tribunal administratif de Poitiers qui a rejeté le recours par un jugement du 8 mars 2019. Le 22 mars 2019, l'intéressée a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en qualité de parent d'enfant malade. Par un arrêté du 29 juin 2020, le préfet de la Charente-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement. Mme F... relève appel du jugement du 30 juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de la décision de refus de titre de séjour :

2. Aux termes de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si leur présence constitue une menace pour l'ordre public, une autorisation provisoire de séjour est délivrée aux parents étrangers de l'étranger mineur qui remplit les conditions mentionnées au 11° de l'article L. 313-11, ou à l'étranger titulaire d'un jugement lui ayant conféré l'exercice de l'autorité parentale sur ce mineur, sous réserve qu'ils justifient résider habituellement en France avec lui et subvenir à son entretien et à son éducation, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée (...) ". Aux termes de l'article L. 313-11 du même code : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ". Aux termes de l'article

R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) ". Et aux termes de l'article 6 de l'arrêté

du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précise que : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; d) la durée prévisible du traitement. Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Cet avis mentionne les éléments de procédure. Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".

3. Il ne résulte d'aucune disposition législative ou règlementaire ni d'aucun principe général du droit que le préfet serait destinataire du rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) ni que ce rapport devrait être systématiquement adressé à l'intéressé avant l'intervention de la décision administrative sur sa demande. Par suite, l'appelante n'est pas fondée à soutenir que la procédure est irrégulière au motif que le préfet ne lui a pas communiqué le rapport du médecin de l'OFII. La circonstance que ce rapport n'aurait pas été communiqué par le préfet au cours de la procédure contentieuse est sans incidence sur la régularité de la décision, dès lors qu'elle lui est postérieure.

4. Comme le soutient Mme F..., aucune case n'est cochée dans les rubriques relatives aux éléments de procédure de l'avis de l'OFII. Toutefois, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que cette irrégularité aurait en l'espèce privée l'intéressée d'une garantie ni qu'elle aurait été susceptible d'influer sur le sens de la décision prise.

5. Pour déterminer si un étranger peut bénéficier effectivement dans le pays dont il est originaire d'un traitement médical approprié, au sens du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il convient de s'assurer, eu égard à la pathologie de l'intéressé, de l'existence d'un traitement approprié et de sa disponibilité dans des conditions permettant d'y avoir accès, et non de rechercher si les soins dans le pays d'origine sont équivalents à ceux offerts en France ou en Europe.

6. Par ailleurs, en vertu des articles L. 313-11, R. 313-22 et R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des articles 3 et 6 de l'arrêté

du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 de ce code, le collège des médecins de l'OFII, dont l'avis est requis préalablement à la décision du préfet relative à la délivrance de la carte de séjour prévue au 11° de l'article L. 313-11, doit émettre son avis dans les conditions fixées par l'arrêté du 27 décembre 2016, au vu notamment du rapport médical établi par un médecin de l'OFII. S'il est saisi, à l'appui de conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus, d'un moyen relatif à l'état de santé du demandeur, aux conséquences de l'interruption de sa prise en charge médicale ou à la possibilité pour lui d'en bénéficier effectivement dans le pays dont il est originaire, il appartient au juge administratif de prendre en considération l'avis médical rendu par le collège des médecins de l'OFII. Si le demandeur entend contester le sens de cet avis, il appartient à lui seul de lever le secret relatif aux informations médicales qui le concernent, afin de permettre au juge de se prononcer en prenant en considération l'ensemble des éléments pertinents, notamment l'entier dossier du rapport médical au vu duquel s'est prononcé le collège des médecins de l'OFII, en sollicitant sa communication, ainsi que les éléments versés par le demandeur au débat contradictoire.

7. Il ressort des pièces du dossier que l'enfant Eben C..., née le 23 mai 2016, souffre d'un retard psychomoteur syndromique en lien avec une maladie génétique chromosomique entrainant un polyhandicap associant une déficience intellectuelle et une surdité. Dans son avis du 10 juin 2020, le collège des médecins de l'OFII a estimé que si l'état de santé de l'enfant nécessitait une prise en charge médicale, le défaut d'une telle prise en charge ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il lui permettait de voyager sans risque vers son pays d'origine. Pour contester la pertinence de cet avis, Mme F... produit des certificats médicaux du 15 juillet 2020 du service de génétique clinique du centre hospitalier universitaire de Poitiers et du 10 juillet 2020 d'un pédiatre de l'UNAPEI indiquant que l'enfant est atteint d'une pathologie génétique nécessitant une prise en charge multidisciplinaire " pour espérer des progrès et une inclusion dans la société civile ", plusieurs certificats du neuro-pédiatre du pôle de psychiatrie du groupement hospitalier de territoire Atlantique 17 des 22 mai, 12 juillet et 7 novembre 2019 présentant les différents examens effectués et évoquant un suivi pluridisciplinaire ainsi que d'autres documents médicaux attestant de la mise en place d'un suivi de kinésithérapie, psychomotricité, dermatologie, ophtalmologie, psychologique, orthophonique, ergothérapique, ainsi que l'orientation vers un service d'éducation spéciale et de soins à domicile du 1er août 2019 au 30 septembre 2022. Ni ces certificats, ni les autres documents médicaux produits, qui se bornent à décrire l'état de santé de la jeune B... C... et la nature de sa prise en charge, n'indiquent que l'interruption de la prise en charge auraient des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Ils ne permettent donc pas de mettre en doute le sens de l'avis précité du collège des médecins de l'OFII. Dans ces conditions, l'appelante ne peut utilement se prévaloir de la circonstance, à la supposer établie, que leur fille ne pourrait bénéficier dans son pays d'origine des soins et du suivi que nécessite son état de santé. Par suite, et sans qu'il soit besoin de faire produire le dossier de l'OFII, le moyen tiré de la méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

8. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ".

9. Il ressort des pièces du dossier que Mme F... est entrée irrégulièrement en France le 22 novembre 2017, accompagnée de ses quatre enfants, le dernier enfant étant né

le 28 juillet 2020 postérieurement à la décision contestée. Si elle se prévaut de la nécessité de prise en charge de son quatrième enfant, il ne ressort pas des pièces du dossier que le défaut de prise en charge médicale de cet enfant pourrait entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité ainsi qu'il a été indiqué au point 7. En outre, si la requérante fait valoir que le père des enfants, M. G... D..., réside régulièrement en France et est titulaire d'une carte de séjour mention " passeport talent profession artistique et culturelle " jusqu'au 25 avril 2023, il ressort des pièces du dossier et notamment des attestations produites par l'appelante que la communauté de vie s'est interrompue et n'a repris qu'à la suite de la naissance du dernier enfant. En outre, si l'appelante a été autorisée, à titre temporaire, à séjourner en France pour permettre à sa fille de bénéficier de soins pendant un an, il ne ressort pas des pièces du dossier que

Mme F... aurait noué des liens d'une particulière intensité en France alors qu'elle n'est pas dépourvue d'attaches dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de 28 ans. Dans ces conditions, eu égard à la durée et aux conditions de séjour de Mme F... et dès lors que rien ne fait obstacle à la reconstitution de la cellule familiale en République démocratique du Congo, Mme F... n'est pas fondée à soutenir que le refus de titre de séjour aurait, à la date de l'arrêté contesté, porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard de ces motifs en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

10. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

11. Ainsi qu'il a été indiqué au point 7, si la fille de l'appelante,

Eben C... D... Matondo, souffre un retard psychomoteur sévère associé à une surdité bilatérale, sa pathologie trouve son origine dans une maladie génétique chromosomique et le défaut de prise en charge médicale éventuelle n'est pas, par lui-même, susceptible d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que les enfants de l'appelante, arrivés récemment en France, ne pourraient pas suivre une scolarité normale en République démocratique du Congo, ni que la cellule familiale ne pourrait se reconstituer dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de

l'article 3-1 de la convention internationale de l'enfant, qui s'apprécie à la date de l'arrêté contesté, doit être écarté.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

12. Dans les circonstances exposées au point 7 du présent arrêt, le moyen tiré de la méconnaissance du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

13. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ". Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ".

14. Mme F... fait valoir qu'en cas de retour en République démocratique du Congo, son engagement politique en faveur du mouvement lumumbiste progressiste l'exposerait au risque d'une arrestation et d'une détention arbitraires qui impliqueraient une séparation avec ses quatre enfants mineurs. Toutefois, la requérante, dont la demande d'asile a été rejetée par décisions de l'OFPRA et de la CNDA, n'apporte pas de justification quant à la réalité et à la gravité des risques auxquels elle serait exposée en cas de retour dans son pays d'origine. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

15. Enfin, ainsi qu'il a été dit précédemment, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'absence de prise en charge médicale de l'enfant de la requérante serait susceptible d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé. Ainsi, et alors même que les traitements disponibles en République démocratique du Congo ne seraient pas équivalents à ceux dont l'enfant a pu bénéficier en France, la décision fixant le pays de renvoi n'a pas été prise en méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

16. Il résulte de tout ce qui précède que Mme F... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi

du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête présentée par Mme F... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme H... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de la Charente-Maritime.

Délibéré après l'audience du 27 septembre 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, présidente,

Mme Claire Chauvet, présidente-assesseure,

Mme Nathalie Gay, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022.

La rapporteure,

Nathalie A...La présidente,

Elisabeth Jayat

La greffière,

Virginie Santana

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 21BX04052 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX04052
Date de la décision : 18/10/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Nathalie GAY
Rapporteur public ?: M. GUEGUEIN
Avocat(s) : MARQUES - MELCHY

Origine de la décision
Date de l'import : 23/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-10-18;21bx04052 ?
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