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13/12/2022 | FRANCE | N°21BX01078

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre, 13 décembre 2022, 21BX01078


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Medi Peinture a demandé au tribunal de Bordeaux, qui a requalifié ses conclusions, d'annuler les titres exécutoires émis le 22 octobre 2018 par le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration en vue du recouvrement des sommes de 7 140 euros au titre de la contribution spéciale, prévue à l'article L. 8253-1 du code du travail, et de 2 124 euros au titre de la contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement

, prévue à l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Medi Peinture a demandé au tribunal de Bordeaux, qui a requalifié ses conclusions, d'annuler les titres exécutoires émis le 22 octobre 2018 par le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration en vue du recouvrement des sommes de 7 140 euros au titre de la contribution spéciale, prévue à l'article L. 8253-1 du code du travail, et de 2 124 euros au titre de la contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement, prévue à l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que la décision du 18 décembre 2018 portant rejet de sa réclamation contre ces titres.

Par un jugement n°1900317 du 31 décembre 2020, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 11 mars 2021, la société Medi Peinture, représentée par Me Menjoulou, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 31 décembre 2020 ;

2°) à titre principal, d'annuler la décision du 2 octobre 2018 par laquelle le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a mis à sa charge les contributions spéciale et forfaitaire représentatives des frais de réacheminement, ainsi que la décision du 18 décembre 2018 par laquelle il a rejeté sa réclamation contre les titres exécutoires émis le 22 octobre 2018 ;

3°) à titre subsidiaire, de la décharger de l'obligation de payer les sommes précitées ;

4°) à titre infiniment subsidiaire, de réduire le montant des contributions à de plus justes proportions, et plus précisément, s'agissant de la contribution spéciale, à 1 000 fois le taux horaire du minimum garanti, conformément aux dispositions du III de l'article R. 8253-2 du code du travail ;

5°) de mettre à la charge de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, outre les dépens et frais d'exécution toutes taxes comprises, la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société Medi Peinture soutient que :

- les droits de la défense et le principe du contradictoire n'ont pas été respectés dès lors qu'elle n'a pas été informée de la possibilité de consulter son dossier, en particulier le procès-verbal d'infraction ;

- la décision attaquée confirmant les sanctions litigieuses est insuffisamment motivée ;

- l'étranger embauché par la société et qui avait été déclaré, avait présenté un titre de séjour et des récépissés, et a été immédiatement licencié après le contrôle ; au demeurant, elle a fait l'objet d'un simple rappel à la loi par le procureur de la République et l'URSSAF a renoncé au redressement ;

- la contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement n'est pas fondée dès lors l'étranger embauché n'a jamais quitté le territoire français ;

- le principe de proportionnalité des peines garanti par l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme de 1780 a été méconnu ;

- le montant de la contribution spéciale aurait dû être réduit à 1 000 fois le taux horaire du minimum garanti, conformément aux dispositions du III de l'article R. 8253-2 du code du travail.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 septembre 2022, le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, représenté par Me Schegin, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la société Medi Peinture la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par la société Medi Peinture n'est fondé.

Par un courrier du 14 novembre 2022, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur deux moyens relevés d'office tirés, d'une part, de l'irrecevabilité des conclusions tendant à l'annulation de la décision du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 2 octobre 2018 et à la décharge de l'obligation de payer les contributions litigieuses qui présentent le caractère de conclusions nouvelles en appel, et d'autre part, de l'irrecevabilité des moyens tirés de ce que la décision du 18 décembre 2018 du directeur général de l'office est insuffisamment motivée et que les contributions litigieuses auraient été mises à sa charge à l'issue d'une procédure irrégulière en ce que la société Medi Peinture n'a pas été informée de la possibilité de consulter son dossier, de tels moyens qui ne se rattachent pas au bien-fondé de la créance étant irrecevables à l'appui d'un recours contre les titres de perception.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code du travail ;

- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;

- l'arrêté du 5 décembre 2006 relatif au montant de la contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement des étrangers dans leur pays d'origine ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Au cours de l'audience publique, ont été entendus :

- le rapport de M. A...,

- et les conclusions de Mme Madelaigue, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. A la suite d'un contrôle routier effectué le 24 avril 2018, les services de gendarmerie ont constaté que la société à responsabilité limitée (SARL) Medi Peinture employait un ressortissant marocain démuni de titres de travail et de séjour. Informé de cette situation, le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a, le 2 octobre 2018, décidé d'appliquer à la société Medi Peinture la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 du code du travail, pour un montant de 7 140 euros, et la contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement, prévue à l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur, pour un montant de 2 124 euros. Deux titres de perception ont été émis le 22 octobre 2018 en vue du recouvrement de ces sommes. Par courriers des 6 et 7 décembre 2018, la société Medi Peinture a, par l'intermédiaire de son conseil, formé une réclamation contre ces titres de perception qui a été rejetée par une décision du directeur général de l'office du 18 décembre 2018. La société Medi Peinture a demandé au tribunal d'annuler cette dernière décision. Par un jugement n°1900317 du 31 décembre 2020 dont la société Medi Peinture relève appel, le tribunal administratif de Bordeaux, après avoir requalifié les conclusions de la société requérante comme tendant également à l'annulation des titres de perception émis le 22 octobre 2018, a rejeté sa demande.

Sur l'étendue du litige :

2. Si la société Medi Peinture demande l'annulation de la décision du 2 octobre 2018 par laquelle le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a mis à sa charge les contributions spéciale et forfaitaire, ces conclusions présentent le caractère de conclusions nouvelles en appel et ne sont, dès lors, pas recevables.

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 18 décembre 2018 :

3. Aux termes de l'article 117 du décret susvisé du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique, dans sa rédaction applicable à la date de la réclamation : " Les titres de perception émis en application de l'article L. 252 A du livre des procédures fiscales peuvent faire l'objet de la part des redevables : / 1° Soit d'une opposition à l'exécution en cas de contestation de l'existence de la créance, de son montant ou de son exigibilité ; (...). / L'opposition à l'exécution et l'opposition à poursuites ont pour effet de suspendre le recouvrement de la créance. ". Aux termes de l'article 118 du même décret : " Avant de saisir la juridiction compétente, le redevable doit adresser une réclamation appuyée de toutes justifications utiles au comptable chargé du recouvrement de l'ordre de recouvrer. / La réclamation doit être déposée, sous peine de nullité : / 1° En cas d'opposition à l'exécution d'un titre de perception, dans les deux mois qui suivent la notification de ce titre ou du premier acte de poursuite qui procède du titre en cause ; (...). / L'autorité compétente délivre un reçu de la réclamation, précisant la date de réception de cette réclamation. Elle statue dans un délai de six mois dans le cas prévu au 1° et dans un délai de deux mois dans le cas prévu au 2°. A défaut d'une décision notifiée dans ces délais, la réclamation est considérée comme rejeté. ". Selon l'article 119 de ce décret : " Le débiteur peut saisir la juridiction compétente dans un délai de deux mois à compter de la date de notification de la décision prise sur sa réclamation ou, à défaut de cette notification, dans un délai de deux mois à compter de la date d'expiration des délais prévus à l'article 118. ".

4. Il résulte de l'instruction que la décision du 18 décembre 2018 doit être regardée comme une décision de rejet d'une réclamation préalable obligatoire formée les 6 et 7 décembre 2018 à l'encontre des titres de perception émis le 22 octobre 2018 pour le recouvrement des contributions spéciale et forfaitaire mises à la charge de la société Medi Peinture, ayant pour seul effet de lier le contentieux à l'égard de l'objet de la demande de l'intéressée qui, en formulant les conclusions visées ci-dessus, a donné à l'ensemble de sa requête le caractère d'un recours de plein contentieux. Par suite, les moyens tirés de l'insuffisance de motivation de cette décision, de la méconnaissance des droits de la défense et de l'irrégularité de la procédure à l'issue de laquelle elle a été prise ne peuvent qu'être écartés comme inopérants dès lors que ces vices propres sont sans incidence sur la solution du litige.

Sur les conclusions aux fins d'annulation et de décharge des deux contributions litigieuses :

5. Le destinataire d'un ordre de versement est recevable à contester, à l'appui de son recours contre cet ordre de versement et dans un délai de deux mois suivant la notification de ce dernier, le bien-fondé de la créance correspondante, alors même que la décision initiale constatant et liquidant cette créance est devenue définitive, comme le prévoient au demeurant, pour les dépenses de l'Etat, les articles 117 et 118 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012.

6. En premier lieu, à l'appui de ses conclusions à fin d'annulation des titres de perception, la société Medi Peinture doit être regardée comme ayant entendu contester la décision établissant les créances pour le recouvrement desquelles ces titres ont été émis. Le moyen tiré de ce que cette décision du 2 octobre 2018 par laquelle le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a mis à la charge de l'intéressée les contributions spéciale et forfaitaire en litige a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors que la société requérante n'a pas été informée de la possibilité de consulter son dossier, en particulier le procès-verbal de constat des infractions ne se rattache pas à une contestation du bien-fondé des créances. Par suite, il doit être écarté comme irrecevable.

7. En second lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 8251-1 du code du travail : " Nul ne peut, directement ou indirectement, embaucher, conserver à son service ou employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France. (...) ". Aux termes de l'article L. 8253-1 du même code : " Sans préjudice des poursuites judiciaires pouvant être intentées à son encontre, l'employeur qui a employé un travailleur étranger en méconnaissance des dispositions du premier alinéa de l'article L. 8251-1 acquitte, pour chaque travailleur étranger non autorisé à travailler, une contribution spéciale. Le montant de cette contribution spéciale est déterminé dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. Il est, au plus, égal à 5 000 fois le taux horaire du minimum garanti prévu à l'article L. 3231-12. Ce montant peut être minoré en cas de non-cumul d'infractions ou en cas de paiement spontané par l'employeur des salaires et indemnités dus au salarié étranger non autorisé à travailler mentionné à l'article R. 8252-6. Il est alors, au plus, égal à 2 000 fois ce même taux. (...) ".

8. D'autre part, aux termes de l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " Sans préjudice des poursuites judiciaires qui pourront être engagées à son encontre et de la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 du code du travail, l'employeur qui aura occupé un travailleur étranger en situation de séjour irrégulier acquittera une contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement de l'étranger dans son pays d'origine. (...) ". Aux termes de l'article R. 626-1 du même code, alors en vigueur : " I.- La contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement de l'étranger dans son pays d'origine prévue à l'article L. 626-1 est due pour chaque employé en situation irrégulière au regard du droit au séjour. / Cette contribution est à la charge de l'employeur qui, en violation de l'article L. 8251-1 du code du travail, a embauché ou employé un travailleur étranger dépourvu de titre de séjour. / II.- Le montant de cette contribution forfaitaire est fixé par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé du budget, en fonction du coût moyen des opérations d'éloignement vers la zone géographique de réacheminement du salarié, dans la limite prescrite à l'alinéa 2 de l'article L. 626-1. ". Enfin, le tableau annexé à l'arrêté du 5 décembre 2006 relatif au montant de la contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement des étrangers dans leur pays d'origine prévoit que le montant de la contribution s'élève à 2 124 euros s'agissant d'un étranger originaire du Maghreb.

9. La société Medi Peinture fait valoir, tout d'abord, que M. B... était titulaire d'un titre de séjour l'autorisant à exercer une activité salariée en France lors de son embauche le 26 septembre 2011. Toutefois, il résulte de l'instruction que le dernier titre produit par le salarié, un récépissé de renouvellement de titre de séjour, a expiré le 19 janvier 2016. Au demeurant, il résulte de l'instruction que la société requérante qui avait, par un courrier du 19 décembre 2016, adressé au salarié une demande de régularisation de sa situation l'invitant à produire un titre de séjour valide ou un récépissé de demande de renouvellement en cours de validité, n'ignorait pas l'irrégularité de la situation administrative de M. B.... Les circonstances que celui-ci était toujours régulièrement déclaré, qu'il a ensuite été rapidement licencié et que sa situation administrative aurait finalement été régularisée, ou encore que le gérant de la société n'a fait l'objet que d'un rappel à la loi et que la commission de recours amiable de l'Union de recouvrement des cotisations de Sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) a annulé le redressement de cotisations dont elle faisait l'objet, sont sans incidence sur la méconnaissance, par la société Medi Peinture, de l'article L. 8251-1 du code du travail, l'absence d'élément intentionnel ou la prétendue bonne foi étant sans effet sur la matérialité de l'infraction. De même, les dispositions de l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne subordonnant pas la mise à la charge de l'employeur de la contribution représentative des frais de réacheminement des étrangers dans leur pays d'origine à la justification, par l'administration, du caractère effectif de ce réacheminement, la société Medi Peinture ne peut utilement faire valoir, pour contester le bien-fondé de la contribution forfaitaire, la circonstance que le travailleur en cause n'aurait ni fait l'objet d'une mesure d'éloignement ni quitté le territoire français.

10. Ensuite, la société Medi Peinture reprend en des termes identiques le moyen, déjà soulevé en première instance, tiré de la méconnaissance des principes d'individualisation et de proportionnalité des peines garantis par l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, sans critique utile du jugement ni pièce nouvelle. Elle n'apporte ainsi en cause d'appel aucun élément susceptible de remettre en cause l'appréciation des premiers juges qui ont suffisamment et pertinemment répondu à ce moyen. Par suite, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif de Bordeaux.

11. Enfin, il résulte des dispositions de l'article L. 8253-1 du code du travail que le montant de la contribution spéciale est, au plus, égal à 5 000 fois le taux horaire du minimum garanti prévu à l'article L. 3231-12 et que ce montant peut être minoré en cas de non-cumul d'infractions ou en cas de paiement spontané par l'employeur des salaires et indemnités dus au salarié étranger non autorisé à travailler. Selon l'article R. 8253-2 du même code : " I.- Le montant de la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 est égal à 5 000 fois le taux horaire, à la date de la constatation de l'infraction, du minimum garanti prévu à l'article L. 3231-12. / II.- Ce montant est réduit à 2 000 fois le taux horaire du minimum garanti dans l'un ou l'autre des cas suivants : / 1° Lorsque le procès-verbal d'infraction ne mentionne pas d'autre infraction commise à l'occasion de l'emploi du salarié étranger en cause que la méconnaissance des dispositions du premier alinéa de l'article L. 8251-1 ; / 2° Lorsque l'employeur s'est acquitté des salaires et indemnités mentionnés à l'article L. 8252-2 dans les conditions prévues par les articles R. 8252-6 et R. 8252-7. / III.- Dans l'hypothèse mentionnée au 2° du II, le montant de la contribution spéciale est réduit à 1 000 fois le taux horaire du minimum garanti lorsque le procès-verbal d'infraction ne mentionne l'emploi que d'un seul étranger sans titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France. (...) ". Selon l'article L. 8252-2 de ce code : " Le salarié étranger a droit au titre de la période d'emploi illicite : / 1° Au paiement du salaire et des accessoires de celui-ci, conformément aux dispositions légales, conventionnelles et aux stipulations contractuelles applicables à son emploi, déduction faite des sommes antérieurement perçues au titre de la période considérée. A défaut de preuve contraire, les sommes dues au salarié correspondent à une relation de travail présumée d'une durée de trois mois. Le salarié peut apporter par tous moyens la preuve du travail effectué ; / 2° En cas de rupture de la relation de travail, à une indemnité forfaitaire égale à trois mois de salaire, à moins que l'application des règles figurant aux articles L. 1234-5, L. 1234-9, L. 1243-4 et L. 1243-8 ou des stipulations contractuelles correspondantes ne conduise à une solution plus favorable. (...) ". L'article L. 8252-4 du même code dispose : " Les sommes dues à l'étranger non autorisé à travailler, dans les cas prévus aux 1° à 3° de l'article L. 8252-2, lui sont versées par l'employeur dans un délai de trente jours à compter de la constatation de l'infraction. (...) ". Aux termes de l'article R. 8252-6 de ce code : " L'employeur d'un étranger non autorisé à travailler s'acquitte par tout moyen, dans le délai mentionné à l'article L. 8252-4, des salaires et indemnités déterminés à l'article L. 8252-2. / Il remet au salarié étranger sans titre les bulletins de paie correspondants, un certificat de travail ainsi que le solde de tout compte. Il justifie, auprès de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, par tout moyen, de l'accomplissement de ses obligations légales. ".

12. Il résulte de l'instruction que le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a tenu compte de l'absence d'autre infraction commise à l'occasion de l'emploi du salarié étranger et a appliqué le taux réduit prévu au II de l'article

R. 8253-2 du code du travail, correspondant à 2 000 fois le taux horaire du minimum garanti. Il résulte également de l'instruction que la société Medi Peinture a, le 12 juin 2018, adressé une attestation d'employeur destinée à Pôle emploi et remis à M. B... un certificat de travail, ainsi qu'un reçu pour solde de tout compte mentionnant une indemnité d'un montant de 4 853 euros, correspondant à trois mois de salaire, en sus du salaire du mois de juin 2018. La requérante produit en outre, pour la première fois en appel, un extrait du grand livre comptable qui établit que cette somme a effectivement été versée au salarié par chèque. Par suite, et dès lors que, d'une part, la société Medi Peinture qui s'est acquittée des salaires et indemnités dans les conditions prévues par l'article R. 8252-6 du code du travail, et que, d'autre part, le procès-verbal d'infraction ne mentionne l'emploi que d'un seul étranger sans titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France, le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration aurait dû, conformément au III de l'article R. 8253-2 du même code, fixer le montant de la contribution spéciale en appliquant 1 000 fois le taux horaire du minimum garanti, soit la somme de 3 570 euros. Il s'ensuit que le titre de perception émis le 22 octobre 2018 en vue du recouvrement de la contribution spéciale doit être annulé en tant qu'il met à la charge de la société Medi Peinture une somme supérieure au montant de 3 570 euros.

13. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la société Medi Peinture est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a laissé à sa charge un montant de contribution spéciale correspondant à 2 000 fois le taux horaire du minimum garanti, soit 7 140 euros. Par suite, elle est également fondée à demander l'annulation du titre de perception émis le 22 octobre 2018 en tant qu'il met à sa charge un montant de contribution spéciale supérieur au montant de 3 570 euros et à être déchargée du paiement de la somme de 3 570 euros.

Sur les frais liés au litige :

14. D'une part, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Medi Peinture qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance la somme que demande l'Office français de l'immigration et de l'intégration au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'office la somme de 1 500 euros à verser à la requérante au titre des frais de même nature.

15. D'autre part, la présente instance n'ayant occasionné aucuns dépens et frais d'exécution, les conclusions de la société Medi Peinture présentées sur le fondement de

l'article R. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : Le titre de perception émis le 22 octobre 2018 en vue du recouvrement de la contribution spéciale mise à la charge de la société Medi Peinture est annulé en tant que son montant excède la somme de 3 570 euros.

Article 2 : La société est déchargée du paiement de la somme de 3 570 euros.

Article 3 : Le jugement n°1900317 du tribunal administratif de Bordeaux du 31 décembre 2020 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la société Medi Peinture est rejeté.

Article 5 : L'Office français de l'immigration et de l'intégration versera à la société Medi Peinture la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée (SARL) Medi Peinture et à l'Office français de l'immigration et de l'intégration.

Délibéré après l'audience du 28 novembre 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Florence Demurger, présidente,

Mme Karine Butéri, présidente-assesseure,

M. Anthony Duplan premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 13 décembre 2022.

Le rapporteur,

Anthony A...

La présidente,

Florence Demurger

La greffière,

Catherine JussyLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21BX01078


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX01078
Date de la décision : 13/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme DEMURGER
Rapporteur ?: M. Anthony DUPLAN
Rapporteur public ?: Mme MADELAIGUE
Avocat(s) : MENJOULOU CLAVERIE

Origine de la décision
Date de l'import : 18/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-12-13;21bx01078 ?
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