Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... C... et son épouse, Mme B... F..., ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler les arrêtés du 8 décembre 2021 par lesquels la préfète de la Gironde a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 2200809-2200814 du 31 mai 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
I/ Par une requête, enregistrée sous le numéro 22BX02906 le 22 novembre 2022, Mme B... F... épouse C..., représentée par Me Trebesses, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 31 mai 2022 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la préfète de la Gironde du 8 décembre 2021 ;
3°) d'enjoindre à la préfète de la Gironde, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat, au profit de son conseil, une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle.
Mme F... soutient que :
- l'arrêté attaqué est entaché d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;
- il méconnaît les dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'elle et son époux craignent pour leur sécurité et leur liberté en cas de retour dans leur pays d'origine ;
- la décision fixant le pays de renvoi est insuffisamment motivée ;
- elle méconnaît les dispositions des articles L. 425-9 et L. 611-3 du même code dès lors que le défaut de prise en charge de son enfant aurait des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur sa santé ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 11 février 2023, la préfète de la Gironde conclut au rejet de la requête.
Elle s'en rapporte à ses écritures présentées en première instance.
Mme F..., épouse C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision n°2022/010805 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Bordeaux du 15 septembre 2022.
II/ Par une requête, enregistrée sous le numéro 22BX02907 le 22 novembre 2022,
M. D... C..., représenté par Me Trebesses, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 31 mai 2022 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la préfète de la Gironde du 8 décembre 2021 ;
3°) d'enjoindre à la préfète de la Gironde, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat, au profit de son conseil, une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle.
M. C... soutient que :
- l'arrêté attaqué est entaché d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;
- il méconnaît les dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que lui et son épouse craignent pour leur sécurité et leur liberté en cas de retour dans leur pays d'origine ;
- la décision fixant le pays de renvoi est insuffisamment motivée ;
- elle méconnaît les dispositions des articles L. 425-9 et L. 611-3 du même code dès lors que le défaut de prise en charge de son enfant aurait des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur sa santé ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 11 février 2023, la préfète de la Gironde conclut au rejet de la requête.
Elle s'en rapporte à ses écritures présentées en première instance.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision n°2022/010806 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Bordeaux du 15 septembre 2022.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Au cours de l'audience publique, a été entendu le rapport de M. E....
Considérant ce qui suit :
1. M. C... et son épouse, Mme G..., ressortissants géorgiens nés respectivement les 26 juillet 1969 et 5 décembre 1972, sont entrés en France le 12 mars 2018, accompagnés de leurs deux enfants mineurs. Leur demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides du 23 octobre 2018, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 5 avril 2019. Par deux arrêtés du 9 octobre 2019, dont la légalité a été définitivement confirmée par un arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 31 décembre 2020, la préfète de la Gironde leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Le 2 juillet 2021, les requérants ont sollicité leur admission au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 425-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en qualité de parents d'enfant malade. Par des arrêtés du 8 décembre 2021, la préfète de la Gironde a rejeté leur demande, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. C... et Mme G... relèvent du jugement du 31 mai 2022 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux, après avoir joint leurs requêtes, a rejeté leur demande tendant à l'annulation des arrêtés du 8 décembre 2021.
2. Les requêtes n° 22BX02906 et n° 22BX02907, présentées par un couple de ressortissants étrangers, présentent à juger des questions semblables. Compte tenu du lien étroit les unissant, il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
3. En premier lieu, M. C... et Mme G... reprennent en des termes identiques les moyens, déjà soulevés en première instance, tirés de ce que les arrêtés seraient insuffisamment motivés en ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi et entachés d'un défaut d'examen sans critique utile du jugement ni pièce nouvelle. Ils n'apportent ainsi en cause d'appel aucun élément susceptible de remettre en cause l'appréciation des premiers juges qui ont suffisamment et pertinemment répondu à ces moyens. Par suite, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif de Bordeaux.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 425-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Les parents étrangers de l'étranger mineur qui remplit les conditions prévues à l'article L. 425-9, ou l'étranger titulaire d'un jugement lui ayant conféré l'exercice de l'autorité parentale sur ce mineur, se voient délivrer, sous réserve qu'ils justifient résider habituellement en France avec lui et subvenir à son entretien et à son éducation, une autorisation provisoire de séjour d'une durée maximale de six mois. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / Cette autorisation provisoire de séjour ouvre droit à l'exercice d'une activité professionnelle. / Elle est renouvelée pendant toute la durée de la prise en charge médicale de l'étranger mineur, sous réserve que les conditions prévues pour sa délivrance continuent d'être satisfaites. / Elle est délivrée par l'autorité administrative, après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans les conditions prévues à l'article L. 425-9. ". Aux termes de l'article L. 425-9 du même code : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'État. (...)".
5. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration allant dans le sens de ses conclusions doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.
6. Pour refuser de délivrer aux requérants le titre de séjour sollicité en qualité de parent d'enfant malade, la préfète de la Gironde s'est notamment fondée sur l'avis émis le 10 octobre 2021 par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, qui a estimé que l'état de santé de leur enfant nécessite une prise en charge médicale, dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que son état de santé lui permet de voyager vers le pays dont il a la nationalité. M. C... et Mme G... produisent un certificat médical d'un praticien du pôle de pédiatrie médicale du centre hospitalier universitaire de Bordeaux, établi le 10 février 2022, postérieurement à l'arrêté attaqué, qui précise le traitement dont bénéficie leur fils A..., né le 17 juin 2012. Ils produisent également un certificat rédigé le 7 mars 2022 par un médecin d'un centre d'accueil spécialisé qui indique notamment que l'absence de soins disciplinaires dont bénéficie l'enfant, en particulier les injections de toxines botuliques " conduirait à l'aggravation de ses déformations, mettant à terme en jeu son pronostic vital par restriction pulmonaire majeure et impossibilité d'alimentation ". A supposer que ce dernier certificat médical, également postérieur à l'arrêté attaqué et qui fait par ailleurs état de progrès sur le plan moteur et cognitif, soit de nature à remettre en cause l'avis du collège de médecin quant à la gravité de la pathologie de l'enfant, les requérants n'apportent, en tout état de cause, aucun élément permettant de démontrer que le traitement et la prise en charge pluridisciplinaire nécessaires à l'état de santé de l'enfant seraient indisponibles dans leur pays d'origine. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que la préfète aurait fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 425-10 code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
7. En troisième lieu, les requérants n'établissant pas que leur fils ne pourrait effectivement bénéficier d'un traitement adapté à son état de santé, ils ne sont pas fondés à soutenir que les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile feraient obstacle au prononcé d'une obligation de quitter le territoire français à leur encontre. Le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit donc être écarté.
8. En quatrième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ". Aux termes de l'article
L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ". ;
9. Si M. C... et Mme G... soutiennent qu'ils encourent un risque pour leur sécurité et leur liberté en cas de retour en Géorgie, pays qu'ils ont quitté en 2018 en raison notamment de leurs origines abkhazes, la seule " lettre de témoignage " qu'ils produisent, émanant de trois voisins en Abkhazie relatant des faits d'agressions et d'intimidations dont ils auraient été victimes, est insuffisant pour établir la réalité et l'actualité de la menace qu'ils invoquent. Dans ces conditions, et alors que leur demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 23 octobre 2018, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 5 avril 2019, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations et dispositions citées au point précédent doit être écarté.
10. En dernier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, eu égard à l'ensemble des éléments de fait rappelés précédemment, que la préfète de la Gironde aurait porté une appréciation manifestement erronée des conséquences de ses arrêtés sur la situation des requérants.
11. Il résulte de ce qui précède que Mme F... et M. C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande. Par suite, leurs requêtes doivent être rejetées en toutes leurs conclusions.
DECIDE :
Article 1er : Les requêtes n°s 22BX02906, 22BX02907 présentées par Mme F... et M. C... sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... F..., à M. D... C..., à Me Trebesses et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.
Délibéré après l'audience du 6 mars 2023 à laquelle siégeaient :
Mme Florence Demurger, présidente,
M. Frédéric Faïck, président-assesseur,
M. Anthony Duplan premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 29 mars 2023.
Le rapporteur,
Anthony E...
La présidente,
Florence DemurgerLa greffière,
Catherine JussyLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22BX02906, 22BX02907