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25/05/2023 | FRANCE | N°22BX02557

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre, 25 mai 2023, 22BX02557


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... épouse C... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 25 juillet 2022 par lequel la préfète de la Charente lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour en qualité de conjointe d'un ressortissant français, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2202047 du 16 septembre 2022, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Poitiers a,

d'une part, renvoyé devant une formation collégiale les conclusions dirigées contre le...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... épouse C... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 25 juillet 2022 par lequel la préfète de la Charente lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour en qualité de conjointe d'un ressortissant français, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2202047 du 16 septembre 2022, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Poitiers a, d'une part, renvoyé devant une formation collégiale les conclusions dirigées contre le refus de délivrance d'un certificat de résidence algérien et, en tant qu'elles s'y rattachent, les conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et, d'autre part, rejeté le surplus de la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 27 septembre 2022, Mme A... épouse C..., représentée par Me Thominette, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Poitiers

du 16 septembre 2022 ;

2°) de renvoyer l'affaire devant une formation collégiale du tribunal administratif.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors que la décision portant obligation de quitter le territoire français est fondée sur un refus de délivrance de titre de séjour et que

l'article L. 614-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sur lequel la magistrate désignée a fondé sa compétence, n'était pas applicable ;

- contrairement à ce qu'a jugé la première juge, la décision d'éloignement est fondée sur le refus de titre de séjour qui lui est opposé à l'article 1er de l'arrêté en litige, ce qui justifiait la compétence de la formation collégiale ;

- alors même que les conclusions dirigées contre le refus de titre de séjour ont été renvoyées devant une formation collégiale, la première juge a illégalement statué sur son droit au séjour en estimant qu'elle ne remplissait pas les conditions énoncées à l'article 6, alinéa 2 de l'accord franco-algérien, entachant son jugement de contradiction de motifs.

La requête a été communiquée à la préfète de la Charente qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Olivier Cotte a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., ressortissante algérienne née le 1er août 1981, est entrée en France selon ses déclarations le 21 novembre 2019. Elle a sollicité le 26 janvier 2021 un titre de séjour après son mariage, le 11 juillet 2020, avec un ressortissant français, M. C.... Par un arrêté du 25 juillet 2022, la préfète de la Charente lui a refusé la délivrance d'un

titre de séjour en qualité de conjoint de français, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Par un jugement

du 16 septembre 2022 dont Mme C... relève appel, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Poitiers sur le fondement de l'article L. 614-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a renvoyé devant une formation collégiale les conclusions dirigées contre le refus de délivrance d'un certificat de résidence algérien, et a rejeté le surplus des conclusions.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : 1° L'étranger, ne pouvant justifier être entré régulièrement sur le territoire français, s'y est maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (...) 3° L'étranger s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour (...) ". Aux termes de l'article L. 614-1 de ce code : " L'étranger qui fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français peut, dans les conditions et délais prévus au présent chapitre, demander au tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision relative au séjour, de la décision relative au délai de départ volontaire et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant. (...) ". Aux termes de l'article L. 614-4 du même code : " Lorsque la décision portant obligation de quitter le territoire français prise en application des 3°, 5° ou 6° de l'article L. 611-1 est assortie d'un délai de départ volontaire, le tribunal administratif est saisi dans le délai de trente jours suivant la notification de la décision. / (...) / Le tribunal administratif statue dans un délai de trois mois à compter de sa saisine. ".

Aux termes de l'article L. 614-5 de ce code : " Lorsque la décision portant obligation de quitter le territoire français prise en application des 1°, 2° ou 4° de l'article L. 611-1 est assortie d'un délai de départ volontaire, le président du tribunal administratif peut être saisi dans le délai de quinze jours suivant la notification de la décision. / (...) / Le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il désigne à cette fin parmi les membres

de sa juridiction ou parmi les magistrats honoraires inscrits sur la liste mentionnée à

l'article L. 222-2-1 du code de justice administrative statue dans un délai de six semaines à compter de sa saisine. (...) ".

3. Les dispositions des articles R. 776-1 et suivants du code de justice administrative précisent les règles applicables au contentieux des obligations de quitter le territoire

français. Aux termes de l'article R. 776-13-1 : " Les dispositions de la présente sous-section sont applicables aux recours formés, en application des articles L. 614-5 ou L. 614-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, contre les décisions d'obligation de quitter le territoire français prise sur le fondement des 1°, 2° ou 4° de l'article L. 611-1 du même code et les décisions mentionnées à l'article R. 776-1 du présent code notifiées simultanément, lorsque l'étranger n'est pas placé en rétention, ni assigné à résidence. (...) ". L'article R. 776-13-2 dispose que : " La présentation, l'instruction et le jugement des recours obéissent, sans préjudice de la section 1, aux règles définies au premier alinéa de

l'article R. 776-13, aux articles R. 776-15, R. 776-18, R. 776-20-1, R. 776-22 à R. 776-26, aux deuxième et quatrième alinéas de l'article R. 776-27 et à l'article R. 776-28. ".

4. Il résulte des dispositions de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le prononcé, par l'autorité administrative à l'encontre d'un ressortissant étranger, d'une obligation de quitter le territoire français, sur le fondement

du 1° de cet article, n'est pas subordonné à l'intervention préalable d'une décision statuant sur le droit au séjour de l'intéressé en France. Pour autant, lorsqu'une décision relative au séjour est néanmoins intervenue concomitamment et fait l'objet d'une contestation à l'occasion d'un recours dirigé contre une obligation de quitter le territoire français prise sur le fondement

du 1° de l'article L. 611-1, cette contestation suit le régime contentieux applicable à l'obligation de quitter le territoire. Dès lors, les dispositions de l'article L. 614-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que celles de l'article R. 776-13-2 du code de justice administrative, sont applicables à l'ensemble des conclusions présentées au juge administratif dans le cadre de ce litige, y compris celles tendant à l'annulation de la décision relative au séjour.

5. Il ressort des pièces du dossier que la préfète de la Charente a pris à l'encontre de Mme C... une obligation de quitter le territoire français, en se fondant sur

le 1° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, au motif de l'entrée irrégulière en France de l'intéressée. Par suite, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Poitiers était compétente, en application de

l'article L. 614-5 de ce code, pour connaître des conclusions dirigées contre cette décision, ainsi que de celles présentées à l'encontre de la décision fixant le pays de renvoi. Si la magistrate désignée était également compétente pour connaître des conclusions présentées contre le refus de délivrance d'un titre de séjour en qualité de conjoint de français, pris concomitamment par la préfète de la Charente, et que c'est à tort qu'elle s'est cru tenue de renvoyer ces conclusions devant une formation collégiale, Mme C... n'est pas fondée à se plaindre de ce renvoi, dès lors qu'il est toujours loisible à un magistrat statuant seul de renvoyer des conclusions dont il est saisi devant une formation collégiale. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement serait irrégulier en raison de l'incompétence de la magistrate désignée pour connaître de la demande de Mme C... doit être écarté.

6. En second lieu, Mme C... ayant soutenu, dans ses écritures de première instance, que l'obligation de quitter le territoire français était illégale du fait de l'illégalité de la décision de refus de séjour, la magistrate désignée n'a pas entaché son jugement de contradiction de motifs en examinant, par la voie de l'exception, la légalité du refus de titre de séjour.

7. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Poitiers a renvoyé devant une formation collégiale les conclusions dirigées contre le refus de délivrance d'un certificat de résidence algérien et rejeté le surplus de ses conclusions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... épouse C... et au ministre de l'intérieur et de l'outre-mer. Copie en sera adressée à la préfète de la Charente.

Délibéré après l'audience du 25 avril 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Anne Meyer, présidente,

Mme Florence Rey-Gabriac, première conseillère,

M. Olivier Cotte, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 25 mai 2023.

Le rapporteur,

Olivier Cotte

La présidente,

Anne Meyer

Le greffier,

Fabrice Benoit

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22BX02557


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22BX02557
Date de la décision : 25/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MEYER
Rapporteur ?: M. Olivier COTTE
Rapporteur public ?: Mme GALLIER
Avocat(s) : THOMINETTE

Origine de la décision
Date de l'import : 28/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-05-25;22bx02557 ?
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