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31/05/2023 | FRANCE | N°21BX04129

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre, 31 mai 2023, 21BX04129


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler l'arrêté du 24 novembre 2020 par lequel le préfet de la Réunion a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire dans un délai d'un mois et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 2100313 du 21 mai 2021, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 29 octobre

2021, M. C... A..., représenté par Me Ali, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribun...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler l'arrêté du 24 novembre 2020 par lequel le préfet de la Réunion a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire dans un délai d'un mois et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 2100313 du 21 mai 2021, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 29 octobre 2021, M. C... A..., représenté par Me Ali, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de La Réunion du 21 mai 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 24 novembre 2020 ;

3°) d'enjoindre au préfet de La Réunion de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard et, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande dès la notification de l'arrêt à intervenir et de prendre une décision dans un délai de deux mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et en tout état de cause, de lui délivrer sans délai une autorisation provisoire de séjour durant l'instruction de son dossier ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

Sur la régularité du jugement :

- le jugement est irrégulier en ce que les premiers juges ont omis de répondre au moyen tiré de l'erreur de fait au soutien des conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus de titre de séjour ;

- le jugement est irrégulier en ce que les premiers juges ont omis de répondre au moyen tiré du défaut de motivation de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne l'arrêté pris dans son ensemble :

- l'arrêté n'est pas suffisamment motivé ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen sérieux de sa situation ; l'arrêté est entaché d'un vice de procédure dès lors qu'il n'a pas été mis à même de présenter ses observations préalablement à son édiction en méconnaissance du droit d'être entendu, principe général du droit de l'Union européenne et de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;

En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :

- la décision qui mentionne qu'il s'est inscrit pour la sixième fois consécutive en L3 " droit " est entachée d'une erreur de fait dès lors qu'il a validé ses quatre semestres de L1 et L2 ainsi que son premier semestre de L3 ;

- la décision méconnait l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste quant à l'appréciation de sa situation personnelle et universitaire ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- la décision est privée de base légale en ce qu'elle se fonde sur une décision de refus de titre de séjour illégale ;

- la décision méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne la décision fixant le délai de départ volontaire :

- la décision est privée de base légale en ce qu'elle se fonde sur une décision de refus de titre de séjour illégale ;

- la décision méconnait le II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; le préfet a fait une application automatique de ces dispositions, méconnaissant ainsi l'étendue de sa compétence ; compte tenu de ses chances de valider son dernier semestre de son diplôme de droit, de son état de santé et du contexte sanitaire, la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire enregistré le 17 avril 2023, le préfet de La Réunion conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens développés par M. A... ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 2 septembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Au cours de l'audience publique a été entendu le rapport de Mme Nathalie Gay.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... A..., né le 16 mai 1992, de nationalité comorienne, est entré à La Réunion le 16 septembre 2015 muni d'un visa autorisant la délivrance d'une carte de séjour sur le fondement de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. A la suite de l'expiration de son visa, il a bénéficié, jusqu'au 4 novembre 2020, d'une carte de séjour en qualité d'étudiant dont il a sollicité le renouvellement. Par un arrêté du 24 novembre 2020, le préfet de la Réunion a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire dans un délai d'un mois et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement. M. A... relève appel du jugement du 21 mai 2021 par lequel le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement :

2. A l'appui de sa demande, M. A... soutenait notamment que la décision par laquelle le préfet de La Réunion a refusé de lui délivrer un titre de séjour, qui mentionne qu'il s'est inscrit pour la sixième fois consécutive en L3 " droit ", était entachée d'une erreur de fait dès lors qu'il avait validé ses quatre semestres de L1 et L2 ainsi que son premier semestre de L3. Le tribunal ne s'est pas prononcé sur ce moyen, qui n'était pas inopérant. Par suite, son jugement doit être annulé en tant qu'il statue sur les conclusions en annulation de la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour.

3. Si M. A... avait soulevé en première instance, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision portant obligation de quitter le territoire français, le tribunal y a répondu au point 2 du jugement. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement sur ce point doit en revanche être écarté.

4. Il y a lieu pour la cour de se prononcer immédiatement, par la voie de l'évocation, sur les conclusions présentées par M. A... devant le tribunal administratif de La Réunion tendant à l'annulation de la décision de refus de titre de séjour et de statuer par l'effet dévolutif de l'appel sur les autres conclusions de M. A....

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus de titre de séjour :

5. En premier lieu, la décision par laquelle le préfet de La Réunion a refusé la délivrance d'un titre de séjour mentionne l'état civil de M. A..., ses conditions d'entrée et de séjour sur le territoire français et le fondement de sa demande de titre de séjour. L'arrêté indique les raisons pour lesquelles M. A... ne pouvait prétendre à la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étudiant, et notamment qu'il n'apportait pas la preuve de son assiduité et qu'il ne justifiait pas d'une progression dans le suivi de ses études. L'arrêté ajoute qu'il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé à sa vie familiale. Ainsi, l'arrêté qui vise notamment l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles la décision de refus de titre de séjour est fondée. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.

6. En deuxième lieu, il ne ressort ni de la motivation de la décision attaquée, ni des autres pièces du dossier que le préfet de La Réunion, qui n'était pas tenu d'indiquer l'ensemble des éléments de la situation personnelle de M. A..., n'aurait pas procédé à un examen complet de sa situation avant de lui refuser la délivrance d'un titre de séjour.

7. En troisième lieu, il résulte de la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union européenne que le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union et qu'il appartient aux Etats membres, dans le cadre de leur autonomie procédurale, de déterminer les conditions dans lesquelles le respect de ce droit est assuré. Ce droit se définit comme celui de toute personne de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours d'une procédure administrative avant l'adoption de toute décision susceptible d'affecter de manière défavorable ses intérêts. Il suppose seulement que, informé de ce qu'une décision lui faisant grief est susceptible d'être prise à son encontre, il soit en mesure de présenter spontanément des observations écrites ou de solliciter un entretien pour faire valoir ses observations orales.

8. En l'espèce, il appartenait à M. A..., à l'occasion du dépôt de sa demande de titre de séjour, de préciser à l'administration les motifs pour lesquels il estimait devoir être admis au séjour et de produire tous les éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande. Par ailleurs, il lui était loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir toute observation complémentaire utile quant à sa situation. Dès lors, la seule circonstance que M. A... n'a pas été invité par le préfet de La Réunion à formuler des observations avant le refus de l'admettre au séjour n'est pas de nature à permettre de le regarder comme ayant été privé de son droit à être entendu.

9. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable ". Selon l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Les décisions mentionnées à l'article L. 211-2 n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix (...) ". Il résulte des termes mêmes de ces dispositions qu'elles ne peuvent être utilement invoquées à l'encontre d'une décision de refus de titre de séjour, qui est prise en réponse à une demande formulée par l'intéressé. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de La Réunion n'aurait pas respecté la procédure contradictoire prévue par les articles précités du code des relations entre le public et l'administration avant de refuser à M. A... le renouvellement de son titre de séjour est inopérant.

10. En cinquième lieu, le préfet de La Réunion fait valoir, sans être sérieusement contesté, que M. A... était inscrit à l'université des Comores en L1 au titre de l'année 2012-2013, en L2 au titre de l'année 2013-2014, en L3 droit au titre de l'année 2014-2015 et que, depuis son entrée en France en 2015, il s'est inscrit à l'université de La Réunion en année L3 au titre des années universitaires 2015-2016, 2016-2017, 2017-2018, 2018-2019 et 2019-2020. En outre, M. A... produit un certificat de scolarité de l'université de La Réunion du 21 septembre 2021 aux termes duquel il est inscrit au titre de l'année universitaire 2020-2021 en année " licence 3 droit ". Par suite, en indiquant dans l'arrêté contesté que M. A... s'est inscrit pour la sixième fois consécutive en L3 " droit ", le préfet n'a pas entaché sa décision de refus de titre de séjour d'erreur de fait.

11. Aux termes de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable à la date de la décision attaquée : " I. La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention " étudiant " (...) ". Le renouvellement de cette carte est subordonné, notamment, à la justification par son titulaire de la réalité et du sérieux des études qu'il a déclaré accomplir.

12. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a validé ses semestres de première et deuxième années de licence de droit au sein de l'université des Comores et qu'il est inscrit, depuis son entrée en France en septembre 2015, en troisième année de licence de droit. Si l'appelant fait valoir qu'il a validé cinq semestres sur les six que comprend le diplôme de licence et s'il produit un relevé de notes et de résultats montrant qu'il a été admis au semestre 5 de la licence de droit au cours de l'année universitaire 2019-2020, il est constant qu'il n'a aucunement validé cette formation en dépit de six inscriptions consécutives en licence 3. L'intéressé se prévaut de son état de santé qui l'aurait empêché de suivre correctement les cours et qui justifierait ses échecs répétés. Toutefois, il ne produit qu'un certificat médical établi par un médecin spécialisé en oto-rhino-laryngologie le 14 décembre 2020 ainsi qu'un compte-rendu d'un scanner des sinus du 28 décembre 2020, soit postérieurement à la décision attaquée, attestant d'une rhinosinusite chronique inflammatoire non allergique nécessitant une corticothérapie nasale au long cours. Il ne résulte ni de ces éléments ni d'aucune autre pièce du dossier que le préfet aurait entaché sa décision d'erreur d'appréciation en refusant de renouveler le titre de séjour étudiant dont il bénéficiait. Au vu de l'absence de progression des résultats obtenus par l'intéressé dans le cadre de ses études, il ne ressort pas non plus des pièces du dossier que la décision contestée serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé.

13. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision par laquelle le préfet de La Réunion a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français et de la décision lui accordant un délai de départ volontaire d'un mois :

14. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable à la date de la décision contestée : " I. L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III (...) ".

15. La décision d'obliger M. A... à quitter le territoire français est fondée sur le 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors que le refus de titre de séjour est suffisamment motivé, la mesure d'éloignement n'avait donc pas à faire l'objet d'une motivation spécifique.

16. Dès lors que le délai de trente jours accordé à un étranger pour exécuter une obligation de quitter le territoire français constitue un délai équivalent au délai de droit commun le plus long susceptible d'être accordé en application de l'article 7 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008, l'absence de prolongation de ce délai n'a pas à faire l'objet d'une motivation spécifique, distincte de celle du principe même de ladite obligation, à moins que l'étranger ait expressément demandé le bénéfice d'une telle prolongation ou justifie d'éléments suffisamment précis sur sa situation personnelle susceptibles de rendre nécessaire, au sens desdites dispositions de l'article 7, une telle prolongation. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A... ait demandé au préfet à bénéficier d'une prolongation dudit délai. Par suite, celui-ci n'est pas fondé à soutenir que la décision du préfet de La Réunion ne lui accordant un délai de départ volontaire d'un mois n'est pas suffisamment motivée.

17. Il ne ressort ni de la motivation de la décision attaquée, ni des autres pièces du dossier que le préfet de La Réunion, qui n'était pas tenu d'indiquer l'ensemble des éléments de la situation personnelle de M. A..., n'aurait pas procédé à un examen complet de sa situation avant de l'obliger à quitter le territoire français dans un délai d'un mois.

18. Lorsqu'il sollicite la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, l'étranger, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement et d'interdiction de retour sur le territoire français. Ainsi qu'il a été indiqué au point 7, à l'occasion du dépôt de sa demande, l'intéressé est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit délivré un titre de séjour et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande. Le droit de l'intéressé d'être entendu est ainsi satisfait avant que n'intervienne le refus de titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire français, la décision lui accordant un délai de départ volontaire et la décision fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement. En l'espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A... n'aurait pas eu la possibilité, pendant l'instruction de sa demande de titre de séjour, de faire état de tous éléments pertinents relatifs à sa situation personnelle susceptibles d'influer sur le contenu des décisions subséquentes à la décision se prononçant sur cette demande. Par suite, le moyen tiré de ce qu'en l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et en fixant le pays de renvoi, le préfet de La Réunion aurait porté atteinte au principe général du droit de l'Union européenne, selon lequel toute personne a le droit d'être entendue préalablement à l'adoption d'une mesure individuelle l'affectant défavorablement, doit être écarté.

19. Il ressort des dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à un étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français. Dès lors, l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 codifié à l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration, imposant de façon générale le respect d'une procédure contradictoire en préalable aux décisions individuelles soumises à l'exigence de motivation, ne peut être utilement invoqué à l'encontre d'une telle mesure d'éloignement et de la décision lui accordant un délai de départ d'un mois.

20. Il résulte des points 5 à 13 que le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français ainsi que celle lui accordant un délai de départ volontaire d'un mois seraient dépourvues de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour.

21. En vertu de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

22. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., entré en France en septembre 2015, à l'âge de 23 ans, n'a été autorisé à séjourner sur le territoire national que le temps nécessaire à ses études et qu'il ne justifie pas, ainsi qu'il a été dit précédemment, du caractère réel et sérieux de ces dernières depuis son arrivée sur le territoire national. S'il fait valoir qu'il est en couple depuis 2018 avec Mme B..., ressortissante comorienne, qui serait mère d'un enfant de nationalité française, et avec laquelle il a eu un enfant né le 1er février 2020, il ne justifie ni de l'ancienneté ni de la stabilité de sa relation par la seule production d'un avis d'imposition de 2019. En outre, s'il se prévaut de l'obtention de qualifications en matière d'assurance par la production d'un " certificat de blocs de compétences du certificat de qualification professionnelle négociateur immobilier " obtenu le 10 mai 2021, d'une attestation de suivi d'une formation en assurance à distance non datée, et de la conclusion d'une convention de conseiller en assurance ADEP sous le statut de mandataire indépendant conclue le 23 juillet 2021, ces seuls éléments, postérieurs à la date de la décision contestée, ne permettent pas de caractériser une insertion professionnelle particulière en France à la date de la décision contestée. Dans ces conditions, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de La Réunion aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la mesure d'éloignement a été prise et aurait ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

23. Aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel il est fait obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de l'obligation de quitter le territoire français. L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas (...) ".

24. M. A... fait valoir que compte tenu de ses chances de valider le dernier semestre de son diplôme de licence de droit, de son état de santé et du contexte sanitaire, le préfet de La Réunion n'a pas tenu compte des éléments relatifs à sa situation personnelle et familiale pour fixer le délai de départ volontaire. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier, eu égard notamment à la durée du séjour de M. A... en France et du nombre de ses inscriptions en L3, qu'en ne lui accordant pas un délai de départ volontaire supérieur au délai de droit commun prévu par le II de l'article L. 511-1, le préfet aurait fait une appréciation manifestement erronée de la situation de l'intéressé.

25. Il résulte ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français et lui accordant un délai de départ volontaire d'un mois.

26. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions de M. A... à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2100313 du 21 mai 2021 du tribunal administratif de La Réunion est annulé en tant qu'il se prononce sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus de titre de séjour.

Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de La Réunion tendant à l'annulation de la décision de refus de titre de séjour ainsi que le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de La Réunion.

Délibéré après l'audience du 10 mai 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, présidente,

Mme Nathalie Gay, première conseillère,

Mme Héloïse Pruche-Maurin, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 mai 2023.

La rapporteure,

Nathalie GayLa présidente,

Elisabeth Jayat

La greffière,

Virginie Santana

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 21BX04129 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX04129
Date de la décision : 31/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Nathalie GAY
Rapporteur public ?: M. GUEGUEIN
Avocat(s) : CABINET ALI - MAGAMOOTOO

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-05-31;21bx04129 ?
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