Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B..., représentée par Me Weinling Gaze, a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler la décision du 15 septembre 2023 par laquelle le ministre de l'intérieur et des outre-mer a rejeté sa demande d'entrée en France au titre de l'asile, accompagnée de M. D... E..., et a ordonné son réacheminement vers le territoire des Comores ou de tout pays vers lequel elle est légalement admissible.
Par un jugement n° 2301185 du 19 septembre 2023, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de la Réunion a admis provisoirement Mme B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle, annulé la décision du 15 septembre 2023, enjoint au ministre de l'intérieur et des outre-mer d'admettre Mme B... au séjour et de lui délivrer l'attestation de demande d'asile lui permettant d'introduire sa demande d'asile auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), et a rejeté le surplus des conclusions.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 27 septembre 2023, et un mémoire enregistré le 19 janvier 2024, M. Weinling Gaze, agissant en son nom propre, représenté par Me Djafour, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de la Réunion
du 19 septembre 2023 en tant qu'il a rejeté les conclusions présentées sur le fondement
de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi
du 10 juillet 1991 ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais non compris dans les dépens exposés devant le tribunal administratif ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre des frais non compris dans les dépens exposés devant la cour.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier dès lors qu'il n'a pas motivé le rejet de sa demande tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
- il résulte des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 que les frais non compris dans les dépens doivent être mis à la charge de la partie perdante : en l'espèce, Mme B... a obtenu l'annulation de la décision du 15 septembre 2023 ; l'Etat est donc la partie perdante dans le cadre de l'instance devant le tribunal administratif ;
- il a été notamment contraint, en tant que conseil de Mme B..., de se déplacer en zone d'attente pour récupérer la décision litigieuse, d'effectuer de nombreuses recherches documentaires sur la situation politique aux Comores et de rédiger une requête particulièrement motivée.
Par un mémoire, enregistré le 14 décembre 2023, le ministre de l'intérieur et des outre-mer conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C... ;
- les conclusions de Mme Isoard, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par un jugement du 19 septembre 2023, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de La Réunion a annulé la décision du 15 septembre 2023 par laquelle le ministre de l'intérieur et des outre-mer a rejeté la demande d'entrée en France au titre de l'asile présentée par Mme B... et a ordonné son réacheminement vers le territoire des Comores ou de tout pays vers lequel elle est légalement admissible. Le tribunal a par ailleurs enjoint au ministre de l'intérieur et des outre-mer d'admettre Mme B... au séjour et de lui délivrer l'attestation de demande d'asile lui permettant d'introduire sa demande auprès de l'OFPRA, et a rejeté le surplus des conclusions. M. Weinling Gaze, avocat de Mme B..., relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté les conclusions présentées sur le fondement de
l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Sur les frais exposés et non compris dans les dépens au titre de la première instance :
2. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu'elles demandent et le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ". Aux termes de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 : " Les auxiliaires de justice rémunérés selon un tarif peuvent renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat et poursuivre contre la partie condamnée aux dépens et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle le recouvrement des émoluments auxquels ils peuvent prétendre. / Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou qui perd son procès, et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à payer à l'avocat pouvant être rétribué, totalement ou partiellement, au titre de l'aide juridictionnelle, une somme qu'il détermine et qui ne saurait être inférieure à la part contributive de l'Etat majorée de 50 %, au titre des honoraires et frais non compris dans les dépens que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu'elles demandent et le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".
3. Le jugement attaqué a annulé pour erreur d'appréciation le refus d'entrée opposé par le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur le fondement de l'article L. 351-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en estimant que les éléments précis de la situation personnelle de l'intéressée consignés dans le compte-rendu d'entretien avec l'OFPRA, qu'il a rappelés, ne permettaient pas de regarder sa demande comme dénuée de tout élément circonstancié. M. Weinling Gaze fait valoir que le délai de recours contentieux, particulièrement bref sur le refus d'entrée, expirait un dimanche, qu'il a été contraint de se déplacer en zone d'attente pour récupérer la décision, qu'il a dû effectuer des recherches sur la situation politique aux Comores et tenter de recueillir des pièces justificatives sur la situation personnelle de l'intéressée, que son mémoire était particulièrement motivé et qu'il a assisté sa cliente à l'audience pendant plusieurs heures. Dans ces conditions, M. Weinling Gaze est fondé à soutenir que c'est à tort que ce jugement a rejeté les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991
4. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur sa régularité, que le jugement attaqué doit être annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu pour la cour, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser à M. Weinling Gaze au titre de ces dispositions.
Sur les frais de l'instance d'appel :
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. Weinling Gaze d'une somme de 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du 19 septembre 2023 du tribunal administratif de La Réunion est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de la demande tendant à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat au titre des frais exposés par Mme B... et non compris dans les dépens.
Article 2 : L'Etat versera à Me Weinling Gaze, sous réserve qu'il renonce à percevoir la contribution étatique à l'aide juridictionnelle, la somme de 1 200 euros au titre des frais de première instance en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Article 3 : L'Etat versera également à M. Weinling Gaze la somme de 500 euros au titre des frais exposés en appel et non compris dans les dépens en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de première instance et d'appel est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... Weinling Gaze et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Délibéré après l'audience du 23 janvier 2024 à laquelle siégeaient :
Mme Catherine Girault, présidente,
Mme Anne Meyer, présidente-assesseure,
M. Olivier Cotte, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 15 février 2024.
La présidente-assesseure,
Anne MeyerLa présidente, rapporteure,
Catherine C...
La greffière,
Virginie Guillout
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23BX02511