Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... D... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 19 janvier 2023 par lequel le préfet de la Dordogne a refusé de lui délivrer un titre de séjour.
Par un jugement n° 2301929 du 15 septembre 2023, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 5 décembre 2023, M. A... D..., représenté par Me Jouteau, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du
15 septembre 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 19 janvier 2023 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Dordogne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, de réexaminer sa demande et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- il ne constitue pas une menace grave pour l'ordre public, son casier judiciaire ne comportant que deux condamnations, anciennes, pour conduite d'un véhicule sans permis, prononcées les 14 novembre 2017 et 15 décembre 2020 ; en outre, il est titulaire depuis
le 14 avril 2018 d'un permis de conduire centrafricain, depuis le 12 mars 2022 d'un permis de conduire camerounais et depuis le 25 avril 2022 d'un permis de conduire international ; il ne pouvait échanger son permis centrafricain faute de résider régulièrement sur le territoire ; les autres faits allégués par le préfet ne figurent pas à son casier et n'ont pas donné lieu à une condamnation ;
- la décision méconnaît les dispositions applicables aux parents d'enfants français dès lors que son ex-compagne n'a pas respecté son droit de visite et qu'il a pu obtenir du juge aux affaires familiales un droit de visite progressif pour sa fille âgée de 21 mois ou son fils âgé de 5 ans ; il établit participer à l'entretien de son fils avec des versements réguliers à la mère de l'enfant ; il en va de même pour sa fille.
Par un mémoire en défense enregistré le 22 mars 2024, le préfet de la Dordogne conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- M. A... D... a fait l'objet de quatre condamnations en novembre 2017, septembre 2020, décembre 2020 et janvier 2022 pour, respectivement, conduite sous l'empire d'un état alcoolique et sans permis, ainsi que recel de vol, violence sur conjoint, conduite sans permis et conduite en faisant usage d'un permis faux ou falsifié ; il n'a pas respecté la mesure d'éloignement dont la légalité a pourtant été confirmée, ni l'assignation à résidence prise à son encontre le 13 novembre 2017 ; son comportement constitue bien une menace pour l'ordre public.
- la contribution aux besoins de ses enfants nés en 2010 et 2018 n'est que ponctuelle et insuffisante.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Olivier Cotte a été entendu au cours de l'audience publique.
Des notes en délibéré, présentées pour M. A... D..., ont été enregistrées les 17 et 21 mai 2024.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... D..., ressortissant camerounais né le 10 août 1995, est entré en France le 1er novembre 2013 afin de solliciter l'asile. Sa demande a été définitivement rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 31 mars 2016 et l'intéressé a fait l'objet, le 26 décembre 2016, d'un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français, arrêté dont la légalité a été confirmée, en dernier lieu, par la cour
le 30 novembre 2017. Le 21 juillet 2021, l'intéressé a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français. Par un arrêté du 19 janvier 2023, et après avoir recueilli l'avis défavorable de la commission du titre de séjour, le préfet de la Dordogne a refusé de lui délivrer un titre de séjour. M. A... D... relève appel du jugement
du 15 septembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté préfectoral.
2. Aux termes de l'article L. 412-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La circonstance que la présence d'un étranger en France constitue une menace pour l'ordre public fait obstacle à la délivrance et au renouvellement de la carte de séjour temporaire, de la carte de séjour pluriannuelle et de l'autorisation provisoire de séjour prévue aux articles L. 425-4 ou L. 425-10 (...) ". Selon l'article L. 432-1 du même code : " La délivrance d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle ou d'une carte de résident peut, par une décision motivée, être refusée à tout étranger dont la présence en France constitue une menace pour l'ordre public ".
3. Il ressort des pièces du dossier, et notamment des mentions de l'extrait de son casier judiciaire, que M. A... D... a été condamné le 14 novembre 2017 à deux mois d'emprisonnement avec sursis pour conduite d'un véhicule sous l'empire d'un état alcoolique, sans permis et en faisant usage d'un permis de conduire faux ou falsifié et recel de bien provenant d'un vol, faits commis le 12 novembre précédent, et le 15 décembre 2020
à 450 euros d'amende pour conduite d'un véhicule sans permis, faits commis le 3 juin 2019. Si le préfet de la Dordogne mentionne dans son arrêté trois autres interpellations, les
5 janvier 2022, 18 septembre 2020 et 27 juillet 2020 pour des faits d'infraction routière et de violence sans incapacité, en présence d'un mineur, par une personne étant ou ayant été conjoint, concubin ou partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité, ces faits sont contestés par M. A... D... et ne sont établis par aucune pièce du dossier. Eu égard à la relative ancienneté des faits d'infraction routière qui ont donné lieu aux condamnations et à l'absence de précisions apportées sur les faits de recel, le préfet de la Dordogne ne pouvait se fonder sur la menace à l'ordre public que représenterait le comportement de M. A... D... pour lui refuser la délivrance d'un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français.
4. Toutefois, le préfet de la Dordogne s'est aussi fondé pour rejeter la demande de M. A... D... sur l'absence de participation à l'entretien et l'éducation de ses enfants.
5. Aux termes de l'article L. 423-7 du code l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France et qui établit contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil, depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. ". Aux termes de l'article 371-2 du code civil : " Chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant. (...) ".
6. Il ressort des pièces du dossier que M. A... D... est marié, depuis le
8 août 2015, à une ressortissante française, Mme E..., avec laquelle il a vécu jusqu'en 2017 avant que le couple ne se sépare. Il est père de deux enfants issus de deux autres relations avec des ressortissantes françaises, C... né le 5 juillet 2018 et Lily née le
10 janvier 2022. Les pièces produites, pour certaines datées de 2019, pour d'autres postérieures à la décision en litige, ne sont pas suffisantes pour démontrer une participation à l'entretien et l'éducation de ses enfants. Il ne démontre avoir versé une pension à son ancienne compagne pour son fils C... qu'à compter de novembre 2021 alors que ce dernier était déjà âgé de plus de trois ans, et il ressort de l'attestation de la directrice de l'école que ses droits parentaux ont été suspendus au cours de l'année 2022 à la suite d'une information préoccupante ayant conduit à une ordonnance de protection. S'il se prévaut de deux jugements du juge aux affaires familiales lui accordant un droit de visite pour chacun de ses enfants dans un lieu neutre, ces décisions sont postérieures à l'arrêté en litige. Dans ces conditions, la décision refusant de lui accorder un titre de séjour ne méconnaît pas les dispositions de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il résulte de l'instruction que le préfet de la Dordogne aurait pris la même décision s'il s'était fondé sur ce seul motif.
7. Il résulte de ce qui précède que M. A... D... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent être que rejetées.
Sur les frais liés au litige :
8. Les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. A... D... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de la Dordogne.
Délibéré après l'audience du 7 mai 2024 à laquelle siégeaient :
Mme Catherine Girault, présidente,
Mme Anne Meyer, présidente assesseure,
M. Olivier Cotte, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 30 mai 2024.
Le rapporteur,
Olivier Cotte
La présidente,
Catherine Girault
La greffière,
Virginie Guillout
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23BX02986