Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société civile d'exploitation agricole (SCEA) Barjone a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler la délibération du 6 février 2020 par laquelle le conseil communautaire de la communauté de communes des Luys en Béarn a approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal Sud du territoire.
Par un jugement n° 2001163 du 30 décembre 2022, le tribunal administratif de Pau a rejeté cette demande et a mis à la charge de la SCEA Barjone une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 10 mars 2023 et un mémoire enregistré le 28 novembre 2023, la SCEA Barjone, représentée par Me Marcel, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 30 décembre 2022 du tribunal administratif de Pau ;
2°) d'annuler la délibération du 6 février 2020 par laquelle le conseil communautaire de la communauté de communes des Luys en Béarn a approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal Sud du territoire ;
3°) de mettre à la charge de la communauté de communes des Luys en Béarn une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les conseillers communautaires ont été irrégulièrement convoqués, en méconnaissance des dispositions articles L. 2121-10 et L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales ; la note de synthèse ne comporte pas les motifs des modifications opérées et n'explique pas pour quelles raison seule la deuxième recommandation de la commission d'enquête a été prise en compte ;
- en méconnaissance des dispositions des articles L. 151-4 et R. 151-2 du code de l'urbanisme, le rapport de présentation est insuffisant en matière d'inventaire des capacités de stationnement ;
- le classement des parcelles cadastrées section ZA n°40, 42, 44 et 49 n'est pas cohérent avec le projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme ;
- ce classement est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire enregistré le 24 octobre 2023, la communauté de communes des Luys en Béarn, représentée par Me Dunyach, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la SCEA Barjone d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens invoqués par l'appelante ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 15 décembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 15 décembre 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'environnement ;
- le code rural et de la pêche maritime ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy,
- les conclusions de M. Julien Dufour, rapporteur public,
- et les observations de Me Marcel, représentant la SCEA Barjone, et de Me Dunyach, représentant la communauté de communes des Luys en Béarn.
Considérant ce qui suit :
1. La société civile d'exploitation agricole (SCEA) Barjone est propriétaire, sur le territoire de la commune de Miossens-Lanuss, des parcelles cadastrées section AD n° s 40, 42, 44 et 49 formant un tènement foncier de 20 088 m². Par une délibération du 6 février 2020, le conseil communautaire de la communauté de communes des Luys en Béarn a approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal (PLUI) Sud du territoire, lequel a notamment classé les parcelles appartenant à la société Barjone en zone agricole. Cette dernière relève appel du jugement du 30 décembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette délibération.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales : " Toute convocation est faite par le maire. Elle indique les questions portées à l'ordre du jour. Elle est mentionnée au registre des délibérations, affichée ou publiée. Elle est adressée par écrit, au domicile des conseillers municipaux ou, s'ils en font la demande, envoyée à une autre adresse ou transmise de manière dématérialisée. ". Aux termes de l'article L. 2121 12 du même code : " Dans les communes de 3 500 habitants et plus, une note explicative de synthèse sur les affaires soumises à délibération doit être adressée avec la convocation aux membres du conseil municipal (...) ". Aux termes de l'article L. 2121-13 dudit code : " Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération ". Aux termes de l'article L. 5211-1 de ce code : " Les dispositions du chapitre Ier du titre II du livre Ier de la deuxième partie relatives au fonctionnement du conseil municipal sont applicables au fonctionnement de l'organe délibérant des établissements publics de coopération intercommunale, en tant qu'elles ne sont pas contraires aux dispositions du présent titre (...)Pour l'application des articles L. 2121-11 et L. 2121-12, ces établissements sont soumis aux règles applicables aux communes de 3 500 habitants et plus (...) ".
3. Il résulte des dispositions citées au point précédent que la convocation aux réunions du conseil communautaire doit être accompagnée d'une note explicative de synthèse portant sur chacun des points de l'ordre du jour. Le défaut d'envoi de cette note ou son insuffisance entache d'irrégularité les délibérations prises, à moins que le président du conseil communautaire n'ait fait parvenir aux membres du conseil communautaire, en même temps que la convocation, les documents leur permettant de disposer d'une information adéquate pour exercer utilement leur mandat. Cette obligation, qui doit être adaptée à la nature et à l'importance des affaires, doit permettre aux intéressés d'appréhender le contexte ainsi que de comprendre les motifs de fait et de droit des mesures envisagées et de mesurer les implications de leurs décisions. Elle n'impose pas de joindre à la convocation adressée aux intéressés, à qui il est au demeurant loisible de solliciter des précisions ou explications conformément à l'article L. 2121-13 du même code, une justification détaillée du bien-fondé des propositions qui leur sont soumises.
4. La communauté de communes des Luys en Béarn a produit devant les premiers juges la note relative au PLUI Sud du territoire adressée aux conseillers communautaires par courrier du 28 janvier 2020. Cette note indique de façon précise les objectifs poursuivis par la révision envisagée, rappelle la procédure suivie, fait état des axes du projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme, indique les modifications envisagées à la suite de l'avis de la commission d'enquête, comporte une annexe relative aux modifications projetées à la suite des avis des personnes publiques associées et présente enfin le projet soumis à approbation en énumérant les modifications apportées au projet de PLUI dans le rapport de présentation, le règlement écrit et le document graphique. Dès lors que cette note fait état de l'avis favorable de la commission d'enquête, indique la teneur des cinq recommandations que comporte cet avis et précise que celle relative au projet de parking à Bournos a donné lieu à une modification du projet de PLUI, elle informe suffisamment les élus sur les suites données audit avis, ce alors même qu'elle n'expose pas les raisons pour lesquelles les autres recommandations ne sont pas prises en compte. Dans ces conditions, et alors que l'obligation prévue à l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales n'impose pas que la note de synthèse détaille les motifs présidant à chacune des modifications envisagées, cette note satisfait aux exigences rappelées au point précédent. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit, dès lors, être écarté.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 151-4 : " Le rapport de présentation explique les choix retenus pour établir le projet d'aménagement et de développement durables, les orientations d'aménagement et de programmation et le règlement (...) Il établit un inventaire des capacités de stationnement de véhicules motorisés, de véhicules hybrides et électriques et de vélos des parcs ouverts au public et des possibilités de mutualisation de ces capacités ".
6. D'une part, si la SCEA Barjone critique l'absence de précision, dans l'inventaire des capacités de stationnement du rapport de présentation du PLUI litigieux, quant aux abris non couverts destinés au stationnement des vélos et quant aux possibilités de mutualisation des capacités de stationnement, elle ne démontre cependant pas que de tels types d'abris et de telles possibilités de mutualisation existeraient en l'espèce sur le territoire couvert par le PLUI. D'autre part, l'appelante fait valoir qu'alors que le rapport de présentation indique, dans le diagnostic de l'état initial de l'environnement, l'existence d'abris couverts destinés au stationnement des vélos aux abords de certains points d'arrêts des réseaux de bus urbains, l'inventaire des capacités de stationnement ne les recense pas. Toutefois, outre que cette incomplétude de l'inventaire est en partie compensée par les précisions apportées par le diagnostic, la SCEA Barjone n'établit pas ni même ne soutient que le stationnement des vélos n'ayant pas fait l'objet d'un inventaire soulèverait des difficultés particulières susceptibles d'avoir des incidences sur les choix d'aménagement retenus par les auteurs du PLUI. Le moyen tiré de l'insuffisance du rapport de présentation doit, par suite, être écarté.
7. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 151-8 du code de l'urbanisme : " Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés aux articles L. 101-1 à L. 101-3. ".
8. Pour apprécier la cohérence ainsi exigée au sein du plan local d'urbanisme entre le règlement et le projet d'aménagement et de développement durables, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle du territoire couvert par le document d'urbanisme, si le règlement ne contrarie pas les orientations générales et objectifs que les auteurs du document ont définis dans le projet d'aménagement et de développement durables, compte tenu de leur degré de précision. Par suite, l'inadéquation d'une disposition du règlement du plan local d'urbanisme à une orientation ou un objectif du projet d'aménagement et de développement durables ne suffit pas nécessairement, compte tenu de l'existence d'autres orientations ou objectifs au sein de ce projet, à caractériser une incohérence entre ce règlement et ce projet.
9. Le projet d'aménagement et de développement durables (PADD) du PLUI a notamment pour objectif la préservation de l'activité agricole présente sur le territoire, par la prise en compte de la cohérence des différents secteurs et dynamiques agricoles présentes. Il vise à garantir la pérennité des exploitations agricoles par le maintien d'entités agricoles cohérentes via la prise en compte de l'accès aux îlots agricoles et une modération de la consommation d'espaces ". Il prône par ailleurs un développement urbain qualitatif, notamment en favorisant le développement des énergies renouvelables.
10. La société appelante soutient que le classement en zone agricole des parcelles litigieuses, dénuées selon elle de tout potentiel agronomique et pour lesquelles elle avait sollicité un classement en zone Ner dédiée à l'implantation de panneaux photovoltaïques, n'est pas cohérent avec l'objectif du PADD de favoriser le développement des énergies renouvelables. Toutefois, d'une part, il ressort des pièces du dossier que ces parcelles, situées au sein d'un vaste secteur agricole, sont exploitées pour la culture céréalière. S'il est établi que les travaux de construction de l'autoroute A65 ont amoindri le potentiel agronomique de ces parcelles, lesquelles ont été décaissées puis remblayées par des terres de moindre qualité et comportent dans leur-sous-sol des encombrants gênant l'enracinement des plantes, il n'en résulte pas qu'elles seraient dénuées de tout potentiel, que ce soit pour la culture céréalière qui est actuellement exploitée ou encore pour d'autres activités agricoles. Ainsi, le classement litigieux répond aux objectifs précités du PADD du PLUI tenant à la préservation des entités et exploitations agricoles et à la limitation de la consommation d'espaces agricoles. Par ailleurs, conformément à l'objectif de développement des énergies renouvelables, le PLUI a classé d'autres terrains en zone Ner, en particulier le terrain jouxtant le parc photovoltaïque situé à Sévignacq ainsi qu'une parcelle, située à proximité des parcelles litigieuses, ayant servi au dépôt de matériaux routiers et qui ne fait l'objet d'aucune exploitation agricole. Dans ces conditions, le moyen doit être écarté.
11. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 151-9 du code de l'urbanisme : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger (...) ". Aux termes de l'article R. 151-22 du même code : " Les zones agricoles sont dites " zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles ".
12. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme, qui ne sont pas liés par les modalités existantes d'utilisation du sol, de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.
13. Il ressort des pièces du dossier que les parcelles litigieuses sont situées dans un vaste secteur à vocation agricole comportant des surfaces dédiées à la culture céréalière ainsi que des prairies et fourrages. Les parcelles litigieuses forment un tènement d'une superficie de de 20 088 m² vierge de toute construction, font l'objet d'une exploitation agricole et, comme il a été dit au point 10, ne sont pas dénuées de tout potentiel agricole. Dans ces conditions, eu égard aux caractéristiques des parcelles et au parti d'aménagement retenu par les auteurs du PLUI, le classement litigieux ne repose pas sur une erreur manifeste d'appréciation.
14. Il résulte de ce qui précède que la SCEA Barjone n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande. Ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, être accueillies.
15. Enfin, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SCEA Barjone une somme globale de 1 500 euros au titre des frais exposés par la communauté de communes des Luys en Béarn et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SCEA Barjone est rejetée.
Article 2 : La SCEA Barjone versera à la communauté de communes des Luys en Béarn une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCEA Barjone et à la communauté de communes des Luys en Béarn.
Délibéré après l'audience du 28 janvier 2025 à laquelle siégeaient :
M. Laurent Pouget, président,
Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente-assesseure,
M. Vincent Bureau, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 février 2025.
La rapporteure,
Marie-Pierre Beuve Dupuy
Le président,
Laurent Pouget Le greffier,
Christophe Pelletier
La République mande et ordonne au préfet des Pyrénées-Atlantiques, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 23BX00673